J'en ai mare de ces disputes incessantes entre Lou et sa mère. Bien sur, elles se battent toujours à mon sujet, comme si j'étais LE problème dans leur relation mère/fille. Je trouve ça même blessant, de me sentir à ce point intrus dans cette famille. Des enfants de Johan, il n'y a que Jeremy qui me facilite la tâche. Ca suffit, je ne veux plus de ces disputes, il faut que je mette les points sur les "i", une bonne fois pour toute. Lou n'a pas à incendier sa mère de la sorte. Si elle a un problème, c'est avec moi qu'elle doit le régler... c'est tout.

La dispute avait eu lieu une heure plus tôt, nous allions passer à table. Johan avait demandé à Lou de venir l'aider à la cuisine. La jeune fille n'avait pas bronché. C'est une fois dans la cuisine qu'elle avait provoqué sa mère en lui demandant pourquoi je ne venais pas l'aider. Johan lui avait répondu qu'elle n'avait pas à discuter, que c'était comme ça, et qu'elle devait arrêter de s'en prendre injustement à moi. Lou l'ignore peut être, mais cette situation me met dans une position délicate. Peut être que si finalement, elle le fait certainement exprès. Si elle pense que je vais quitter la maison, elle se trompe.

J'étais énervé, vexé et déçu d'en arriver à un tel point. J'avais pourtant fait tout les efforts possibles pour leur faciliter la vie, ne pas trop m'imposer comme le patriarche de la famille. J'avais tout fait pour préserver la mémoire de leur père, et ne pas me comporter comme tel vis à vis d'eux. Je ne leur impose rien, juste le respect. Car ils ont une petite soeur, qui mérite de grandir dans une bonne ambiance à la maison.

Je montais rapidement les escaliers, pour atteindre la chambre où la jeune fille s'était réfugiée. Bien évidemment, elle avait pris soin de fermer sa porte à clef. Je frappais: "Lou... Lou, s'il te plait, laisse moi entrer. Il faut qu'on parle... Lou? Lou ouvre cette porte!"

L’ambiance au sein de la maison numéro 13 était toxique. Du moins quand tout le monde était présent. Ce soir-là, quand Johan avait demandé à Lou de venir l’aider à cuisiner, la jeune étudiante avait traîné des pieds. Elle n’aimait pas cuisiner, sauf si c’était Andrew qui lui demandait (a). Qui plus est, elle avait du boulot à faire, elle avait donc bien mieux à faire que de préparer le repas. Innocemment elle demanda à Johan pourquoi son cher et tendre Paul ne l’aidait pas. Au lieu de lui répondre simplement, sa mère imagina une nouvelle fois que Lou attaquait son nouveau mari. Pire, elle lui donnait des ordres comme si Lou était encore une petite fille. Elle ne pouvait pas résister, et dû lui qu’elle n’était pas d’accord. Evidemment, une discussion entre mère et fille, ça n’existait pas entre Lou et Johan, et après que le ton soit monté, Lou prit la fuite, et déclara qu’elle n’avait pas faim. Elle s’enferma dans sa chambre, mit son iPod en marche et continua de travailler préférant vraiment passer à autre chose.

Mais ce n’était pas sans compter le fait que Paul avait toujours un truc à dire. Il monta, et tambourina à la porte de Lou, qui dans un premier temps ne l’avait pas entendu à cause de ses écouteurs. Quand elle s’aperçut que quelqu’un martelait sa porte, elle se leva agacée. Impossible d’avoir la paix dans cette baraque ! Et ensuite, sa mère se demandait pourquoi elle était toujours fourrée dans la maison d’en face. La réponse était juste évidente ! « Ça va minute ! » répondit-elle en allant ouvrir la porte. Elle découvrit un Paul apparemment résolu à avoir une discussion avec elle. En ce qui concernait Lou, elle n’avait rien à lui dire de plus que ce qu’il savait déjà. Elle n’arrivait pas à l’accepter, c’était ainsi. Elle n’était pas une peste avec lui, elle lui disait simplement ses quatre vérités. « Un problème peut-être Paul ? » demanda-t-elle d’un ton froid. « J’ai du travail à faire. » sous entendu, si tu pouvais t’en aller tout seul comme un grand, je t’en serais très reconnaissante. Malheureusement elle se doutait bien qu’il n’allait pas être aussi facile de le convaincre de ne pas lui faire la morale. Elle sentait la leçon arriver. Il allait sûrement se mettre à son niveau pour la regarder dans les yeux – comme il faisait lorsqu’il grondait Anaïs – pour la sermonner, sur le fait qu’elle devait écouter sa mère parce qu’elle vivait sous son toit, et donc sous ses règles. Elle soupira. Elle ne serait jamais sa fille, et n’en avait rien à faire de tout ce qu’il pourrait bien lui dire.

Avoir une discussion avec Lou, voila quelque chose de difficile. Elle ne s'entend ni avec sa mère, ni avec sa petite soeur, bien encore moins avec moi. Elle et Mike ont formé cette petite résistance, et monter des plans contre moi semblent leur plaire. Soit, si seulement j'avais leur âge, je pourrais peut être comprendre. Au lieu de ça, j'avais désormais la lourde tâche de me comporter comme un homme responsable. Je n'allais pas entrer dans leur petit jeu débile. S'ils voulaient la guerre, et bien ils se battraient tous seuls.

Lou ouvrit la porte. Je découvrais enfin son visage, tinté d'agacement et de mépris. Elle me demanda si j'avais un problème, ajoutant par la suite qu'elle avait du travail à faire. Et bien je m'en moquais, pour une fois, c'était moi qui décidais de la durée de notre conversation. Je m'introduisis dans sa chambre, et refermais la porte derrière moi. "Oui, et le problème c'est ton comportement... Je ne te parles même pas de ton insolence envers ta mère, ce ne sont pas mes affaires, elle est assez grande pour savoir comment vous élever." Je m'avançais au centre de la pièce, lui tournant le dos. Je m'approchais de la fenêtre, puis m'adossais contre le rebord. Maintenant face à elle, je la regardais fixement. J'étais vraiment agacé de voir que même après temps de temps passé au sein de cette famille je n'arrivais toujours pas à me sentir apprécié et intégré. " C'est quoi votre problème à toi et Mike? Répond moi Lou! Je t'en prie, exprimez vous, toi et ton honnêteté! (...) Alors quoi, c'est ça l'exemple que vous voulez donner à Anais? Celui d'une famille désunie, où l'on ne peut pas passer UN jour sans conflit?"

Lou voulait à tout prix éviter une énième dispute, qui plus est si c’était Paul qui la demandait. Pourtant, il n’avait pas pu résister, il n’avait pas pu laisser couler et aider Johan à faire la cuisine. A la place, il venait emmerder Lou, oui emmerder. Il n’y avait pas d’autres mots, Lou ne le calculait même pas, elle se fichait de lui, alors pourquoi faisait-il exprès de venir la provoquer. Il entra de force dans la pièce et referma la porte. Ça va qu’il fasse comme chez lui, tranquille. Lou soupira, elle aussi en avait marre de ses disputes incessantes, c’est pourquoi elle préférait désormais tourner des talons. Cela faisait longtemps qu’elle ne cherchait plus la bagarre inutilement. Il se mit près de la fenêtre et posa de nouveau le regard sur Lou qui ne bougeait pas. Elle avait croisé ses bras et attendait à côté de la porte, prête à lui ouvrir à tout instant.

Il venait lui faire la morale. Elle ne pipa mot et le laissa parler alors que la colère commençait à bouillonner en elle. Insolence ? Rien n’à redire de l’éducation que sa mère leurs avaient donnée ? Il se foutait de la gueule du monde ou il cherchait vraiment à provoquer la Troisième Guerre Mondiale. Il lui demanda ensuite quel était son problème et Lou pouffa. Après lui avoir fait la morale il s’appuyait sur la pitié c’est-à-dire sur la petite Anaïs qui était injustement la victime de toutes ses histoires. Lou réfléchit un instant avant de donner une réponse, elle avait tendance à se laisser emporter dans ses émotions et voulait éviter de trop surchauffer, surtout si Paul était déterminé à avoir des explications. « Premièrement je t’interdis de remettre en cause l’éducation de notre mère. » fit-elle d’un ton froid et n’ayant toujours pas digéré sa première réplique. « Ensuite, tu sais très bien ce qu’est "notre problème". » fit-elle en mimant les guillemets étant donné qu’elle venait de le citer. « Le problème c’est que c’est famille, ce n’est plus notre famille. » c’était horrible de dire ça, Lou en avait conscience, mais elle n’arrivait pas à accepter la situation. Elle vivait dans le souvenir de sa famille, avant Paul, avant Anaïs. « De toute façon vous n’en avez plus pour longtemps à nous supporter, Mike et moi on va bientôt quitter la maison et vous l’aurez votre famille unie. » lança-t-elle totalement de mauvaise foi. Elle avait toujours imaginé comment seraient ses relations avec sa famille une fois qu’elle ne serait plus obligée de la supporter tous les jours ; c’était triste à avouer, mais ne pas les voir aussi souvent, la soulagerait d’une certaine manière.

"Moi je remets en cause l'éducation de votre mère? Non Lou, je remets en cause votre comportement à mon égard, et pas seulement. Votre mère ne s'amuse pas de cette situation, et bien évidemment, elle aurait voulu que ça se passe mieux. Vous ne faites rien pour que ça s'arrange, rien du tout." répondais-je à cette remarque je trouvais fortement déplacée. Elle me fit par du "problème", "notre problème". Cette famille n'est plus leur famille? Mais je rêve, qu'ai-je réellement fait pour que ce soit le cas? Ai-je prétendu remplacer leur père? Non! Ai-je été désagréable avec les enfants de Johan? Je ne crois pas non ! Me suis-je mêlé de leurs affaires? Non plus! "Laisse moi te dire quel est "LE problème Lou"... Cette famille est toujours VOTRE famille, votre mère se tue à la tâche pour qu'elle le reste. Non le problème, c'est que ni Mike ni toi n'êtes capables de faire l'effort d'accepter l'étranger, d'admettre le changement. Je ne vous ai rien demandé d'autre que d'avoir un minimum de respect pour ma personne, pour votre petite soeur, et surtout pour votre mère. Je sais ce que vous avez vécu, et je peux difficilement me mettre à votre place parce que je n'ai jamais perdu ma femme, et mes parents sont tous les deux encore en vie. Mais je peux comprendre que ce soit éprouvant, et je conçois totalement que vous ayez besoin de vous exprimer sur la chose. Je ne suis pas con! Mais alors quoi, quel est le problème? Vous lui en voulez de passer à autre chose? Vous lui en voulez parce qu'elle a décidé de se relever, et d'être heureuse?". Je savais qu'en abordant la mort de leur père, je m'aventurais sur une pente dangereuse, mais je n'avais plus le choix. Il fallait que Lou comprenne que je n'étais pas là pour être son ennemi, ni même son meilleur ami. J'étais là parce que sa mère avait choisi d'être avec moi, de vivre avec moi, et personne ne pouvait lui reprocher de vouloir reprendre sa vie en main. A en croire les nombreuses réflexions de Mike et Lou, j'avais surtout l'impression qu'il préfèreraient voir leur mère pleurer son défunt mari plutôt que de lui laisser vivre une nouvelle vie. D'accord, je pars peut-être dans les extrêmes. Si le problème vient de moi, je veux bien l'entendre. S'ils ne veulent pas m'aimer, tant pis pour moi. Mais j'attends juste un minimum de respect de leur part. Un bonjour, un merci, ça n'a jamais tué personne. Puis elle fini par dire que lorsqu'elle et Mike seront partis de la maison, la vie de famille sera meilleur. "C'est là que je relève tout ton égoïsme Lou... Oui pour toi c'est facile, partir c'est ta solution hein!? Mais ce n'est pas notre premier souhait, ni à ta mère, ni à moi. Ce serait tellement simple avec un peu de bonne volonté de donner à cette famille une once d'unité...". Je soupirais, en la regardant droit dans les yeux... Puis je me dirigeais vers la porte, autrement dit vers Lou, pour retourner à mes affaires. J'espérais juste que le message soit bien passé.

Lou écoutait patiemment Paul lui faire la morale. Enfin, patiemment peut-être pas. Elle tapait du pied, totalement sur les nerfs. Il avait réussi à gommer toute once de bonne humeur. Il se permettait de la disputer comme si elle avait eu six ans. Il confondait, Lou n’était pas Anaïs, par conséquent, il n’avait aucun droit sur elle. Ni même de lui reprocher quoi que ce soit. Comme il le disait si bien, il n’avait jamais eu la prétention de remplacer leur père. Plus il avançait dans sa tirade, plus Lou avait envie de lui dire d’aller se faire foutre. Clairement. Elle n’appréciait pas ce ton moraliste qu’il employait, comme si lui était un ange et que Mike et Lou étaient deux petits démons. C’était bien beau de tout rejeter sur les autres et de ne jamais se remettre en question, mais parfois il faut aussi aller chercher plus loin que le bout de son nez, en dépit de tous les bons sentiments que l’on peut avoir. Comme il le disait lui-même, Paul ne comprenait pas le traumatisme que cela faisait de perdre un parent. Et sincèrement, Lou ne lui souhaitait pas de vivre ça de sitôt. « Justement tu ne comprends rien, c’est ça le problème. C’est bien beau de venir ici et de me faire la morale comme à une petite fille, mais ça ne changera rien. Mon père sera toujours mort, et toi tu seras toujours là, à faire comme si on pouvait être une famille parfaite alors qu’on ne le sera jamais. » elle avait limite envie de pleurer, il lui parlait de son père, et cette blessure ne c’était jamais refermée, elle brûlait toujours en elle, toujours aussi vive. « Je lui en veux de s’être remariée trop vite, comme si Papa n’avait jamais été là. Et je t’en veux à toi, d’être ici, à la place de mon père, tous les jours, comme s’il n’avait jamais existé. » il avait gagné, elle pleurait. Lou était à la fois fragile, et dure. Fragile parce que sensible, et dure dans les mots qu’elle pouvait avoir. Parler de tout ça, ne faisait qu’accentuer toute la douleur qu’elle éprouvait, surtout face à Paul qui ne cherchait qu’à la culpabiliser, il n’essayait même pas de lui parler, comme à une adulte.

Si pour lui partir était une solution de facilité, il se trompait fortement. Lou avait toujours ambitionné de quitter ce quartier de vipère, mais il n’en restait pas moins le quartier qui l’avait vu grandir, où elle avait passé son enfance, son adolescence, les bons comme les mauvais moments de sa vie. Partir serait dur, à bien des égards. C’était néanmoins inévitable, elle ne se voyait pas rester là plus longtemps, au sein de cette famille qui n’était plus la sienne, et ce malgré tous les efforts de sa mère que Paul mettaient tant en avant. « Je te réponds sincèrement alors, je n’en ai pas cette bonne volonté. Quoi que tu pourras me dire, ça ne changera pas Paul. Arrête de venir me faire la morale, et occupe toi de ta femme et de ta fille. Quant à moi je suis assez grande pour savoir ce que je dois faire. » lui lança-t-elle en essuyant une larme qui perlait au coin de son œil. Elle ne savait même pas pourquoi elle pleurait, dans le fond elle était plus énervée que triste, mais la rage en elle ne demandait qu’à être exprimée. « Je ne t’ai jamais rien demandé Paul, alors laisse moi tranquille. »

"Je ne suis pas entrain de te faire la morale comme à une petite fille Lou. Je te parle d'adulte à adulte. Et excuse moi de penser qu'à ce moment là tu ne te comportes pas en tant que telle.". C'était vrai, si Lou se comportait comme une adulte, elle pourrait dépenser plus d'énergie à discuter calmement, plutôt qu'à passer son temps à vouloir mettre le feu au poudre. Je serais désormais intransigeant, il est clair que je ne veux plus vivre tous ces conflits permanents. "Et je n'attend pas à ce qu'on soit une famille parfaite Lou... j'espère juste que l'on puisse vivre... normalement, et que chacun puisse bénéficier du respect de tous."

Lou en veut à Johan de s'être remariée trop vite, comme si elle oubliait le père de ses enfants. Je pouvais comprendre ce que ressentait la jeune Lou, la mort de son père avait été difficile à vivre, et je concevais totalement qu'elle ne veuille pas m'accorder une place au sein de cette famille. Il faudrait du temps, du courage pour passer outre cela, accepter le changement. Je n'étais pas responsable de la mort de son père, je n'avais pas non plus obligé leur mère à m'aimer, à me prendre pour mari. Lou m'avouait qu'elle m'en voulait de prendre la place de son père, sous ce toit, comme si il n'avait jamais existé. Puis elle se mit à pleurer. Je m'en voulais dans un sens, j'avais probablement été un peu trop sévère avec elle. Dans un autre sens, je savais que cette discussion était nécessaire pour espérer voir cette famille avancer, et nos relations évoluer dans le bon sens. Après m'être encore agacé sur cette histoire de quitter la maison pour que la famille se porte mieux, je m'étais approché de la porte. Lou était dure dans ses mots. Elle ne voulait pas faire d'effort, elle ne voulait pas se remettre en question et me donner au moins une chance. Tant pis pour elle, tant pis pour moi. Sauf que j'avais bien décidé cette fois ci de ne pas me laisser faire. Depuis le début, j'étais un peu le souffre douleur de cette famille, et je n'osais jamais rien dire, pour ne blesser personne et surtout pas Johan. Je voulais lui montrer que j'avais les épaules assez solides pour encaisser. Je voulais lui montrer que peut importe ce qu'il se passerait, je saurais être aussi fort et que je ne la laisserais pas tomber. Je n'imaginais simplement pas à quel point il serait difficile de se faire accepter au sein d'une famille... Oui, j'étais un peu comme le vilain petit canard! Fatigué, je lui répondais calmement:

"Très intelligent de ta part Lou! Quelle preuve de maturité au passage ! Ecoute, je sais que la disparition de votre père est difficile, je sais qu'on ne peut rien effacer, et je ne cherche pas à remplacer ton père... Tu n'as pas besoin de mon aide, tu n'as pas besoin que je te rassure, au final pour toi je ne suis pas moins que l'intrus qui s'est installé sous ton toit... je le sais, je l'accepte. Maintenant, c'est à toi de décidé si tu veux faire de moi ton ennemi, ou quelqu'un que tu peux apprendre à connaitre et à apprécier. De mon côté, je ne tolèrerais plus de tels comportements. Je ne ménagerais ni Mike, ni toi. Au même titre que ton père, je suis un être humain, jusqu'à preuve du contraire. La balle est dans votre camp, mais je ne me tairais plus."

Lou ne put réprimer un rire quand Paul lui affirma ne pas la traiter comme une enfant. Si elle pouvait faire preuve de mauvaise foi, lui aussi. Il ne s’adressait pas à elle comme il aurait pu s’adresser à un de ses employés au magasin. Il essayait simplement de la culpabiliser, de lui faire des reproches. Il ne tentait pas de comprendre ses raisons, il lui dictait sa façon de voir les choses, et Lou devait s’y plier. Il pouvait toujours se brosser. Lou, par fierté surtout, ne prendrait jamais en compte tous les bons conseils de vie que Paul pouvait lui prodiguer. Elle ne lui répondit même pas, signe qu’elle était totalement indifférente à tous ses reproches. La leçon de morale continuait. Il lui parlait maintenant de respect. Mon dieu. Lou était en train de bouillir. Elle était comme un volcan qui allait entrer en éruption. Elle aurait bien aimé savoir quand elle lui avait manqué de respect. Jamais elle ne l’avait insulté, jamais elle n’avait agi avec lui en peste. Il était en train de confondre ou bien n’y connaissait rien en matière de respect. Elle soupira et leva les yeux au ciel, ce qu’il lui demandait là était une utopie.

Doucement, les larmes étaient montées. Elle avait envie de les lui cacher, de ne pas montrer qu’elle pouvait être touchée à cause de cette situation. Elle pouvait toujours prendre un livre et se cacher derrière en attendant qu’elle se calme. Ou elle pouvait tout simplement ordonner à Paul de quitter sa chambre car elle n’avait plus rien à lui dire. Oui, c’était sans doute plus raisonnable. Paul semblait fatigué, mais il décida de reprendre une nouvelle fois la parole et l’écouta, attentivement, et lui répondit du tac au tac. « Je crois que j’ai déjà fait mon choix Paul, et que c’est ce que tu me reproches aujourd’hui. » fit-elle sur le même ton froid. Non, elle n’avait pas envie d’apprendre à la connaître, non elle n’avait pas envie d’organiser des déjeuners sur l’herbe avec toute sa petite famille parfaite pour montrer aux voisins comment tout ce passe bien au sein de la maison numéro treize. « Si ma mère et Jérémy sont heureux de cette situation, grand bien leur fasse. Je ne vois pas pourquoi je devrais être hypocrite et faire semblant que ça me convient à moi aussi. » ses joues étaient mouillées, à cause des quelques larmes qui avaient coulées, mais elles s’étaient arrêtées, heureusement. « Tu peux agir comme tu veux avec moi, je m’en fiche. En tout honnêteté, ce que tu peux me dire je n’en ai rien à faire. » elle le fixait sans ciller, Lou était sincère. Dure, mais sincère. Paul était un intrus comme il l’avait dit lui-même. Depuis le temps Lou s’était simplement habitué à sa présence par force des choses. « Si tu as envie de me reprocher tous les dysfonctionnements de cette famille, vas-y. Je t’écoute même avec grand plaisir. » ajouta-t-elle par pure provocation.

Les réponses de Lou s'enchainaient, entre les larmes et sa colère. Et ses mots faisaient mal, très mal. Je m'étais habitué à ne recevoir aucun signe d'affection de sa part, mais l'entendre me dire ouvertement ce qu'elle pensait de moi, de cette famille m'arrachait le coeur. Comment pouvait-elle être aussi médisante? Comment pouvait-elle faire du mal à quelqu'un qui n'a jamais cherché à lui en faire? J'étais abasourdi par ses propos et son attitude. Au moins, ça avait le mérité d'être clair. Pour être franche, elle l'était. Je la dévisageais, n'ayant plus qu'une envie, attraper la première bricole qui se trouvait sous ma main pour la jeter contre un mur. J'étais vraiment déçu, énervé mais surtout triste.

Je savais qu'il serait difficile de me faire une place au sein de cette famille, surtout auprès des enfants. Mais je n'imaginais pas que la tâche serait aussi difficile. Je me demandais si c'était une bonne idée que de venir habiter sous ce toit. J'étais prêt à encaisser beaucoup de chose, mais ça, c'était la goutte d'eau qui faisait déborder le vase.

Elle continuait à me répondre, à employer ce ton sec et fracassant. D'apparence, je restais solide, mais à l'intérieur, je fondais comme la cire chaude d'une bougie. Elle avait fini par me clouer le bec, et je comprenais que tout était peine perdu. Alors je n'avais plus d'efforts à faire non plus. Game over. Elle ne méritait pas mon attention, et tant mieux, car elle n'en veut pas de toutes façons. Mais je suis le mari de sa mère, et qu'elle le veuille ou pas, elle devra apprendre à vivre avec... ou elle pourra prendre ses affaires et partir, comme elle le souhaite tant. Je m'en fiche.

Quand Lou se redressa légèrement, et me dit qu'elle était prête à écouter tous les nombreux reproches que j'avais à lui faire, je la regardais fixement, et secoua la tête. Je fini par lui souffler: "Tu es juste.... complètement... différente de cette fille dont ta mère me parlait lorsque l'on sait rencontré Lou. Nous en avons fini.". Je décrochais mon regard du sien, puis sortit de la chambre de la jeune fille, refermant la porte doucement. Je m'arrêtais un instant dans le couloir, soupirais une nouvelle fois, puis me dirigeais vers les escaliers pour rejoindre le séjour...