S'il y avait bien une chose qu'Esperanza détestait c'était rester toute une journée sans rien faire. Il fallait avouer qu'une petite journée de farniente de temps en temps c'était très agréable mais elle avait bien du mal à tenir en place. Aujourd'hui était une de ses journées où tout ce qui était à faire avait déjà été fait et où le temps gris et froid tuait tout projet proche de la nature. Il n'était pas 14h que déjà elle tournait en rond. Le fait de travailler en décalé avait ses avantages et ses inconvénients. L'un de ceux-là était qu'elle se retrouvait souvent seule à la maison. Ce qui était à la fois une bonne et une mauvaise chose. En tous cas aujourd'hui ça ne faisait que rajouter à ce sentiment de solitude.

Elle ne savait donc pas quoi faire de sa journée libre. Il y avait bien ce vernissage où elles avaient été invitées, sa soeur et elle, au nom de leur entreprise de "traiteur chic", mais elle n'avait en réalité aucune envie d'y aller. Elle adorait l'art, là n'était pas le problème, mais ce genre d'endroit n'était pas pour elle. Elle venait de quartiers modestes et même si depuis qu'elle vivait à Magnolia elle avait commencé à s'habituer aux normes en vigueur dans ce genre de quartier elle n'était pas forcément à l'aise dès qu'il y avait trop de fast ou de mondanités. Elle savait qu'un énervement comme un vernissage attirerait la crème de Magnolia et qu'elle se retrouverait à coup sûr au milieu de bourgeois hautains, méprisants et méprisables.

Elle n'avait donc pas envie d'y aller, mais après avoir fait les cent pas dans chacune des pièces de la maison elle se dit que ce serait peut-être mieux de se retrouver au milieu de cette bande de réacs que de continuer à user le plancher comme elle le faisait. Elle fini par prendre ses affaires et sortir de chez elle. Elle s'était habillée de façon à ne pas dénoter, elle avait appris avec le temps à jouer pour dissimuler son statut social souvent moins élevé. Heureusement sa classe naturelle aidait bien. Elle ne s'était jamais laissé aller sous prétexte qu'elle n'avait pas forcément d'argent.

Esperanza franchit donc le seuil de l'exposition, la tête haute et la motivation à zéro. Après avoir passé au crible les premières œuvres de l exposition elle en avait déjà marre. C’était un art un peu trop moderne pour elle, des trucs totalement incompréhensibles, des œuvres qui auraient pu être réalisées par des enfants sans que personne ne s’en rende compte. Elle n’aurait pas dû s’habiller pour l’occasion car elle avait eu la mauvaise idée de sortir ses nouvelles chaussures et que celles-ci lui faisaient déjà mal. Elle partie s’asseoir sur une chaise, à côté d’une petite brune (T'es brune ? lol) qu’elle avait déjà vu quelque part, mais sans même s’en rendre compte. Elle replaça sa chaussure en râlant. « Bon sang, quelle expo maudite !! » marmonna-t-elle dans sa barbe, mécontente au possible de sa journée.