Tout semblait s’améliorer dans la vie de Zoë, sauf quelques petits détails bien entendu. Il y avait longtemps qu’elle ne s’était pas sentie aussi stable émotionnellement, et à l’époque où elle ne l’était pas, elle n’avait pas pu mettre la faute sur le dos des hormones. Mais maintenant, avec Jérémy dans sa vie, tout semblait s’améliorer. Seulement, ce sont ces petits détails que Zoë voudrait bien corriger. À commencer par sa dispute avec son père. Ce froid entre les deux la tuait de plus en plus. Elle qui avait toujours aimé ses parents plus que tout au monde, elle avait mal. Et elle savait bien que son père devait en souffrir aussi. Seulement, aucun des deux n’osait faire les premiers pas pour en parler.

D’ailleurs, Zoë se trouvait idiote de tant craindre cette conversation avec son père. Enfin, elle ne craignait pas tant la conversation, mais plus les questions qu’il ne lui avait jamais posé, à savoir qui est le père du bébé, pourquoi elle ne lui a rien dit quand elle l’a su, pourquoi avait-elle décidé de garder cet enfant… Il y avait pire. Monsieur Kahn allait probablement demander également dans quelles circonstances avait été créé cet enfant, et si le père avait été gentil, si, lors de la conception, il s’agissait de sa première fois, et d’autres trucs du genre… Elle n’avait pas trop envie de parler de tout ça. Elle n’en discutait même pas avec Jérémy, ni ses deux meilleures amies d’ailleurs. Même le père adoptif de Hope, Jay, ne connaissait pas l’identité du vrai père, et elle avait l’intention de garder son nom secret, ayant ses raisons.

Bref, malgré cette tension qui travaillait Zoë dernièrement, elle trouvait le moyen de relaxer. Et prochainement, elle avait même prévu de diner en tête à tête avec son amour. Elle avait envie de lui préparer un repas elle-même. Ayant souvent cuisiné depuis la disparition de sa mère, Zoë n’avait pas trop peur que son repas soit un fiasco total. Elle avait un peu reprit confiance en elle depuis le temps. Et cette soirée, la jeune maman savait bien que ça allait lui faire du bien à elle et à Jérémy qui n’étaient pas à l’abri de pression. Ayant donc tout prévu, il ne lui restait qu’à acheter ce dont elle avait besoin pour préparer son fameux repas. Grâce à sa grand-mère, elle allait avoir un peu d’argent pour offrir ce cadeau à Jérémy. Alors après avoir fait une marche rapide jusqu’à l’arrêt de bus pour éviter que sa fille ait trop froid, elle se rendit au super marché.

Une fois là-bas, elle entra directement et se mit à marcher à travers les allées, prenant quelques ingrédients, qu’elle mettait dans le panier de la poussette de Hope, ne pouvant pas pousser un panier de métal en plus quand même. Heureusement que la petite était calme. Dans ces moments-là, la vie semblait BIEN plus facile. D’ailleurs, c’était une bonne chose qu’elle ne soit pas en pleine crise de larmes, puisque Zoë avait besoin de garder son calme en ce moment, venant de tomber face à face avec son père.

Malgré leur froid, elle était contente de le voir. Pour elle, il était comme une source de chaleur à laquelle on se colle quand on a froid. Il avait le don de la calmer. Elle se sentait en sécurité. D’ailleurs, elle lui fit un léger sourire.

♦ « Bonjour papa. »

Inutile de préciser que le malaise n’était pas petit. Malgré ce malaise pourtant, il était facile de ressentir le bonheur des deux. Ils étaient heureux que le hasard - ou le destin, qui sait? - ait fait en sorte qu’ils se rencontrent. Et même si l’endroit était inapproprié pour démarrer une longue conversation, Zoë espérait que son père ne la quitte pas de sitôt.

Pour toute fille, son père est un héro, ou presque. Zoë l’avait toujours cru du moins, et ça n’avait pas changé. Même si l’attitude de Monsieur Kahn l’avait déçu, mettant même à risque sa grossesse, elle continuait de l’aimer, de l’admirer. Après tout ce qu’il avait vécu, elle trouvait admirable qu’il tienne toujours debout. C’est un peu de lui que Zoë tenait cette force d’ailleurs, n’ayant pas été à l’abri de pression elle non plus.

Le voir dans ce super marché laissait deviner à la jeune maman que le réfrigérateur était vide. Connaissant bien son père, elle devinait qu’il avait attendu, comme il l’aurait fait auparavant si Zoë n’avait pas été là pour faire des courses une fois de temps en temps. D’ailleurs, de quoi avait l’air la maison maintenant ? Était-elle en ordre ou plutôt en désordre ? Est-ce que Camilla donnait un peu du sien pour aider leur père ? Ou bien est-ce que le fait que Zoë ne vivait plus là-bas paraissait, même beaucoup trop ? Depuis son départ, la blonde n’avait pas remit les pieds chez elle. Enfin, chez son père plutôt. Elle n’avait même plus de chambre même, car sa sœur en avait prit possession. Chez les Huntington, elle était bien, certes, surtout avec sa meilleure amie et son petit ami, tous réunis sous le même toit. Mais il manquait quelque chose, de la couleur dans sa vie. Hope bien sûr remplissait bien sa vie de couleur, mais elle n'apportait pas à Zoë cette couleur spécifique que lui aurait apporté son père et sa soeur en vivant avec eux. Depuis qu'elle était partie, tout était différent, même ses liens avec eux.

Bref, Monsieur Kahn dit à sa fille qu’il était heureux de la voir, ce qui fit agrandir le sourire de la jeune Kahn.

♦ « Moi aussi. Je suis contente. »

Un silence s’installa, laissant le malaise reprendre de l’ampleur.

Zoë n’avait jamais douté de son père. Même pas une seule fois. Elle savait très bien qu’il l’aimait très fort et devinait même qu’il regrettait de l’avoir laissé partir. Seulement, que son père lui rappelle en lui disant qu’il était content de la revoir, ça lui rappelait le fait qu’elle n’était pas seule, qu’il était toujours derrière elle pour l’aider en cas de besoin. Se rappeler de tout ça la mettait en confiance un peu plus. Elle avait moins peur d’avancer et faire un mauvais pas puisqu’elle savait qu’il serait là pour la rattraper quand elle tomberait. Elle se sentait plus en sécurité et Dieu savait à quel point cette jeune maman en avait besoin. Bref, Monsieur Kahn reprit parole, la complimentant.

♦ « Oui, enfin… Pour une jeune maman, je me débrouille plutôt bien je crois. »

Soudain, elle se sentit méchante. C’était nul de sa part de ne pas lui renvoyer de compliment. Où était donc la Zoë au grand cœur, toujours souriante, si gentille et si polie ? Était-elle disparue pour laisser la place à une Zoë égoïste ? Non, pas du tout. Elle n’était pas identique, puisque bien des choses avaient changées. Elle était plus trouillarde par exemple, mais elle n’était pas différente pour autant. Ses valeurs étaient les mêmes. Et elle savait exactement comment lui renvoyer son compliment.

♦ « Et puis, j’arrive à être forte, et ça, ça ne vient pas de nulle part, n’est-ce pas? »

En entendant cela, son père devait comprendre qu’elle le trouvait fort, le plus fort au monde d’ailleurs. Zoë était loin d’être aussi rêveuse qu’avant, fort malheureusement, mais ça ne l’aidait pas à changer sa façon de voir les choses, la vie, les gens. Son père n’était peut-être pas le plus fort physiquement, mais elle avait toujours cette fierté de dire que sa force de caractère, elle la tenait de lui. C’était peut-être ça qui les éloignait, puisqu’aucun des deux ne faisait les premiers pas pour régler ce conflit, mais c’était également probablement ça qui allait les réunir à nouveau, comme avant. Zoë avait confiance que cette dispute allait se terminer bientôt, et s’ils n’y mettaient pas foin pour eux, peut-être le feraient-ils pour Camilla, ou encore Mme Kahn. Une chose restait certaine, c’est que cette famille n’était pas aussi facile à détruire que ça.

♦ « Sinon... Ça va ? »

Question stupide. Comment pouvait-il bien aller quand sa fille l'a quitté ainsi ? Zoë regrettait également, mais elle n'avait pas vraiment eu le choix de partir non plus. Son médecin avait été clair : Si elle ne trouvait pas une solution pour éviter toute forme de stress, sa grossesse restait à risque. C'était donc la raison pour laquelle elle partie. Mais maintenant, elle savait bien que le regret était des deux côtés. Il fallait donc que ce problème se règle, et avant Noël, ce serait le mieux...

Douglas ne se sentait pas vraiment à l'aise mais, il ne laissait aucune émotion paraitre sur son visage. Sa fille était enfin en face de lui et il ne savait pas comment il devait réagir exactement. Il savait au fond de lui qu'il ne pourrait pas faire comme si rien ne c'était passé entre eux ces derniers temps. Elle avait dû quitter le domicile familiale pour la santé de son bébé et tout ça c'était à cause de ces froids et de ces disputes entre eux. Lorsqu'il l'avait appris, il a totalement paniqué et il voulait absolument des explications au lieu de savoir si sa fille allait bien et de lui expliquer qu'il serait toujours là pour elle.

Cependant, malgré tout ça, il continuerait d'être là pour elle. Si jamais elle avait le moindre problème, il serait à ses côtés pour la protéger mais, il n'avait jamais su exprimer cela ou le dire. Douglas est une personne très protectrice envers ces filles mais, il a toujours eu du mal à leur dire qu'il les aimait et qu'elles sont tout pour lui. Il ne le dit jamais et ne le montre peut-être pas assez mais, même s'il ne le dit pas, il sait que ces filles le savent au plus profond d'elles-mêmes.

Douglas regarda Hope et ne put s'empêcher de sourire légèrement à cette vue. C'est vrai qu'elle était jeune mais, pourtant il était persuadé qu'elle ressemblait comme deux gouttes d'eau à sa fille. La voir comme ça, lui rappelait ces filles quand elles étaient encore que des bébés. Il n'était vraiment pas doué et il pouvait passer plus de 20 minutes pour essayer de changer une couche. Sa femme l'avait laissé que quelques fois tout seul avec Zoë quand elle était encore toute petite et il avait été une véritable catastrophe à chaque fois. La maison finissait en un énorme champ de bataille. Pourtant, il adorait ça, s'occuper d'elle et la porter. Ces moments étaient devenus des images qu'il n'oublierait sans doute jamais.

L'homme finit par sortir de ces pensées et salua sa fille en la regardant dans les yeux. Il ne put pas s'empêcher de lui dire qu'il était content de la voir d'un ton sincère. Le fait que sa fille lui fasses comprendre que c'était réciproque lui réchauffait le coeur et l'avait fait sourire. Malheureusement, il perdit vite son sourire quand le silence s'installa entre eux et que personne ne savait quoi dire. C'était un de ces moments qu'il regrettait, car il aurait voulu qu'aucun d'eux ne ressente ce malaise. Douglas reprit la parole pour briser ce moment de silence en disant à sa fille qu'elle avait l'air en forme. Sur le moment c'est tout ce qu'il avait trouvé mais, il allait regretter ces quelques mots quelques secondes après quand sa fille lui répondit.

« Je n'en doute pas une seule seconde. Tu es quelqu'un de très responsable et une bonne mère » Répondit-il à sa fille en la regardant. Responsable ? Il ne l'avait plus dit depuis qu'il avait appris qu'elle était enceinte. Mais à quoi bon le nier. Zoë avait toujours était sérieuse et responsable. Elle serait une bonne mère et il n'en douterait jamais.

Elle ajouta qu'elle était forte et que ça ne venait pas de nulle part. Douglas avait compris facilement qu'elle parlait de lui et ça le touchait énormément. Il ne se trouvait pas particulièrement fort d'un point de vue caractère mais, il fallait quand même avouer que c'était une personne qui n'abandonnait pas facilement et qui gardait la tête froide surtout lorsqu'il s'agissait de sa famille. Zoë reprit la parole en lui demandant s'il allait bien.

« On va dire que vu la situation je ne me débrouille comme je peux et toi ? » Demanda Monsieur Kahn à Zoë. Il savait très bien que sa fille, ne lui avait posé cette question que par politesse et pour faire la conversation. Mais la réponse était évidente. Il n'allait pas bien. Sa fille lui manquait, ses filles lui manquaient. Étant donné que même si Zoë était la seule à être partie de la maison, il perdait peu à peu son autre fille qui s'éloignait de lui à son tour.

Quelqu’un de responsable ? Avait-il réellement dit responsable ? Depuis très longtemps, Zoë se qualifiait ainsi d’elle-même. Ça prend beaucoup de courage après tout pour affronter la disparition de sa mère et accepter en même temps de prendre sur elle toutes les responsabilités que sa mère avait avant. Donc responsable, oui elle l’était. Son argent, elle ne l’avait jamais dépensé pour quelque chose d’inutile, elle avait toujours prit soin de sa petite sœur, prit soin de la maison en faisant le ménage, la lessive et tout le reste. Seulement, on ne lui avait pas rappelé à quel point elle pouvait être une personne responsable depuis plus d’un an maintenant. Quand tout le monde a apprit qu’elle était enceinte, les gens ont semblés cessés de croire qu’elle était responsable, se demandant pourquoi elle n’avait pas utilisé de protection, d’anticonceptionnelle ou peu importe. Certes, ça avait été là sa plus grande erreur, mais est-ce qu’une erreur est assez pour condamner une personne? Pas selon Zoë en tout cas. Bref, que son père lui dise qu’elle était responsable lui faisait plaisir à entendre, à se rappeler.

La jeune maman devina que son père fut ravi d’entendre ces mots sortant de la bouche de sa fille. Il n’était certes pas le plus fort, mais il savait qu’il n’était pas le plus faible non plus. Après tout, ce sont les attitudes, plus que les aptitudes, qui mènent aux altitudes. Zoë l’avait toujours pensé et elle le pensait toujours. Son père savait faire face à toute sorte de situation, son métier l’exigeait un peu d’ailleurs, et c’est probablement de lui que la blonde tenait sa force de caractère, son sang-froid. S’il en avait douté un jour, c’est qu’il devait être complètement idiot. Mais il n’en avait probablement pas douté. Il l’avait peut-être oublié, mais le doute n’a jamais prit possession de son esprit à ce sujet.

Bref, pour éviter qu’un nouveau silence s’installe, Zoë lui demanda s’il allait bien, et la réponse qu’elle reçue fut… décevante. En effet, la jeune maman comprenait bien pourquoi il n’allait pas, mais elle aurait voulu apprendre qu’il allait bien. Malgré cela par contre, elle n’aurait pas voulu qu’il lui mente non plus. Baissant alors les yeux, elle prit parole réfléchir à sa propre question qu’il lui avait renvoyée. Comment allait-elle? C’était la même chose pour elle. Elle n’allait pas mal, mais pas très bien non plus. Elle était heureuse avec Jérémy, mais son bonheur avec Jérémy avait rendu quelqu’un de très malheureux. Elle aimait Jérémy, mais leur couple était mal vu. Camilla le détestait d’ailleurs, ce qui rendait les choses un peu… chiantes. N’oublions pas de dire aussi que son ami, Dean Brown, avait été gravement blessé et avait été à l’hôpital. Aussi, le meilleur ami de Zoë, Zain Richardson, ne lui parlait plus depuis plus d’un an aussi, sans oublier ce/cette DirtySecret qui s’amusait à traiter sa fille d’enfant bâtard, ce qui enrageait et blessée énormément Zoë. Alors comment allait-elle? C’était difficile à dire.

♦ « Je dirais que… Je ne suis pas malheureuse, mais je ne suis pas heureuse non plus. Ce n’est pas noir, ni blanc. C’est gris. Ça ira probablement mieux un jour, donc en attendant, je fais ce que je dois faire. »

Pourquoi disait-elle tout ça à son père ? Tout simplement parce que si elle lui mentait, elle allait probablement confondre elle-même ce mensonge à la vérité. Elle n’avait pas envie de se voiler la face, et elle avait encore moins envie de mentir à son père. Il était là non ? Pourquoi ne pas se confier à lui, comme avant ? Pourquoi ne pas lui donner cet indice du fait qu’elle recherche leur vie, leur complicité d’avant. Elle avait besoin de ce sentiment de sécurité que son père lui procurait. Ce n’était pas pour rien qu’elle s’était acheté un chien avant de déménager, chien d’ailleurs qu’elle n’a pas pu amener chez les Huntington.

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