*Non, mais elle a intérêt à avoir une excuse en béton si elle ne veut pas que je l’enterre vivante.*

Julia Fitzgerald aurait du être là, au centre commercial, en compagnie de Minnie McCormick. Oui, elles auraient dû passer une véritable après-midi de folie entre filles rien que toutes les deux. Elles se seraient échappé du cadre spatio-temporel quelques heures pour ne plus penser à rien et n’exister que pour les fou-rires et la panoplie de vêtements qui se trouvaient à leur disposition. Alors, Juju, l’une des seules personnes qu’elle réussissait à apprécier dans ce bled dans lequel elle s’était retrouvée malgré elle n’avait tout bonnement pas le droit de lui poser un joli lapin. Julia n’avait pas le droit de la laisser tomber, et ce même si c’était pour un tout petit truc aussi moindre. Alors, elle avait donc finalement décidée de se les faire ses magasins, en solitaire, et de venir juste après régler ses comptes avec Julia et lui montrer tout ce qu’elle s’était procuré de nouveau. (Comment ça elle était sensée être en colère ? o/)

Minnie en avait donc fini avec les boutiques et se trouvait en ce moment-même devant la porte n°39, soit celle qui donnait accès à l’antre des Fitzgerald. Elle y sonna, une, deux et trois fois.

Elle n’en donnait pas l’impression, mais Minnie était plus ou moins inquiète de la situation. Elle avait peur. Peur de perdre l’une de ses seules amies du quartier et du jour au lendemain se retrouvait sans personne autour. Déjà que personne n’arrangeait le fait qu’elle se sente elle-même telle une sorte de calamitée vivante, si en plus de cela, elle faisait fuir tout ce qui lui tenait un tant soit peu au cœur, Minnie risquait de méchamment péter un câble. C’était peut-être le premier faux-plan que la jeune Fitzgerald lui faisait … Mais tout commencer par un petit lapin tout blanc, pour que sans crier garde, les deux femmes finissent par devenir de parfaites inconnues l’une pour l’autre. Déjà qu’elle avait perdu Elias Sheirman par le passé, elle ne voulait pas que la même situation se reproduisent.

Minnie sonna à nouveau une dernière fois.

*Putaaaain, pourquoi elle n’ouvre pas. MON DIEU, imagine elle a crevé comme la vieille bique là dans les escaliers. Mondieu … non non non. Elle n’a pas le droit de nous faire ça. NON ! Mais bon peut-être qu’elle a juste glissé dans la salle de bain, est tombée sur la tête et a perdu légèrement connaissance. C’est vrai que c’est possible ça. Mais imagine alors, t’as une fuite de gaz et elle meurt dans le coma ou un truc pire encore.*

« JULIAAAAAAAAAAAA, C’EST MINNIE. OUVRE LA PORTE ! »

*Si dans deux minutes, elle ne répond pas, j’appelle les pompiers*

Et voilà, c’était reparti pour un tour pour Minnie et son légendaire pessimisme. Et pour le coup, elle s’acharna sur la sonnerie dans l’espoir de réveiller sa meilleure amie. Au cas où, elle se trouverait dans le coma hain, on n’était jamais assez sûr …

Une clope dans la bouche, la tête dans les étoiles, rêveuse, Julia n'entendit la sonnette qu'à partir de la troisième fois, comme si elle se réveillait à l'instant. Et franchement, elle n'avait pas du tout envie de se lever. Elle était bien là, pourquoi fallait-il qu'on vienne l'embêter ? Elle se sentait toute légère, sans soucis. Mais cet horrible son venait tout gâcher. La sonnerie retentit une quatrième fois – ou peut-être bien une cinquième fois, qui sait – et Juju se décida enfin à éteindre sa cigarette puis à lentement se lever. Visiblement, la personne était bien décidée à ce qu'on vienne lui ouvrir. Soit.
Il faisait chaud, dans le couloir ; la jeune femme avait dû laisser la fenêtre de sa chambre ouverte pendant qu'elle fumait, histoire de ne pas trop se faire embêter par Leeda par la suite mais il faisait un froid de canard dehors en cet automne – ou plutôt en ce début d'hiver – et elle n'était pas vraiment bien habillée pour la saison. La tête lui tournait et elle chancela un peu en descendant l'escalier ; elle y était peut-être allé un peu trop fort sur la drogue pour ce coup-ci. Quelqu'un gueulait dehors. Holala, il faut se calmer monsieur, gueuler dès le matin c'est pas sympa ça. Enfin, matin... Julia avait peut-être quelques heures de retard. Elle ouvrit donc légèrement la porte en se tenant au battant et cligna plusieurs fois des yeux avant de s'habituer à la lumière du dehors. Fiou, c'était comme si elle avait dormi toute la journée – précisément ce qu'elle avait fait.

« Ah salut Minnie. » Eh merde, Julia venait de se rappeler qu'elle avait rendez-vous au centre commercial avec elle, hier. Ou peut-être bien... demain ? Non, Minnie avait l'air trop en colère pour que Ju' ait de l'avance. « Euh, ça va ? » Aujourd'hui, c'était aujourd'hui qu'elles devaient se voir. Et à en juger par la tête du soleil et la tête de Minnie, la journée était déjà bien avancée... Euh ... Oups ? Juju avait complètement oublié et voyait d'ici la rage folle de Minnie. « Tu veux entrer ? » Elle ouvrit plus grand encore la porte et se cognant contre le meuble de l'entrée, elle faillit tomber. « Oups, fait attention. » ajouta-t-elle d'une voix débile. Hm, ce n'était sûrement pas dans cet état là que Minnie était sensé voir Julia mais celle-ci n'avait absolument rien prévu et se retrouvait un peu gênée. Son excuse ? ... Le réveil n'a pas sonné, désolée. Même ça, ce n'était pas tout à fait vrai – le réveil n'était qu'une option secondaire pour Julia.