Après la brocante les deux jeunes femmes se dirigèrent vers la maison de la jeune brune. Plongée dans ses pensées, Elisabeth ne parlait pas et essayait de réfléchir à ce qu’elles venaient de trouver en fouillant les cartons, elle savait que ce qu’elles avaient fait n’allait pas être sans conséquence et c’était ce qui l’inquiétait le plus.

Une fois arrivées devant la maison de la jeune brune, Eli ouvrit la porte et invita Ginny à entrer.

«Tu veux un truc à boire ou à manger ? » demanda-t-elle en se dirigeant vers la cuisine avec la jeune rousse sur ses pas.

Malgré le fait qu’elle n’avait envie de rien, elle n’allait tout de même pas jouer les mal élevé et ne rien proposer, c’est pourquoi avant même que la jeune Wainwright ne lui réponde, elle se dirigea vers les placards et sorti 2 verres avant d’aller chercher de la limonade que sa mère avait fait.

Elle sortit ensuite deux plats dans lesquels elle y plaça deux cupcakes, une pour elle et une pour son amie, puis s’assit à la table de la cuisine.

Elle avait envie de lui demander si elle n’avait pas peur des conséquences, si elle ne regrette pas un peu ce qu’elles avaient fait, quoi qu’en même temps, il était un peu trop tard pour regretter quoi que ce soit.

«Bon, on fait quoi maintenant ? »

C’était la question qu’elle s’était posée pendant tout le trajet jusque sa maison, pendant qu’elles étaient derrière le bâtiment et sûrement la question dont elle allait continuer à chercher la réponse.

Elles avaient en leur possession un objet important qui aurait semble-t-il appartenu à Dirty Secret. Le danger était bien présent et là, autant lorsque les articles tombaient elles ne pouvaient pas prédire ce qui allait se passer, là elles pouvaient être sûres qu’elles allaient apparaître dans le prochain article et sûrement pas pour les bonnes raisons.

«Faudrait qu’on s’en débarrasse… »

Elle prit son verre entre ses mains pour qu’elle ait quelque chose avec quoi jouer pour cacher sa nervosité, même si ça pouvait se sentir.

Le trajet de la salle des fêtes à la maison des Spencer avait été interminable. Pourtant, ce n'était pas si loin. Mais avec le silence qui régnait entre les deux jeunes filles, l'objet qui semblait brûler la peau de la rouquine, au fond de la poche de son pantalon, et les questionnements incessants qui la faisait douter sur ses actes présents, normal que ce trajet jusqu'à une possible libération semblait trop long. Et ce casque de pompier qu'elle emmenait malgré tout, preuve de la vente aux enchères truquée qu'Elisabeth et elle avaient gâchés. L'objet, attirant au départ, avait un tout autre sens maintenant que la rouquine savait qu'il s'agissait d'un indice sur quelque chose que cache un de ses voisins. Un incendie. Son joli casque était maintenant plus pesant.

Elles arrivèrent enfin à la maison numéro 14 et dès que la rouquine arriva dans la cuisine après avoir suivi Elisabeth, elle déposa son casque de pompier sur la table, question de s'en débarrasser. Ginny avait tellement envie de ne plus le tenir qu'elle n'avait pas fait attention à la question d'Elisabeth, mais de temps de lui dire qu'elle n'avait pas trop faim - comment avoir faim dans une situation pareille? -, la limonade et les cupcakes étaient déjà servis. Ginerva remercia son hôte et s'installa en face de la Spencer, ignorant comment aborder le sujet. Ce fut finalement Eli qui en parla et la rouquine sortit l'objet de sa poche, le déposant au centre de la table. Les mots ne voulaient pas sortir, mélange de crainte, d'appréhension et de curiosité. Étrange brochette d'émotions! Puis son amie parla de se débarrasser de cet objet. Si seulement c'était si simple! "On pourrait le brûler, comme ça on n'en entendrait plus parler! Mais si jamais on en a besoin..." Pourquoi avoir besoin d'un objet qui leur emmènerait autant la poisse? Moyen de pression contre cette vipère de DS? Les possibles bénéfices en vaudraient-ils la peine de le conserver? "On pourrait le cacher, sinon. Six pieds sous terre." Ça semblait gore dit comme ça, mais ce n'était pas un humain qu'elles allaient cacher. La rouquine prit une bouchée de cupcake qui semblait sans saveur dans sa bouche, mais ce n'était pas de la faute de la personne qui avait fait ce dessert. "Des idées de cachette?" Question stupide: la famille Spencer était propriétaire de la morgue, donc devait avoir accès au cimetière en tout temps. Ou pas.

Ginny venait de marquer un point, elles pourraient tout aussi bien brûler l'objet et ainsi faire comme si de rien n'était, mais impossible. Déjà parce que, ce genre d'objet on pouvait n'en avoir qu'une seule fois dans sa vie et ensuite, ce n'est pas parce qu'elles ne trouvaient pas l'utilité de l'objet là, que ça n'allait pas servir.

« Attends, reste ici j'ai une idée. »

Elle n'attendit même pas la réponse de la rouquine qu'elle sauta de sa chaise d'un bond, pour se diriger vers sa chambre. Elle venait d'avoir une idée qui n'allait certainement pas les faire sentir mieux, mais elle valait ce qu'elle valait.

Se dirigeant vers sa chambre, elle partie en direction de sa penderie et se mit à chercher activement quelque chose qui allait lui être utilise, jusqu'à ce qu'elle mette la main dessus. Il s'agissait en fait d'une boite à bijoux qu'elle avait reçu le jour de son anniversaire il y avait déjà quelques années mais dont elle ne s'était jamais servie. Elle y avait seulement rangé un collier qu'elle enleva avant de sortir pour se diriger de nouveau vers la cuisine.

Elle posa la boite sur la table de la cuisine à côté des cupcakes et des verres de limonade et l'ouvrit comme pour la présenter. Elle était assez grande et on pouvait largement contenir l'objet sans l'abîmer pour autant.

« Voilà. » dit-elle en passant une main sur la boîte pour enlever la poussière. « On va mettre l'objet dedans, et je sais pas, peut-être qu'on devrait l'enterrer, le cacher 6 pieds sous terre comme tu dis... »

Elle n'avait qu'une seule envie, c'était de s'en débarrasser et de ne plus jamais en entendre parler même si elle savait qu'elle ne pourrait pas se le sortir de la tête pendant un petit moment.

« Tu veux qu'on... qu'on le fasse maintenant ? »

Elle ne savait pas si elle devait vraiment poser cette question puisque de son côté, elle voulait y aller tout de suite, cependant, peut-être que son amie voulait regarder l'objet encore un peu, histoire qu'elle se creuse encore un peu la tête.

Pour l'instant, l'objet qui se trouvait entre leurs mains était désuet. Mais quand on se souvenait de l'endroit où il a été trouvé, de la possible personne qui l'aurait déposé là - d'ailleurs, était-ce un objet perdu ou laissé là consciemment? -, la situation prenait une toute autre tournure. Dirty Secret avait un pouvoir indéniable dans le quartier, elle pouvait faire taire n'importe qui, vous détruire, vous faire quitter le pays. Tuer? On ignorait encore l'identité de l'assassin d'Alicia King. Était-ce DS? Si oui, son pouvoir n'avait aucune limite. Et les deux jeunes filles étaient probablement déjà dans le collimateur de cette peste à cause de ce qui s'était passé à la vente aux enchères. Cet objet les mettait en danger, c'était indéniable. Mais il pourrait tout aussi bien être leur planche de salut. Pour autant qu'elles découvrent ce qu'il signifie exactement. Elisabeth quitta la cuisine quelques instants, puis revint avec une jolie boîte à bijoux. De la taille parfaite, on se demanderait presque s'il n'a pas été conçu pour cette utilité. Pour s'en assurer, la rouquine déposa tranquillement l'objet à l'intérieur de la boîte. C'était parfait. "Je ne vois aucune autre solution à part l'enterrer. Si on ne le fait pas, quelqu'un d'autre pourrait le trouver." Ginny était convaincue que plus de personnes connaissaient l'existence de cet objet, plus il y avait de risques que Dirty Secret soit informée. À éviter absolument. Si cette peste avait des yeux et des oreilles partout, ce n'était pas parce qu'elle était omnisciente; des traîtres se trouvaient partout dans leur quartier. Il fallait mieux mettre toutes leurs chances de leur côté.

Spencer demanda ensuite à Ginerva s'il fallait l'enterrer tout de suite ou attendre. La rouquine regarda la brunette et soupira. "Il est déjà gravé dans ma mémoire, donc si tu veux le regarder une dernière fois avant de l'enterrer, vas-y. Mais je suis prête à le faire maintenant." La pianiste tourna la boîte qui contenait l'objet vers sa complice pour qu'elle y jette un dernier coup d'oeil. Tous les détails de ce que contenait la boîte étaient gravés dans la tête de Wainwright, ça prendrait des années avant qu'elle ne ressente le besoin de revoir l'objet pour s'en souvenir. Si elle désirait le revoir un jour, ce qui était improbable. Ginny but la moitié de son verre de limonade et se leva - être immobile dans une situation aussi stressante était impossible pour la grande rousse. "Tu as une pelle?" S'il n'y en avait qu'une, Ginny pourrait utiliser son casque de pompier pour creuser, comme ça il aurait une utilité autre que lui faire penser à des actes immondes commis par un voisin.

Elle ne savait pas trop ce qu'elle voulait, elle avait d'un côté envie de garder leur trouvaille pour qu'elle puisse servir de preuve – dans quelle situation ? Elle n'en avait aucune idée – mais elle savait que le faire relèverait d'une expérience kamikaze. Mais après tout, se disait-elle, elles avaient déjà fait annulés la vente aux enchères où des indices étaient livrés et elles avaient en leur possession un objet qui semblait appartenir à la Queen Bitch. A ce niveau là, quel pourcentage de chance avaient-elles pour que leur secret respectif ne soit pas balancé dans le prochain article ?

« Je... non ça va aller... »

Malgré la curiosité et l'envie de provoquer Dirty Secret – comme si elle n'en avait pas fait assez – elle voulait se débarrasser de ce truc au plus vite pour ne plus jamais en entendreparler, même si cela allait être plus facile à dire qu'à faire.

« Je n'sais pas, je pense qu'on en a. »

Il lui aura fallut 22 ans et une catastrophe de la sorte pour que quelqu'un se demande si elle avait ou non une pelle.

Elle jeta un regard en direction de la boîte posé sur la table de la cuisine et rien que l'idée de savoir ce qu'elle contentait, elle en eut un frisson qui était plus que désagréable. Elle aurait aimé que ce soit un rêve mais dans leur cas, cela relèverait plus du cauchemar, mais quoi qu'il en soit, elle aurait aimé que ça ne soit pas réel.

« Bon, allons-y. Faut qu'on aille chercher des pelles au garage. »

La machine était lancée et même si elles le voulaient, elles ne pouvaient plus l'arrêter et encore moins essayer de faire machine arrière.

Prenant la boîte à bijoux dans les mains, elle ouvrit la marche avec la jeune pianiste sur les talons, jusqu'au garage, avec une boule au ventre comme elle n'en avait jamais eut auparavant.

Elisabeth ne voulait pas le regarder une dernière fois. Ginerva était bien d'accord avec son choix: il fallait s'en débarrasser au plus vite. Ginny ferma donc le boîtier, ne voulant y jeter un dernier coup d'oeil. L'aura de cet objet lui donnait des frissons dans le dos, heureusement elle n'aurait plus à le voir. Sauf dans ses pensées. C'était évident que même six pieds sous terre, cet objet la hantera durant quelques nuits encore. Voire plusieurs. Dirty Secret avait décidément ce don d'obséder la population, de les rendre fous. C'en était effrayant. Mais cette folie avait atteint la rouquine. La découverte de cet objet venait d'attiser la curiosité de la Wainwright quant à l'identité de Dirty Secret. Elle voulait la démasquer. Et elle espérait que ce qui se cachait à l'intérieur de la boîte l'aiderait dans ce but, même si elle doutait qu'Elisabeth la suive dans son plan. Tant pis, elle agirait seule. Et n'aurait pas besoin de revenir chercher cette boite; qu'elle aille au fond du trou et y reste! Sa mémoire lui serait suffisante.

Après l'hésitation de Spencer quant à la question existentielle - pelle ou pas pelle -, elles cessèrent de rester immobiles comme des poiriers et se dirigèrent vers le garage. Avant de partir, Ginny termina sa limonade, question de se donner du courage et faire diminuer le stress qui l'envahissait. Si quelqu'un les voyait, elles seraient foutues. Car dans le quartier, dès que quelqu'un sait, tout le monde sait. C'était comme ça. Elisabeth la mena donc au garage, boîte en main. La rouquine, elle, traînait le casque de pompier comme un boulet - et dans les faits, c'en était un, lui emmenant davantage de points négatifs que positifs. Elles arrivèrent finalement à destination, un garage normal que presque tous les voisins devaient avoir. Pourtant, elles allaient prendre une pelle. Creuser un trou. Y enterrer quelque chose d'important, voire de dangereux. Ce garage aurait dû être plus glauque, moins ordinaire. Mais il y avait des pelles. L'une semblait plus petite et plus usée, mais elles feront toutes deux l'affaire. Par habitude, Ginny prit la pelle la plus usée, mit son casque de pompier sur sa tête - où pouvait-elle le mettre à part à cet endroit? - et quitta le garage. L'air frais lui faisait du bien. "Une idée d'emplacement, Eli? Pas trop fréquenté, à l'abri des regards, où on pourrait passer inaperçues avec nos pelles..." Légère réflexion, puis: "Est-ce que tu sais où tes parents cachent les clés des portes du cimetière?" Le cimetière était l'endroit idéal pour y cacher des secrets. Entre des arbres morts entrelacés qui donnent l'impression de se bécoter aux endroits plus obscurs où sont situés les vieilles tombes, cet endroit pullulait de petits coins sombres et de repères pour s'y retrouver. Surtout qu'Elisabeth était une Spencer. Ginny lança un sourire complice à son amie; elle devait trouver ces clés et enterrer leur boîte là-bas.

Une fois qu'elles arrivèrent au garage, il ne leur fallut pas longtemps pour qu'elles mettent la main sur une pelle. Elles en prirent une chacune et la rouquine, enfila son casque de pompier qu'elle gardait sous le bras, comme si elle était  prête à être aux aguets de quelconque danger. En temps normal, ce genre de chose aurait dû faire rire la jeune Spencer, mais là, elle n'avait pas le cœur à rire, la situation étant loin d'être aussi banal que d'habitude.

Une fois ça de fait, elles devaient à présent trouver un endroit où enterrer la boîte, comme un dépotoir où personne n'irait fouiller, mais au lieu de ça, Ginny proposa le cimetière. Bon, la situation devenait de plus en plus étrange et inconfortable, mais là, elles n'avaient pas d'autre solution, ce n'était pas comme si elle pouvait se contenter d'enfermer à clé la boîte dans le tiroir et de laisser tout ça derrière.

« Ils le gardent à la morgue je crois, mais attends. »

Elle déposa la boîte sur le plan de travail qui se trouvait dans le garage et se contenta de lever le doigt en direction de son amie pour lui demander de rester là un instant. Elle s'était souvenue que sa mère avait rangé les clés dans une boîte – oui, encore une – qu'elle avait reçu quand elle était jeune et y rangeait des souvenirs que ses grands-parents lui avait donné.

Bref, elle n'avait pas le temps de se rappeler de tout ça. Elle monta les escaliers deux par deux, au risque de se tordre la cheville et de s'étaler, et arriva finalement saine et sauve à l'étage du haut pour finalement se retrouver dans la chambre de ses parents. Elle n'avait pas besoin de chercher pendant très longtemps, sachant pertinemment ce qu'elle cherchait. Elle partit en direction de l'armoire de ses parents et commença à foutre un peu le bordel dans les vêtements de sa mère, mais là encore, pas le temps de ranger. Qu'importe, au pire elle n'aura qu'à lui dire qu'elle cherchait seulement un vêtement et qu'elle rangera quand elle aura le temps.

Lorsqu'elle mit la main sur ce qu'elle cherchait, elle poussa un soupir de soulagement. Même si il n'y avait pas de quoi être soulagé, elles auraient pu être dans la merde si elles n'avaient pas la clé pour bien cacher l'objet.

De la même façon qu'elle était montée, elle descendit d'une vitesse impressionnante au garage et d'un simple geste de la main, elle se mit debout en face de Ginny, lui montrant qu'elle avait la clé et qu'elles allaient pouvoir commencé à passer aux choses sérieuses.

Aussitôt que Ginny posa la question des clés à Elisabeth, celle-ci partit en flèche vers la maison avant que la rouquine n'ait pu lui répliquer quoi que ce soit. Même si en même temps, elle n'avait rien à dire. Alors en attendant, Ginerva regarda un peu les environs, se rappelant la joyeuse époque où Carl, Jeremy et elle jouaient ensemble. La belle vie, où les secrets n'étaient pas si imposants et les objets à cacher, moins dangereux. Le trio avait d'ailleurs caché une boîte une fois, où ils avaient enfouis des trucs personnels, rien de bien méchant. Mais où? Ginny avait déjà oublié, ça faisait si longtemps...  Dire qu'aujourd'hui, elle était encore chez les Spencer, à enterrer une boîte avec un objet à l'intérieur. Si seulement c'était pareil. Après quelques minutes, Elisabeth rejoignit Ginny, essoufflée d'avoir été aussi rapide. La rouquine s'extasia sur la clé: qu'auraient-elles fait sans celle-ci? Elles l'auraient caché à un endroit plus évident, la cour arrière des Spencer par exemple. Le premier endroit où des petits curieux auraient commencé à chercher! Ginny poussa un soupir de soulagement et alla chercher la boîte que Spencer avait laissé sur le plan de travail du garage. "On passe par le petit chemin? Je te suis." Ginny ignorait si Elisabeth serait surprise de sa phrase, mais le fait est que la rouquine connaissait ce chemin. Carl lui avait montré, à l'époque où ils étaient amis. Il s'agissait d'un chemin de terre, passable seulement par des piétons, qui menait jusqu'au cimetière. Utile lorsqu'on possédait une morgue. Et c'était plus subtil que de passer par les rues, où tout le monde pourrait les voir avec leurs pelles, leur boîte et le casque de pompier. Ginerva suivit donc Eli dans le petit chemin jusqu'à ce qu'elles arrivent à destination.

Même en plein après-midi, le cimetière faisait peur. Et pour Wainwright, qui n'aimait pas la mort, c'était angoissant. Des pierres tombales qui se faisaient réchauffer par les rayons du soleil, c'était forcément louche, non? Soleil = joie, tombe = tristesse, ne pas mélanger les deux. Et cette fichue boîte qui semblait peser beaucoup plus qu'elle n'était supposée l'être; le poids du secret qu'elle traînait, peut-être. "Choisis un coin tranquille.", stipula la rousse. Pas question de rester là une éternité dans ce lieu qui faisait franchement froid dans le dos.

Elle ne savait pas pourquoi mais elle sentait qu’elle allait devoir ouvrir la route, et la phrase de la rouquine ne fit que confirmer sa pensée.

« Oui, bien sûr… »

Avant de faire un pas, elle prit une profonde respiration comme si elle s’apprêtait à faire quelque chose d’extraordinaire, alors qu’elle allait seulement faire le chemin depuis chez elle, jusque le cimetière.

Elles prirent le petit chemin qui se trouvait non loin de la maison numéro 14, chemin que la brune trouvait particulièrement long, et plus elle se rapprochait du cimetière, plus elle sentait une boule se former dans son ventre et des frissons lui parcourir le corps.

Pendant qu’elle marchait, elle ne cessait de se retourner, comme si elle voulait s’assurer que son amie était toujours derrière elle, pourtant elle n’avait pas à s’en faire pour ça, elles étaient là-dedans toutes les deux, Ginny ne risquait pas de s’enfuir.

Une fois dans le cimetière, ce fût encore une fois à Elisabeth qui devait choisir l’emplacement. Mais pourquoi elle ? Ginny ne pouvait pas le faire ? Etait-ce parce que la jeune brune est issue d’une famille ayant l’habitude de fréquenter ce lieu qu’elle est plus apte à choisir un emplacement ? Cliché !

Poussant un soupir pour seule réponse, la jeune femme commença à arpenter les petits chemins entre les tombes et essayant au maximum de ne pas regarder autour d’elle trop longtemps. Ce genre d’endroit lui mettait mal à l’aise, rien que le fait que quelqu’un de mort était juste à côté d’elle alors que elle, elle était vivante, c’était stupide mais suffisant pour donner à la jeune Spencer envie de prendre ses jambes à son cou.

« Viens, on va faire ça ici. »

Elle repéra un arbre sous lequel l’endroit semblait adéquat pour y cacher quelque chose, malheureusement pour Elisabeth, il était juste entre deux tombes, mais elle avait tout simplement envie d’en finir avec cette histoire en prenant le premier endroit qu’elle trouverait.
S’emparant d’une pelle, elle la planta dans la terre et avant de commencer  à creuser et se tourna vers la rouquine.

« Faisons-le vite, qu’on en finisse. »

Elle n’avait même pas encore commencé à creuser, qu’elle commençait à avoir la nausée, mais quand fallait y aller…

Plus vite on enterre, plus vite on quitte le cimetière. Ginerva se répéta cette phrase dans sa tête, tel un mantra, tentant de se persuader que tout ira bien et qu'elles finiront rapidement. Elle essayait aussi de penser à autre chose qu'à son environnement immédiat: non, la rouquine ne contournait pas une pierre tombale, elle contournait une grosse roche en forme de pierre tombale. Nuance. Et non, le chat à côté d'une des roches qui était en train de regarder les deux jeunes femmes n'était pas noir, il était simplement d'un gris très foncé. Mais malgré les pensées mélioratives de la Wainwright, elle savait bien qu'Elisabeth et elle se trouvaient dans un cimetière. La rouquine ignorait si Eli était aussi mal à l'aise dans cet endroit que Ginny - elle a dû se forger une carapace avec le temps, non? -, mais elle sentait que l'aînée des Spencer avait hâte de passer à autre chose. Car à peine Elisabeth avait trouvé l'endroit parfait qu'elle encouragea fortement la rouquine à se dépêcher.

Ginny n'attendit pas une seconde de plus pour aider sa comparse à creuser. Non, je ne suis pas en train de profaner une tombe, je creuse seulement à côté. Ginny pouvait penser ce qu'elle voulait pour la rassurer, si les policiers débarquaient, les deux jeunes femmes seraient emprisonnées. Et tout le monde saurait qu'elles étaient parties en douce enterrer un objet dans le cimetière. Peut-être même que les policiers auraient pris leur objet! Ginerva frissonna à cette simple pensée et redoubla d'efforts pour creuser rapidement. À deux, ça allait plus vite. Après avoir considéré que le trou était assez profond, la rouquine déposa l'objet au fond au trou. "Bon débarras!" Et en espérant qu'elles ne verraient plus jamais cet objet, Ginny commença à remplir le trou que les deux femmes venaient juste de creuser.

Au premier coup de pelle qu'elle donna, elle se sentait mal. L'endroit faisait qu'elle se sente mal, cette atmosphère glauque et macabre ne la réussissait pas et ne l'avait jamais réussit, à se demander comment fait encore pour travailler dans cette morgue. Elle regardait autour d'elle pour voir si il n'y avait personne qui les regardait, et se souvenait que la plupart des gens devaient encore être à cette brocante. Pourquoi est-ce que pour une fois au moins, il ne pouvait pas se passer quelque chose de normal dans cette ville ? Pourquoi est-ce que tout devait tourner autour de DS ? Pourquoi est-ce que  cette garce devait à tout prix essayer de gâcher la vie des gens ? Son but dans la vie c'est quoi à part faire chier le monde et faire en sorte qu'Eli et la rouquine se retrouvent dans un cimetière en train de creuser pour cacher un coffre ?

Elles creusaient toutes les deux sans dire un mot, comme si leur vie en dépendait si elles osaient ouvrir la bouche, ce qui n'était pas totalement faux. La boule au ventre et les mains tremblante, elle continuait sans rien dire.

Lorsque Ginny cassa le silence avec son « bon débarras », la jeune brune n'en dit rien, mais ne pensait pas moins. Elle était un peu soulagée de voir la boîte là, dans ce trou, mais elle avait toujours cette sensation que ça n'allait pas se régler aussi facilement.

«  Comme tu dis... » finit-elle finalement par dire avant de pelleter de nouveau pour boucher le trou.

Elle avait souvent fréquenté les cimetières, mais si on lui avait dit qu'elle ferait ce genre de chose au moins une fois dans sa vie, elle ne l'aurait pas cru. C'est dans ce genre de moment où elle aurait aimé habiter quelque part d'autre, avoir une autre vie, être une autre personne qu'Elisabeth Spencer, fille des parents qui tiennent une morgue, et surtout, fille qui creuse des trous dans les cimetières à côté des tombes pour enterrer quelque chose qui pourrait détruire sa vie.

«  Voilà, c'est fini. On peut s'en aller maintenant ? Je ne me sens pas très bien là... »

Elle n'attendit pas vraiment la réponse de son amie et commença à emboîter le pas, sachant que cette dernière la suivrait, de toute façon il ne semblait pas que la jeune rousse avait très envie de rester dans cet endroit.

Le fait d'avoir déposé le coffre au fond du trou n'avait pas enlevé la sensation de fardeau qui pesait sur la rouquine. Elle se disait que c'était parce qu'il n'était pas enterré, d'où son empressement de combler le trou de la terre qu'elles venaient de retourner. À voir la vitesse à laquelle les deux jeunes femmes remplissaient le trou, c'était évident qu'elles avaient toutes deux hâte d'en finir avec cette histoire. Inconsciemment, Ginny voulait que ses souvenirs de cette journée, de ce qu'elles tentaient de cacher, finissent avec la boîte, ensevelies pendant un bon moment. Malgré elle, la rouquine regarda les environs pendant qu'elle creusait, question de se mémoriser l'emplacement exact. Même si déterrer cette boîte était la dernière chose qu'elle voudrait faire de sa vie, elle préférait savoir à quel endroit il était bien caché. Au cas où une urgence arrivait et le besoin se faisait sentir d'utiliser l'objet à mauvais escient. Il était rare que Ginerva soit de mauvaise foi, mais dans cette ville où Dirty Secret régnait en maîtresse absolue, il ne fallait pas prendre de risques.

Voilà, leur 'trésor' était caché. Mais ça n'enleva pas le fardeau des épaules de Ginny, à son grand désarroi. Qu'allait-elle devoir faire pour que cesse cette impression? Brûler l'objet? Le redonner gentiment à DS? Le manger? Elisabeth proposa de quitter cet endroit, une excellente idée selon la rouquine. C'était peut-être l'ambiance macabre qui pesait lourd sur Ginerva. Elle suivit donc sans un mot l'aînée des Spencer, qui était déjà un peu en avance sur elle. La rouquine alla même un peu plus rapidement pour suivre de plus près Elisabeth, cet endroit lui donnait vraiment la chair de poule. Bientôt, le chemin de terre apparut et Ginny put respirer un peu plus normalement une fois que ses pieds quittèrent officiellement le terrain du cimetière. Une étape de franchie, plus que la maison des Spencer, pensa Ginny. Fort heureusement, ce n'était pas très long avant que la façade arrière de la maison résidentielle apparut devant leurs yeux. Cette simple vision rassura la rouquine. Soulagée d'arriver à destination, Ginerva poussa un soupir de soulagement. Elle alla remettre la pelle à sa place et se retrouva face à Elisabeth. Que faisaient-elles maintenant? Un câlin et tout redevenait comme avant? Impossible. "Bon... hum... inutile de dire que rien n'est arrivé aujourd'hui, non? On a pris des biscuits, discuté, regardé un film... Tranquille." Ginny ricana; comme si on pouvait qualifier cette journée de tranquille.

Elles arrivèrent à la maison numéro 14 plus rapidement qu'elles ne l'avait quitté avant d'aller au cimetière, et pour cause, elles voulaient toutes les deux tirer un trait sur cette mésaventure. Elisabeth avait bien comprit le prix à payer quand on vit dans une ville comme la sienne, où on épie tous vos moindres faits et gestes, il fallait donc assumer les conséquences jusqu'au bout et dans son cas, attendre que cette Dirty Secret lui tombe dessus et malheureusement pour elle, elle avait le pressentiment que ça n'allait pas tarder à arriver.

Elle reposa la pelle là où elle était avant qu'elles ne s'en emparent et resta là, près de la table du garage sans rien dire pendant un moment. Elle voulait seulement oublier tout ce qui venait de se passer, avancer, mais impossible, ce jour là allait être le genre de jour qui allait la hanter jusqu'à la fin de ses jours, c'était le genre d'aventure qui allait lui revenir en pleine tête la nuit, juste pour la faire cauchemarder. Pendant qu'elle marchait pour revenir chez elle, elle avait oublié de même oublier l'emplacement où elles avaient creuser, mais elle avait l'impression qu'elle aurait même pu dire le nombre de pas exact entre chez elle et l'emplacement. Peut-être l'avait-elle inconsciemment compter, au cas où il faudrait déterrer l'objet.

Elle secoua la tête pour sortir cette pensée de sa tête, pourquoi devrait-elle déterrer l'objet ? Pour le donner à quelqu'un qui l'utiliserait contre elle ? Hors de question, elles avaient prit la bonne décision de s'en débarrasser, de le cacher, du moins, essayer de le cacher. Il suffirait que quelqu'un s'aperçoive que le trou est anormalement creusé ou qu'on décide de creuser une tomber à cet emplacement précis pour qu'on découvre ce qui se cache dans la boîte.

«  Oui, je... comme tu dis, rien n'est arrivé et nous n'avons jamais quitté la maison. »

Elle avait les yeux baissés vers le sol, ne réalisant pas bien ce qu'elle venait de faire, mais pourtant elle devoir le faire, elle allait devoir passer à autre chose, et Ginny aussi.

«  Je pense que... je vais aller prendre une douche. »

Voilà, c'était ce dont elle avait besoin, d'une douche pour enlever toute cette crasse et essayer de laver son cerveau de ce souvenir affreux d'elle en train de creuser dans un cimetière. Elle s'avança de quelques pas en direction de son amie pour lui dire au revoir, mais se stoppa net dans son geste. Elle n'avait même pas le courage de le faire, elle se contenta donc de lui faire un sourire maladroit  et de se diriger sans dire un mot vers l'intérieure pour aller ouvrir la porte à la rouquine. Elle savait que ce qu'elle faisait était contraire à toute règle de courtoisie, mais vue ce qu'elle venait de vivre, elle venait de bafouer plus d'une règle.

Arrivée devant la porte d'entrée, elle l'ouvrit et sourit encore une fois à son amie avant de refermer la porte. Elle allait à présent pouvoir se détendre – du moins essayer – et rejoindre sa salle de bain qui n'attendait qu'elle.

FIN DU SUJET