Le plus souvent, Stacy sortait le samedi soir. Pour faire la fête, ou pour faire une sortie plus calme avec quelques amis au cinéma ou au restau. Mais elle appréciait aussi de se réserver des soirées pour se retrouver avec elle-même, se chouchouter, prendre le temps de faire des choses impossibles à réaliser en semaine, comme tout simplement se poser pour regarder un bon film, ou prévoir des plans pour les vacances d'été. Mais aussi, prendre des nouvelles d'anciens amis, ou faire un peu le point sur certaines choses pas claires dans sa vie. Ce soir, Stacy avait réfléchi. A ce qui allait et ce qui n'allait pas. Et, finalement, ce constat l'avait un peu déprimée. Elle ne se sentait pas du tout malheureuse, or il y avait certaines choses dans sa vie qu'elle n'aurait pas imaginées vivre de cette façon. Cette indépendance acquise seulement à demi lui pesait. La jeune femme avait passé la majeure partie de la soirée dans sa chambre, la porte ouverte pour ne pas totalement s'isoler, mais seule. Et son inactivité un peu trop longue commençait à lui peser. La jeune femme attrapa son téléphone et se leva. Direction la chambre de son frère. S'étant isolée de lui pour une fois, elle n'avait pas pris la peine de lui demander s'il restait à la maison ou était de sortie ce soir. La seconde option était celle qu'elle imaginait la plus probable. La blonde toqua à la porte de Jackson et l'entrouvrit. « Bah alors t'es pas de sortie ce soir ? » s'étonna-t-elle lorsqu'elle aperçut la tignasse de son frère. La métisse alla s'asseoir sur le lit de son frère instinctivement. « Ça va pas ? Tu fais quoi ? » Contrairement à elle, il était rare que Stacy ne voie pas son frère sortir un samedi soir. Peut-être avait-il des choses plus importantes à faire, ou qu'il s'était engueulé avec ses potes, dans tous les cas, la jeune femme voulait être au courant. Elle ne supportait pas de ne pas être au courant du moindre détail de la vie de son frère et, de son côté, lui racontait également tout ce qu'il y avait à savoir. Ou presque. Elle lui demandait toujours son avis avant de prendre la moindre décision. Pas que Stacy ne soit pas une grande fille capable de décider par elle-même, mais savoir que Jackson était d'accord avec elle, ou qu'au contraire il pouvait lui dire si elle déconnait totalement, la rassurait. La jeune femme s'assit en tailleur sur le lit et verrouilla son téléphone. Elle ignorait si Billy et Irina étaient également à la maison ; dans tous les cas ils n'avaient pas l'âge légal pour boire et faire la fête comme des grands, et Stacy les surveillait un peu, -plus Billy en réalité puisqu'elle se fichait d'Irina comme de sa première culotte- plus pour les emmerder qu'autre chose, puisqu'à leur âge elle n'était plus clean depuis déjà longtemps. La jeune femme tourna son regard vers son frère. « Je te dérange pas au moins ? » Son comportement était inhabituel. Peut-être avait-il tout simplement, comme elle, eu besoin de calme et de solitude pour ce soir.

Samedi soir. Rien à faire. La tête dans le cul et les pieds dans le vide, je regarde le plafond. Les mains sur le ventre à attendre que quelque chose se passe. Je repense à Amy, aux problèmes qu'elle peut m'attirer. Je secoue la tête, je ne dois pas penser à ce genre de choses. Ces choses tourmentent, inquiètent, et détruisent. Je soupire et passe une main dans mes cheveux bouclés. Je me décide à me lever et me dirige vers mon placard. Je l'ouvre, soulève le bout de bois décollé et en sort mon cahier de dessin ainsi que mon crayon à papier. Je la referme et retourne sur mon lit, où je commence à dessiner. Je dessine un jeune homme, seul, et entouré de noir. Moi, moi dans la nuit où j'ai cédé au vice, à la corruption. Moi seul, abandonné par des parents irresponsables. Moi seul, dans mon cœur comme dans ma vie. La seule personne qui compte réellement dans ma vie c'est Stacy. Je la revois, à sept ans, effrayée et perdue dans cet orphelinat. Je me revois lui promettre de la protéger quoiqu'il arrive. Je nous revois grandir, rester souder et changer. Nous avons chacun prit nos chemins, des chemins qui sont restés étroitement liés, et pourtant. Je ne suis pas heureux. Quelque chose manque à cet vie redondante et d'ennui. J'ai besoin de couleur, d'espoir et d'amour. Car j'ai beau montrer aux gens de l'arrogance et de la confiance en soi, moi aussi j'ai besoin de vivre quelque chose de fort, d'avoir quelqu'un pour m'aimer à chaque instant. Oui, quelque chose manque et je pense que ce qui manque, c'est quelqu'un.
Pas pour vivre ces choses niaises dont tout le monde parle. Mais pour combler ces moments de solitude où le seul choix qui s'impose à nous est de se supporter soi-même. Je soupire. Je n'ai rien à faire et ça me déprime. C'est alors que j'entends un bruit. Je me retourne et jette discrètement mon cahier derrière le lit. « Oh, c'est toi ! ». Stacy se tient là, ses cheveux bouclés entourant son beau visage métisse. Je lui souris et lui fais une place sur le lit. En réalité, cette personne qui manque, c'est elle. Lorsqu'elle n'est pas là, tout semble s'effondrer, alors que sa présence donne un sens à ma vie. C'est étrange, mais c'est réel. Je la regarde et lui souris : « Si ça va. Je m'ennuie, j'ai rien à faire. » Je soupire et me laisse tomber violemment sur mon oreiller. Je regarde le plafond en passant les mains dans mes cheveux, l'air fatigué. Je la regarde et réponds alors : « Uhm... Disons que tu ne me déranges pas si tu viens me sauver de la solitude. » Je lui souris et lui tends mes bras pour qu'elle vienne s'y allonger. Je la serre contre moi en tentant de ne pas m'étouffer dans sa touffe de cheveux et lui demande : « Raconte-moi ta semaine, petite sœur. ». Entre nous deux, c'est ainsi. Et pour toujours.