Aucun cours aujourd’hui. Pourtant, Zoë n’avait pas l’intention de rester chez elle à se cacher. Au contraire, elle allait aller au centre commercial pour faire un peu de shopping. Dans l’état qu’elle était, elle allait avoir besoin de nouveaux vêtements. Pas qu’elle soit tellement triste et que ce soit le seul moyen pour sourire un peu, bien au contraire. Si Zoë avait besoin de nouveaux vêtements, c’était pour une raison bien personnelle. En tout cas, ce dont elle avait besoin était loin d’être ces vêtements qui collent à la peau. C’était justement ce qu’elle ne voulait pas. Bref, ce qui était bien aujourd’hui, c’était sa volonté de cesser de pleurer pour enfin se reprendre en main, malgré ses problèmes, ses graves problèmes. À force de ne pas dormir et réfléchir durant la nuit, elle a réalisé qu’elle ne pouvait plus continuer à s’apitoyer sur son sort. D’ailleurs, elle avait commencé il y a quelques jours à travailler dans un musée. C’était déjà un bon début pour se prendre en main. De plus, elle allait avoir besoin d’argent dans les mois à venir. Même dans les années à venir. Bref, se mettant du plomb dans la tête afin de ne pas reculer, elle se rendit au centre commercial en bus.

Arrivée, elle se rendit à une boutique bien précise et y entra. Dès qu’elle eut mise un orteil à l’intérieur de la boutique, elle sentie des regards se poser sur elle, comme si c’était anormal qu’elle soit là. Elle fit le tour du magasin, prenant les vêtements qu’elle trouvait les plus beau jusqu’à ce que l’une des vendeuses vienne lui offrir son aide tandis que les autres la fixaient comme un extra-terrestre. Cette vendeuse fut très aimable. Elle semblait même compatir avec elle. Une fois que Zoë eut payé tout ce qu’elle voulait, la vendeuse lui souhaita toute la chance qu’elle méritait et l’encouragea, comme si elle savait ce qu’elle vivait. C’est donc souriante que Zoë sortie de la boutique, se rendant maintenant dans l’épicerie pour acheter une bouteille de sirop d’érable. Elle adorait en mettre dans son verre de lait la nuit, quand elle se levait parce qu’elle n’arrivait pas à dormir. Une fois fini, elle parti, décidant de marcher jusqu’à chez elle puisqu’il faisait beau. Elle s’offrit une pause café quand elle passa devant un café. Elle commanda une vanille française, chose qu’elle ne commandait jamais avant, puis alla s’installer à une table. Dos à la fenêtre, elle ne vit pas Lukas l’apercevoir et entrer dans le café. C’est lorsqu’elle prit une gorgée qu’elle entendit sa voix la saluer. Sursautant, elle déposa sa vanille française puis leva les yeux. Il semblait gêné. Pourquoi par contre? Elle l’ignorait bien. Elle aussi l’était par contre. Elle espérait pouvoir éviter des questions comme « pourquoi m’évites-tu? ».

Zoë_ « Lukas! Salut! »

Sur ces mots, elle enleva ses sacs de l’autre chaise et les mis par terre en dessous d’elle, cherchant à cacher ce qu’il y avait dedans. S’il découvrait ce qu’il y avait dans ces sacs, il allait peut-être comprendre tout ce qu’elle tente de cacher au monde, chose qu’elle ne pourra plus cacher bien longtemps encore.

La place devenue libre devant elle, Zoë prit une nouvelle gorgée de sa vanille française. C’était étrange qu’elle boive cette saveur de café. Avant, elle avait toujours détesté ça. Aujourd’hui par contre, elle adorait. Décidément, elle détestait ces changements qui se faisaient en elle. Elle avait l’impression d’être une nouvelle personne et ça ne l’enchantait pas du tout. Elle voulait revenir deux mois et demi en arrière, quand tout allait bien. Quand les seules responsabilités qu’elle avait étaient celles que sa mère avait laissée derrière elle en disparaissant. En effet, sa mère n’étant plus là, Zoë avait jugé que le manque de sa mère dans la maison allait laisser un grand vide, alors elle avait reprit un peu le rôle qu’elle avait pour que le vide soit moins grand. Maintenant, Zoë se voyait acquérir plus de responsabilité sur ses petites épaules toutes frêles…

En prenant sa gorgée, Zoë posa son regard sur Lukas qui s’assied et leva le doigt pour appeler un serveur. Il commanda un café. Lorsque le serveur parti, il la regarda dans les yeux. À la seconde où leurs regards se croisèrent, Zoë détourna les yeux, regardant vers une autre table.

Lukas_ « C'est bien que je te croise ici... Je voulais savoir quelque chose... »

Les y voilà. Zoë s’y était attendu, bien sûr, mais elle aurait préféré qu’il prenne le temps de discuter un peu. Enfin, elle ne pouvait rien y faire non plus. Et de plus, elle le comprenait totalement. Se faire éviter de la sorte, ce n’était pas joyeux, elle s’en doutait bien, surtout qu’il devait avoir remarqué qu’elle l’évitait plus lui que les autres. Il fallait savoir que ce n’était pas joyeux pour Zoë non plus. Éviter Lukas autant, c’était une vraie torture. Bref, elle ne répondit rien, attendant la suite, faisant comme si de rien était. Elle posa de nouveau son regard dans le sien.

Lukas_ « Je ne sais pas si c'est mon imagination pessimiste qui me joue des tours ... mais j'ai l'impression que tu m'évites, non? »

Zoë apprécia énormément le sourire qu’il lui offrit pour détendre l’atmosphère. C’était délicat de sa part. D’ailleurs, elle aimait beaucoup cette délicatesse chez lui. Elle aimait beaucoup qu’il admette qu’il soit pessimiste. Elle aimait beaucoup qu’il soit aussi pessimiste qu’elle dans la vie. Elle aimait qu’il la comprenne. Elle aimait beaucoup leur complicité. Elle aimait beaucoup qu’il se fasse du souci pour elle. Elle aimait qu’il soit capable de deviner qu’elle ait des soucis. Elle aimait beaucoup… N’en faisait-elle pas un peu trop? Quoi qu’il en soit, elle réfléchit à ce qu’elle pourrait dire. Cependant, elle ne trouvait rien puisque son cœur dont le rythme cardiaque accélérait la déconcentrait. Celui-ci brisa le silence de nouveau, heureusement.

Lukas_ « J'aimerais comprendre pourquoi ce revirement de situation, on s'entendait bien non? »

En effet. Entre eux, il y avait cette complicité qu’elle n’avait avec personne d’autre. Ce genre de complicité était différente de la complicité qu’elle avait avec ses deux meilleures amies. Il y avait plus que ça. Il y avait comme… une étincelle. Baissant les yeux, sa tasse sur la table, dans ses mains, elle entendit Lukas reprendre parole. Du moins, il commença une phrase. Il n’en dit qu’un seul mot. Il laissa sa phrase en suspend par contre, comme s’il allait faire une déclaration qu’il avait soudainement voulu garder pour lui. Quoi qu’il en soit, elle voulait savoir ce qu’il allait dire avant de se taire. D’ailleurs, c’était là une belle occasion d’éviter le sujet.

Zoë_ « Vas-y. Je t’écoute Lukas. Qu’est-ce que tu allais dire ? »

Leurs visages étant proche, Zoë remarqua que ses mains se mirent à trembler quand elle leva sa tasse pour boire une nouvelle gorgée. Un mal de cœur s’en suit. Super! Comme si c’était le moment !

Si seulement elle avait pu justifier le tremblement de ses mains par une quelconque raison qui avait du sens! Si au moins c’était pour une maladie… Ou simplement un coup de faiblesse du au fait qu’elle n’aurait pas assez mangé ces derniers temps ! Malheureusement, c’était à cause d’autre chose et ça lui fendait le cœur de devoir le cacher, surtout à Lukas. Lui cacher la vérité à lui était pire que de cacher la vérité aux autres. Bref, elle se sentit pâlir et Lukas le remarqua aussi, ce pourquoi il lui demanda si elle allait bien. Devinez la réponse ! En réalité, elle n’allait pas bien du tout, mais pourquoi le lui dire? En quoi ça l’intéresserait de toute façon. En quoi ça intéresserait l’univers? Elle n’était que Zoë Kahn après tout. Il n’y avait pas de quoi faire un plat. Ce n’est pas comme si elle était née pour changer le monde et réaliser quelconque prophétie. Ce serait trop beau comme vie…

C’est alors que Lukas reprit parole, revenant à la phrase qu’il avait laissé en suspend plus tôt.

Lukas_ « En fait, je… bah en fait c'est que je t'… en fait je t’apprécie beaucoup tu sais... et j'ai remarqué que tu m'évitais plus que les autres... et moi bah je t'apprécie beaucoup... donc j'aimerais savoir pourquoi tu m'évitais plus que les autres. … Je pensais qu'on s'entendait bien... alors je comprends pas, j'aimerais bien comprendre, je suis un peu maladroit je sais, mais …. mais.... voilà... en fait bah je crois que je … bah que je suis …. bah jcroisquejesuisamoureuxdetoi... »

Zoë écouta attentivement chaque mot, faisant son possible pour avoir l’air normal. En réalité, elle n’allait pas bien et elle eut bien hâte qu’il ait fini pour courir aux toilettes. Se concentrant sur chaque mot pour oublier sa nausée, Zoë sentit son cœur battre de plus en plus vite, espérant vraiment qu’elle avait deviné ce qu’il allait dire. Malgré que la phrase fut dite rapidement, elle la comprit très bien et en resta figée quelques brèves secondes. Comment se lever après ça pour aller aux toilettes pour vomir? Voyant qu’il tournait au rouge, elle le fixa dans les yeux jusqu’à ce qu’il détourne le regard pour se pencher. Elle baissa les yeux, toujours placée de la même façon jusqu’à ce qu’elle réagisse et qu’elle décide d’aller trouver le regard de Lukas. Cependant, en se penchant, elle remarqua que ses vêtements étaient étalés sur le sol du café. Lukas devait avoir renversé son sac sans le vouloir. Il avait les yeux sur le contenu. Rapidement, Zoë eut le réflexe de tout ranger dans son sac. Elle regarda ensuite Lukas. Avait-il deviné? Ce fut son tour de devenir rouge. Elle eut une soudaine envie de pleurer. Elle paniquait. Que devait-elle dire? Le temps de lui dire qu’elle l’aimait aussi et que c’était exactement pour ça qu’elle l’évitait était légèrement passé. Il était trop tard. Mettant son sac sous sa chaise, Zoë se redressa sur sa chaise et soudainement fut prise d’un étourdissement. Elle s’était redressée trop vite et elle avait encore plus envie de vomir maintenant. Elle croisa le regard de Lukas, le visage tout pâle, tremblant davantage, de panique ou à cause qu’elle allait vomir?

Zoë_ « Je… Je reviens! »

Sur ces mots, elle se leva et accourut à la toilette. Là, elle se vida le cœur, laissant couler des larmes. Encore une fois, était-ce à cause qu’elle était malade ou bien parce qu’elle était peut-être devinée? Qui sait?

Spoiler:

Une fois que tout fut sorti, Zoë se rendit au lavabo en vitesse, prenant de l’eau dans ses mains pour boire une gorgée et recracher la mauvaise haleine qu’elle avait. Elle était dans de beaux draps là! Et elle ne pouvait plus cesser de pleurer, ce qui voulait dire qu’elle pleurait parce que celui qu’elle aime a découvert qu’elle était enceinte. Elle était mal, elle s’en voulait. Qu’allait-il croire maintenant? Qu’allait-il penser d’elle? Et dire qu’il venait de lui avouer qu’il l’aimait. C’était terrible. Autant positivement que négativement. Après tout, les deux s’aimaient. Cependant, c’était toujours impossible, selon Zoë. Pourquoi? À cause de ce moustique qui grandissait patiemment en comptant sur sa maman pour être en sécurité. « Sa maman »… Rien que le mot « maman » donnait des frissons à Zoë, et pourtant, elle savait que lorsque cet enfant allait l’appeler maman, elle allait être la plus heureuse du monde. C’est ce qu’on dit en tout cas.

Lukas_ « Zoë, ça va? ... »

Zoë leva les yeux dans le miroir pour voir Lukas qui était entré. Elle baissa les yeux de nouveau. Elle avait honte. Elle n’avait pas honte du bébé, bien au contraire, puisqu’elle avait prit la décision de le garder, mais elle avait honte d’elle-même. Elle était embarrassée. Le pauvre Lukas devait souffrir le martyr. Et les autres du café… Que pensaient-ils en ce moment après avoir vu Zoë courir ainsi dans les toilettes? Il vint se poster à côté d’elle.

Lukas_ « C'est pour toi les vêtements que tu as acheté? »

Zoë le regarda, affirmant que ces vêtements étaient en effet pour elle. Il pu facilement le comprendre d’ailleurs.

Lukas_ « Si tu veux en parler, je suis là tu sais? »

En parler? Qu’y avait-il à dire? Elle était enceinte, point final. Bien sûr, il y en avait plus à dire sur la conception de l’enfant, mais ça, elle ne voulait pas le dire. Ça allait lui prendre du temps avant d’être capable d’en parler. Quoi qu’il en soit, Lukas posa sa main sur celle de Zoë. Au moins, elle avait toujours son affection. Il souffrait probablement, mais il l’aimait toujours. C’était à la seule chose positive à laquelle Zoë voulait s’accrocher maintenant. Elle baissa les yeux de nouveau, posant son regard sur leurs mains, mais son regard fut détourné par la main de Lukas qui vient chercher son visage pour qu’elle le regarde à nouveau.

Lukas_ « Fait moi un joli sourire. Je sais que ce n’est pas vraiment approprié à la situation, mais tu es plus belle quand tu souris. »

Zoë baissa à nouveau les yeux, ne pouvant s’empêcher de faire un léger sourire tout en continuant de pleurer. Elle vit le sourire de Lukas qui disparu presque aussi vite qu’il était apparu. Il enleva sa main de sur la sienne en s'excusant puis regarda le lavabo, redevenant rouge. Sa timidité touchait Zoë énormément. Elle prit une grande respiration en reprenant la main de Lukas, reposant son regard sur lui.

Zoë_ « La vérité, c’est que si j’évite les autres moins que toi, c’est parce que je ne suis pas amoureuse d’eux. Avec ce qui m’arrive, c’est difficile de te regarder et me dire que j’ai tout gâché. »

Elle baissa les yeux, pleurant un peu plus, en silence. Elle avait mal. C’était comme si le dire à haute voix était plus difficile que de seulement le penser. C’était comme de lui planter un couteau en plein cœur.

Spoiler:

Le couteau une fois planté, Zoë se sentait le cœur saigner. La douleur était intense et surtout atroce. Le fait que Lukas soit amoureux d’elle était une bénédiction, un cadeau du ciel qui semblait soudainement vouloir lui laisser une chance d’être heureuse. Cependant, elle se disait qu’elle avait tout gâché, que c’était impossible qu’elle ait une chance un jour avec Lukas. Pleurant, elle entendit la réaction de Lukas qui lui posait la question à savoir si c’était réel. Zoë hocha la tête.

Zoë_ « J’ai tout gâché! Je suis désolée! »

Celui-ci s’approcha d’elle, l’empêchant de répéter ses excuses des milliers de fois en la serrant dans ses bras et en lui demandant de ne pas dire qu’elle avait tout gâché. Pourtant, c’était l’impression qu’elle avait. Elle voulait bien croire que tout allait bien aller, mais comment était-ce possible de croire tout ça. Depuis un moment, tous ses rêves semblaient brisés alors de croire que c’était possible de pouvoir être heureuse avec Lucas, c’était insensé pour elle. Enfin, presque. Pourquoi disait-elle qu’elle avait tout gâché? Pour cette raison précise, mais ça, elle le garda pour elle.

Lukas_ « Je te protègerais ma petite Zoë, je te protègerais... »

La protéger… La protéger de quoi? Pourquoi? Bon, parce qu’il l’aimait, d’accord. Mais de quoi voulait-il la protéger? Que savait-il? Quoi qu’il en soit ça lui faisait du bien de l’entendre dire ça. C’était soulageant. Elle passa ses bras autour de lui aussi, prenant des grandes respirations pour cesser de pleurer, du moins essayer. À son tour, elle chuchota des mots à son oreille.

Zoë_ « Je t’aime Lukas. »

Prononcer ces mots avait été en quelque sorte difficile, mais ça avait été merveilleux en même temps. Son cœur avait bondi comme ces dauphins que l’on voit jaillir hors de l’eau. Elle se décolla puis le regarda, les yeux rouges. Elle aurait voulu faire un sourire, mais elle n’y arrivait pas. Son teint recommençait au moins à retrouver de sa couleur normale. C’est alors qu’elle pensa à leurs sacs seuls à la table où ils s’étaient installés…

Lukas se décolla lorsqu’elle affirma l’aimer. Sur le coup, elle eut peur de faire face à une réaction négative de sa part, mais lorsqu’elle vit ce grand sourire illuminer le visage de Lukas, elle fut soulagée. Il était si beau dès le départ, et c’était encore mieux quand il souriait. Celui-ci lui prit le visage et le rapprocha du sien.

Lukas_ « Moi aussi je t’aime Zoë. »

Il s’approcha encore plus pour finalement l’embrasser. Inutile de dire à quel point le rythme cardiaque de Zoë était rapide. Son cœur semblait vouloir sortir de sa poitrine. Elle aurait même pu l’entendre si elle s’était bien concentrée, mais ça ne l’intéressait pas vraiment. Ce qui comptait, c’est qu’elle et Lukas étaient en train de s’embrasser. Leur baiser dura un moment après lequel Lukas pensa à leurs sacs qui étaient restés seuls. Celui-ci sortit en vitesse des toilettes tandis que Zoë resta figée sur place durant quelques secondes. Quand elle revint sur terre, elle regarda le miroir juste à côté pour remarquer la rougeur de ses yeux. Elle soupira, se disant que ça n’était pas important puisque rien ne pouvait détruire son bonheur. Rien sauf une chose :

En sortant des toilettes, elle chercha immédiatement Lukas du regard. Elle perdit le sourire qu’elle avait quand elle constata que Lukas s’apprêtait à partir, sans la prévenir. Celui-ci s’arrêta subitement, sans même l’avoir vu. Le sourire disparu, elle se rendit à la table où ils étaient installés pour vérifier le contenu de son sac. Tout y était, mais personnellement, ça lui était égal. Elle était pour le moment trop déçue pour se soucier de ses biens matériels. Elle ne comprenait pas trop pourquoi Lukas décidait de partir après l’avoir embrassé. Peut-être était-ce elle qui le faisait fuir, elle et sa grossesse… Bref, perdue dans ses pensées, Zoë fut ramenée sur terre par la voix d’une fille qui cria une phrase, seulement pour attirer l’attention et rire des autres :

Fille_ « Je savais pas qu’ici c’était permis de faire des bébés dans les toilettes! »

Zoë figea tandis que tout le monde se mit à rire. Normalement, elle n’aurait pas porté attention à ce commentaire, mais dans son état, c’était plutôt difficile. C’est pourquoi elle mit rapidement son foulard et son manteau, prit son sac et sortie, ignorant du mieux qu’elle put les rires de tous. Une fois en contact avec l’air de l’extérieur, elle prit une grande respiration pour s’empêcher de pleurer. Décidemment, le ciel lui en voulait toujours…

Il était évident que Zoë avait entendu Lukas répliquer à cette fille. Du moins, elle avait entendu le début de la réplique, puisqu’elle sortie et se mit à marcher, laissant couler quelques larmes. Au moins, Lukas avait prit sa défense, lui qui, deux minutes plus tôt, était sur le point de s’enfuir et la laisser derrière après ce baiser. D’ailleurs, il sortit la rejoindre et alla se planter devant elle en l’interpellant, lui demandant de l’attendre. Puisqu’il était devant elle, elle n’eut autre choix que de s’arrêter.

Lukas_ « Ne l’écoute pas. Ce n’est qu’une pétasse qui ne sait pas ce qu’elle dit. C’est pour amuser la galerie. »

Zoë détourna le regard et croisa les bras pour se refermer sur elle-même. C’est alors que Lukas s’approcha d’elle et lui prit les joues, comme pour l’obliger à le regarder.

Lukas_ « Je t’aime et je ne laisserai personne te faire du mal, tu sais? Je tiens trop à toi pour ça. »

Ah oui? S’il le disait, c’est qu’il devait y avoir un fond de vérité, mais ça ne changeait pas le fait qu’elle l’avait surpris en train de se sauver, de fuir, de LA fuir. Enfin, c’était ce qu’elle avait déduit quand elle l’avait vu se dépêcher à prendre ses sacs.

Lukas_ « Je vois que tu es fragile en ce moment, je ne sais pas si c’est seulement dû à… »

Lukas baissa les yeux pour regarder le ventre de Zoë. Elle fut légèrement insultée, sans avoir de raison de l’être. Après tout, ça n’était quand même pas d’un extra-terrestre qu’elle était enceinte! C’était un simple bébé. Bien sûr, il compliquait les choses, mais elle n’était certainement pas la seule fille de son âge à être enceinte! … N’en faisait-elle pas un peu trop pour si peu?

Lukas_ « … ou si c’est pour autre chose. Tu sais que tu peux compter sur moi, ma petite Zoë. »

Bon d’accord, Lukas pouvait flipper un peu, c’était normal. Mais elle ne lui avait quand même pas demandé de devenir le père du bébé et de prendre des responsabilités qui ne lui appartenaient pas. En aucun cas elle lui imposait cela. Enfin bref, bien que ce soit un gros poids à supporter, Zoë ne pouvait pas comprendre pourquoi il avait eu l’intention de l’abandonner derrière en prenant ses jambes à son cou pour se mettre à l’abri, comme si elle allait l’attaquer.

Zoë_ « Alors pourquoi est-ce que tu as voulu t’enfuir tout à l’heure, quand tu es sortis des toilettes… Juste après m’avoir embrassé… »

Zoë fit un pas vers l’arrière, question de se dégager. Elle avait toujours les bras croisés, comme si c’était une façon de se protéger. Elle prit une grande respiration par la suite. Quel genre de garçon pouvait embrasser une fille qu’il prétend aimer pour ensuite s’enfuir et la laisser seule dans une situation pareille? C’était insensé pour elle, et l’idée qu’elle ait pu faire fuir Lukas la répugnait. Elle se répugnait. Comprenons-nous bien. La haine, elle l’avait envers elle seulement, pas envers Lukas, car à sa place, elle aurait probablement voulu prendre ses jambes à son cou et courir le plus loin possible pour se mettre à l’abri des ennuis. Elle tenta de se retenir de laisser couler d’autres larmes.

Lukas baissa les yeux. Visiblement, il n’avait pas remarqué qu’elle l’avait surpris et il en avait honte. Ça paraissait. Mais la honte ne pardonne pas nos intentions. Celui-ci avait eu l’intention de l’abandonner, au risque de lui faire de la peine, il devait donc s’expliquer. Après tout, il lui avait dit qu’il l’aimait non? Quand on aime quelqu’un, on ne veut certainement pas lui faire du mal. C’est pourquoi elle voulait comprendre ce qui lui avait prit. Elle voulait le savoir maintenant. Si Lukas ne parlait pas dans dix secondes, elle allait probablement baisser les yeux et partir. 10, 9, 8, 7, 6…

Lukas_ « Je… J’ai juste eu peur. J’ai repensé à ce que j’avais découvert … que tu étais enceinte… et je me suis dit qu’à cause de ce bébé... »

Il posa alors sa main sur le ventre de Zoë, ce ventre portant la vie. Ça sembla lui prendre tous les efforts du monde. Surprise, elle posa sa main par réflexe sur la sienne.

Lukas_ « … tu ne mérites pas un fardeau de plus... pas que le bébé sera un fardeau pour toi non... c'est juste moi le fardeau en fait... tu ne peux pas être avec quelqu’un comme moi, de toujours pessimiste, non il te faut quelqu’un qui puisse t’aider à te sentir mieux, … pour accueillir ce bébé... quelqu’un d’optimiste, dans le genre de Greg quoi, mais pas moi… »

Mais qu’est-ce que c’était que ce délire? En quoi Lukas serait un fardeau? Bien sûr, il était pessimiste, et alors? Ça n’est pas comme si c’était un cancer généralisé : complètement inguérissable. Il s’agissait seulement de l’aider à avoir confiance en lui et voilà. Et puis de toute façon, c’était lui qu’elle aimait, pas Gregory. C’est pourquoi il était le seul à pouvoir l’aider à se sentir mieux. Pour ce qui était du bébé, Zoë ne suivait pas trop. Il semblait y avoir confusion. Ça n’était pas facile pour les deux, certes, mais elle ne lui avait pas demandé d’être le père du bébé ni de prendre quelconque responsabilité envers celui-ci. Zoë remarqua que des larmes montèrent à ses yeux. Elle en fut profondément touchée.

Lukas_ « … Je t’aime Zoë, c’est pour ça que je dis que je ne te mérite pas... Je veux ton bonheur, je ne veux pas te faire souffrir... Et avec quelqu’un de plus optimiste que moi tu seras heureuse… »

Pourquoi disait-il cela? Pourquoi ne comprenait-il pas que c’était lui qui pourrait la rendre heureuse? En voyant les larmes de Lukas couler sur ses joues, Zoë se mit également à pleurer silencieusement. Décidément, elle allait se coucher de bonne heure ce soir puisqu’elle allait avoir mal à la tête. Malheureusement, elle allait devoir oublier les Advil pour le soulager…

Lukas_ « Je t’aime Zoë, tu comprends ? Je m’excuse d’avoir songé à partir comme un voleur, mais je suis resté, je ne voulais pas partir comme ça, je voulais t’expliquer que je t’aime, que je ne supporterais pas te faire de mal, et que d’un autre côté j’avais peur. Voilà. »

Maintenant qu’il avait fini, c’était maintenant le temps pour Zoë de le rassurer. Celui-ci se battait pour ne pas détourner le regard. Ça aussi elle le devinait. Celui-ci savait exactement comment la rendre heureuse, comment pourrait-elle vouloir quelqu’un d’autre? Elle posa l’une de ses mains sur la joue de Lukas.

Zoë_ « Comment peux-tu croire que tu es un fardeau pour moi? Tu es pessimiste, c’est vrai. Mais c’est ce qui nous a plutôt rapprochés, non? Toi et moi on se comprend. On sait comment on peut se sentir seul face à l’optimisme des autres. Tu ne crois pas qu’on devrait s’aider? Moi, j’ai envie de t’aider à voir la vie plus clairement, parce que ton bonheur me tient à cœur… »

Elle prit une grande respiration.

Zoë_ « Lukas, je ne veux pas de Greg. C’est avec toi que je veux être. Je sais que ça peut être difficile à gérer comme situation et je ne te demande pas de passer par-dessus ça pour être avec moi. Je ne veux pas te forcer en rien et même que je préfèrerais que tu ne sois pas avec moi plutôt que tu te sentes forcé. Mais par pitié, ne va jamais croire que tu puisses être un fardeau. Ce nom-là ne te correspond pas du tout et je veux que tu en sois certain… Je ne te demande pas d’être le père de mon bébé. Ça non! Tu es jeune encore et tu as la vie devant toi pour avoir des enfants. Moi, j’ai fait une erreur en m’intéressant au père du bébé et je ne vais pas te faire supporter les conséquences de mes actes. »

Elle baissa les yeux quelques secondes et prit les mains de Lukas dans les siennes. Elle reposa son regard dans le sien ensuite.

Zoë_ « Regarde toi Lukas. Tu fais tellement d’efforts pour moi. Tu as pilé sur ta timidité pour me dire ce que tu ressentais pour moi. Tu as fait ce gros effort pour poser ta main sur mon ventre, même si ça te fait du mal à l’intérieur de me savoir enceinte, tu fais tout pour garder ton regard dans le mien… Comment est-ce que je pourrais vouloir quelqu’un d’autre que toi? Comment est-ce que je pourrais te voir comme un fardeau? Comment fais-tu pour simplement le croire? Je t’ai fui pendant si longtemps parce que je t’aimais. Je n’ai pas eu le courage que tu as pour aller te voir et te dire immédiatement ce qu’il en était. J’aurais pu, mais je ne l’ai pas fait parce que j’avais honte de moi, honte de mon passé, honte d’exister. J’ai été trouillarde. Alors cesse d’avoir honte. Je ne t’en veux pas. »

Avait-elle fini de parler? Elle avait l’impression de manquer de salive tellement elle en avait dit. Elle espérait seulement l’avoir rassuré pour de bon. Tout ce qu’elle voulait, c’était son bonheur, quitte à renoncer au sien…

Zoë_ « […] Alors cesse d’avoir honte. Je ne t’en veux pas. »

Une fois ceci dit, Zoë remarqua un sourire se dessiner sur le visage de Lukas, ce qui la fit sourire également. Cette fois, c’était un vrai sourire. Elle était contente de pouvoir le rassurer, le rendre heureux. Lukas la serra dans ses bras et donc, Zoë passa ses bras autour de lui pour se coller. Là, elle était bien. Elle était en sécurité, à l’abri de tout souci.

Lukas_ « Tu ne peux pas savoir à quel point tout ce que tu m’as dit me fait plaisir ma Zoë. Je… je me rends finalement compte que tu feras tout pour que je m’améliore, pour toi, et moi je ferais tout pour ton bonheur, également. »

On dit que les yeux sont les fenêtres de l’âme. Pourtant, malgré le fait qu’elle ait perdu son regard pour l’instant qu’elle passait dans ses bras, la tête contre son épaule, elle pouvait voir une lueur d’espoir et de bonheur en lui, et ça, ça lui faisait plaisir. Zoë aurait bien voulu lui répondre quelque chose, mais au fond, elle ne trouvait rien à dire. Elle croyait avoir tout dit plus tôt. Répéter le fait qu’elle voulait son bonheur était complètement inutile et ne lui servirait qu’à gaspiller sa salive. Or, un moment de silence assez long s’installa durant lequel les passants devaient bien se demander ce qui se passait, à moins qu’ils se disent que cet amour était touchant. D’ailleurs, il l’était. Ce silence se brisa quand Lukas s’éloigna enfin d’elle pour lui prendre les mains et reprendre parole.

Lukas_ « J’étais en train de penser au bébé, à ton bébé. Tu m’as dit que tu ne m’avais pas demandé d’être le père. Ça me rassure, car j’avais peur que si je voulais être avec toi, bah, ça devait m’engager dans quelques manières que ce soit, avec toi ou ce bébé. »

Tant mieux si Lukas était rassuré, mais il ne fallait pas qu’il le soit complètement par contre, car même s’il n’était pas le père, il risquait d’avoir à en supporter énormément malgré tout. Il baissa son regard sur le bébé, poussant Zoë à avoir le réflexe de poser également ses yeux sur son ventre, en même temps que l’une de ses mains, tenant donc maintenant une seule main à Lukas.

Lukas_ « Mais bon, ce n’est pas parce que tu m’as dit que je te considère comme un simple coup…. Euh non ce n’est pas ça, … comme une simple fille de passage…. Ah je n’arrive pas à m’exprimer, … bref, tu m’as compris ? Fin, j’espère…. Donc je disais que non je ne te considère pas comme ça. Je t’aime et on verra, si on se met ensemble, combien de temps ça durera. Mais je t’aime, tu sais, à part Greg, tu es la seule à réussir cet exploit de me redonner le sourire comme ça. »

Entendre Lukas chercher ses mots de cette façon la fit sourire. En effet, elle avait comprit ce qu’il avait voulu dire et de toute façon, elle n’avait jamais cru, depuis tout à l’heure, qu’il la considérait comme une fille de passage. Il n’était pas comme d’autre dont Zoë n’osait même pas penser au nom… Elle fut touchée de savoir qu’elle était la seule, mis à part Gregory, ce qui était normal, à réussir à le faire sourire. C’était bien, non? Un baiser s’en suit, un baiser dont Zoë ne voulait pas mettre fin. C’est d’ailleurs Lukas qui prit cette initiative. Quand elle recroisa le regard de Lukas, elle n’avait plus de sourire aux lèvres. Elle pensait à un seul truc, mais ne pu rien dire puisque Lukas fut, une fois de plus, plus rapide qu’elle.

Lukas_ « Pour finir, on peut donc dire qu’on est ensemble non ? A moins que tu ne veuilles plus !! »

Quelle question! Elle baissa les yeux, embarrassée, sachant bien que Lukas allait se sentir nul après ce qu’elle allait dire.

Zoë_ « Lukas… Je ne te demande pas d’être le père, ça c’est certain. Le bébé est entièrement ma responsabilité. Tu n’as aucun engagement envers lui, mais il faut quand même que tu prennes le temps de réfléchir à la question. Regarde autour. Si ça se trouve, Dirty Secret nous espionne et elle ira dire sur son blog que tu es le père. J’ai pas envie de te mettre dans une mauvaise posture. Je le répète, tu n’as aucune responsabilité à prendre envers le bébé, mais n’empêche que c’est risqué pour toi quand même. Je ne veux pas que tu portes le poids des rumeurs et tout ce qui viendra avec. Avoir une petite amie enceinte alors que le bébé n’est pas le tien, ça ne va pas être de la tarte. Surtout à notre âge. »

Elle baissa les yeux.

Zoë_ « Je… Je veux être avec toi. Je te le jure Lukas, c’est ce que je veux le plus, à part peut-être la santé du bébé… mais je veux que tu réfléchisses bien avant de t’embarquer dans cette aventure-là. Je préfère que tu y penses bien avant, que tu penses à ton bonheur et seulement le tien. Si d’être avec moi implique que tu vives sous un poids trop lourd à supporter, je préfère que tu laisses tomber, parce que tu vaux plus que ça. »

Voilà qui était dit. Elle espérait seulement qu’il n’allait pas croire qu’elle ne voulait pas de lui parce qu’il était un fardeau ou une connerie du genre. Elle l’aimait profondément, il n’y avait aucun doute là-dessus. C’était pour ça qu’elle lui demandait de réfléchir avant de s’embarquer.