Savannah poussa un soupir de soulagement quand elle franchit enfin la porte de chez elle. Sa journée au travail avait plutôt été mouvementée, comme les précédentes, Charly avait bien fait trinquer les filles pendant les derniers jours des soldes, il avait fallu enlever les vieux modèles et réassortir les nouvelles collections en quatrième vitesse dans les rayons, si bien qu’après ces rudes journées, sa ‘gentille’ patronne avait finalement laissé la jolie blonde rentrer plus tôt chez elle aujourd’hui. Savannah n’en était pas mécontente, bien au contraire, car elle comptait profiter de la tranquillité qui régnait dans la maison, vide à cette heure-ci, pour s’occuper. Elle déposa les sacs qu’elle portait à l’entrée. En effet, grâce à son travail, la jeune femme revenait parfois les bras chargés de belles surprises pour ses proches, pas qu’elle était très ‘famille’, mais ça ne lui coûtait absolument rien de leur en faire profiter. Savannah enleva ensuite sa veste et se dirigea vers la cuisine. Elle se servit un verre de jus d’orange pour se requinquer et remarqua la note de sa mère qui avait préparé le dîner et l’avait ensuite laissé dans le frigo ;  et heureusement, parce que la jolie blonde n’était pas la pire cuisinière du quartier, au point d’empoisonner toute sa petite famille, mais elle était loin de prendre la relève de sa mère et d’être le cordon bleu de la maison. Disons que Savannah préférait limite sauter un repas que de se mettre derrière les fourneaux. La jeune femme termina son verre et monta alors dans sa chambre. Elle alluma la radio et ouvrit ensuite en grand sa garde-robe, son armoire était pleine à craquer de vêtements, plusieurs qu’elle n’avait jamais mis, d’autres qui étaient trop usés ou qui n’allaient plus. Il était grand temps de faire un tri dans toutes ses affaires. Savannah observa quelques instants les différents vêtements avant de décrocher un premier cintre de la penderie et d’en détacher une robe qu’elle ne mettrait plus et qu’elle posa sur le lit. Elle continua cet « inventaire » durant quelques minutes, les vêtements s’accumulaient sur la couverture, lorsqu’elle entendit un coup sur la porte de sa chambre et la voix de Sean qui l’appelait. À cause de la musique, Savannah ne l’avait pas entendu rentrer. Fort heureusement, il ne s’agissait pas d’un inconnu qui s’était introduit dans la maison. Un peu insouciante, la jeune femme n’avait pas pris garde à fermer la porte, ce n’était pas le genre de chose dont elle se souciait. « Oui, vas-y, entre. » Dit-elle en baissant le volume de la radio au minimum. Sean ne se fit pas prier deux fois pour ouvrir la porte. Savannah leva les yeux vers son frère qui, ça ne la surprenait guère, était déjà une bière à la main. « T’es rentré tôt aujourd’hui. » Constata-t-elle simplement, en souriant. Elle était plutôt de bonne humeur aujourd’hui, autant en profiter, car ce n’était pas le cas tous les jours. « Je fais un ménage de printemps. Il me faut de la place, je ne sais plus rien ranger. À moins que tu ne me laisses investir tes armoires… » Ajouta-t-elle pour le charrier. Ce serait peut-être LA solution. Sean prenait soin de lui, et passait parfois même plus de temps qu’elle dans la salle de bains, mais la palme d’or de la quantité de vêtements revenait à Savannah, les penderies de ses frères étaient moins remplies. Toutefois, la jolie blonde le disait sur le ton de la plaisanterie, elle savait très bien que sa chambre à lui, tout comme la sienne, était leur endroit hors-limite. « D’ailleurs, en parlant de ranger, je vous ai ramené à tous des nouvelles paires, derniers modèles du mois, elles sont dans l’entrée, si tu veux jeter un œil tout à l’heure, voir s’il y en a qui te plaise. » Annonça-t-elle ensuite à propos des sacs qu’elle avait rapporté, les invendus qu’elle avait pu récupérer et qui étaient ‘donnés’ par Charly, plutôt que de les éliminer bêtement, elle pouvait en faire profiter la famille. Savannah déposa une énième blouse sur le lit, puis regardant de nouveau son frère, elle remarqua qu’il semblait… trop sérieux à son goût. « Ça va ? T’as l’air soucieux. » Fronça-t-elle les sourcils. Une mauvaise journée peut-être ? Puis se rappelant qu’il l’avait appelée avant d’entrer, elle devina que sa venue n’était pas anodine. « Tu voulais me voir ? » Supposa-t-elle enfin, tout en poursuivant son occupation.

Un sourire étira les lèvres de Savannah lorsque Sean réagit à sa petite proposition déguisée. Ils avaient beau ne pas être les frères et sœurs les plus fusionnels du quartier, la jeune femme connaissait son frère un minimum. Dès qu’elle tendait une perche, il s’empressait de la saisir – phrase tordue, je sais – et vice versa. D’ailleurs, quand il indiqua que ses intrusions vestimentaires pourraient conduire à des situations délicates, puis qu’il la soupçonna de vouloir satisfaire sa curiosité en fouinant, elle rit de bon cœur. Sean aussi la connaissait bien. « Si tu sous-entends que tu as des choses à cacher, ça pourrait oui, fais-gaffe. ». Répondit-elle, tandis qu’il s’installait sur son lit. Elle comprit qu’il avait l’intention de lui tenir compagnie pour un moment. Savannah l’avertit alors qu’elle avait ramené plusieurs affaires avant de reprendre son activité du jour. Elle essayait d’introduire la conversation en douceur, car elle avait remarqué que son frère était soucieux. Le problème avec Sean était que la jeune femme ne savait jamais s’il garderait son calme ou au contraire partirait au quart de tour si elle lui en demandait la raison. Disons que d’expérience, il leur arrivait de se chamailler fréquemment, et parfois même pour des bêtises. Elle devait néanmoins lui reconnaître une qualité non négligeable, qui pouvait parfois être perçue comme un défaut aux yeux de certaines personnes qui le trouvaient trop direct, mais quand Sean avait quelque chose en tête, il ne tournait pas autour du pot et le disait franchement. Savannah préféra toutefois se reconcentrer à sa tâche pour l’instant et laisser venir le sujet ‘doucement’. Comme elle s’y attendait, son frère ne mit pas longtemps à se lancer. Il avait entendu des rumeurs sur elle et voulait en avoir le cœur net. Sean lui demanda entre autre si elle voyait Jay et si elle était vraiment saine d’esprit. La jolie blonde, qui venait de sortir un énième vêtement de la penderie pour le mettre sur son lit, suspendit son geste et leva les yeux vers son frère. Malgré les propos qu’il avait utilisés, elle ne lui en tenait pas rigueur. Sean n’était pas la délicatesse incarnée et n’avait jamais prétendu l’être. D’ailleurs, Savannah ne l’était pas non plus. « Oh je vois. » Répondit-elle très calme. Après tout, elle fréquentait qui bon lui semblait et n’avait aucun compte à rendre à personne. « Je ne sais pas depuis quand je dois me justifier auprès de mon petit frère… » Ajouta-t-elle pour le piquer un peu, en lui rappelant, qu’il serait limite plus normal, qu’elle, l’aînée de la fratrie, ait ce genre de comportement envers lui que l’inverse, mais la jeune femme n’était pas comme ça. « Mais puisque tu me le demandes, oui. Je fréquente Jay. Plus ou moins. » C’était terriblement compliqué, Savannah avait certaines raisons que personne, pas même son frère ne pourrait comprendre, et qu’elle n’avait d’ailleurs pas envie de donner. Il devrait se contenter de cette réponse, point. Et si Sean pensait qu’elle était tombée bien bas, la jolie blonde n’en avait strictement rien à faire des quand dira-t-on. « Enfin, ce n’est pas ce que tu crois. » Crû-t-elle cependant bon de préciser. Quoique… Que croyait-il au juste ? Qu’ils couchaient ensemble ? En effet, ça leur était arrivé. Qu’elle l’aimait ? En amitié certainement, mais pas de sentiments amoureux en tout cas. « Que je tombe aussi bas ? Sean, tu crois pas que je suis assez grande pour gérer ma vie toute seule ? Je ne me mêle pas de qui tu te tapes, toi, même si on ne peut pas dire que ce soit toujours bien haut pour autant. » Et voilà. Il avait lancé le sujet, il était normal qu’elle lui rendre la pareille. Savannah était restée en douceur et avait gardé son calme, après tout, il n’avait que « posé » des questions pour le moment. Mais si son frère continuait à émettre des jugements, ça risquait de bien vite changer.