Carl flânait dans les couloirs de l'hôpital. La deuxième année de médecine était éreintante, avec tous ces stages et demandes à faire de partout, Carl ne s'en sortait pas. Finalement, il avait réussi à dégoter un stage auprès d'un docteur dans l'hôpital de Magnolia, et ça l'arrangeait, vu que c'était à deux pas de chez lui. Il avait décidé ce matin de passer y faire un tour, voir de plus près comment fonctionnait un hôpital, et essayer de trouver cette personne à qui il avait été attribué. Docteur.. Richardson ? Il ne savait plus trop bien, mais cela devait être ça. Bref, il déambulait dans les couloirs, les mains dans les poches, après avoir volé un expresso qui traînait sur une table de l'entrée de la garderie. Carl était resté un moment devant, regardant avec un sourire les petites choses qui rampaient par terre en criant. C'était con les bébés. Mais c'était drôle. Alors il était resté là à les regarder, surtout celui avec les cheveux en bataille, le blond aux yeux bleus. Il était choupinet mais ça alors, il avait l'air d'avoir bouffé le grand schtroumpf tellement il était rouge. Bref.

Après avoir traversé plusieurs couloirs, Carl remarqua une femme plutôt attirante.  Et il se souvint alors de sa liste de bizu à accomplir, celle que les autres te donnent à faire, et si tu fais tout, tu gagnes un titre, variant en fonction de ta liste. Donc séduire un médecin ? L'occasion se présentait, et il ne reculerait pas. Et même si elle était plus âgée que lui, peu importait, Carl Spencer aimait le risque. Il réfléchit alors aux moyens pour l'aborder, et en observant une petite fille qui toussait à côté de lui, il eut une idée. Sortant ses mains de ses poches, il les posa sur son t-shirt afin d'enlever les plis, qui ne faisaient pas très soigné. Remarquant qu'elle avait un cabinet, après l'avoir suivie, Carlos s'assit dans la salle d'attente. Il ne savait pas encore quelle maladie s'inventer, mais il était assez au courant des pathologies pour pouvoir mener la femme en bateau pendant un certain temps.

Ce fut enfin son tour, et il entra dans la salle, en feignant une grimace de douleur, en souriant tout de même à la femme, avec un regard pétillant. Elle lui demanda ce qui l'amenait. Carl gémit en portant une main à son ventre.

- Je sais pas trop.. Hier j'ai commencé à avoir des maux de ventre, et ça ne passe pas.. J'ai l'impression que c'est grave.. Vous ne voudriez pas m'ausculter, histoire de jeter un coup d'oeil ? Je sens un gonflement vers le bas, c'est vraiment bizarre .. répondit Carl, avec un air de chien battu, comme ignorant de tout ce qui était médecine. Mais au contraire, il savait ce qu'elle allait faire, ce qu'elle allait dire et diagnostiquer, mais le Spencer avait un train d'avance. Toujours.

« Oui c'est vraiment bizarre.. et ça me coupe l'appétit.. dit Carl avec une mine attristée. La docteur lui demanda alors de retirer son t-shirt. Il sourit.
-  Pas de problème.. » répondit-il avec un air mielleux mais qui pouvait passer pour un ton gémissant de douleur et d'angoisse.  Il enleva alors son t-shirt pendant qu'elle lui demandait s'il avait déjà fait de l'asthme.
« Oh non, je pense pas. Enfin.. peut-être quand j'étais petit, je ne sais pas, je parle pas trop à mes parents de tout ça.. mentit-il. Bien sûr, il savait qu'il n'avait jamais fait d'asthme, mais trouvait ça super drôle de s'inventer une vie tout comme il s'inventait une maladie. Chacun ses formes d'humour, hein.

Rachel palpa le ventre de Carl, bien dessiné par des abdos saillants qu'elle ne put manquer, et elle lui demanda s'il avait mal. L'étudiant secoua d'abord la tête puis alors qu'elle descendait vers l'aine, il retint son souffle. « Aie aie aie, là ça fait mal ! » S'écria-t-il, comme en panique. Il vit le médecin froncer les sourcils, et il devina qu'il avait réussit à la troubler. Bingo ! C'est alors qu'elle lui demanda si les gonflements ressemblaient plutôt à une boule ou à une prise de poids. Le Spencer allait répondre, outré, que lui, Carl Spencer, prendre du poids ? La grosse blague ! Cela n'était jamais arrivé et n'arriverait jamais, ou tout du moins il l'espérait. Mais quelque chose l'en empêcha. Dr. Richardson s'était penchée au-dessus et lui et avait posé ses yeux dans les siens, et Carl retint son souffle, attiré par ce parfum qui embaumait tout à coup la pièce, et ce pendentif qui semblait être un chemin direct entre sa poitrine. L'étudiant se perdit un moment, les yeux dans le vague, comme ensorcelé par cette femme. Mais elle le sortit de sa rêverie rapidement. « Euh.. une boule ou du poids ? Euh..  bégaya-t-il, hésitant. Je ne sais pas, c'était plutôt comme une boule oui, une grosse boule. » Il se racla la gorge et reprit ses esprits. Et bien, Carlos qui perd ses moyens ! C'était une première..

« Vous avez une idée de ce que cela peut-être ? Je dois vous avouer que je suis un peu angoissé, j'ai peur que ce soit une tumeur, ou une autre chose au nom compliqué que l'on voit à la télé.. » feigna-t-il avec un air naïf. Puis il lui sourit, montrant son côté de garçon gentil. La blague.

Les mains fraîches du docteur s'enlevèrent de son ventre et Carl relâcha ses abdos, contractés sous l'effet du froid. Une hernie ? Une proctosigmoïdite ulcéreuse ? Intérieurement, le Spencer vit bien qu'elle savait ce qu'elle faisait, et en fut épaté. En effet, il avait vu cette maladie en TP et c'était bien les symptômes qui la provoquait. Décidément, elle était belle et intelligente, Carl n'aurait pas refusé de bosser pour elle. Elle demanda ensuite si il fumait.

- Moi ? Fumer ? Ah non non, jamais. Vous savez comment ça détruit les poumons ces choses-là ? Mentit-il.

Heureusement, il n'avait pas pris sa clope du matin, où cela se serait senti sur ses vêtements, trahissant tout de suite son mensonge. La Richardson enleva alors ses gants et les jeta, et Carl vit que le rendez-vous allait bientôt s'achever. Il réfléchit alors pour une autre solution, pendant qu'elle lui disait qu'elle allait tout faire pour trouver ce qu'il avait, en lui faisait passer des tests. Il fit un sourire triste de remerciement, avant se se tordre les mains, feignant d'être gêné.

- D'accord..merci. Et euh, pendant qu'on est là.. J'ai eu... enfin.. j'ai .. depuis quelques temps des rougeurs sur.. Et il chuchota, comme un enfant qui a peur de dire le mot, les fesses.. j'ai mis de la crème, mais ça ne passe pas.. c'est en forme de cercle, c'est assez bizarre.. J'en ai pas parlé à mes parents, j'ai peur que ce soit une maladie, vous savez ..

Et Carl fit une grimace avec ses lèvres, comme s'il avait peut que ce soit la peste ou un truc tabou. Il prenait énormément de plaisir à jouer l'enfant innocent, et manquait de rire toutes les trente secondes. Il savait que ce qu'il faisait n'était pas très cool, mais profiter d'une morsure d'insecte sur les fesses pour prétexter une mycose, c'était génial. Tout simplement génial.

Carl ne mesurait pas vraiment les conséquences de ses actes. Pour lui, c'était marrant, il s'amusait bien, de faire tourner en rond un médecin, comme ça. Mais si jamais elle lui faisait faire plein de tests, pour rien et qu'elle se faisait licenciée, pour x raison ? Ce serait quand même un peu abusé. Il espérait quand même qu'elle ne lui en voudrait pas, si jamais elle le découvrait. En attendant, Carl testait ce médecin, et la trouvait compétente, voir très compétente. Un peu plus, et il l'admirerait vraiment. Elle était douce, compréhensive, intéressée par le patient.. Tout ce qui faisait un bon médecin. Et Carl s'en voulut un peu de la faire marcher. Mais maintenant que le cyclone était en route, il n'y avait pas moyen de l'arrêter.

Après que Carl eut évoqué son problème de démangeaison aux fesses, le Dr. Richardson lui demanda de se tourner pour lui montrer. Carl retint une phrase salace et se contenta d'un hochement de tête. Heureusement il n'eut pas à baisser son pantalon trop bas, la morsure pseudo-mycose étrange se situant plutôt vers le haut. Il l'indiqua d'ailleurs avec un petit geste de la main. « Voilà c'est là, à côté du tatouage. »

Elle analysa rapidement les rougeurs et demanda à Carl depuis quand cela le grattait. « Oh je sais pas vraiment, ça varie d'un jour à l'autre. C'est souvent le lundi matin, ouais. » Carl avait une envie folle de rire. Il racontait tellement n'importe quoi sous ses airs de petit garçon inquiet qu'il aurait pu faire gober à n'importe qui que les éléphants volaient.  Mais il se retenait, et gardait son air pur et innocent.

« Du camping ? Oh oui j'adore ça ! J'y vais souvent avec mon meilleur ami, les dimanches. » répondit-il, en l'ajoutant à sa liste des mensonges de la journée. Si Carl avait été Pinocchio, son nez aurait à présent fait le tour de la planète.

Carl eut peur d'être allé trop loin. Le lundi matin, sérieusement ? Il savait très bien que ce n'était pas du tout crédible. Il s'était laissé allé dans son imaginaire un peu trop fantasque. Parfois il se demandait si son allaitement n'avait pas été fait avec de la vodka, hm. Maman Spencer, vilaine.  Dr. Richardson parut en avoir marre, comme elle soupirait en déclarant que ce n'était qu'une piqûre d'insecte.

« Oh ça me rassure ce que vous me dites-là ! Merci docteur ! » s'exclama Carl en remontant son pantalon (sensuellement sisi)

Cependant, elle n'avait pas l'air d'avoir remarque le manège de Carl. Et bien, était-il si bon menteur que ça ? Il s'étonnait lui-même. Peut-être qu'elle était simplement de voir tous ces patients lui prendre de son temps pour des broutilles alors qu'à côté, des gens vraiment malades attendaient. Carl n'avait pas du tout pensé à cela. Et en tant que futur médecin, il aurait dû. Mais il voulait faire cela depuis tellement longtemps ! Mettre en oeuvre son pouvoir de mentir, et voir par la même occasion si le médecin était vraiment bon. Dans le cas présent, il voyait que Rachel savait ce qu'elle faisait et qu'elle n'était pas l'un de ces médecine qui avaient acheté leur diplôme.

Carl fit un sourire et la remercia encore une fois pour l'ordonnance et sa gentilesse. « Pareillement ! » répondit Carl. Et oui, des fois le Spencer savait être poli.

Il sortit donc de la salle d'examen et fourra ses mains dans ses poches après avoir plié l'ordonnance en quatre dans sa poche arrière. Il allait sûrement l'oublier et elle resterait indéfiniment dans sa poche jusqu'à ce que sa mère le découvre dans la machine à laver, un jour. Arrivé dehors, Carl s'alluma une cigarette et serra ses poings dans ses poches peu après. C'est qu'il commençait à faire froid dans ce pays. Ceci dit, il n'accéléra pas le pas pour autant, profitant de sa clope tout en souriant, content d'avoir trouvé une bonne occupation pour son après-midi. A présent il pouvait retourner travailler sur ses chromosomes. Ou faire un tour chez Elias, tiens.