Scarlett poussa un soupir. Cette journée avait été horrible. Entre les nouvelles disputes de ses parents, les gens qui la regardaient bizarrement dans la rue, ou l’atmosphère oppressante de la morgue tenue par ses parents, la jeune femme avait besoin de quitter ce monde derrière lequel elle devait toujours faire bonne figure. Elle en avait assez de jouer le jeu, se glisser dans le moule de la parfaite jeune fille qui ne dit rien, ne réagit pas, dans ce masque d’indifférence trompeur, comme si elle s’effaçait toujours un peu plus. Dans sa famille régnait une ambiance d’amertume, de souvenirs gâchés, de temps effacés. Non, pas ce soir. Elle ne pouvait plus en supporter. Pas alors qu’elle rejoindrait quelqu’un avec qui elle se sentait différente. Parce qu’avec lui, elle pouvait presque se retrouver elle-même. Quitter cette atmosphère tendue, fuir la froideur de sa famille, les regards inquisiteurs, les rumeurs dévastatrices. Elle oublierait tout.

La jeune femme quitta sa maison, alors que l’écho des voix de ses parents résonna en elle encore un instant. Elle prit une bouffée d’air frais, en même temps qu’un vent brutal la frappa de plein fouet, envahissant ses narines, soulevant ses cheveux avec une vivacité peu commune. Elle se sentait soudain vivre, transportée au rythme de ses pas, toujours plus proche de la maison d’Elias. Comme si elle allait s’enfermer dans une bulle bienveillante, bien qu’elle ne l’avouerait jamais. L’obscurité du soir était tombée depuis un moment déjà, le ciel était couvert et les nuages lourds. Le tonnerre gronda et soudain, la pluie la frappa de plein fouet. Elle resta quelques instants sous l’eau ruisselante, immobile. La douche froide qu’elle se prit lui donna la sensation de se réveiller d’une journée cauchemardesque.

Mais lorsqu’elle sentit l’eau s’introduire doucement sous sa fine veste noire, trouver son chemin jusqu’à sa tunique sombre, la jeune femme réalisa qu’elle était trempée. Elle voulut se retourner pour rentrer chez elle, s’essuyer et éventuellement se changer, mais elle avait malencontreusement oublié ses clés. Ses parents étant trop occupés à se chamailler, elle n’allait pas les importuner, au risque d’aggraver les choses. Elle les voyait bien se lancer des pics sur le fait d’avoir laissé leur fille risquer d’attraper une pneumonie dehors. Tant pis. Elle se décida tout de même à courir jusque chez le jeune homme, et assez trempée, elle sonna à sa porte, espérant qu’il lui ouvrirait rapidement.

Scarlett se tenait toujours devant la porte d’Elias. Le vent continuait de fouetter son visage. La jeune femme glissa ses doigts bleuis par le froid dans les poches de sa veste, et mordilla ses lèvres pour qu’elles arrêtent de trembler. La lumière dans le hall de la maison s’alluma au bout d’une minute. Par chance, ce fut bien le jeune homme qui vint lui ouvrir la porte. Malgré sa surprise évidente de voir la jeune brune devant lui, il la laissa entrer chez lui avant de lui poser la moindre question. La jeune femme ne se fit pas prier deux fois. En même temps, vu son apparence, elle devait faire peur à voir… Il ne devait pas y être habitué.

Une fois à l’intérieur, ses cheveux dégoulinèrent un peu. L’eau coulait littéralement de ses affaires, elle s’en voulait un peu de mettre de l’eau un peu partout… Scarlett se retourna ensuite vers Elias. Le jeune homme lui demanda alors ce qu’elle fichait dehors avec une tempête pareille. Un sourire s’esquissa sur le visage de la jeune étudiante. « Une voisine ne peut pas simplement passer dire bonjour à son voisin ? ». Lui répondit-elle, amusée. « J’ai quand même affronté vents et marées pour venir te voir ». Rigola-t-elle, en tremblant encore un peu. En effet, la métaphore était assez appropriée ; puisqu’elle était sortie, s’était pris le vent violent de face, puis les trombes d’eau s’étaient abattues sur elle… Bon, d’accord. L’excuse était légèrement bidon, la vraie raison était tout autre. Ces temps-ci, les disputes de ses parents l’épuisaient. Surtout quand celles-ci devenaient violentes ou quand leurs enfants s’y retrouvaient impliqués, bon gré mal gré. Mais Scarlett n’aimait pas trop parler de sa famille, ou d’en étaler les problèmes devant autrui. C’est pourquoi, elle se contenta d’ajouter un peu vaguement. « Non, en fait. Je devais vraiment fuir l’ambiance familiale. ». Elle n’avait pas envie de donner davantage de détails pour le moment.

Soudain, alors qu’elle n’y avait pas vraiment prêté attention avant, le regard de la brunette s’attarda quelques secondes sur le corps du jeune homme, uniquement vêtu de son bas de pyjama. Visiblement, elle était arrivée au mauvais moment, il s’apprêtait sans doute à se glisser dans son lit, avant qu’elle ne frappe à sa porte. Pour dormir... ou peut-être avait-il de la compagnie? La jeune femme chassa cette idée de sa tête. A cette pensée, elle rougit légèrement, avant de retrouver son sang froid. Le changement brusque de température la déstabilisait sans doute un peu. Plus encore que la vue qui s’offrait à elle. Puis, sur un ton un peu plus hésitant que précédemment, elle formula une sorte d’excuse.« Vu l’heure, j’espère que je te dérange pas… Sinon, je peux retourner chez moi. ». . Elle n’avait certes pas envie de l’ennuyer avec ses problèmes. Bon là, elle avait limite l’impression de passer pour la fille un peu incruste, mais bon, tant pis. Elle frissonna un peu ; son corps devait commencer à se réchauffer doucement, malgré que ses vêtements restaient froids. Finalement, elle allait peut-être vraiment l’attraper cette pneumonie. Rien qu’à cette idée, elle se sentit encore plus idiote d’être restée dehors si longtemps.

Scarlett ne put s’empêcher de sourire de la situation, malgré son apparence un peu en pagaille. Elias trouvait toujours le moyen de la taquiner. Néanmoins, elle éclaircit vite la véritable raison de sa présence ici. Depuis peu, ses parents se disputaient souvent. Elle savait que le jeune homme serait le premier à comprendre, puisque l’atmosphère chez lui avait souvent été tendue. Sûrement une des raisons pour lesquelles il habitait avec ses amis maintenant. Quoique Scarlett ne put s’empêcher de sourire à nouveau, en songeant que l’ambiance n’était pas spécialement au beau fixe non plus dans la propre maison du jeune homme… Un de ses amis vivait justement ici en compagnie de sa sœur ; jeune femme qui avait certainement du mal à s’intégrer parmi un groupe de garçons plus âgés.

Les yeux de Scarlett s’égarèrent un instant sur le torse du jeune homme. Il était beau, et elle restait une femme qui savait le reconnaître. Elias n’était plus du tout un de ces adolescents pré-pubères et gamin. Loin de là. De toute façon, cela ne le gênait certainement pas qu’on le regarde, et Scarlett le savait très bien. Il n’y avait jamais eu aucun malaise entre eux à ce niveau-là, surtout vu leur lien plus étroit depuis quelques temps. Mais la jeune femme se demanda tout de même si elle ne débarquait pas à un mauvais moment. Le sourire d’Elias s’empressa de la rassurer.

« J’avoue le choix a été très dur. Entre l’ambiance infernale chez moi, la pneumonie ou toi, c’est sûr, j’ai eu du mal à me décider. ». Elle leva les yeux au ciel, souriante. Bien sûr qu’elle plaisantait ; elle n’avait pas hésité une seconde à venir. Et si elle tombait vraiment malade, tant pis. Au moins, elle ne partirait pas avec ses parents en vacances et n’auraient pas à subir de nouvelles scènes.

Il lui dit ensuite qu’il ne la laisserait évidemment pas retourner dehors, et l’entraîna avec lui dans sa chambre, histoire qu’elle puisse se mettre des vêtements secs. Scarlett le suivit sans mot dire, sentant le frisson du jeune homme lorsqu’il lui prit la main. Une fois dans la pièce, il farfouilla dans son armoire pour lui donner des affaires. « Merci ». Dit-elle simplement lorsqu’il les lui tendit. Elle l’écouta ensuite d’un air amusé lui proposer de se changer dans les toilettes, ou de rester ici. Elle savait bien qu’il n’avait aucun problème avec ça, elle non plus d’ailleurs, plus maintenant après tout ce qui s’était déjà passé. D’habitude, elle aurait réagi autrement, parce qu’elle n’avait pas envie que ça devienne systématique, presque facile de se déshabiller ainsi, de quoi elle aurait l’air après ? Mais là, elle était juste complètement gelée, elle se fichait bien du reste. Puis, elle n’avait pas envie de sortir et de tomber nez à nez avec un de ses colocataires qui se seraient réveillé. La jeune femme enleva donc sa petite veste, puis sa tunique sans se soucier de savoir si Elias la regardait ou non, et enfila le short et le t-shirt qu’il lui avait donné. Son corps frissonna un peu moins au contact du tissu sec. Elle se tourna alors vers le jeune homme et fit un tour sur elle-même. « Sexy n’est-ce-pas ? » Ria-t-elle d’elle-même de bon cœur. Effectivement, comme il lui avait dit, c’était un peu large, mais ça allait encore. Puis, son t-shirt sentait bon. Comme toujours. La jeune femme prit ensuite un élastique pour cheveux qu’elle avait autour du poignet, et les attacha histoire de ne plus goutter partout. Elle ramassa ensuite ses affaires et alla les mettre elle-même dans la sécheuse, puisqu’elle savait où c’était. Elle revint ensuite à pas de loups dans la chambre du jeune homme, histoire de ne pas réveiller ses amis.

« Bon, vu que la tempête n’a pas l’air de se calmer, je crois que je suis ici pour un moment. » Dit-elle en souriant, et en s’asseyant sur le lit du jeune homme. Puis, changeant de sujet, la jeune brune demanda « Alors, comment ça se passe la vie à quatre ? ». Elle se demandait si la situation s’était améliorée depuis la dernière fois qu’elle était venue et avait quasiment assisté à une scène de ménage entre les trois garçons et la jeune fille qui habitait ici. Si, si. C’était vraiment arrivé. A cette seule idée, la jeune femme n'osait même pas imaginer ce qui s'était passé depuis.

La jeune femme ne put s’empêcher de sourire lorsqu’il lui fit un compliment, mais elle préféra ne rien ajouter. Elle sortit ensuite quelques minutes de sa chambre pour débarrasser ses vêtements trempés, avant de revenir dans la pièce. Elle s’installa sur le lit d’Elias, et s’assit à côté de lui, ou plutôt glissa ses jambes sous la couverture, histoire de réchauffer ses pieds glacés. Elle prévint alors le jeune homme que la tempête ne se calmerait pas de si tôt, mais cela n’eut pas l’air de le gêner, que du contraire. Il lui proposa gentiment de rester aussi longtemps qu’elle le voudrait. Son regard se plongea dans le sien ; elle tenta de le cerner un peu plus, parfois il la surprenait vraiment. Scarlett comprit dans ses paroles ce qu’il avait voulu dire, elle pouvait compter sur lui. « Merci » répéta-t-elle une nouvelle fois. Elle le gratifia d’un nouveau sourire, avant de changer finalement de sujet. En effet, depuis qu’elle avait débarqué ici par surprise, elle n’avait pas vraiment pris le temps de prendre des nouvelles du jeune homme, depuis la dernière fois qu’ils s’étaient vus. Surtout qu’elle ne s’était pas éternisée, quand elle était arrivée en pleine dispute des quatre colocataires.

Elias lui expliqua que l’ambiance s’était encore dégradée, qu’avant ses potes et lui s’entendaient très bien, mais que l’arrivée de la jeune sœur de l’un d’entre eux avait tout changé. Leur différence d’âge et de goût avaient créé une distance trop importante entre les jeunes habitants de cette maison. Scarlett parvenait à comprendre le problème dans les grandes lignes : une jeune fille en pleine crise d’adolescence, entourée de beaux jeunes hommes, et d’aucune présence féminine… Elle leur tenait tête, et se réfugiait derrière un frère trop protecteur, qui faisait naturellement passer sa chair et son sang, avant son amitié profonde pour ses potes. Ce qui était logique, certes, mais la jeune brune comprenait la position difficile dans laquelle était mis Elias. S’il taquinait un peu trop sa jeune colocataire, la situation pouvait être mal interprétée et se dégrader rapidement. Or, Scarlett voyait bien qu’il n’avait plus la patience de supporter cette ambiance. Peut-être l’arrivée de cette jeune fille avait-elle déjà déclenché des réticences parmi eux et l’avait-elle senti ? Du coup, elle se réfugiait derrière son frère. Scarlett devinait à peu près la façon dont ça se passait. Elle réfléchit un instant, avant d’émettre une question.

« Et tu n’as jamais envisagé de la considérer comme ta petite sœur ? Je veux dire, depuis qu’elle est arrivée, tu la vois comme la sœur encombrante de ton ami. Elle l’a peut-être ressenti, qu’elle n’était pas à sa place, qu’il y avait un malaise pour elle de s’intégrer. Si toi ou tes potes agissiez un peu comme si vous étiez des grands frères, elle comprendrait peut-être mieux que vous ne voulez pas la vexer et elle arrêterait peut-être de ‘‘pleurnicher’’… »

D’habitude, la jeune femme ne voulait pas trop se mêler des histoires d’autrui, mais elle s’intéressait quand même à ce qui se passait dans la vie de son ami. Et en tant que femme qui sortait à peine de l’adolescence, elle essayait de se mettre dans la tête de la jeune fille, pour essayer de donner un conseil au jeune homme, et tenter d’améliorer l’ambiance. Mais bon, ça ne voulait pas dire que ça marcherait forcément. Elias avait sans doute déjà dû faire des efforts, sans succès… Pourtant, si leur jeune colocataire était là, ils n’allaient pas avoir le choix ; autant essayer de s’entendre au mieux.

« Au pire, tu veux que j’essaie de lui parler, lui proposer de venir quelques jours chez moi… ? Un week-end entre filles… Ca vous permettrait de souffler un peu entre vous, et à elle de s’échapper de l’antre des garçons. » Proposa sur un coup de tête la jeune femme.

Son ami changea ensuite de sujet et lui retourna à peu près la question. Qu’est-ce-qui n’allait pas vraiment chez Scarlett ? Hmm. A vrai dire, elle n’avait vraiment pas envie d’en parler. C’était compliqué. Elle n’était vraiment pas à l’aise pour évoquer ce sujet, et préférait nettement l’éviter autant que possible. C’est pourquoi, elle se contenta de rester assez vague.

« De mon côté ? Oh tu sais, les disputes de couples habituelles. T’en fais pas. Ca arrive, ça finira bien par s’arranger. C’est juste que parfois, c’est plus… violent. En paroles. On va dire que c’était la goutte de trop aujourd’hui, et je ne voulais absolument pas rester à les écouter se prendre la tête. C’est tout. ».

La jeune femme dévia son regard un bref instant, comme perdue dans ses pensées. En fait, elle connaissait une partie de leurs raisons et d’autres non. En réalité, elle avait occulté une partie d’entre elles, par choix. Moins elle en saurait pour le moment, mieux elle se porterait. Elle ne niait pas la présence des problèmes dans sa famille, elle en repoussait juste l’évidence pour le moment.

« Enfin, assez parler de mes problèmes » Ajouta-t-elle comme pour clore définitivement ce sujet pour le moment.

Son regard se reporta alors à nouveau dans celui du jeune homme ; elle savait qu’il essayait souvent de la cerner, de comprendre, et qu’il n’avait pas toujours toutes les réponses. Pourtant, il était capable de lire en elle mieux que la plupart des gens ; même si Scarlett n’arrivait pas très bien à expliquer ce qui la liait exactement au jeune homme. Elle était à la fois si distante et si proche de lui. A lui en dire assez, sans entrer dans les détails. A portée et à la fois insaisissable. C’était compliqué à comprendre, mais leur drôle d’amitié était devenue incontournable pour la jeune femme.

L’ambiance dans la maison des quatre colocataires ne semblait pas vraiment en bonne voie de se calmer, mais une jeune fille en pleine adolescence, entourée de garçons en âge de faire ce que bon leur semblait… Ca ne pouvait qu’être assez compliqué, quoiqu’il se passait. Scarlett tenta néanmoins de conseiller son ami, après tout en tant que femme, elle pouvait peut-être se le permettre. Histoire de faire changer d’un peu d’air la jeune fille qui habitait ici, la jeune Spencer proposa même à son ami de parler à sa jeune colocataire elle-même, ou de la faire venir chez elle pour un week-end. Mais ce n’était qu’une idée comme ça ; leur entente ne s’améliorerait entre eux que s’ils faisaient chacun un effort, et avant tout celui de se supporter. La jeune femme sourit lorsqu’Elias lui fit remarquer que ce ne serait pas du tout un cadeau que d'endurer la jeune Seavers.

« Tu verras » Répondit-elle en faisant un clin d’œil. « Entre filles, c’est souvent différent. »

En effet, soit ça se passe très bien, soit très mal. Il y avait rarement des demi-mesures. Puis, Scarlett n’était pas difficile pour s’entendre avec les gens, elle s’adaptait souvent, c’était juste qu’elle était… peu sociable, et distante, la plupart du temps. Enfin, ils ne tardèrent pas plus longtemps sur ce sujet, lorsqu’Elias lui posa une question sur les propres ennuis de la jeune femme ; la dispute de ses parents. A vrai dire, la jeune brune n’avait pas trop envie de donner des détails, elle lui expliqua donc vaguement ce qu’il en était, sans s’éterniser sur le sujet. Sentant sans doute l’hésitation dans la voix de la jeune femme, le jeune homme lui prit la main et lui répéta qu’elle pouvait venir quand elle le désirait, si jamais la situation dégénérait encore chez elle. Scarlett fut soulagée, et à la fois contente, qu’il ne lui pose pas plus de questions à ce sujet.

« Merci beaucoup. » Répondit-elle encore. « Mais je ne veux pas t’ennuyer avec ça chaque fois que je viens, ni te voir que quand ça va mal. »

Elle lui fit un petit sourire. Evidemment, elle ne venait pas à chaque fois quand les circonstances tournaient au vinaigre chez elle, ni que lorsqu’elle allait mal, mais aussi quand tout allait bien, ou pour prendre de ses nouvelles. La jeune brune ajouta donc ensuite une phrase qui clôturait clairement le sujet. Leurs regards se croisèrent, elle vit celui d’Elias chargé de questions, mais il n’insista pas. La jeune femme savait qu’il avait comprit que la situation était sans doute plus grave que ce qu’elle laissait entendre, mais elle préférait vraiment éviter d’en parler pour le moment. Le jeune homme lâcha donc la main de la jeune Spencer, et se leva en direction d’une armoire, en dessous de sa télévision. Il farfouilla un peu à l’intérieur, avant de se retourner vers Scarlett et de lui proposer plusieurs activités. La jeune femme se redressa un peu, descendit du lit à son tour et vint près de lui, pour voir parmi ce qu’il y avait dedans.

« T’as une Xbox ? » Dit-elle étonnée. Enfin, pas si étonnée, Elias était un garçon et la plupart d’entre eux en avaient au moins eu une dans leur vie, pour occuper leurs journées trop pluvieuses, comme aujourd’hui. « J’ai toujours voulu essayer ! »

Elle le regarda en souriant. A la vérité, elle ne lui admettrait jamais, que loin d’être une novice, elle avait déjà joué quelques fois avec son frère à des jeux de ce genre, le battant même de temps en temps… C’était un truc entre eux, ils passaient parfois une après-midi entière à s’amuser de cette façon… Qu’à cela ne tienne, Elias aurait sans doute la surprise de la voir… pas mal se débrouiller. En réalité, elle jouait même plutôt bien… la plupart du temps.

HJ: désolée pour la réponse pas top, je me rattrape à la prochaine ♥

Scarlett n’aurait trop su expliquer pourquoi, mais elle souhaitait vraiment que la situation dans cette maison s’améliore. Etait-ce parce qu’il s’agissait pour elle d’une sorte de refuge secondaire, ou parce qu’involontairement, elle tenait à aider Elias ? Son inconscient n’aurait pas su vraiment expliquer pourquoi, mais elle tenterait de passer ce week-end avec la jeune femme habitant ici… encore fallait-il qu’elle accepte, car comme le jeune homme lui avait fait remarquer, les deux jeunes femmes n’avaient pas grand-chose en commun. Devant l’apparente sûreté de la jeune Spencer, Elias finit simplement par dire qu’ils verraient le résultat ; si la situation s’en trouvait arrangée, il ajouta même qu’il lui devrait quelque chose. Cette fois, Scarlett plongea son regard dans le sien. Une lueur taquine, un peu malicieuse, se glissa dans ses yeux. Elle se leva, et s’approcha doucement du jeune homme, passa derrière lui, tout en laissant glisser avec douceur un doigt sur l’épaule nue de son ami, remontant vers son cou, jusqu’à le sentir tressaillir à ce contact. « M’en devoir une ? Et qu’est ce que tu ferais ? Je suis curieuse de le savoir. ». Murmura-t-elle près de son oreille, souriante. Elle aimait bien le charrier un peu. Finalement, elle reprit son sérieux. « Mais non, tu sais que je plaisante. Tu ne me devras rien du tout. Tu sais bien que tu fais déjà beaucoup en me laissant venir ici à peu près aussi souvent que je le veux. ». En effet, Scarlett avait parfois l’impression de profiter un peu trop, mais bon, ils n’allaient pas encore remettre ce sujet sur le tapis une énième fois.

Le jeune homme dériva donc la conversation sur les raisons qui avaient amenées la jeune femme chez lui ce soir. Les disputes entre ses parents, entre autres, avait-elle expliqué succinctement. Elle n’avait pas très envie de détailler ce qui s’était passé ; elle préférait plutôt passer la soirée à oublier ce mauvais épisode. Elias se montra d’ailleurs assez compréhensif ; même s’il en parlait peu, la jeune Spencer savait que chez lui aussi, il n’y avait pas toujours eu de très bonnes relations entre ses parents. Mais elle préférait ne pas s’étaler ; elle n’était pas venue chez lui pour jouer les pleurnicheuses, et puis de toute façon, elle aimait souvent mieux tout garder pour elle. Le jeune Sheirman acquiesça, respectant son choix du silence, et mit rapidement fin à ce sujet en lui proposant diverses activités. Scarlett réfléchit un instant, avant d’opter pour la fameuse Xbox. Elle se leva pour le rejoindre, et se fit passer pour une novice, juste parce qu’elle mourrait d’envie de voir la réaction de son ami. Evidemment, il se montra extrêmement surpris. « Très bien » Dit-elle. « Je sens que je vais me faire laminer. ». Ajouta-t-elle en levant les yeux au ciel, et en souriant une fois de plus.

Elias sortit le jeu de l’armoire, et inséra un « James Bond », un jeu pour débutant où il suffisait de descendre quelques méchants –en même temps, c’était le but basique de quasiment tous les jeux-. La jeune femme prit place sur le lit, rapidement rejointe par le jeune homme, qui se plaça à côté d’elle. Prenant la console de la jeune femme, il posa ses mains sur les siennes, pour lui expliquer comment fonctionnait les différentes commandes. Elle avait du mal à se retenir de sourire, ne fut-ce qu’intérieurement, puisqu’il ignorait que c’était loin d’être sa première fois. Elias lança enfin l’application, mais leur partie ne dura guère plus de deux minutes. Il avait vraiment mis le niveau le plus facile aussi… Pourtant, il se tourna vers la jeune Spencer, assez perplexe. Scarlett reconnaissait ce regard… En effet, elle connaissait les garçons –enfin surtout son frère-, et leur fierté à vouloir gagner quand ils jouaient aux jeux, surtout face à une fille ; ils voulaient souvent « l’impressionner » ou ils étaient mauvais perdants. La jeune femme riait un peu de cette réaction, c’est pourquoi elle avait laissé croire à Elias qu’elle était une débutante. La tête surprise qu’il avait en ce moment valait tout l’or du monde.

« Bon d’accord, j’ai peut-être un peu menti... ». Dit-elle, en souriant de plus belle. « J’avoue que mon frère m’a appris… deux ou trois trucs. ». Deux trois trucs… à voir. Elle limitait un peu, pour ne pas lui faire croire l’étendue de ce qu’elle savait déjà faire. Se tournant vers l’écran, la jeune femme poursuivit. « Et si on élevait un peu le niveau ? Sauf si tu préfères qu’on s’arrête déjà là. ». Mais Scarlett savait qu’Elias avait l’esprit compétiteur, et ne se laisserait pas avoir aussi facilement après une défaite ; leur sourire espiègle et leur regard joueur en disaient long sur le déroulement probable des prochaines parties. Environ une bonne heure s’écoula d’ailleurs, au cours de laquelle, chacun à leur tour, ils gagnèrent ou perdirent aux cours des différentes parties. Finalement, pour pimenter un peu le jeu, ils se mirent d’accord pour en jouer une dernière, et se départager. L’ultime partie débuta donc, une sorte de jeu de rôle prenant, mêlant encore enquête et espionnage. Au bout de quelques minutes, la jeune femme sentit son personnage sur le point de se faire acculer… Se tournant vers le jeune homme, qui avait l’air concentré sur sa partie, elle eut alors une petite idée à laquelle il ne s’attendrait sûrement pas. Se reculant sur le lit, elle fit semblant de jouer assidument, avant de déposer sa console et de venir se placer discrètement derrière lui.

La jeune Spencer s’approcha alors doucement de l’oreille de son ami, déposa ses lèvres sur son lobe et commença à descendre avec douceur le long de son cou. Dernièrement, Scarlett avait rarement pris l’initiative d’un rapprochement éventuel entre eux, parce que cette pseudo-relation améliorée qu’elle entretenait parfois avec le jeune homme l’avait rendue assez confuse depuis peu, et sans se l’avouer, elle se sentait un peu perdue. Mais ce soir, elle n’avait pas hésité. Elle continua pendant un instant, espérant qu’il se déconcentrerait un peu de sa partie. Mais le faisait-elle pour les bonnes raisons, ou n’avait-elle trouvé que le prétexte du « jeu » pour se lancer ? Elle l’ignorait, mais elle finit par s’arrêter et par relever la tête vers l’écran. « Oups, je crois que ton personnage est entrain de se faire tuer. » Dit-elle en souriant. Pendant qu’elle s’était exécutée, elle avait repris sa console pour continuer à jouer discrètement en même temps, mais concentrée vers Elias, elle n’avait guère fait mieux, à vrai dire. « Le mien aussi d'ailleurs » ajouta-t-elle, mimant une mine dépitée. Mais pour tout avouer, à cet instant, elle se fichait bien de gagner ou de perdre ou même du jeu. Elle déposa même les commandes, laissant le soin au jeune homme d’achever ou non sa partie, ou de se venger à sa façon de l’astuce diabolique de la jeune femme.

Scarlett s’était toujours bien sentie chez le jeune homme, malgré qu’elle tombait parfois au sein d’une ambiance tendue entre ses colocataires et lui. Elle n’était plus surprise d’entendre une dispute à propos de ménage non fait, ou de corvées qui trainaient. Vivre seule en tant que fille au milieu de garçons ne devait pas être facile tous les jours, elle devait bien le reconnaître, mais elle ne s’en était jamais mêlée jusqu’à présent. Après avoir donné quelques conseils au jeune homme pour tenter d’améliorer la situation, la jeune femme avait donc proposé de l’aider pour une fois à essayer d’arranger les choses vis-à-vis de leur jeune colocataire. Pour la remercier, Elias se proposa de lui rendre la faveur. La jeune étudiante fit mine de se montrer intéressée, le taquinant un peu, avant de décliner l’offre. Elias rit à son tour, lui signifiant ainsi qu’elle passait à côté de l’opportunité de l’avoir comme esclave pour une journée. Scarlett sourit et leva les yeux au ciel, l’air de dire qu’il exagérait toujours un peu.

Vint ensuite la véritable raison de la venue de la jeune femme ; à savoir ses problèmes familiaux, qu’elle préférait éviter d’aborder pour le moment. Si elle préférait « échapper » à l’atmosphère de chez elle en plein milieu de la nuit et par un temps pareil, ce n’était pas pour plomber l’ambiance chez Elias. Quoique, il faisait souvent tendu chez lui aussi, alors il serait sûrement le premier à comprendre. Ce soir, seul le jeune homme semblait encore éveillé dans la maison ; ses colocataires devaient sans doute être sortis quelque part, ou déjà bien endormis, malgré l’heure pas encore si tardive à ce moment-là. Comprenant vite la situation délicate de Scarlett, le jeune homme n’insista pas plus longtemps et l’invita à rester chez lui cette nuit. Très vite, la jeune Spencer se retrouva dans la chambre de son ami, habillée de ses vêtements secs, et assise à côté de lui entrain de jouer à des jeux vidéo. C’était peut-être pour ça qu’elle arrivait à si bien s’entendre avec lui ; parce qu’elle arrivait autant à s’adapter et à rire de trucs de « garçons » que ceux de filles.

Avant de commencer la partie, Scarlett fit croire au jeune homme qu’elle ne savait absolument pas jouer. Elle savait que beaucoup de garçons avaient une fierté phénoménale à vouloir gagner, surtout contre une fille. Elle ne voulait pas qu’il croit le contraire, et se dit qu’il valait mieux qu’il se rende compte de ce qu’elle savait déjà faire au moment voulu. Elias s’empressa pourtant de la rassurer, lui promettant de lui laisser quelques chances, mais la jeune femme n’était pas dupe. La galanterie n’avait pas vraiment place dans le monde des jeux vidéo. Elle lui fit un sourire à la fois en guise de remerciement, mais surtout parce qu’elle s’imaginait déjà sa tête quand il se rendrait compte qu’elle était loin d’être une débutante. Quelques minutes plus tard, la première partie fut lancée… et le niveau vite monté, en l’occurrence, puisque ce fut la jeune femme qui l’emporta. Evidemment, ce ne fut pas du goût du jeune homme, mais il ne lui en tint pas rigueur longtemps, prétextant qu’ils verraient bien vite si ce que lui avait appris son frère lui serait bien utile. Scarlett ne se laissa pas démonter, loin de là.

« Tu n’acceptes juste pas de se faire battre par une fille. Je t’ai testé, parce que je le savais. ». Rigola-t-elle en le taquinant encore un peu. « Je n’imagine même pas la réaction de tes colocataires s’ils l’apprenaient… » Ajouta-t-elle un peu songeuse rien que pour voir la tête qu’il ferait.

Elle sourit de plus belle. Scarlett savait très bien quelle serait la réaction de ses potes. Ils se moqueraient de lui gentiment, mais cela ne plairait sûrement pas au jeune homme. Cependant, elle lui avait plus dit cette phrase pour le taquiner, elle ne comptait pas vraiment aller crier sur tous les toits des petits délires qui n’appartenaient qu’à eux. Ce n’était pas son genre, en tout cas, pas vis-à-vis d’Elias. S’ensuivit alors une heure de jeux au cours de laquelle, il testa les compétences de sa jeune voisine en la matière. Après avoir remporté tour à tour une partie ou l’autre, ils décidèrent d’en jouer une dernière pour les départager définitivement. Mais la partie commençait à durer depuis un bon moment, et le personnage de Scarlett faiblissait. Une idée un peu tordue lui traversa l’esprit, et la jeune femme tenta de déconcentrer Elias par un moyen assez surprenant pour lui sans doute. Cependant, la jeune Spencer se prit elle-même à son propre jeu, et se rendit bien vite compte qu’elle se fichait de la partie à l’écran. Elle déposa ses commandes et cessa de participer. Elle venait de faire quelque chose qu’elle n’aurait sûrement pas dû faire ; d’habitude, elle savait se contrôler en toutes circonstances, ne rien laisser transparaître de ses émotions, mais inconsciemment, elle se rendit compte qu’elle avait eut envie de le déconcentrer. D’ailleurs, ce qu’elle avait fait avait plutôt bien fonctionné, car Elias avait lui aussi stoppé net la Xbox. Un peu frustré sans doute qu’elle s’arrête déjà, il lui fit remarquer qu’il se fichait royalement de la partie. La jeune brune s’était engagée sur un autre terrain, plus par impulsion subite, que par réflexion sur les conséquences réelles de son acte. Des conséquences dangereuses… pour leur amitié. Le jeune homme déposa ses mannettes sur le lit, et se tourna vers elle, le regard déterminé plongeant dans celui de la jeune femme, plus tout à fait sûre de ce qu’elle voulait ou non. Elias s’approcha à quelques centimètres d’elle et lui chuchota alors que ce petit jeu pouvait aussi se jouer à deux. Scarlett ne broncha pas, ni ne bougea d’un pouce. Elle réalisa alors que quelque chose venait vraiment de changer entre eux. Pourtant, elle ne redoutait absolument pas ce changement. Elle n’avait certes jamais eu ce genre d’approche avec lui auparavant, ni même avec quiconque. Mais, ça s’était juste produit, elle ne l’expliquait pas. Elle hésitait entre vouloir croupir six pieds sous terre pour revenir en arrière, et la sensation confuse d’une vérité qu’elle s’était toujours cachée à elle-même. La jeune femme retint sa respiration lorsqu’elle sentit son souffle près du sien, mais elle n’osa pas esquisser pas le moindre mouvement vers lui.

Le jeune Sheirman rompit alors le contact des yeux, et se leva pour aller ranger le jeu et les commandes. Elle avait lu dans son regard les mêmes interrogations qui la traversaient en ce moment-même. Pourquoi avait-elle fait ça ? Pourquoi maintenant et pas avant ? Elle-même l’ignorait, ou préférait l’ignorer. Elle savait que si le jeune homme avait souhaité un autre lien que la forte amitié qui les unissait, il ne se serait pas gêné pour essayer. Scarlett connaissait son ami par cœur et savait pertinemment bien comment il était habituellement vis-à-vis des filles qui lui plaisaient; mais avec la jeune Spencer, il n’avait jamais rien tenté, tout simplement parce qu’elle savait qu’il avait du respect pour elle, et que leur amitié avait toujours été plus importante pour eux qu’une simple aventure. Cependant, elle chassa alors toutes ces pensées de sa tête et tenta juste de se focaliser dans l’instant présent. Une fois tout rangé, le jeune homme se retourna et s’approcha d’elle, le regard illuminé d’une intention nouvelle. Il se pencha vers la jeune femme, lui prit doucement le visage de ses deux mains, et leurs lèvres se joignirent tendrement. Scarlett ferma les yeux et une foule de sensations l’envahit alors ; c’était la première fois qu’ils s’embrassaient, que leurs souffles se mêlaient si étroitement… La jeune femme se surprit presque à s’abandonner à la douceur des lèvres du jeune homme, approchant un peu plus encore le visage d’Elias vers elle comme pour mieux profiter de la chaleur de son corps contre elle. Elle n’avait jamais imaginé qu’ils auraient pu s’embrasser de la sorte, presque passionnément. Du moins pour elle… Mais cette belle sensation fut de courte durée ; ses pensées la rattrapèrent rapidement, et telle une alarme, s’éveillèrent en elle distinctement : elle ne savait que trop bien comment finissait ce genre d’aventures. Elle n’avait pas vraiment envie de sacrifier leur amitié uniquement pour faire partie d’un vulgaire tableau d’aventures sans lendemain. Pas contre leur amitié. Elle savait faire la part des choses et s’amuser, mais comment lui expliquer que dans sa tête tout était confus en ce moment et que pour elle, tout ceci n’’était pas qu’un simple jeu? Parce que Scarlett avait beau se voiler la face, elle s’était peut-être attachée à lui un peu plus qu’elle n’aurait dû… Comment aurait-elle pu le lui expliquer, sans briser sa propre fierté au passage et sans changer leur amitié en même temps ? Mais la jeune femme choisit l’option de la confusion ; elle devait sans doute se tromper, elle devait confondre amitié complice, avec cette autre forme d'attachement. Elle refusa de le reconnaître en elle-même, et ne dit donc rien, enfouissant ses pensées idiotes au fond de son inconscient. Elle ne voulait pas tout gâcher pour des soi-disant pensées qu’elle ne maitrisait pas. Elle profita encore un peu de l’instant, elle ne voulait pas que ça s’arrête dans le fond, puis le contact de leurs lèvres se rompit au bout de quelques secondes. Le petit air gêné de la jeune femme s’effaça aussitôt qu’elle reprit contenance lorsque leurs regards se croisèrent. Qu’il ait remarqué ou non son trouble, il ne pouvait pas en deviner la véritable raison. Alors qu’allait-il se passer maintenant ? Et jusqu’où serait-elle capable d’aller ? Elle n’allait pas tarder à le savoir.


pas de soucis! (:

Scarlett commençait à comprendre les attitudes différentes que pouvaient avoir Elias. Il était un cas particulier ; comme si la plupart du temps, il faisait de son comportement un jeu et qu’il attendait d’être à l’abri des regards pour redevenir lui-même. De toute façon, le jeune homme avait très vite remarqué que ses petits jeux ne marchaient pas avec la jeune Spencer. Elle le préférait quand il n’y avait pas de faux-semblants entre eux. Lorsque le masque d’Elias était tombé, pour laisser place à l’autre facette de sa personnalité, une amitié sincère était née entre eux. Les deux jeunes gens s’étaient montrés présents l’un pour l’autre, surtout ces derniers-temps entre les prises de tête d’Elias avec ses colocataires et de Scarlett avec ses parents. Mais à trop se découvrir et se dévoiler l’un à l’autre… Ils s’étaient laissé prendre au piège de sentiments indéchiffrables pour eux-mêmes.

Au début, cette soirée avait commencé comme tant d’autres avant… La jeune brune était sortie de chez elle pour rejoindre la maison de son ami. Il habitait à deux pas des Spencer. Ne se tracassant pas trop de la présence de ses autres colocataires -qui avaient d’ailleurs eu la bonne idée de s’enfermer assez tôt dans leur chambre pour une fois- ; récemment, elle passait souvent du temps avec le jeune Sheirman. Bien que les disputes dans la maison du jeune homme dataient de son arrivée à Magnolia, Scarlett ne comprenait pas vraiment pourquoi il restait déterminé à vivre avec ses colocataires, s’il ne supportait pas la présence de la sœur de son ami. Elle devait admettre que c’était un peu bizarre, mais bon, peu l’importait… Elle avait très vite mis ses questions de côté et s’en était accommodée aussi. A vrai dire, elle y était tellement habituée, qu’elle trouverait plus étrange encore que les prises de têtes s’arrêtent d’un coup…

Entre brèves confidences et multiples parties de jeux vidéo avec Elias, la soirée défila très vite. Il se faisait tard et les deux jeunes gens décidèrent de jouer une dernière fois. Au bout d’un moment, et un peu spontanément à vrai dire, Scarlett tenta de déconcentrer le jeune homme… Mais la façon dont elle le fit le rendit aussi perplexe qu’elle. Non, le geste de la jeune brune n’avait pas été anodin. Il suggérait des questions implicites quant à son véritable sens, mais la jeune Spencer aurait été incapable d’y répondre elle-même. Totalement surpris, Elias laissa quelques secondes s’écouler avant de rétorquer qu’il pouvait aussi jouer au même jeu qu’elle. Scarlett lut les interrogations qui brillaient dans ses yeux. Il partit alors ranger les commandes du jeu vidéo et revint vers elle pour l’embrasser. Bien loin de le repousser, elle s’abandonna alors à ses lèvres.

Passionné. Le baiser qu’ils s’échangèrent pouvait se décrire ainsi. Pas un baiser de simples amis, ni par goût du jeu, ni comme s’ils n’en avaient rien à faire de la personne qu’ils embrassaient. Scarlett le sentit au fond d’elle. Pour Elias, comme pour elle, quelque chose dans ce baiser sonnait trop vrai. Ils auraient pu recommencer, mais ce quelque chose les rendit perplexe et confus. Pire… Le jeune Sheirman en sembla effrayé. Se rendant compte de la réaction du jeune homme, Scarlett comprit. Elias avait peur, peur de ce qui pouvait arriver, de ce qu’il pourrait lui faire. Avait-il juste peur de ce qui venait de se passer ou tenait-il assez à elle pour ne pas aller plus loin ? Sans doute un peu des deux, parce que tous les deux savaient comment le jeune homme était avec les femmes. De son côté, la jeune étudiante refoulait aussi ce qu’elle ressentait au plus profond d’elle-même. Elle ne voulait pas briser cette « amitié » qui lui tenait à cœur ; ou plutôt elle ne voulait pas que leur lien se retrouve détruit pour ce qui venait de se passer.

Scarlett retrouva toute sa contenance ; ce fut vraiment comme si elle venait d’enfermer à double tour dans un tiroir de son inconscient cet épisode, et qu’elle ne comptait plus en reparler. Elias fit de même, mais son attitude avait pourtant changée. Il annonça à la jeune femme qu’il lui laissait sa chambre et qu’il partait dormir dans le salon. La jeune Spencer n’eut pas le temps de lui répondre qu’elle entendit un bruit dans le couloir… sans doute un de ses colocataires qui rentrait d’une soirée, ou qui venait de se réveiller. La dernière chose que voulait Scarlett à ce moment, c’était de devoir affronter les regards interrogatifs, ou les questions des amis d’Elias s’il sortait, ou même de se retrouver nez-à-nez avec ses colocataires demain en l’absence du jeune homme. Cela ne ferait que donner une réalité à ce qui venait de se passer, or tous les deux voulaient oublier. La jeune femme se releva et s’approcha du jeune Sheirman. Son lit deux personnes était bien assez grand, combien de fois les deux amis n’avaient pas dormi ensemble quand elle venait avant… ? S’il changeait cette habitude, Scarlett saurait que plus rien ne serait jamais comme avant… Mais peut-être ne l’était-ce déjà plus…

« Arrête de dire n’importe quoi. On ne va pas s’éviter pour… ‘‘ça’’. » Dit-elle à voix basse. Les mots s’écorchèrent, sortant avec un peu d’hésitation de sa bouche. Un nouveau bruit se fit entendre dans le couloir, des pas qui se dirigèrent vers les escaliers, une porte d’une des chambres voisine qui claqua. Le silence retomba à nouveau dans la maison, mais pour combien de temps ? Scarlett prit la main d’Elias. « Reste. » souffla-t-elle du bout des lèvres. Elle attendit quelques secondes, tenta d’esquisser un sourire, mais n’y arriva pas aussi bien qu’elle l’aurait voulu. Enfin, elle s’éloigna de lui, éteignit la lampe de chevet encore allumée et se glissa sous les couvertures dans un côté du lit. Après tout, il se déciderait de lui-même. Elle était trop fatiguée pour lutter ou encore penser à ce qui venait de se passer, ou même à quoique ce soit d’autre aujourd’hui. Demain serait un autre jour. Un jour bien différent de la soirée qu’ils venaient de passer ensemble…

HJ : je te laisse donc finir le sujet, comme on avait dit ♥