Ça se sent dans l’air. Ce léger changement de température qui est annonciateur de la mauvaise nouvelle. Et quelle mauvaise nouvelle : l’automne arrive. Juste à entendre le mot automne, Ginny entend la mélodie dramatique qui apparaît dans tous les moments de suspens dans les films. Vous savez, les fameuses notes de musique qui précède toujours le cri d’une femme – blonde de préférence – et qui te donnent envie de crier tellement ça te stresse. Au placard, les jolies robes estivales. Cachées, les petites ballerines. Les vestes et les pantalons ressortent, ainsi que le vent froid et les feuilles colorées. Gnah. Ginerva déteste le froid. C’est... froid. Ouais. Cette semaine, le soleil s’était plus ou moins montré et le vent du Nord avait pointé le bout de son nez. Mais aujourd’hui, pas de vent. Que du soleil. Du magnifique soleil. Qui avait affecté l’humeur de la rouquine de façon très positive. Le soleil a illuminé le sourire de Ginerva dès son réveil, et l’absence de vent à l’extérieur lui a fait faire une petite danse de la joie en pyjama. Belle journée en ce samedi matin, elle irait donc dehors, obligé. O-bli-gé. À ce temps-ci de l’année, on commençait à compter le nombre de jours chauds à venir. Il fallait profiter des derniers avant qu’il ne soit trop tard et qu’on se mette à tousser comme des forcenés. Et Ginny voulait absolument faire une dernière chose avant la fin de l’été : se baigner. Aller dans la piscine une dernière fois avant l’an prochain. Déjà qu’elle avait dû supplier son père de ne pas vider la piscine avant d’être sûre que l’automne a bel et bien débarqué à MC. Et aujourd’hui, elle allait en profiter pleinement. Le temps de dire « piscine », Wainwright était déjà en maillot de bain et plongeait dans la piscine. Sur le coup, la fraîcheur de l’eau surprit Ginerva, mais elle passa bien vite outre en plongeant à quelques reprises et en faisant des figues dans l’eau. Même seule, elle arrivait à s’amuser dans la piscine. Après une bonne trentaine de minutes, la pianiste avait dépensé une grosse partie de son énergie dans l’eau et se laissait flotter en étoile, les yeux rivés sur les nuages. Soudain, LE bruit que Ginny attend toujours avec impatience se fit entendre au loin. Le bruit qui te donne envie de sauter du lit le matin et de te ruer vers l’origine. L’équivalent d’un marchand de crème glacée pour Ginerva.

Une tondeuse.

Mais pas celle du voisin d’à côté, qu’Alistair passe deux fois par année, lorsque Harper le menace de le priver de sortie. La tondeuse venait d’en face. Ce qui impliquait que la personne qui faisait la tondeuse était dehors, souvent torse nu, mais toujours sexy. Maxim Daniels. Dès que le bruit de la tondeuse se fit entendre sur son terrain, la rouquine, déstabilisée, coula. Elle nagea jusqu’aux petits escaliers dans la piscine, sortit en vitesse de l’eau et alla en avant de la maison. Ginny n’avait pas eu le temps de prendre sa serviette pour s’essuyer un peu, du coup ses pieds étaient déjà sales de gazon. Mais tout ce qui lui importait sur le moment, c’était la vue.

Et elle avait toute une vue.

Cachée derrière un des arbustes devant la porte de la demeure familiale, Ginerva avait une vue imprenable sur Maxim Daniels, qui commençait sa tondeuse comme à son habitude sur le terrain avant. Lui aussi devait profiter de la journée chaude d’aujourd’hui pour tondre le gazon avant qu’il ne fasse trop froid. La pianiste remercia le soleil de s’être pointé; sa journée se passait de mieux en mieux.

Wainwright s’assied donc sur le sol et regardait son sexy voisin à travers les feuilles de l’arbuste, les soulevant de temps en temps pour mieux voir une des plus belles créatures de Magnolia Cresent.

Décidément, Ginny vivait un des plus beaux moments de l'été. Et un des derniers, qui plus est. C'était donc une jolie façon de terminer l'été en beauté - dans tous les sens du terme. Regarder ce si joli voisin torse nu, suant à grosses gouttes, forcer des bras pour faire avancer sa tondeuse, le tout incognito, donnait à Ginerva des ailes. Elle imaginait une tonne de situations lui donnant l'occasion d'aller lui parler, par exemple courir de l'autre côté de la rue, se faire frapper par une voiture et se faire vaillamment secourir par le prince charmant torse nu. Ça serait un excellent plan, si ce n'était du risque de mourir au bout de son sang si Maxim n'était pas galant ou courageux. Mais dans l'esprit de Ginny, il l'était. Et justement, une voiture passait et s'est même arrêtée devant la maison. Opportunité de rêve pour la rouquine de réaliser son plan - elle n'aurait qu'à foncer sur le capot pour avoir quand même quelques blessures -, mais se retint de le faire. En y réfléchissant bien, son plan était stupide. Une fois la voiture partie - il semblait s'être arrêté pour parler à son sexy voisin -, Maxim semblait dans la lune car il regardait en direction de la maison des Wainwright. En direction de son arbuste, en fait. Impossible qu'il la voie, au nombre de fois qu'elle s'était cachée ici et qu'il ne l'avait pas vue, cette cachette la rendait invisible. Ça devait être à cause de sa discussion avec le conducteur qui l'a secoué. N'empêche qu'il reprit ses esprits rapidement et continua son travail, au grand plaisir de Ginerva. Mais même après avoir recommencé, Maxim tournait la tête de temps en temps en direction de l'arbuste. Louche, ça. Ginny commençait à stresser: et s'il l'avait vue? Elle se raisonna cependant rapidement: elle était invisible, point. Il trouvait peut-être leur arbuste joli: amateur d'horticulture? Un autre point fort, au moins il avait des passions, pas comme certains gars de MC qui ne faisaient rien de leur journée à part emmerder les autres - genre Alistair. Perdue dans ses pensées, elle ne remarqua pas la disparition du bruit de la tondeuse ainsi que les pas qui traversaient la rue et se rapprochaient dangereusement. Lorsqu'elle revint à la réalité, la jeune femme regarda machinalement à travers les arbustes, mais vit la tondeuse seule. La rouquine fronça les sourcils. Où était-il passé, merde!?

Puis, elle entendit sa voix.

Elle avait l'impression qu'il était juste à côté. En se tournant vers l'origine de la voix, Ginny vit que c'était le cas. Elle poussa un cri de surprise. Comment était-il arrivé juste à côté sans qu'elle s'en rende compte? Et pourquoi était-il juste à côté d'elle, merde!? L'arbuste ne l'avait pas assez protégé? Elle devrait donc trouver une autre cachette... mais en attendant, il lui avait parlé, elle se devait de répondre. Même si Ginny était trop surprise et bouche bée de le savoir à ses côtés pour se souvenir de sa question. Soudainement gênée de son habillement léger, elle se couvrit rapidement en collant ses jambes contre son ventre et se souvint finalement de la question du voisin.

"Ah... euh... Salut!... En fait... oui je... je cherchais mon chat! Sacré Minou, il... aime se promener dans... dans le quartier!..."
Puis, en levant la tête vers la rue - tout pour ne pas le regarder en face:
"Mi-nouuu!"

La famille Wainwright n'a jamais possédé d'animaux de leur vie - question de poils et de saleté -, mais Ginny pourrait expliquer - enfin, tenter d'expliquer sans trop bredouiller - à son voisin qu'ils avaient un nouvel animal depuis un moment. Un petit chaton, oui. D'où l'importance de le retrouver rapidement. Et de courir dans la maison tout de suite après, tiens. Genre loin de Maxim et de ses muscles si... saillants et si... musclées...

Ginny n'avait pas remarqué qu'elle fixait depuis trop longtemps le corps de son voisin; lorsqu'elle le remarqua, elle retourna son attention vers la rue, où son "chaton disparu" avait pris la fuite.

Intérieurement, Ginerva capotait. Littéralement. Elle était en mode panique. Mais elle ne le laissait pas paraître sur son visage. Enfin, elle essayait: c'était quand même Maxim-awesome-Daniels qui se tenait devant elle! Et Ginny tentait de garder son calme devant les questions de Maxim à propos de son chat. Hé merde! Non seulement elle devrait lui répondre - au moins elle avait un plan en tête -, mais elle devrait le dire sans bredouiller ou passer pour une folle. Là était le problème. La rouquine prit une grande inspiration pour se calmer et imagina qu'elle parlait en fait à James Fitzgerald, son meilleur ami et l'homme le moins intimidant du monde. Elle leva la tête vers son fantasme et dut se retenir de ne pas exploser de rire. La tête de James avec le corps d'Apollon de Maxim, ça faisait vraiment étrange! N'empêche que ça la détendait.

"Heu non, je n'ai pas de photo... je l'ai seulement depuis... deux mois, donc... j'ai pas de photo!"

Une description, une description... c'était facile à dire, ça! Ginny n'en avait aucune en tête. Mais elle avisera. Une fois avoir vu un chat et décréter que c'était le sien. Il y avait de nombreux chats dans le quartier et plusieurs sans collier, alors ça serait facile. Mais un deuxième obstacle s'imposait: Maxim qui lui tendait la main et lui proposait de la porter. Merde, merde, merde! Ginny fixa la magnifique main de Daniels. Elle devait être tellement douce... Instinctivement, la rouquine prit la main tendue, puis se rendit compte de son erreur. Trop tard. Si elle le lâchait, il le prendrait certainement mal et trouverait son comportement étrange.

"Pas besoin, je... je vais m'habiller et... tu pourras m'aider à le trouver!"

Ginny s'aida de la main de Maxim pour se lever, elle tira dessus pour se donner un appui, mais en ce levant - effet de poussée avec ses jambes oblige -, elle termina sa trajectoire sur le torse de Daniels. Elle était collée à lui! Moment d'extase. Puis moment de panique. La rouquine se décolla de ce corps d'Apollon et lui sourit.

"Je vais m'habiller!"

Et elle courut à l'intérieur sans fermer la porte. Courut dans sa chambre. Sauta sur son lit. Cria dans son oreiller. Ginerva était en état de panique générale. Elle avait envie de sauter partout, de crier, de danser tout en même temps. Mais elle se retint. Maxim Daniels était quand même devant sa maison. Il était là pour elle! Ginny se trouva rapidement un short bleu et une camisole blanche, mit des chaussures et prit une grande respiration avant de sortir de la chambre. En descendant les escaliers, la rouquine s'immobilisa.

Maxim Daniels était devant la porte d'entrée, laissée ouverte par la musicienne.

Merde, merde, merde!

Lorsque le corps de Ginny colla celui de Maxim, elle sentit le corps de ce dernier frissonner. Sur le coup elle ne s'en était pas trop soucié, mais une fois dans son lit, criant dans son oreiller, elle se repassa cet incident dans sa tête et ce détail lui revint à l'esprit. La rouquine jubilait. Soit c'était une réaction normale au corps froid de Ginny - elle était quand même mouillée à cause de la piscine -, soit il avait apprécié le moment. Maxim avait apprécié le moment! Autre cri dans l'oreiller. Mais elle se ressaisit: impossible, voyons. Avec toutes les femmes qui étaient passées dans son lit - dont cette garce de Mya, elle avait lu l'article qui racontait les exploits de son voisin avec les soeurs Cleavers, Ginny avait trouvé ça répugnant jusqu'à ce qu'elle revit son joli corps passer la tondeuse -, les chances que Ginerva soit la prochaine étaient minimes. Voire invisibles. Ginny était considérée comme une amie selon les garçons, pas comme une petite amie. Nuance. Elle n'avais d'ailleurs jamais eu de relations sexuelles - c'était ce qui arrivait lorsqu'on était trop gentille et pas assez pute. En même temps, la musicienne ne voulait pas qu'on l'étiquette dans la deuxième catégorie, alors ça lui allait très bien, même si sentir un corps masculin contre soi de temps à autre devait être réconfortant. Wainwright s'habilla et descendit les marches avant de réaliser que Maxim était présent. Et voilà qu'il était entré chez les Wainwright sans sa permission et lui bloquait le chemin, debout devant l'escalier! Merde, merde, merde! La rouquine devait rester calme, maître de la situation, faire son indépendante. Mais ce qu'elle avait envie de se jeter dans ses bras! Il était juste là, à deux marches de distance, prêt à l'attraper. Solution pour s'en sortir? Changer de sujet. Ginny regarda à l'extérieur - tout pour ne pas trop dévorer des yeux ce dieu - et par miracle aperçut un chat passer rapidement devant la maison. Parfait timing! Ginny jubilait. Son mensonge fonctionnait!

"Minou!"

La rouquine passa devant Maxim - et sentit un peu son odeur, ce qui la fit baver quelques instants - et courut en direction de son "chat". Il semblait jeune, ce qui était un bon point. Il était noir avec quelques taches blanches. Mais il prit peur en voyant Ginny lui courir après comme une furie et s'enfuit en direction opposée. Wainwright cessa de courir et laissa échapper un juron. Ce chat était parfait pour jouer le rôle de son chat!

"Piano! Méchant chat!"

En voyant l'apparence du félin, ce nom lui était venu spontanément. Et connaissant sa famille, ça n'était pas très original. En courant après le chat, Ginny ne s'était pas attardé à Maxim: l'avait-il suivi? Était-il juste derrière elle? La rouquine se doutait que oui, et pourtant elle ne voulait pas se retourner pour vérifier. C'était évident qu'elle fuyait son voisin, mais pourquoi? Ginny se le demandait. Il était magnifique, parfait, il voulait lui parler, et elle courrait dès qu'il était trop proche? Sa réaction était stupide, mais Wainwright n'y pouvait rien.

Même si quelques minutes plus tôt Ginny était heureuse de voir ce chat débarquer, en ce moment elle regrettait un peu d'avoir prétexté que c'était le sien. Parce que maintenant, elle allait devoir lui courir après! Il s'est enfui, le but était donc de le récupérer. Et si elle n'avait pas menti, aussi! La rouquine pesta contre elle-même. Et Maxim l'avait rejointe au milieu de la rue, il avait vu le chat s'enfuir loin de sa "maîtresse" et trouvait que cette dernière avait le même comportement envers lui. C'était effectivement vrai, et Ginerva le savait. Mais elle ne s'en était pas vraiment rendu compte, ce ne fut que lorsque cette remarque sortit de la bouche de Maxim Daniels lui-même qu'elle ouvrit vraiment les yeux. Elle avait fait une tonne de scénarios impossibles pour lui adresser la parole et se coller contre lui, maintenant le scénario parfait était en train de se dérouler - IL était venu chez ELLE torse nu et dégoulinant de sueur pour LUI parler -, pourquoi n'était-elle pas en train de lui sauter dessus pour l'embrasser passionnément, comme dans ses scénarios? Parce que c'était vrai, cette fois. Dans sa tête, Maxim disait ce que Ginny voulait lui faire dire et faisait ce que Ginny voulait. Maintenant, elle n'avait aucun contrôle. Elle qui adore l'imprévisible habituellement! Ce n'était pas elle. La Ginerva Wainwright de tous des jours n'aurait pas hésité à lui proposer de la rejoindre dans la piscine! Maxim Daniels l'intimidait. Il était trop parfait, il pouvait avoir les filles qu'il voulait en claquant des doigts, la rouquine n'était pas de taille. Allez Ginny, on se tourne et on lui parle en le regardant dans les yeux. La musicienne prit son courage à deux mains, inspira profondément, se tourna vers ce dieu grec et s'obligea à le regarder dans les yeux. Ils étaient si beaux, si pétillants qu'elle se perdit dedans quelques instants. Ça devait être une des premières fois que Ginerva regardait Maxim directement dans les yeux. Hypnotisée, elle n'arrivait presque plus à bouger. Seule sa bouche réussit à esquisser un sourire timide. La rouquine se dit qu'elle devait tellement avoir l'air stupide; elle cligna des yeux. Ce petit repos lui permit de reprendre possession de son corps qui se détendit un peu.

"Je trouve que tu me juges beaucoup pour le peu que tu as vu."

Ça ressemblait à une invitation, mais ce n'était pas le but visé par la rouquine. En tout cas, consciemment. Elle baissa les yeux au sol: elle avait regardé le soleil trop longtemps, ça lui avait brûlé les yeux, ils devaient se reposer.

Lorsque Maxim lui révéla qu'il savait pour les cachettes de Ginny et son obsession sur lui, elle se sentait prise au piège. Elle était confrontée à la réalité, chose qui lui arrivait peu souvent. Parce qu'en effet, son monde en était un de Bisounours, ce qu'elle faisait n'avait pas vraiment de conséquence et passait inaperçu. Mais cette fois-ci, Maxim savait que ce Ginny faisait et lui demandait de s'expliquer de vive voix. Aouch. La rouquine n'a jamais été confrontée à ce genre de situation - sa famille se fichant un peu de ses faits et gestes, heureusement qu'elle n'avait pas un tempérament belliqueux, elle aurait pu mal finir! - alors ce qu'elle vivait était un peu nouveau dans son esprit. Ginny s'imaginait que Daniels ne remarquerait jamais la petite voisine qui le regardait d'un peu trop près. Mais maintenant qu'elle était au pied du mur, elle ignorait quoi faire à part rougir et se mettre en mode défensive, choses qu'elle faisait très rarement. Comme quoi elle se sent vraiment perdue. N'empêche qu'il soulevait un bon point. Mais la rouquine ne pouvait certainement pas lui dire en pleine face "Oui je t'espionne, et non je ne suis pas allée te parler parce que tu m'intimide trop, je ne suis pas de ton calibre, tu es trop beau pour une fille comme moi!". Impossible. Ginny n'en avait pas la force ni le courage. Elle se contenta donc de marmonner:

"Ce n'est pas moi l'espionne... c'est Satine..."
Évidemment, elle jeta le blâme sur sa grande soeur. Elles étaient toutes les deux rousses, il aurait pu confondre. Mais Ginny savait bien qu'il n'y croyait pas, et elle non plus. Il l'avait quand même prise sur le fait! Ginny soupira.
"C'est bon, j'avoue..."

Cette phrase, elle l'avait murmuré, presqu'à contrecœur. Comme lorsqu'on s'excusait à quelqu'un parce que nos parents nous ont ordonné de lui présenter nos excuses. Au moins c'était dit, elle devrait être contente, non? Non. Elle avait un léger arrière-goût dans la bouche, cette sensation de vivre avec cette conséquence encore longtemps. Sur le coup, elle avait honte. A début, c'était inoffensif, la classique voisine qui espionnait le sexy voisin. Comme dans les films. Mais dans les films, le sexy voisin ne s'en rendait jamais compte et n'allait jamais demander des explications à ladite voisine. Ginerva se sentait vraiment comme un enfant qu'on punissait. Et Maxim s'était approché d'elle, empirant son sentiment de honte. Dans d'autres circonstances, la rouquine aurait été ravie de ce rapprochement. Avant qu'elle ne sache qu'il savait. Maintenant, elle avait envie de s'enfuir, s'enfermer dans sa chambre par honte. Mais en même temps, elle voulait se coller contre lui et ne rien dire, seulement sentir sa chaleur corporelle. À défaut de se décider, la musicienne resta immobile. Par contre, elle prit son courage à deux mains et finit par lever les yeux pour regarder le visage parfait de son interlocuteur et lui dire:

"Évidemment que je serais venue te parler! J'attendais le bon moment."
Bon moment = lorsque Ginny aurait accumulé assez de courage pour marcher jusqu'à la maison d'en face.
"Et puis pourquoi tu voudrais me parler?"

Après tout, Maxim Daniels pouvait avoir toutes les filles qu'il désirait en claquant des doigts, pourquoi s'intéresser à Ginerva Wainwright, la fille la plus simple et invisible du quartier, ou du moins de sa famille?

La dernière phrase de Ginny avait laissé Maxim bouche bée. Il avait ouvert la bouche pour dire quelque chose, puis s'était ravisé. Qu'est-ce qu'il aurait voulu dire? Pourquoi cette réserve? Ginny voulait savoir. Elle était accrochée à ses lèvres, attendant une réponse quelconque. Et quelle sorte de réponse voulait-elle entendre? Elle-même l'ignorait. La rouquine voulait seulement entendre sa voix pour rompre ce silence troublant. Alors qu'auparavant, elle aurait voulu qu'il se la ferme, surtout concernant ses découvertes sur la voisine. Contradictoire, vous avez dit? Finalement, Maxim se mit à lui répondre, ce que Ginny attendait. Mais il n'arrêtait pas, c'était un flot continu, parlant de leur jeunesse, leurs ressemblances et le comportement de la rouquine. Il se souvenait d'elle, donc. Même s'ils n'étaient pas très proches, ils fréquentaient les mêmes personnes et s'étaient parlés un ou deux fois. Même à cette époque, Ginerva le trouvait attirant, mais avait caché tout ça en se disant que toutes les filles le voulaient de toute façon, une groupie de plus l'énerverait davantage qu'autre chose. Elle avait le même sentiment aujourd'hui, mais c'était plus dur de le garder pour soi, Daniels avait tellement changé... surtout niveau physique. Il avait atteint la perfection, un niveau encore moins accessible qu'avant. Donc Ginny l'évitait. Et elle n'allait certainement lui révéler tout ça d'un coup! Maxim demandait des explications, mais il ne devrait certainement pas s'attendre à une telle déclaration. Devant le silence de Wainwright, le beau voisin la frôla et partit. Affolée, la rouquine ne put s'empêcher d'exprimer sa désapprobation en voulant retenir son bras et en lançant un petit "Non!" désespéré. Mais elle ne réussit pas à l'attraper à temps, sa main frôla son bras - bras qui était si musclé, elle avait tellement envie de s'y tenir et de le garder contre elle le plus longtemps possible -, cependant il s'était arrêté sur le trottoir et la regardait. Ils se tenaient donc face à face, l'une au milieu de la rue et l'autre sur le trottoir, se regardant et attendant. Attendant quoi? La rouquine. Ça serait elle qui déciderait du sort de leur relation. Si elle ne dit rien, ils ne se parlent plus, s'ignorent. Si elle se décide à lui dire ce qu'elle a sur le coeur, une barrière invisible se brisera, elle en avait l'impression. Ce qui en ressortira? Tout le monde l'ignore. Eux les premiers. Le coeur de Ginny battait la chamade, elle se devait de faire le bon choix. Et pour ça, il n'y avait qu'une solution.

"Ce n'est pas que je ne veux pas te parler, tu le sais. D'ailleurs, tu sais pourquoi j'agis ainsi avec toi, tu veux seulement l'entendre sortir de ma bouche. Parce que c'est trop évident. D'après toi, pourquoi une jeune fille regarderait-elle souvent en cachette quelqu'un et le fuirait à chaque fois que ce quelqu'un voudrait lui adresser la parole?" Ginerva avança en direction de Maxim en parlant, mais ne le lâchait pas des yeux. Elle avait commencé, pas question de s'arrêter en si bon chemin. "Tu me plais, Maxim Daniels. Voilà, je l'ai dit, j'espère que tu es content. Mais je n'ai aucun espoir que ça aille plus loin. On est trop différents." Elle venait de rejoindre Daniels sur le trottoir et le défiait du regard. "Alors voilà, je t'ai dit tout ce que j'avais à te dire. Satisfait?"

Après tout le courage que cela lui avait nécessité pour déballer l'histoire à son fantasme, elle n'avait plus la force de le regarder en face et de se tenir droite devant Maxim. Elle tourna donc les talons et courut en direction de sa maison. Il savait tout, elle devait se cacher, se faire oublier durant quelques temps, se terrer dans sa chambre le temps qu'il faudra. Parce que dans sa tête, c'était impossible que ça soit réciproque. Il allait rire d'elle et parler de sa voisine folle et obsédée à tout le quartier. Et si elle déménageait quelques temps chez sa tante, à New York, le temps que ça se calme et qu'il oublie?

Sa maison n'était pas si loin, elle qui pourtant avait l'impression d'avoir couru deux kilomètres. En arrivant au numéro 42, la Wainwright ferma la porte violemment, courut dans sa chambre, ferma de nouveau sa porte et s'accota sur celle-ci, se laissant glisser sur le sol. Et maintenant, qu'est-ce qu'elle devait faire? Ce sentiment qui la rongeait - étrange mélange de liberté, de honte et d'excitation - était tout nouveau pour elle. Craquer sur un homme pendant si longtemps en le gardant caché au principal intéressé aussi, il fallait dire. Enfant, elle ne se gênait pas pour dire aux garçons de son âge qu'ils lui plaisaient et ils faisaient ainsi de mignons petits couples, comme avec Cameron Cooper. Ginny avait douze ans lorsqu'elle est "sortie" avec, et la façon dont elle lui avait avoué qu'il lui plaisait ne s'était jamais passé ainsi! Ah, les jeunes et leur simplicité naïve... C'était le bon temps. Mais avec Maxim, c'était autre chose. Ça a toujours été différent avec lui - son comportement lorsqu'il était présent, sa gêne lorsqu'il se collait trop près, sa tendance à éviter de trop longues discussions à ses côtés. Les yeux fixés au mur d'en face, la rouquine se mit à réfléchir. Qu'est-ce qu'ils faisaient, dans les films? Ils déprimaient en pyjama et mangeaient de la crème glacée en écoutant de vieux films d'amour. Mais ça, c'était en cas de peine d'amour, merde! Ginerva n'était même pas en couple ou amoureuse de Daniels - ce qui est un prérequis à toute peine de coeur - , elle était pathétique! Pour le moment, elle en avait juste marre. Elle enleva ses vêtements - mouillés, parce qu'elle avait gardé son maillot de bain en dessous - et se mit en pyjama. Elle détestait porter un pyjama durant la journée, mais c'était la première étape. Deuxième étape: crème glacée! La rouquine descendit les escaliers et ouvrit le congélateur pour voir si elle en avait. Alors qu'elle allait prendre le pot de crème glacée à l'érable - une de ses saveurs préférées, en plus! -, quelqu'un sonna à la porte. La main dans le congélateur et les yeux rivés sur la porte d'entrée, Ginerva se figea. Elle espérait de tout coeur que ce soit ses parents, Lucy, son frère ou sa soeur qui avait oublié les clés de la maison. Mais la voix qu'elle entendit à travers la porte lui confirma le pire.

Maxim était revenu.

Merde, merde, merde. Ginny ferma doucement la porte du congélateur, en espérant passer inaperçu et lui faire croire qu'il parlait seul à une porte. Mais elle savait qu'il savait qu'elle était chez elle. La preuve, il sonna de nouveau et cogna même à la porte! Il voulait vraiment lui parler. Ginny n'avait pas le choix, surtout qu'avec la déclaration qu'elle venait de lui faire, la moindre des choses était de le laisser parler. La musicienne soupira et ouvrit la porte. Elle ne disait rien, attendait seulement que Maxim entre pour fermer la porte derrière lui. Une fois la porte fermée, la rouquine croisa les bras et tenta de regarder Maxim dans les yeux afin de le défier, voire de l'humilier, mais en était incapable. Ginerva baissa donc son regard vers les pieds de son voisin, ne disant toujours pas un mot.

Elle lui a dit ce qu'elle avait à dire. À son tour, maintenant.

Ginny se demanda sérieusement quel était le problème de Maxim! Il en avait du culot, pour la juger sur son habillement et regarder les photos de famille au mur au lieu de lui parler! C'était lui qui s'était incrusté, en plus! Étonnée par l'étonnement du beau brun, la rouquine leva la tête - ce qui n'était pas si intimidant, il lui avait tourné le dos -, décroisa les bras et lui lança:

"J'ai le droit de me mettre à l'aise dans ma propre maison, à ce que je sache. Et je ne t'ai pas invité à entrer pour que tu ries de mon pyjama."

C'était vrai que si Ginny voulait réussir à avoir Maxim, elle devrait se trouver des pyjamas plus sexy, parce que le sien était plus gênant qu'autre chose. En ouvrant la porte, elle n'y avait pas pensé, mais une fois face à son sexy voisin, elle ressentait un peu de honte. Lorsque Daniels cessa de regarder ses photos et se tourna vers la rouquine, celle-ci reposa ses yeux au sol et recroisa ses bras. Elle semblait si timide et Maxim si à l'aise qu'on se demandait qui était l'invité et qui était l'hôte. Wainwright tenta de se ressaisir, de lui montrer la facette d'elle que tout le monde connaissait, mais en vain. Elle n'était définitivement pas elle-même à ses côtés.

"Non, ça fait plus longtemps. C'est juste que lorsque tu es revenu, disons que je ne m'y attendais pas et tu avais tellement... changé, quoi."

Ginny rougit, puis se souvint de ses dernière paroles. Il s'attendait à une autre raison pour expliquer son comportement... Ça intrigua la rouquine, qui fit un effort pour lever ses yeux au niveau du visage de Maxim. Mais elle ne regardait pas directement ses yeux: ses cheveux étaient très beaux, aussi. Et moins intimidants.

"Et sérieusement, à quoi tu t'attendais?"

Dans l'esprit de Ginerva, toutes les filles du quartier avaient jeté leur dévolu sur Maxim Daniels - et le dernier article de Dirty Secret penchait en faveur de sa théorie - et que des déclarations comme celle de la rouquine, il en recevait tous les jours. Son étonnement et sa difficulté à croire la vérité venaient de lui prouver le contraire.

Lorsque Maxim lui parla de son habitude à séduire les filles, Ginny eut envie de pleurer. Évidemment, elle s'y attendait. Un homme aussi beau se devait d'utiliser son corps pour attraper les filles qu'il désirait. Et elle n'en faisait pas partie, parce qu'elle était trop invisible, trop inintéressante pour attirer des hommes tel que Maxim. Et il venait de lui confirmer tout ça en plein visage, de quoi lui briser tous ses rêves sur une future relation avec lui. Autant arrêter de fantasmer sur lui alors, ça ne mènerait à rien de toute façon... Daniels s'approcha de Ginerva qui ne recula pas. Elle se concentrait pour ne pas reculer devant lui, pour ne pas se sentir plus faible qu'elle ne l'était déjà. Son voisin lui dit alors qu'elle était mignonne. Mignonne! Évidemment! Tous les hommes ont envie d'être en couple avec une fille mignonne. Ginny avait l'impression que plus il parlait, plus son coeur se tordait et se craquelait, lui faisant horriblement mal. Ne pas pleurer Ginny, surtout ne pas pleurer... Pour éviter de pleurer, la rouquine rit.

"Tu as raison, tu t'enfonces royalement..."

Puis, Maxim prit l'avant-bras de Ginny. Étonnée, celle-ci eut le réflexe de retirer son bras, mais se retint de le faire. Après tout, ça serait un des seuls rapprochements qu'elle aurait avec son voisin, autant en profiter pendant que ça se passe. La rouquine cessa de regarder les cheveux de Max et porta son regard sur ses yeux. Jamais elle n'avait été aussi près de lui qu'en ce moment, et l'envie folle de l'embrasser lui vint à l'esprit. C'était l'occasion ou jamais, n'est-ce pas? Même s'il venait de détruire ses rêves de finir en couple avec lui.

"Je ne me fais pas de fausses idées: on est différents, c'est tout. Je ne suis pas aussi sexy que Mya Cleavers, et je me suis faite à cette idée. Tu devrais être content que je ne me fasse pas de faux espoirs. Et tu crois que c'est facile de parler de ça à la personne concernée?"

Elle venait bien de le faire, mais il fallait dire que Maxim ne lui avait pas vraiment donné le choix. La rouquine resta immobile et continua de le regarder dans les yeux. Elle voulait profiter de ce moment, qui risquerait d'être un des derniers qu'elle vivrait avec Maxim. On pouvait dire que maintenant, Ginny lui avait tout déballé concernant son attirance pour lui, alors elle s'attendait à ce qu'il parte et l'ignore jusqu'à ce qu'un des deux déménage du quartier. Après tout, Maxim n'avait probablement rien à lui dire concernant de potentiels sentiments pour elle, Ginny ne se faisait plus d'idées à ce sujet.

Ginerva ne comprenait pourquoi Maxim s'entêtait à vouloir lui parler. Il cherchait ses mots, il voulait continuer leur conversation alors que Ginny voulait seulement tourner la page. Ne comprenait-il pas qu'ils vivaient dans des mondes parallèles impossibles à concilier? Ginny l'avait bien acceptée, elle. Alors pourquoi s'entêtait-il? Cette histoire d'attirance l'avait affecté à ce point? Maxim finit par lui expliquer qu'il ne s'était pas intéressé à elle à cause de son inaccessibilité à draguer, puis finit par la lâcher et à reculer. Donc, Maxim n'avait pas pensé à avoir une relation avec Ginerva parce que celle-ci n'était pas une pute qui couchait à droite et à gauche. Ça, elle le savait déjà. Elle l'a toujours dit: la rouquine fait partie de la seconde catégorie. Celle des bonnes amies. La première catégorie était celle des filles bonnes pour une nuit. Et étant donné que Ginny était encore vierge, la catégorisation était simple à faire. N'empêche qu'elle était un peu triste que Maxim ait cessé de la toucher. Peu à peu, elle commençait à s'habituer à le sentir près d'elle sans faire de crise de panique.

"Donc, tu trouves que je suis trop bien pour toi? Que je ne te mérite pas?"

Cette constatation étonna la rouquine. De la façon dont Maxim se résumait, il représentait tout ce que Ginny détestait; arrogant, dragueur, amateur des coups d'un soir. Elle qui a toujours cru que son magnifique voisin était parfait, attentionné, gentil et respectueux, voilà que toutes ses espérances venaient de voler en morceaux! Ça lui faisait plus mal que si son voisin s'était contenté de lui rire en plein visage lors de sa déclaration. S'il avait fait ça, la rouquine aurait pu continuer de le trouver beau, mystérieux et de lui imaginer toutes les qualités de l'homme parfait. Mais maintenant qu'elle savait qui il était réellement, elle ne pourrait plus penser à un homme parfait, elle verrait Maxim Daniels comme il était: un homme ordinaire, voire détestable. La rouquine se pinça les lèvres et baissa les yeux. Déjà que son coeur était craquelé, elle sentait qu'il venait carrément d'exploser dans sa cage thoracique. Ce coup-là avait été le plus difficile, elle n'en supporterait pas un autre. Malgré tout, il venait quand même de la complimenter. C'était ce qu'il essayait de faire depuis tout à l'heure, certes, mais ce compliment-là l'avait davantage touchée. Au moins, il ne profiterait pas de son attirance envers lui pour coucher avec.

"..."

Ça y est, la rouquine avait le rouge aux joues. Incapable de dire quoi que ce soit. en même temps désappointée à propos de sa découverte sur le vrai Maxim Daniels et heureuse de voir qu'il n'était pas si salaud que ça. Parce qu'il aurait pu facilement l'être: un claquement de doigt de sa part et elle se serait jeté dans son lit! Ne sachant plus quoi faire, ses jambes la lâchèrent et elle s'assied lourdement sur une chaise près d'elle. C'était assez ironique comme situation, il fallait l'admettre: d'un côté, Ginny trouvait que Maxim était trop parfait pour elle, et de l'autre côté, Maxim trouvait la rouquine trop inaccessible.

"C'est tellement stupide..."

Wainwright ne put s'empêcher de ricaner. Un joli rire jaune pour cette vie qui s'amusait avec eux!

Durant tout le monologue de Maxim, Ginny resta interdite. Elle se contentait de le regarder lui expliquer les choses à sa manière. De toute façon, elle en avait marre de discuter pour le moment. Trop d'informations en même temps, elle devait prendre une pause. Puis son voisin s'accroupit à son niveau et se tint sur sa chaise. Ils étaient dangereusement proches, mais la rouquine apprécia le moment. Ce qui ne l'empêcha pas de rougir et de vouloir détourner le regard. Évidemment que Ginny se doutait qu'il usait de ses charmes envers la gente féminine, mais elle fermait volontairement les yeux sur ce petit détail. On ne voulait pas savoir que son fantasme couchait avec d'autres filles, et encore moins lorsqu'il se tapait des femmes que Ginny connaissait de près ou de loin. Et le fait qu'il lui dise que ce n'était pas son genre de coucher avec Ginny seulement parce qu'il lui plaisait la réconforta. Un peu. Disons que ça la libérait d'une question parmi tant d'autres. Mais la rouquine resta toujours silencieuse. Finalement, Daniels lui tint les mains et les posa sur les cuisses de la rouquine. Ginny regarda son voisin dans les yeux et lui sourit timidement. Ce petit contact lui donnait l'impression de fondre, elle profitait au maximum de ce moment. Et lorsque Maxim termina sa phrase, des étincelles apparurent dans les yeux de la rouquine. Non, il ne venait pas de dire ça? Oh que si. Il venait de lui donner de l'espoir. Lorsqu'elle entendit le mot "mais" sortir de sa bouche, elle s'attendait à tout sauf à ça.

" ... Tu crois?"

Intérieurement, Ginerva refusait d'y croire. Elle ne voulait pas se donner de faux espoirs. Mais en même temps, s'il disait vrai... ça serait si merveilleux! La rouquine serra les mains de Maxim dans les siennes, elle ne voulait plus le lâcher.

Mais la porte s'ouvrit.

Satine apparut à l'entrée. Elle s'arrêta lorsqu'elle vit Ginny et Maxim dans la cuisine, estomaquée. Ginerva savait très bien ce qu'elle se disait: "un homme chez les Wainwright? Mère sera furieuse!" "Ah, c'est notre voisin! Seraient-ils en couple, ces deux-là?" "Mère doit ab-so-lu-ment être au courant de ça!".

"Sat'! Tu veux bien oublier tout ce que tu viens de voir, s'il-te-plaît?"

Ginny lança un regard lourd de sens à sa grande soeur, qui se contenta de hausser les épaules et de se diriger dans sa chambre. Allait-elle tout révéler ou se taire? Wainwright était stressée à ce sujet. Il n'était pas question que leur mère sache que leur beau voisin était entré chez eux, elle imaginerait plein de choses fausses et interdirait la rouquine de le revoir, chose stupide en soi puisqu'ils n'étaient même pas en couple!

"Tu ferais mieux d'y aller avant que Satine ne se pose trop de questions."

Ginerva se leva et alla lui ouvrir la porte.

Debout, poignée de porte à la main, Ginerva attendait que Maxim s'en aille. Il s'était rapidement levé lorsque Satine a débarqué, gâchant toute l'ambiance du moment. Il fallait bien que ce soit de la faute de Satine. Alors qu'il s'approchait - tout en souriant avec son sourire à faire tomber toutes les filles -, Maxim s'est en quelque sorte excusé si elle avait pu le voir d'une mauvaise manière et espérait qu'ils se revoient. La rouquine sourit, elle aussi avait très hâte de le revoir et n'aurait même plus besoin de l'espionner pour le faire: une simple visite chez lui suffirait. Elle n'en revenait pas elle-même de sa chance! Puis Daniels fit quelque chose qui la rendit bouche bée, incapable d'ajouter un mot.

Il venait de l'embrasser sur la joue.

Un bisou, un... bisou! Ses lèvres venaient de lui toucher la joue! Ginny en fut bouche bée et son teint pâle - qui avait souvent changé de couleur durant la journée - venait de prendre une teinte rouge encore jamais apparue sur son visage avant. Le temps de revenir à ses esprits, son sexy voisin était parti. Réalisant qu'elle venait de le quitter sans lui dire au revoir, elle passa sa tête à l'extérieur et lui cria "Bye!" de loin avant de claquer la porte. Ginerva se tint derrière la porte close, immobile. Et maintenant que faire? Son esprit venait d'être complètement chamboulé à cause de Maxim et la conversation qu'ils venaient d'avoir. Elle avait encore de la difficulté à croire que quelque chose était en train de se passer entre eux. La rouquine finit par quitter la pièce - elle y était restée pour ressentir les derniers instants vécus avec Maxim chez elle - et alla voir Satine dans sa chambre pour lui parler. Elle ne devait absolument pas révéler ce qu'elle venait de voir à qui que ce soit, surtout pas à ses parents. Margareth était très protectrice et ne voulait pas d'hommes autre que Marcus et Balthazar chez eux pour que Satine ne fasse pas la même erreur qu'elle. Mais le fait d'inviter Maxim ne voulait pas dire qu'il finira avec Satine et gâchera son rêve, c'est une idée complètement stupide, mais Ginny n'avait pas le choix d'obéir.

La seconde fille Wainwright cogna quelques coups à la porte de la chambre de Satine, puis patienta.

"Oui?"
"Satine? C'est Ginny! Je peux entrer?"
"Oui, entre! On doit se parler de notre voisin. Il se passe quoi entre vous deux!?"

La rouquine sourit légèrement, puis entra dans la chambre de sa grande soeur.