Adrian & Katya

Même ton pantalon en voudra !

mapydew.

Austin était un véritable emmerdeur. Et pour cause : à cause de lui, Katya avait deux immondes poches sous ses yeux. Depuis quand on organisait une fête improvisée le lundi soir ? C’était la goutte d’eau qui faisait déborder le vase, Kat lui en toucherait deux mots dès qu’elle pourrait ! Mais pour l’instant, il était huit heures du matin, et tout le monde dormait dans la collocation. Nina n’avait cours que l’aprèm, et Austin s’en foutait des siens. Quelle chance ils avaient ! De son côté Kat devait se rendre au boulot tôt, pour s’occuper des clients du matin. Elle regarda longuement son reflet dans le miroir de sa salle de bain, se passant un léger coup de brosse et un coup de maquillage pour faire style. Niveau vêtements, elle tenta de faire un effort, elle enfila son éternel legging à motif léopard avec un gros pull marron au-dessus, parce que maintenant que l’automne avait vraiment déposé ses valises, il faisait un froid de canard !
Elle se força à fermer les yeux en passant dans le salon, c’était un désastre, elle le savait et sachant qu’Austin ne rangerait rien, elle allait finir par devoir faire elle-même cette dure corvée. D’un côté, ça ne la changeait pas vraiment de la maison, sa famille était tout aussi bordélique. Elle quitta bientôt le petit appartement des trois étudiants, pour filer dans les rues de Philly à bord de sa bicyclette. Ce qu’elle aimait ici, c’est que même à huit heures du matin, il y avait du monde, de la vie… C’était autre chose comparé à Magnolia, là-bas à cette heure-ci, il n’y avait que des bons hommes qui montaient dans leurs voitures, d’un air pressé, pour aller au boulot et des femmes au foyer qui taillaient pour la énième fois leurs rosiers. C’était un cercle vicieux que Katya ne regrettait absolument pas ! Elle ne tarda pas à arriver au petit pub où elle travaillait pour aider ses parents à payer ses études et son loyer. Son boss était déjà là, et la petite blonde prit bientôt place derrière le comptoir, attendant que les clients arrivent.

Elle commença à se perdre dans ses pensées, tout en se faisant une liste des choses qui lui manquaient de Magnolia. Ca débuta déjà par : Harrison, son chien, ensuite par sa famille et puis finalement, Christian. Elle avait l’impression d’avoir de moins en moins de nouvelles de lui, et maintenant, dès qu’elle avait une pensée pour lui son cœur se serrait. Ce qu’elle craignait en quittant Magnolia se réalisait peut-être ? Perdre de vu les gens qu’elle aimait, et notamment son petit ami. Pourtant, elle essayait de venir dès qu’elle pouvait, mais ces dernières semaines, il était vrai qu’elle n’avait pas fait le trajet jusque là-bas depuis un bout de temps. Durant un moment, elle passait son temps à appeler Christian dès qu’elle avait un trou, puis elle avait cessé, espérant qu’il ferait aussi la démarche de son côté. Mais bien sûr, il ne fallait pas lui demander la lune, c’était Christian après tout, il n’aimait pas téléphoner. Si bien que la fréquence de leurs coups de fils passa de un par jour à un tous les trois jours à un par semaine… Le ventre de Kat se serra à cette pensée. L’unique chose qui marchait dans sa vie était dorénavant devenue son unique problème. Elle secoua d’un coup sec la tête pour se changer les idées, c’est à ce moment-là que son premier client de la journée débarqua… Sa tête ne lui était pas inconnue, et pourtant la jeune Fitzgerald était incapable de le replacer.

« Bonjour m’sieur ! Qu’est-ce que je vous sers de si bon matin ? » Elle dit ça d’un ton las, suivi d’un long bâillement. Eh bien, cette journée s’annonçait prodigieuse !

Katya était si crevée qu’elle en oubliait ses bonnes manières ! Pourtant elle avait été élevée par deux restaurateurs, elle faisait en temps normal une parfaite petite serveuse, mais déprime et fatigue, ce n’était jamais la meilleure des additions. Néanmoins, elle se rappela que son boss était dans les parages, et alors que le client était en train de lui demander un café, Katya lui adressa un léger sourire comme elle savait si bien le faire ! Tout en scrutant à nouveau le visage de l’homme, elle se rappela qu’il lui disait bel et bien quelque chose. Peut-être un client fidèle du pub qu’elle n’avait pas vraiment remarqué jusqu’ici ? Kat était tout de façon trop fatiguée pour le replacer !

« A vos ordres m’sieur, je vous apporte ça tout de suite ! » Dit-elle en inclinant légèrement la tête avec un fin sourire, avant de retourner derrière son comptoir. Cet homme ne semblait pas de bonne humeur, mais tout de même assez pour ne commander qu’un café et pas une bière dès le matin comme la plupart des clients du pub… Ce devait être un homme riche à en croire sa tenue, Kat soupira en observant son client tout en attendant que la machine à café remplisse la tasse qu’elle lui préparait. Elle pensa même à prendre le sucre et du lait, un exploit sachant que la petite blonde était tellement fatiguée qu’elle aurait été capable de lui apporter une barba papa au lieu d’un café.
La tasse prête, elle la déposa sur le plateau et revint à la table de son client. Néanmoins, en chemin, elle rencontra quelques difficultés… Alors qu’elle arrivait à la table, sa jambe droite se déroba, et la jeune fille trébucha comme une idiote le plateau en main. Son premier geste après la chute fut de malaxer sa cheville qu’elle venait de tordre, mais bientôt ses pensées se tournèrent vers autre chose : le client. Elle l’avait presque oublié, et à en croire l’état de ses vêtements, elle avait bel et bien raté son coup. Elle le regarda, paniquée, son pantalon était recouvert de café, il en avait même sur une chaussette. Elle n’osait pas le regarder dans les yeux, de peur qu’il lui fonce dessus tel un tricératops… Néanmoins, il le fallait, et se relevant d’un coup malgré la douleur, elle lança d’un ton affolé :

« Oh excusez-moi monsieur, je ne sais pas où j’avais la tête ! » Elle se précipita pour aller chercher une éponge, et revint vite vers son client pour essuyer son pantalon. Là, Kat ne put s’empêcher de se dire qu’elle était dans la position la plus bizarre qui soit devant le client… A genou par terre, la tête tout près de son entrejambe. A cette pensée elle eut un mouvement de recul… « Je ne suis qu’une idiote. » Murmura-t-elle en se prenant la tête avec les mains, puis reprit en se relevant : « Pardon, je… Je vais vous rapporter un café, et ce sera gratuit pour vous. Hum, vous avez besoin de quelque chose d’autre ? J’ai ruiné votre pantalon… Vous avez sûrement un rendez-vous important, si vous voulez je vais même vous racheter un costume, vous n’aurez pas à me rembourser ! » Elle se mordit la lèvre, un costume de ce genre devait coûter tellement cher, enfin, il pourrait bien faire une exception pour aujourd’hui et porter un costume à une centaine de dollars plutôt qu’un à cinq milles balles comme celui qu’il devait porter présentement… Kat n’avait jamais eu le luxe de se payer ce genre de fringues, et si elle devait le faire aujourd’hui, ça ferait un gros trou dans ses économies.

Je continuais à lire ce fameux article rédigé par Maxim... Puis je déportais mon regard sur la page de gauche, "Un avocat tue un de ses confrères à Los Angeles...". Je pensais directement à Heath', et était rassuré qu'il ne veuille plus y partir. Je savais combien il était dangereux de se faire une place à Los Angeles... et connaissant Heath', je sais qu'il n'aurait pas joué les timides, qu'il se serait rebellé comme le pauvre homme qui a été tué... et je ne voudrais pas que ça arrive. Finalement, il sera aussi bien chez moi que là bas. La tête dans le journal, je sens tout à coup une violente brûlure gagner ma jambe.

Outch, c'est chaud. Un café sur mon pantalon! Heureusement qu'elle n'avait pas visé mon visage. Je mettais ma main devant ma bouche pour éviter de lui hurler dessus, de la traiter de tous les noms, de lui en mettre plein la tête... Mais non, j'étais plus civilisé que ça... PUTAIIIIIIN ! Elle aurait pu faire attention, j'ai un rendez-vous dans même pas une heure et je suis là, tâché, ne sachant même pas si j'avais des affaires de rechange dans ma voiture. Je lançais un regard noir à la jeune femme.

"Surement pas sur vos épaules visiblement..." C'était sorti tout seul! Mais je voyais bien que la jeune fille était très embarrassée. Si ça avait été un mec, je lui aurais fait bouffer mon pantalon... mais j'allais rester courtois. Et puis lui crier dessus ne ferait pas disparaitre cette immonde tâche de café.

Devant la panique de la serveuse, je tentais de la calmer un peu. C'est bon, on allait pas en faire une affaire d'état! "C'est bon... mademoiselle, c'est bon. J'ai dois avoir un costume de rechange dans ma voiture... merci.". Je restais froid malgré tout. Je n'avais pas envie de me montrer gentil devant cette jeune fille, de toute façon j'étais loin d'être quelqu'un de gentil. Ca, tout le monde le savait à Magnolia... mais je doute que ça se sache à Phili!

La jeune femme, toujours très embêtée m'amenait alors une nouvelle tasse de café en prenant soin de bien la déposer sur la table cette fois ci. Le café qui avait coulé sur mes jambes avait atterrie jusque sur mes chevilles. Je découvrais au fur et à mesure des sensations de brûlures. Je retroussais mon pantalon, et découvrais une longue marque, ma peau était aussi rouge qu'un feu. Je soupirais...

Heureusement l’homme ne lui demanda pas de racheter un costume, de toute manière Kat n’aurait jamais eu les moyens, son université lui coûtait une fortune sans compter le loyer de son appart même s’il était divisé en trois avec Nina et Austin. Ce n’est pas avec son minable salaire de serveuse et les petits revenus de ses parents, qu’elle pouvait se permettre ce genre de folie. Il n’y avait qu’à voir son costume, ce n’était certainement pas de la gnognotte et ça se sentait ! Kat s’en voulait affreusement d’avoir ruiné un vêtement qui avait dû coûter cher à son propriétaire. Elle aurait pu s’étaler en excuses indéfiniment, mais elle sentait qu’elle ennuyait le pauvre homme et au final elle retourna derrière le comptoir pour aller lui faire un autre café. Cette fois-ci, elle fit en sorte de faire aucune gaffe, et ramena la tasse saine et sauve jusqu’à la table du client.

« Vous avez besoin d’autre chose ? » Demanda-t-elle aussitôt après avoir posé le café, plateau toujours en main. L’homme était en train de retrousser son pantalon, laissant apparaître une immense brulure sur sa jambe. Katya se mordit la lèvre, reprenant aussitôt : « Ah oui de la pommade, je crois que j’en ai ! Je vais vous chercher ça. » Elle fit un aimable sourire, se ravisant de s’excuser encore une fois. Aussitôt, elle retourna au comptoir, reposant le plateau et fouillant dans son sac pour trouver cette fameuse pommade… Elle ne savait même pas si elle avait vraiment pensé à la prendre, en tant que cheerleader et serveuse, elle se baladait toujours avec un kit de survie dans son immense sac, par chance elle avait en effet de la pommade pour calmer les brûlures ! Elle se précipita de retourner vers son client et lui tendit le tube de crème avec un air victorieux. Elle allait même lui proposer de lui appliquer, avant de se rendre compte que ça pouvait être déplacé. L’homme n’eut de toute façon pas l’air d’avoir besoin de son aide, et se malaxa la jambe avec le crème tout seul. Katya attendit devant lui, elle ne pensa pas une seconde qu’elle pouvait être gênante, mais elle avait si peur de faire une autre bêtise qu’elle ne voulait pas bouger d’un poil ! Tout en l’observant, elle se rappela les réflexions qu’elle s’était faite auparavant comme quoi elle l’avait déjà vu quelque part… Lorsqu’il eut fini de se soigner avec la pommade, il lui redonna et c’est en l’attrapant que ça lui échappa :

« Dites, au risque de paraître enquiquinante, on sait déjà vu quelque part je me trompe ? » C’est en formulant la question, comme une illumination que ça lui revint : « Adrian O’Conell ! Voilà, j’ai enfin trouvé. » Elle lui lança un grand sourire, la famille O’Conell était l’une des plus réputées à Magnolia, tout le monde connaissait Joey ce grand homme politique. Il y avait aussi Heathcliff, le coureur de jupons le plus connu du quartier, et Claire, l’ancienne reine du lycée… Katya la connaissait quelque peu l’ayant côtoyée au sein de l’équipe de cheerleading lorsqu’elles étaient encore au lycée. « Katya Fitzgerald, pour vous servir ! J’habite, enfin habitais, à Magnolia. » Dit-elle en lui tendant la main, peut-être connaissait-il l’un des Fitzgerald… Après tout, sa famille aussi était réputée dans le quartier, d’une autre manière cependant. En effet, les Fitzgerald n’étaient pas très appréciés, notamment à cause du père qui s’était permis des réflexions déplacées durant l’enterrement de Mrs King, mais aussi à cause des membres qui constituaient cette famille, des marginaux, tous sauf Katya qui avait toujours été très banale comparée ses sœurs et son frère… C’était sûrement pour cette raison, qu’on ne la remarquait pas toujours dans le quartier.