Lorenzo avait toujours eu deux passions dans la vie : la drague de jolies filles et les mathématiques. La première se comprenait, la seconde surprenait. Mais comme, désormais, il lui était interdit de pratiquer la première, il devait compenser avec la seconde. Enfin, n'allez pas vous imaginer un Lorenzo transformé en geek des mathématiques, qui se droguait à coup de fonctions et se touchait la nouille en résolvant des équations. Cela signifiait juste qu'il se consacrait corps et âme à son travail ... à défaut de se consacrer à son mariage, dirons certaines mauvaises langues. Ce à quoi Lorenzo répondrait, l'étincelle à l'oeil, « Ce sont les adultes de demain, que je forme ! ». Dévoué ce petit, dévoué ...

Aujourd'hui, c'est avec Katya Fitzgerald qu'il avait rendez-vous, si on pouvait nommer ça ainsi. Donner un cours à cette jeune fille le rendait nostalgique et lui rappelait l'ancienne époque, quand il n'était pas encore parti - puis revenu - , qu'il était encore célibataire ... Comme tout avait pu changer, en un an. Mais le niveau en maths de son ancienne élève, lui, n'avait pas bougé d'un poil. Toujours au raz des pâquerettes, tendant vers moins l'infini. Pourtant, c'était à contrecoeur que le professeur avait accepté de lui donner des cours particuliers. La situation serait malsaine, quand on connaissait son comportement "d'avant". Mais il éprouvait une certaine pitié pour la jeune fille, et savait qu'elle pouvait réussir. C'est pour cette raison, et pour sauver l'avenir du pays, que Lorenzo se rendit donc chez les Fitzgerald (je crois que Lolo est maudit, il se tape que des sujets avec des personnes aux noms de famille compliqués). Il sonna, Katya lui ouvrit et le débarassa de son manteau. Il ne savait dire si la demeure avait changé, il faisait rarement attention à ce genre de futilités. Cela lui attirait d'ailleurs les foudres de sa femme, quand elle agrémentait leur maison d'un petit quelque chose - comme un bouquet de fleurs fraîches - et qu'il ne s'en rendait pas compte. Mais trèves de plaisanteries, Lorenzo était ici pour parler mathématique, et pour faire de Katya la wonderwoman des mathématiques.

Lorenzo ▬ Voyons Katya, je suis sûre qu'après quelques cours, tu feras des prouesses en mathématiques !

Machinalement, il remarqua qu'il tutoyait tous ses élèves - Katya y compris - mais pas Nina. Zut, il ne fallait absolument pas penser à elle. Surtout en présence d'une de ses amies. Amies ... il se demanda si Katya avait déjà confié à Nina les avances qu'il avait pu lui faire. Bien sûr, il ne s'était jamais jeté sur elle en arrachant ses vêtements, il était dragueur mais pas porc (cassdédi !). A croire que non, en fait. Sinon, Nina lui aurait fait une scène monstre qui dépassait tout ce qu'il pouvait imaginer. Bien sûr, elle savait qu'il avait profité du statut non-officiel de leur relation, mais Katya, ce n'était pas pareil. Mais, de toute façon, tous ces problèmes étaient derrière lui. Aujourd'hui, il était branché femmes sans âmes. Trèves de plaisanteries. Ils étaient là pour faire des maths et pour sauver l'avenir de la petite blonde. Lorenzo s'assit donc sur une des chaises placées devant le bureau et ouvrit sa mallette pour en sortir quelques polys d'exercices et un cahier de brouillon.

Lorenzo ▬ Préfères-tu commencer par des exercices ou un rappel de cours ? Et dis moi s'il y a des chapitres en particulier que tu souhaiterais revoir

Connaissant la jeune fille, il avait préparé plusieurs types d'exercices. C'était le premier cours particulier qu'il donnait depuis son retour et, bizarrement, il eut tout à coup l'impression d'être vraiment de retour, désormais.

Tout revoir ? Lorenzo se retint de soupirer, mais le coeur y était. Il restait perplexe devant ces gens affirmant ne rien comprendre aux maths, être mauvais en maths ... Pourquoi ? les maths ne nécessitaient même pas de mots, cette matière s'exprime avec un langage de chiffres, quoi de plus neutre, quoi de plus froid ? C'était une matière stricte, figée ... Pas comme le français ou la philosophie, où tout était vrai et rien n'était vraiment faux, où l'imprévu n'était pas forcément une erreur. Ce que Lorenzo aimait dans les maths, c'est qu'il n'y avait jamais de surprise. Oui, le professeur n'aimait pas les imprévus, il en était souvent déstabilisé et préférait garder le contrôle sur sa vie ... Mais là, nous nous égarons. Or, nous avons une jeune fille en détresse à sauver, revenons donc à nos moutons.

Katya hasarda les fonctions, en guise de réponse. Lorenzo leva les yeux au ciel. Ce truck, comme elle l'appelait, était une notion qu'elle avait vue depuis des années ... Et elle ne l'avait toujours pas comprise. A sa place, Lorenzo se serait inquiété depuis bien longtemps, mais Katya faisait partie de ces gens pour qui les maths ne sont pas indispensables à la vie. Alors que, pour Lorenzo, la vie n'était que calcul.

Lorenzo ▬ Très bien, va pour ce « truck » !

Il lui sourit, Lorenzo avait toujours préféré que ses élèves se sentent à l'aise avec lui. Il n'était pas ce méchant professeur qui frappait les doigts des élèves avec une règle à la moindre réponse fausse. Après tout, il n'était pas beaucoup plus âgés qu'eux, il se serait senti hypocrite de se considérer supérieur. Enfin bref. Lorenzo ouvrit donc son cahier, prêt à expliquer les fonctions à Katya.

Lorenzo ▬ Tout d'abord, pour définir une fonction, il nous faut un intervalle qui sera l'ensemble de définition de notre fonction, et que nous noterons D. Tu te rappelles ce qu'est un intervalle je suppose ? Donc, soit f une fonction qui va de D dans ℝ. Définir une telle fonction D, c'est associé à tout x de D un unique réel dans ℝ, noté f(x) et appelé image de x. On dit également que D est l'ensemble de départ et ℝ l'ensemble d'arrivée.. As-tu des questions là dessus ?

Au fur et à mesure qu'il parlait, Lorenzo avait écrit sur son cahier :

Citation :

f : D ⟶ ℝ
x ⟼ f(x)

Puis, il posa son stylo et regarda Katya. Avant d'aller plus loin, il fallait qu'elle comprenne cette base. Ensuite, tout serait beaucoup plus facile. Mais d'abord, elle devait savoir de quoi ils parlaient, en quoi consistaient ces "trucks".

Lorenzo ▬ Si tu veux, on peut transposer ça autrement, pour que ce soit plus parlant. Imagine que D soit l'ensemble des filles et ℝ l'ensemble des gens. On peut appeler f la fonction qui à toute fille x de D associe quelqu'un, noté f(x), de ℝ.

Le gros problème des fonctions étaient que les élèves n'arrivaient jamais à « voir » ce que c'était. Mais les fonctions n'étaient pas représentables dans l'esprit, d'où la difficulté.

C’était tout de même un peu dommage que Lorenzo soit un pédophile, dans le fond il était vraiment sympa comme prof. Après que Kat lui ait proposé de réviser les fonctions, nommant ça un « truc », le jeune professeur ne s’était pas énervé pour autant et lui avait fait un gentil sourire. Du genre un sourire ultra sexy qui aurait pu faire fondre n’importe quelle élève, toutes sauf Kat, parce que la cheerleader restait de marbre devant son quelconque charme. Enfin presque. Non franchement, il était cool le Mr Di Mascio ! A ce moment là, Katya avait presque envie de l’apprécier mais il commença à parler de fonction s’enfonçant dans un discours incompréhensible. L’adolescente resta d’abord silencieuse, faisant mine de comprendre. Le professeur lui demanda si elle avait des questions, la petite blonde qui n’avait absolument pas suivit ce qu’il venait de dire se contenta de hocher la tête en disant :

« Euh non aucune, je crois avoir à peu près compris jusqu’ici ! »

Lorenzo commença à gribouiller des choses sur le cahier de brouillon, Kat regarda se qu’il écrivait avec attention écoutant sa petite explication comprenant quelques mots, mais très vite fait… Elle resta de nouveau silencieuse, méditant sur ce que venait de dire le matheux. Elle avait tout de même du mal à comprendre. Pourquoi les maths étaient toujours aussi difficiles ? Pourquoi ce n’était pas aussi simple que la recette d’un gâteau au chocolat par exemple ? Si Kat excellait dans certain domaine telle que la cuisine, en sport ou même l’anglais, les maths n’était réellement pas son fort. C’était en partie à cause de cette maudite matière qu’elle avait loupé sa dernière année de lycée ! Et comme les précédentes années, la malédiction des maths reprenait de son cours. Et Kat continuait à ne rien comprendre, se prendre la tête à réviser comme une folle pour se retrouver avec des F.
Elle essayait de chercher un truc à dire, histoire de ne pas passer pour une imbécile totale devant son prof. Elle se remémora ce qu’il venait de lui dire sur fonctions pour l’aider à mieux comprendre, comme quoi D était l’ensemble des filles et ℝ l’ensemble des gens. Elle avait pas trop compris la logique, mais hasarda tout de même :

« D est donc comme une part de ℝ ? Mais y’a un truc que je ne comprends pas, x ça pourrait être interprété comment dans votre histoire ? Le nombre de filles ? »

Elle essayait de comprendre, franchement. Elle fronçait les sourcils fixant le cahier de brouillon, résolue à comprendre ces putains de fonctions ! Pourtant, elle aurait vraiment préféré être tranquille dans son lit là. Voire même, elle regrettait la maternelle, à cette époque à part faire des petits animaux en pâte à modeler, on se cassait pas trop la tête. On n’avait pas de maths et surtout pas de fonctions ! Ah si seulement cette belle époque où tout nous été permis et où on vivait sur le bon dos de ses paternelles pouvaient rester éternelle…

Honnêtement, Lorenzo se demandait si Katya y mettait du sien. Elle n'avait jamais aimé les maths, comme beaucoup d'élèves de son âge. Elle avait toujours pensé qu'elle s'en sortirait en faisant l'impasse sur les maths. Et voilà le résultat ... Mais elle avait payé pour ces cours et puis, elle ne voulait sûrement pas tripler sa dernière année. Alors, le jeune homme supposa qu'elle essayait un minimum de comprendre. La preuve avec cette question qu'elle n'aurait pas posé si elle l'avait écouté correctement. Mais Lorenzo ne lui reprochait pas, c'était humain : comme se concentrer sur un sujet que vous avez en horreur ? Et puis cela ne le dérangeait pas, il savait être patient. Il devait être l'un des seuls idiots qui ne donnait pas des cours pour l'argent, mais pour instruire ses élèves et leur permettre de progresser (et pour rencontrer des petites minettes).

Lorenzo ▬ Non non, X est une seule fille, une fille que tu prends dans D qui est toutes les filles, et qui est bien une part de ℝ. Ça va maintenant ?

Sa question était avant tout réthorique car, là, il ne pouvait plus faire grand chose pour Katya. Elle devait apprendre ces explications de base, pour la suite. Mais il attendit néanmoins qu'elle lui réponde, avant de passer à la suite. Il hésitait : des exercices étaient-ils déjà nécessaires ? Il aurait tendance à passer directement à la dérivation, chapitre peut-être le plus important, dans la découverte des fonctions. Surtout que, des fonctions toutes seules n'étaient jamais très utiles dans des exercices et la première question de tout exercice qui se valait se rapportait souvent à de la dérivation. Mais il ne voulait pas embrouiller l'esprit de Katya. Ce cours risquait donc d'être très très long.

Lorenzo ▬ Maintenant, tu vas calculer quelques images de fonctions, d'accord ?

Il inscrivit donc sur son cahier

Citation :

f : D ⟶ ℝ
x ⟼ x² + 3x - 2

f(3) =
f(9) =
f(11) =

Puis il lui tendit son cahier et son stylo

Lorenzo ▬ Tu vois comment faire ? Sinon, je fais la première avec toi.

Bon, Katya avait un peu l’air de passer pour une idiote… Mais après tout, Mr Di Mascio n’était pas là pour la juger, mais pour l’aider à progresser. Du moins, c’est ce qu’elle espérait. Dans le fond, c’était un type bien, elle le savait… Mais le fait qu’elle sache pour Nina et lui n’aidait pas vraiment Katya à avoir une haute estime de lui. Pourtant, il avait vraiment l’air de vouloir l’aider, il gardait patiente, malgré les questions un peu stupides que pouvait poser Kat… Bref, à l’avenir, elle ferait plus attention à se monter moins s’avère avec lui. Il lui réexpliqua donc son histoire de filles etc… Cette fois, Katya avait l’impression d’avoir capté le truc.

« Oui ça va… Je crois que j’ai compris ! »

Elle essayait vraiment d’y mettre du sien, mais dur dur de se concentrer face à une matière comme les maths, qu’elle avait réellement en horreur. Pourtant, il fallait qu’elle y arrive si elle voulait réussir ses examens de fin d’année et pouvoir enter à l’université. Après, adieu les maths, de toute manière, elle en aurait plus besoin dans les études qu’elle comptait entreprendre… Lorenzo inscrit sur un cahier des exercices qu’il tendit à Katya en lui demandant de les faire. La petite blonde les regarda, quelque peu intimidée… Il lui proposa de faire les premiers, ensemble, Kat hésita : elle pensait savoir comment faire. Mais, encore une fois, elle avait un peu peur de passer pour une nouille… Pourtant, il fallait bien se tromper pour mieux comprendre après, n’est-ce pas ? Sans plus attendre, elle écrivit donc sur le cahier :

Citation :

f : D ⟶ ℝ
x ⟼ x² + 3x - 2

f(3) = 3² + (3x3) – 2
= 9 + 9 – 2
= 18 – 2
= 16
f(9) = 9² + (3x9) – 2
= 81 + 27 – 2
= 98 – 2
= 96
f(11) = 11² + (3x11) – 2
= 121 + 33 – 2
= 154 – 2
= 152

Kat leva les yeux vers son professeur, en attendant de savoir si ce qu’elle avait fait été bon. En le regardant comme ça, elle ne put s’empêcher de se rappeler qu’à un moment de sa vie, il avait été l’amant de Nina… C’était glauque à dire. Sa meilleure amie n’aurait jamais réussi à rester assise comme ça seule en face de Mr Di Mascio, seulement pour faire des maths. Non, elle, elle l’aurait embrassé, voire même au-delà… Enfin bref, Kat n’avait pas très envie de s’imaginer tout ça. Alors, sans trop réfléchir, elle demanda soudainement :

« Mais Nina, vous l’aimez toujours ? »

Kat ne savait pas si Lorenzo était au courant que Nina l’avait dit à ses meilleures amies. Elle espérait que oui, de peur que ça porte conflit entre Nina et lui et qu’au final, Katya se sente coupable… En fait, la petite blonde tentait pour la première fois de laisser sa chance à ce couple qui la dégoutait pourtant… Elle voulait savoir ce que ressentait vraiment Lorenzo pour Nina avec de le juger de pédophile ou quoi que ce soit. Après tout, Nina avait vraiment l’air de l’aimer, et ce n’était pas digne d’une vraie meilleure amie de ne pas la soutenir sur ce point.

Après toutes ces explications différentes, Katya pensait avoir compris. Lorenzo réprima un soupir de soulagement, mais il était heureux que le cours progresse. La jeune fille avait toujours eu des difficultés dans sa matière, alors qu'elle semblait travailler sérieusement. Il était temps qu'elle récolte les fruits de son travail. Il la regarda faire les calculs, elle avait enfin compris le fonctionnement ! Il sourit légèrement, ne voulant pas passer pour un gros débile aux yeux de son élève. Il avait beau être un coureur de jupons qui profitait de la vie, il aimait vraiment les maths et son travail professeur, il voulait que ses élèves réussissent. Et puis, quand un de ses élèves échouait, il s'en voulait toujours un peu, cherchant là où son enseignement avait fait défaut. Il était perfectionniste, et se remettait donc souvent en question.

Alors voyons voir ...

D'ailleurs, sa satisfaction à l'égard de Katya fut de courte durée : son deuxième calcul comportait une erreur. Il se pencha sur le détail pour comprendre, et vit qu'elle avait fit une bête de calcul. Elle avait cependant assimilé le mécanisme des fonctions, c'était encourageant ! Il s'apprêtait à lui faire remarquer que 81 + 27 ne faisait pas 98 mais 108, quand elle reprit la parole, pour lui parler de ... Nina ?! Naturellement, les yeux de Lorenzo s'écarquillèrent, Katya l'avait pris de court et il ne pouvait cacher sa surprise. Comment savait-elle et surtout que savait-elle ? Nina ne lui avait jamais précisé qu'elle en avait touché mot à ses amies et Lorenzo était mi vexé, mi énervé de l'apprendre ainsi. Mais surtout, il devait se dépatouiller de cette situation compromettante. Que répondre à une élève qui le questionnait sur ses sentiments pour une autre élève, sachant qu'il était marié ? Il ne savait pas ce que Katya ferait de l'information, il ne pouvait pas mettre Tiffany en danger. Même si elle se contentait de courir le répéter à Nina, leur relation espérait impossible. Elle était son élève et il était marié qui plus est. Il se trouvait dans un impasse et ne trouvait pas la solution. Cette fois-ci, aucun calcul, aucune formule mathématique, ne serait la clé du problème. En son fort intérieur, une petite voix le sommait de relever la vérité. Après tout, les deux jeunes filles seront normalement diplômées dans moins de deux mois, Nina ne serait alors plus son élève. Mais une dernière donnée venait encore compliquer la donne ...

Peut-être l'as-tu oublié mais je suis marié Katya. Ma euh, ma relation avec Nina est terminée.

Il aurait pu simplement lui dire que sa question était déplacée, mais Lorenzo n'avait pas de telles relations avec ses élèves. Il n'avait que sept ou huit ans de plus qu'eux, il était plus un grand frère qu'un professeur, et au contraire cela lui plaisait ainsi. Et surtout, il ne voulait pas glacer l'atmosphère et mettre Katya mal à l'aise. Elle cherchait juste à comprendre son amie, en somme. Par contre, Lorenzo réalisa soudainement que, si Katya était au courant de la soirée de saint Valentin de sa meilleure amie, elle n'allait pas apprécier sa maigre réponse ...

Mais quelle idée de poser une pareille question ! C’était carrément déplacer, pas du tout le genre de questions que l’on posait habituellement à ses professeurs… Qu’est-ce qui lui avait pris ? Elle ne s’était rendue compte de son erreur qu’après avoir prononcé sa phrase, et la voilà les yeux baissés sur ses mains, tortillant ses doigts d’angoisse et d’embarra. Elle s’apprêtait au pire venant d’un professeur ! En réalité, elle ne s’était jamais montrée aussi insolente auprès d’un enseignant, même si ce n’était qu’une simple question, c’était réellement déplacé… Elle espérait que Lorenzo garderait encore une fois sa cool attitude, même si cela risquait d’être dur face à une question comme celle-ci. Pourquoi ne s’était tout simplement pas tenu à ses fonctions ? Elles étaient toutes innocentes elles au moins, elles n’étaient pas déplacées, tout ce qu’il y avait de plus normal entre élève et professeur. Et puis en même temps il ne l’aidait pas à avoir une telle relation avec Nina, franchement. Ce n’était pas de sa faute si après Katya n’arrivait pas à se concentrer devant le grand amour de sa meilleure amie, il fallait la comprendre ! Enfin bon, la petite blonde plissait les yeux, comme si elle s’apprêtait à se faire engueuler ou quelque chose dans ce genre… Mais rien ne se passa. A la place, Lorenzo expliqua seulement que sa relation amoureuse avec Nina était terminée… Pour le coup, Katya rehaussa la tête et ne put s’empêcher de déclarer d’une voix un peu révoltée :

« Mais Nina vous aime ! Vous n’avez pas le droit de lui faire ça, de lui laisser tant d’espoirs pour conclure finalement par un ‘ce n’est pas possible, je suis mariée’… »

Et une nouvelle fois, Katya faisait une belle gaffe. Elle n’avait pas à se mêler de la vie amoureuse de son professeur, c’était totalement déconseillé même… Mais d’un autre côté, elle avait bien le droit de se mêler de celle-ci lorsqu’elle concernait aussi sa meilleure amie, à qui elle tenait énormément. Et mine de rien, elle savait qu’avec tout ça, sa petite Nina souffrait énormément… Ça l’embêtait et être face à la personne qui faisait tant de mal à la petite brune n’aidait en rien. Pourtant, Katya savait ce qu’elle faisait été mal, surtout devant son propre professeur… Alors avant qu’il n’ait eu le temps de répondre, elle lâcha :

« Excusez-moi, je ne devrais pas parler de ce genre de choses avec vous… »

Mais c’était trop tentant… Néanmoins, Katya avait beau dire ça, elle relança le sujet :

« J’aimerai seulement m’assurer que ma meilleure amie ne fait pas des conneries pour rien. »

Et pour le moment, ça avait l’air d’être le cas, malheureusement. Si Nina l’aimait, Lorenzo donnait l’impression de jouer d’elle pour finalement la rejeter en prenant l’excuse du « je suis mariée ». Certes, c’était une bonne excuse, mais par respect pour sa femme et pour Nina, il ne devrait pas agir comme il le fait… Continuer à tourner autour de la jeune Van Valkenburg, tout en continuant d’entretenir une relation avec sa compagne. Du moins, c’est ce que Katya déduisait.

Spoiler:

Cette situation était quelque peu perverse. D'un côté, Lorenzo voulait en parler. Bien sûr qu'il avait menti à Katya, bien sûr que cette relation était toujours d'actualité pour lui. Seulement il ne pouvait pas dire la vérité à son élève. Comme il l'avait dit, il était marié. Pourtant, les mots mourraient d'envie de sortir. Mais Lorenzo les retenait, serrait les dents pour les maintenir prisonniers. Il avait confié la vérité une fois, il ne ferait pas cette bêtise une seconde fois. Surtout qu'il avait une promesse, désormais. Il devait se persuader que Nina et Lui appartenaient au passé. Mais Katya ne lui facilitait pas la tâche. Quand elle se lança dans cette longue tirade mélodramatique, digne de Romeo et Juliette, Lorenzo dut se retenir de toute réaction. Mais à l'intérieur, bien sûr qu'il jubilait, comme un gosse de 13 ans qui apprend que son amoureuse l'aime en retour. Il était comme dans un dessin animé, et Katya venait de la part de Nina pour lui donner une carte en forme de coeur avec écrit "je veux bien être ton amoureuse", entouré de plein de petites fleurs. Mais Lorenzo ne devait faire aucun signe que son élève pourrait mal interprêter. Il lui avait dit, c'était du passé. Enfin, non ça ne l'était pas, mais ça devait en être ainsi.

« Quels espoirs Katya ? Cela fait plusieurs mois que je n'ai pas vu Nina, en dehors des cours j'entends. Je ne suis pas le seul à avoir rangé cette hm, cette relation dans le passé. »

Mon dieu que c'était pathétique, voilà qu'il s'y mettait aussi, au mélodrame. Il s'imaginait déjà, une épée à la ceinture, déclarant que sa Nina ne l'aimait plus, avant de s'effondrer à terre, meurtri par le chagrin. Pourquoi parlait-il de ça avec Katya, au juste ? Certes c'était sa faute à elle, elle avait abordé le sujet, mais en adulte il aurait très bien pu ne pas répondre à ses questions. Mais non, Lorenzo n'était pas si mature, pas si réfléchi, sur le coup. Lui, sautait dans le plat les deux pieds en avant, tout content de faire une bêtise. Ce sujet était vain, en discuter avec la jeune fille n'avancerait à rien. D'ailleurs, elle avait raison, elle ne devait pas parler de ça avec lui. Mais la situation était perverse, car au fond, Lorenzo était bien content qu'elle l'aborde. Que s'imaginait-il ? Que Katya lui assurerait qu'il était toujours le propriétaire du coeur de Nina, et donc qu'il sauterait sur son cheval pour aller quémander la main de sa belle ? C'était sans avenir. Alors, Lorenzo fit preuve d'un effort surhumain, et redevint un adulte.

« Tu as raison Katya, nous ne devrions pas parler de ça. Et ne t'inquiètes pas, ta meilleure amie ne fait plus de conneries, comme tu dis. »

Il lui fit un sourire qui se voulait rassurant, bienveillant. Maintenant, naturellement, impossible de reprendre les mathématiques. Il regarda sa montre, il restait encore du temps avant que le cours se finisse. Il était tenté d'y mettre fin plus tôt, quitte à ne pas demander son dû à la jeune fille. De toute façon, ils avaient à peine fait des maths, et Lorenzo n'avait pas dû lui être d'une grande aide, alors que l'examen approchait. Il attendit néanmoins que Katya évoque le sujet en premier. Certes, au fond, ce n'était qu'un leurre, son coeur espérait qu'elle renchérisse sur le sujet Nina, mais sa raison le défendait d'en reparler. Il fallait être raisonnable, Tiffany l'attendait à la maison. A cette idée, il ne put s'empêcher de soupirer. Cette vie bien rangée, qui l'attendait chez lui. Et Nina, Nina qui partirait bientôt, probablement. La jeune fille était trop pleine de vie pour passer sa vie à Magnolia. D'ailleurs, il ne savait même pas ce qu'elle faisait l'année prochaine. Mais il se garda bien de poser la question à Katya. Il ne devait montrer aucun signe d'intérêt pour la jeune fille, où Katya s'empresserait d'y voir les vestiges d'un amour pas complétement éteint. Il irait plutôt se renseigner au secrétariat du lycée, comme ça. Il se félicita même de cette réaction raisonnable. C'était bien, il était sur la bonne voie.