Un sourire comme niais restait figé sur les lèvres de Carl depuis qu'il avait retrouvé Maxim. Il était tellement heureux, oui il se le répétait sans cesse, de pouvoir sortir avec un de ses meilleurs amis. Bien sûr, boire une bière avec lui en vrai c'était tellement mieux, même si légalement il n'en avait pas le droit..(a) C'est vrai qu'il faisait plus âgé que son âge et donc que les barman bizarrement ne faisaient pas gaffe et ne lui demandaient pas sa carte. Tant mieux remarque. Il s'amusa alors à taquiner Maxim, et son ami lui rendit la pareil. Leur amitié était tellement forte que chaque petite boutade en était suivie d'un autre, sans vexations ni disputes. Nombre étaient les fois où Carl avait sorti des remarques non appréciées par la personne, alors que ce n'étai qu'amical. Il était vrai que le Spencer avait la fâcheuse tendance à penser tout haut, ce qui lui valait parfois des remarques désagréables. Mais au moins, il était honnête.

Alors que justement Carl taquinait Maxim à propos d'une fille, celui-ci lui répondit que comme d'habitude et fidèle à lui-même, il n'existerait jamais qu'une seule fille dans sa vie. Carl émit un petit rire, content de voir que son ami n'avait définitivement pas changé. C'est sûr que si Carl voyait le Daniels en couple un jour, il n'en croirait pas ses yeux, et se pincerait, croyant à un rêve. Alors que lui avait déjà eu quelques relations sérieuses, Maxim n'en comptait aucune, préférant les coups d'un soir. Ces dernières plaisaient bien à Carl, mais se poser avec quelqu'un était tout aussi agréable, au fond.

Maxim reprit donc la conversation en annonçant qu'il avait vu une belle inconnue hier qu'il aimerait bien revoir. Le Spencer sourit. « Aaah, c'est bien ça ! Tu me la montreras si tu l'as vois, je pourrais te la présenter si je la connais.. » fit-il malicieusement à son ami qui se levait pour aller chercher d'autres bières. Carl se dit que ce devra être sa dernière, parce que trois bières dans le nez pour faire des devoirs, ce n'était pas la meilleure chose au monde. Il n'imaginait pas ce qu'il pourrait écrire.. Quoiqu'il tenait plutôt bien l'alcool, donc il espérait qu'il irait quand même bien. Le Daniel revint vite avec deux nouvelles bières à la main, taquinant Carl sur le fait qu'il avait dû s'inquiéter. La Spencer ouvrit grand la bouche, faussement choqué. « Genre, c'est même pas vrai ! » fit-il. Puis il fit la moue. « Bon, quand même un peu, j'avoue. Mais t'es con toi aussi, pas de nouvelles et tout, t'aurais pu être mort j'en aurais rien su t'sais. » Il fit semblant de bouder, chose qu'il adorait faire puisque ça mettait toujours les autres dans l'embarras. 'fin, ceux qui connaissaient Carl savaient que ce n'était que du pipeau, et Maxim le savait tout aussi bien.

Pendant que Maxim partit chercher les deux nouvelles boissons, Carl prit un air songeur, le menton appuyé sur son bras, le regard dans le vide en direction de l'extérieur. Tout lui paraissait trop irréel. Il avait encore l'impression d'avoir quatorze ans, et que Maxim ne soit pas parti. Pourtant, ils avaient tous les deux continués leurs vie séparément tout en gardant contact, mais le fait d'enfin se revoir au bout de six ans donnait une impression de rêve. Carl avait tellement rêvé de revoir Maxim un jour qu'il en avait presque envie de pleurer. Presque. Il aperçut alors à la fenêtre deux petits garçons qui couraient un cerf-volant à la main. Carl sourit. Ses pensées le renvoyèrent immédiatement à son enfance.

Magnolia Street, 2001.
Carl a huit ans. Il est habillé d'une salopette en jean et de snickers rouges. Un grand sourire aux lèvres, il laisse sa mère lui faire un bisou sur la joue avant de la laisser partir jouer dehors. « Fais attention Carlito. » Le petit garçon fait un grand sourire innocent. « Oui Maman ! » Arsinoë le regarde partir en courant avec un petit sourire. Son jeune fils est tellement plein de vie et mignon qu'elle ne peut rien lui refuser. Carl raffirme sa prise sur le cerf volant qu'il tient à la main, et court vers chez les Daniels. Tout poli, il se place devant la porte et se met sur la pointe des pieds pour appuyer sur la sonnette. Quelqu'un lui ouvre. « Bonjouur, j'peux voir Maxim s'il vous plaît ? » Oui, Carl était très poli (a). Son ami ne tarde pas apparaître et un grand sourire fend le visage du Spencer, tout excité. « Maxou, Maxouu ! Tu viens avec moi faire du cerf-volant ? » Le Daniels lui réponds avec entousiasme, lui demandant une seconde pour aller chercher son jouet. Puis les deux amis se posent sur la pelouse. Carl défait le nœud des ficelles du cerf-volant, tout en discutant avec Maxim, qui a apporté deux skates. « Donc, on fait la course ? Ya beaucoup de vent aujourd'hui, c'est trop cool ! Je vais te battre, tu vas voir ! » fit-il avec un sourire malicieux. Les deux garçons se lançaient toujours des petits défis ou faisaient la compétition mais c'était en toute amitié, bien sûr. Ils ne penseraient jamais à se faire du mal. Carl et Maxim, ammarés sur leurs skates, la ficelle du cerf-volant à la main, sont alors prêts au départ. Arrive alors une grande rafale de vent qui les fait démarrer au quart de tour en pleine rue. « Youhooo ! » lance le petit Carl, tout content. Le vent le tire, le pousse, l'emporte. Si bien qu'il perds vite Maxim de vue et se retourne pour voir où il est. Fatale erreur. Carl dévie de sa trajectoire et fonce dans un poteau. Un peu sonné, il voit Maxim se pencher sur lui pour lui demander comment il va, et c'est alors que Carl dans un grand éclat de son rire enfantin. Maxim ne peut s'emêcher de le suivre, et les voilà donc tous deux écroulés de rire. L'incident est alors vite oublié, ne laissant qu'une bosse pour souvenir.

Carl sourit tout seul à la pensée de ce souvenir. C'est fou ce qu'on peut être résistant quand on est gamin. Le nombre de fois où il avait fait le casse-cou avec Maxim.. Il n'avait que des bons souvenirs. Son ami arriva justement, armé de deux bières. Il fit une réfléxion taquine à Carl, qui répondit en faisant la moue. Maxim posa alors sa main sur la joue de Carl comme on fait à un enfant. « Mon pauvre petit chou, tu sais bien que je n’allais pas t’abandonner dans ce vilain monde rempli de sublimes créatures aux corps de rêves qui nous font vibrer tous les deux… » Carl éclata de rire. « Ahahah, t'es con ! » Habituellement il continuait le petit jeu de Maxim, mais là il n'avait pas pu retenir son rire. Faut dire qu'il manquait d'entraînement.. Son ami porta la bière à ses lèvres tout en s'écriant qu'il était de retour, et qu'il -qu'elles- allaient bien en profiter. « T'as intérêt ! » lui lança Carl en souriant.

Puis portant son regard à sa montre, le Spencer s'aperçut de l'heure. « Oh bordel, il est déjà si tard ! » Il fit une mine triste à Maxim. « J'ai une tonne de devoirs à finir pour demain, j'ai trop rien fait, j'suis dans la mierdaaa.. » Il finit vite son verre, tout en sortant son porte-feuille. « J'espère surtout que je vais écrire des trucs pas trop chelous, avec tout ce que j'ai bu.. » rigola-t-il. Carl enlaça Maxim, qui s'était levé. « Bon, mec, ça m'a trop fait plaisir de te voir en tout cas ! Désolé de partir aussi vite, mais qu'est-ce que tu veux, études de médecine.. ! D'façon on se revoit bientôt hein ? » fit-il, sachant bien que ce n'était pas une question mais une affirmation. Il laissa sur la table de quoi payer pour les boissons, puis quitta le bar après un dernier sourire et geste de la main à Maxim. Il revint chez lui, encore tout surprit de ce qui venait de se passer. Maxim était rentré.