Scarlett fut soulagée en sortant de l’amphithéâtre. Son dernier examen venait de s’achever, elle pouvait enfin se relâcher complètement. Deux longs mois de vacances s’offraient désormais à elle. Il faudrait qu’elle songe sérieusement à faire des projets, même si elle aimait bien les imprévus ou les départs de dernière minute. On pouvait dire que ce trait de caractère était peu commun chez une jeune femme qui aimait bien que tout soit en ordre dans sa vie et organisé. Mais la jeune brune avait cette particularité d’agir comme si elle avait deux facettes parfois. La fille que tout le monde croyait connaître et se plaisait à juger –d’ailleurs Scarlett ne faisait rien pour les contredire- passait pour froide, distante, calculatrice et d’une vie bien rangée. Mais en réalité, elle n’était pas réellement cette personne là, peu la connaissait vraiment mais elle s’en accommodait d’autant mieux. Au moins, la plupart du temps la laissait-on tranquille, sauf quand quelques personnes, comme certains amis de sa sœur essayaient de la cerner. Elle n’aimait pas trop que les gens se forcent à essayer de la comprendre, ce qui poussait davantage à l’effet inverse d’ailleurs, elle se renfermait d’autant plus et avait plutôt tendance à envoyer balader le monde. Mais bon, parfois elle se disait en elle-même qu’elle ferait bien de se calmer et d’être un peu plus sociable aussi. C’est juste… que ce n’était pas vraiment sa façon d’être.

La jeune femme marcha dans les couloirs menant vers la sortie, elle salua silencieusement quelques personnes connues qu’elle croisa, dans un demi-sourire en toute retenue. Elle passa à côté d’eux, toujours plongée dans ses pensées, à défaut de ne pas l’être dans son journal pour une fois. Scarlett pensait que parfois, certaines personnes avaient réussi à la percer quand même, mais pas d’une manière forcée, plutôt d’une manière spontanée, tellement inattendue qu’elle ne s’en était même pas rendue compte. Avec certains de ses amis, la jeune brune se sentait bien et s’était dévoilée à eux sous un tout autre jour, tout simplement parce qu’elle avait appris à leur faire confiance, à s’attacher. La jeune femme sourit à cette idée, elle ignorait pourquoi toutes ces pensées lui traversaient l’esprit en ce moment, alors qu’elle venait de terminer ses examens. Peut-être pour deux raisons principales. La première, sa famille ne se parlait plus trop en ce moment, tout ne tournait plus rond et Scarlett avait l’impression que quelque chose avait changé. Deuxièmement, la jeune femme avait un peu dû mettre sa vie entre parenthèses pour réussir sa fin d’année… Alors maintenant qu’elle était à nouveau libre, elle pourrait recommencer un peu à vivre ses folies… enfin en toute demi-mesure, elle n’était pas non plus ce genre de filles exubérantes et aventureuses… quoique. On pouvait parfois se le demander.

Lorsqu’elle arriva enfin à la sortie de l’université, la jeune femme aperçut alors tout un groupe d’étudiants qui allait fêter la fin des examens au café du coin. D’un commun accord sans doute, les élèves s’étaient donné rendez-vous à cet endroit habituel pour s’y retrouver. Scarlett décida de s’y rendre aussi, non pas pour se joindre spécialement à eux, mais parce qu’elle avait l’habitude de s’y rendre, dans son coin familier où elle venait souvent s’installer entre deux-trois heures de cours, et lorsqu’elle n’avait nulle envie de rentrer chez elle. Puis, peut-être que son frère l’y rejoindrait quand il aurait fini son examen lui aussi, parfois ils s’y retrouvaient tous les deux. La jeune brune marcha donc jusqu’à l’entrée, s’engouffra à l’intérieur et commanda un café avant d’aller s’asseoir. Par chance, ‘sa’ table du coin était encore libre. Elle déposa ses affaires à côté d’elle, tandis qu’une musique rythmée envahissait la salle et que le brouhaha des étudiants s’élevaient dans un bruit confus entre la mélodie et les conversations avoisinantes. Scarlett but une gorgée de son café, avant de remarquer la présence d’une tête connue parmi un groupe d’étudiants. Elle avait beau être assez discrète, cette personne l’avait néanmoins remarquée, par habitude sans doute de la trouver là. La jeune brune lui fit signe à son tour et lui accorda un sourire, parce que ce jeune homme commençait à bien la connaître justement. Elle releva la tête lorsqu’elle le vit s’approcher d’elle. Zain. Une amitié étrange était née entre eux depuis qu’elle s’était mise en tête qu’elle lui devait quelque chose lorsqu’il lui avait sauvé la mise… Drôle de réaction de la part de la jeune femme, et pourtant, elle s’y tenait.

« Salut. ». Le salua-t-elle simplement lorsqu’il fut à portée de voix pour l’entendre malgré la musique. Scarlett y prêta d’ailleurs l’oreille un instant, avant d’ajouter avec une petite moue. « Je crois qu’ils ont envie de nous casser les oreilles aujourd’hui. ». Mais bon, elle l’avait dit avec un petit sourire de bonne humeur, montrant qu’elle appréciait quand même bien l’ambiance. « Comment vas-tu sinon? » Continua-t-elle. « Tu fêtes aussi le début des vacances ou tu accompagnes ceux qui ne sauront pas rentrer chez eux? ».

La jeune femme sourit de nouveau. Elle plaisantait bien sûr. Elle savait que le jeune homme était quelqu’un sur qui on pouvait compter, puisqu’elle en avait déjà elle-même fait l’expérience. Il n’était pas du genre à fêter quelque chose jusqu’à n’en plus avoir de souvenirs mais plutôt à veiller sur ses amis, elle non plus d’ailleurs n’était pas du genre à abuser, même si ça avait pu lui arriver une fois, comme à tout le monde… Mais bon, ils avaient tous connu les bêtises de l’adolescence qui font qu’on a tous une occasion, une première fois à tout. Son regard se plongea dans celui du jeune homme, attendant sa réponse. La jeune femme reposa son café, curieuse d’entendre les dernières nouvelles de son ami malgré le bruit qui résonnait autour d'eux.

La musique battait toujours son plein. Toutefois, le gérant du bar dût se rendre compte que plus personne ne s’entendait, car il baissa un peu le son. Scarlett put donc écouter les questions de son ami sans trop de difficultés. Elle se recula un peu de la banquette, l’invitant tacitement à s’asseoir près d’elle. Après tout, s’ils commençaient à discuter, il n’allait pas rester là debout, devant elle. La jeune brune prit tout d’abord des nouvelles du jeune homme qui lui assura qu’il allait bien, avant de lui demander si ses examens s’étaient bien passés. Scarlett sourit ; elle avait souvent été dissipée durant l’année ; et pourtant, elle s’était bien rattrapée. « Je dirais même très bien. J’ai réussi. Et toi ? Le monde des universités s’ouvre enfin à toi ? ». Lui retourna-t-elle la question. « D’ailleurs, je ne t’ai jamais demandé si tu comptais rester dans les parages ou partir à l’autre bout du pays. » A vrai dire, elle ne s’en était jamais inquiétée jusque maintenant, mais se dire qu’il pourrait envisager de déménager lui retourna soudain le ventre. Elle n’oserait jamais le lui avouer, mais même si elle était contente pour lui, il lui manquerait d’une certaine façon. Et s’il restait ici… encore mieux ; elle pourrait passer plus de temps avec lui pendant les vacances. Pourquoi pas en l’aidant à s’inscrire dans une université ? Scarlett connaissait toute la paperasse qu’il fallait ; plus les questions que l’on se posait avant de se retrouver « parachuter » en première année. S'il le désirait, ou même s'il appréhendait quoique ce soit, elle l'aiderait volontiers.

La conversation dériva ensuite sur la fête d’aujourd’hui et sur leur début de vacances. Scarlett ne savait pas encore vraiment comment elle occuperait les siennes ; elle réagissait plutôt au jour le jour, et disons qu’elle réalisait seulement qu’elle avait quasiment trois mois à tuer… Et dieu sait qu’elle en avait des choses à faire, ou plutôt envie de faire… Le jeune homme reprit la parole, lui disant qu’il fêtait les vacances au coca. Scarlett sourit, elle comprit l’allusion. « Tu m’étonnes. Tu as toujours été plus raisonnable… Et ma foi, c’est pas plus mal. ». Déclara-t-elle en souriant toujours. Zain lui demanda alors ce qu’elle, elle faisait ici. Bon, à la base, elle attendait son frère, ils se retrouvaient souvent ici, mais pour le coup elle se disait qu’elle avait oublié de le prévenir. D’ailleurs, il venait de lui envoyer un message ; il était parti fêter sa fin d’année avec ses amis aussi, donc la jeune femme choisit de ne pas le déranger. Elle n’aimait pas trop faire la « fête » avec genre cinquante personnes, dont trois ou quatre seulement étaient vos vrais amis, c’est pourquoi elle déclina l’offre de son frère de le rejoindre à sa soirée. « Je devais retrouver mon frère ici » Expliqua-t-elle brièvement. « Mais il est parti à une fête et, comme tu le sais, les soirées, c’est très peu pour moi. ». Sourit-elle. Enfin, ce n’était que milieu d’après-midi, mais tout était relatif. Parfois, les fêtes commençaient tôt pour s’achever au bout de la nuit. Auparavant, elle y avait participé une fois, deux fois, mais après la jeune femme s’en était lassée. Le regard de l'étudiante croisa celui du jeune blond, d’un air entendu. Scarlett l’appréciait beaucoup, non pas uniquement parce qu’il lui avait rendu un service, mais parce qu’au fur et à mesure qu’elle apprenait à le connaître, elle se rendait compte qu’il était bien différent que la plupart des jeunes de son âge. En bien évidemment.

HJ : désolée du temps de réponse =/

Scarlett devait admettre qu’elle n’était pas très bavarde d’habitude. Pourtant, ces derniers temps, son humeur s’était un peu améliorée. Sans doute les bienfaits de ce début de vacances qui la poussait à s’ouvrir un peu plus aux autres… Mais avec Zain, elle n’avait pas à se forcer, la conversation s’engageait naturellement entre eux. Le jeune homme prit tout d’abord des nouvelles de la jeune étudiante, à vrai dire, ils se questionnèrent mutuellement à ce sujet. Ils ne s’étaient certes plus vus depuis un moment, mais ils n’avaient pas raté grand-chose… Les examens avaient occupés une grande partie de leur temps. Mais leur travail s’était vu récompensé, puisqu’ils avaient tous les deux réussis. Un exploit pour Scarlett, l’éternelle dissipée en cours. Et une nouvelle étape pour Zain, puisqu’il terminait le lycée.

Puisque son ami franchissait un nouveau cap, la jeune femme aborda alors naturellement le sujet des universités. Elle était curieuse de connaître ses projets, car elle s’intéressait de savoir s’il resterait dans les parages ou non. Magnolia avait une bonne université, mais beaucoup de gens aimaient tout de même partir étudier à l’étranger. Ce qui n’était pas l’intention de Zain, puisqu’il lui annonça qu’il étudierait le droit ici. « Le droit ? C’est super, mais pas facile ! Enfin, rien ne l’est, tu me diras. » Sourit-elle. « Je suis sûre que tu feras un excellent avocat dans quelques années. Ils sont en manque de bons éléments ». Ajouta-t-elle d’un air un peu songeur.

Elle se souvenait que son père avait eu un problème une fois dans une affaire qui concernait une victime, et qui impliquait la morgue. Il n’était pas spécialement en tort, et aurait pu gagner l’affaire, mais son avocat, « attendri » par la famille qui avait porté plainte, s’était laissé corrompre ou en tout cas influencer pour perdre l’affaire… Elle chassa alors cette pensée de sa tête, pour revenir dans le présent. Son ami venait de lui demander si elle restait dans son université actuelle. « Bien sûr que j’y reste, j’adore l’ambiance. Bon les cours parfois… tu me connais, mais je m’y fais doucement. Tu verras, l’université, ce n’est pas que la vie de cours, t’as le campus, les profs vaches ou super sympas, des rencontres géniales, de nouveaux amis… Bon, les soirées organisées aussi, ça en fait partie, mais ça c’est toi qui gères. C’est un tout en fait. Un nouveau mode de vie, totalement différent du lycée. T’as plus de responsabilités, mais en même temps, tu deviens très indépendant. Enfin… la plupart du temps en tout cas. ». Lui décrivit-elle brièvement ce qui l’attendait dans la vie universitaire. Evidemment, elle ne prétendait pas être omnisciente à ce sujet, mais elle lui partageait son expérience. Il n’y avait pas de quoi appréhender, mais sa façon de vivre allait clairement changer.

Mais l’heure n’étant plus au cours, les deux jeunes gens changèrent rapidement de sujet, pour discuter d’un thème bien plus heureux ; leurs plans pour ces vacances. Zain annonça à la jeune femme qu’il partirait certainement quelques jours en France. Beau pays ! Scarlett y était déjà allée une fois, mais elle était tout petite alors, et s’en souvenait à peine. Mais comme elle apprenait le français, parmi ses langues en cours, elle trouvait cela amusant d’y retourner, pour mettre ce qu’elle avait appris en application... « La France. Un beau pays, si je me souviens bien. Evidemment, Paris est incontournable ! Tu en as de la chance, j’aimerais bien y retourner un jour. L’année prochaine, peut-être. ». Elle lui expliqua brièvement pourquoi. Ensuite, Zain poursuivit en lui expliquant qu’il irait sans doute à Miami, mais qu’il n’avait en fait pas vraiment de projets sérieux de voyage avec des amis. « Tu sais, il n’est pas trop tard pour prévoir quelque chose. ». Dit Scarlett. S’il voulait vraiment faire quelque chose entre amis, il était encore temps vu que c’était le début des vacances. Mais bon, ce n’était pas elle qui s’en mêlerait. Le jeune homme lui demanda ensuite si elle voyagerait elle aussi. « Je pense que mes parents ont prévu de passer une quinzaine dans notre chalet au Canada. Je ne sais pas encore si mon frère, ma sœur et moi allons les accompagner dans le froid, mais je me dis que ça pourrait me changer les idées. ». En effet, les Spencer possédaient une merveilleuse maison-chalet dans le pays des caribous. Scarlett y était déjà allée deux-trois fois, lors de longs étés, et elle avait beaucoup aimé se retrouver uniquement avec sa famille, mais elle était désormais en âge de choisir si elle y partait ou non. Et cette année, la jeune femme hésitait. Non pas parce qu’elle n’avait pas envie d’y aller, mais les récents troubles dans sa famille la décourageaient vraiment de s’y rendre cette année. Néanmoins, la jeune femme préféra ne pas mentionner ce détail à son ami ; elle n’était pas là pour mettre ses problèmes sur le tapis, mais pour les oublier justement. Et parler avec Zain était justement une bonne façon de le faire.