*T'es où*, demandait Juliet depuis déjà une heure... *Au bar, avec mes potes* répondais-je. Il faut le dire, j'était complètement déchiré. J'avais cédé à l'appel de Duncan d'aller boire un verre, puis deux, puis trois. Bref, je pensais que ça me ferait du bien de sortir un peu. La veille, j'avais eu cette discussion avec Juliet, et puis j'étais parti, souhaitant être seul pour pouvoir réfléchir... vive la réflexion ! Une nuit à l'hôtel, un déjeuné avec Sasha... bref, après ça j'étais sensé appeler Juliet et la rejoindre. Encore une fois, je n'avais pas suivi les plans, préférant rester éloigner d'elle pour ne pas avoir à assumer celui que je suis désormais devant elle. Elle me demandait où j'étais, bien trop saoul pour lui mentir, lui sortir quelque chose de crédible, j'avais finalement fini par lui dire où j'étais exactement. Depuis, plus un message. Je crois qu'elle boude. Je soupirais.

Je passais une "bonne" soirée avec mes amis... tentant d'oublier un peu la vie de merde que j'avais choisi depuis quelques temps. Alors c'était cool, quatre verres dans le pifs, et a disparu l'Adrian O'Coco ! Attention, il faut être discret... chuuuut ! Si quelqu'un voit un avocat saoul, il va le dire à son papa! Je riais comme un pauvre blaireau, mais finalement j'étais bien. Je ne pensais pas à ce qu'il se passerait après, c'était cool... Duncan nous racontait de vielles blagues, il en tenait une bonne lui aussi. Je me levais, lui tapais dans l'épaule. Mon dieu, je suis un beauf de première classe! Sont marrants ces gays!

Bref, je décidais de me lever de ma chaise. Ce n'était d'ailleurs pas sans difficulté! Je me retenais à ma chaise, pour éviter de m'écraser sur le centre de la table. J'étais vraiment dans un piteux état. Oui ce soir, je suis le mec le plus pathétique de la terre! Youuuuuuhouuu ! De toute façon, à chaque fois que je viens ici, c'est toujours la même merde. La dernière fois j'avais croisé le p'tit Davies là, comment il s'appelle déjà... Andrew! C'est ça ! Lui, il m'avait un peu retourné la tête, à ce mêler de mes histoires avec sa soeur. Si je pouvais lui tordre le cou ! Bref, je sortais du bar. Une petite clope serait la bienvenue ! J'allumais ma clope, manquant plusieurs fois de me griller la moustache. Où est mon sens de l'équilibre bordel?! Mon pauvre Adrian, tu es pathétique... reprend toi! Une taff, deux, et puis un claquement de portière. Je portais alors mon attention en direction du bruit, et une jeune fille s'avançait à grands pas vers moi. Je fronçais les sourcils, tentant de mettre un nom sur ce visage qui me semblait si familier... "Juls !? Qu'est ce que tu fiches là?"

Mais qu'est ce qu'elle faisait là? Je n'allais pas tarder à le savoir. En tout cas je ne m'attendais pas à ce qu'elle fasse la route jusqu'au bar, venait-elle me chercher? Pensait-elle à me ramener à la maison? C'était étrange, de la voir débouler comme ça. Elle voulait faire la fête, mais la manière dont elle me parlait montrait toute sa colère et sa déception... Et Juliet n'était pas quelqu'un qui faisait la fête non. Combien de fois elle m'a laissé aller seul aux soirées entre voisins.

Je l'observais, de bas en haut. Son regard noir, sa mine pâle, son attitude... tout n'était pas très rassurant, elle n'avait clairement pas l'air d'être dans son état normal. Elle était vraiment inquiétante. Disons que je ne l'avais jamais vu dans cet état. Etait-ce l'alcool qui me faisait avoir des hallucinations, où Juliet était-elle bel et bien déchirée? Je fronçais les sourcils et lançais, avec agressivité: "Quoi? Mais non Juliet... Rentre à la maison."... Je lui donnais des ordres oui, mais je n'avais pas envie qu'elle me voit dans cet état, et je n'avais pas prévu de passer cet instant avec elle, car depuis hier soir, je ne savais désormais plus quoi lui dire. Avoir Juliet en face de moi était devenu un supplice, pas parce qu'elle ne me plait plus ou quoi que ce soit, juste parce que je ne trouve plus les mots pour lui dire clairement les choses, et que je ne sais plus comment me comporter.

"Rentre à la maison, s'il te plait..." disais-je en la fixant dans le blanc des yeux. Je soupirais. J'avais l'impression d'être comme un enfant qu'on venait de prendre la main dans le sac alors qu'il s'apprêtait à faire une bêtise. Je passais ma main sur ma nuque, et jetais la clope que je n'avais même pas fini de fumer. La pression montait, je le sentais. Me retrouver face à Juliet, avec autant de culpabilités me rendait dingue. L'alcool n'arrangeait rien.

Ces mots avaient l'effet d'une douche froide sur moi. L'entendre me dire que tout ça était terminé, qu'elle ne se laisserait plus faire, c'était si soudain, si imprévu. Je m'attendais un peu à ce qu'elle craque enfin, mais pas avec autant d'assurance. Ca ne ressemblait pas à Juliet, non. Bref, je la raccompagnerai de force à la maison s'il le fallait, mais je n'avais pas envie de la voir trainer dans cet endroit, et je n'avais pas envie d'y être avec elle. C'était inapproprié, et le moment l'était d'autant plus. Je n'allais pas passer la soirée à m'amuser avec Juliet, d'autant plus que sa présence n'avait pas vocation d'amusement. Elle était en colère, et ça se voyait. Ca se sentait.

Je la regardais droit dans les yeux, je l'écoutais. Elle avait bon nombre de choses à me reprocher, et je ne pouvais pas lui en vouloir. Je devais donc me faire petit, car pour une fois, Juliet élevait la voix. J'ai toujours été habitué à ce qu'elle garde son calme en toutes circonstances. Juliet est passive, elle laisse faire les choses, en souffre, mais ne dit rien. Ce soir, je découvrais une toute autre facette de sa personnalité, et je m'étonnais de ne l'avoir jamais vu comme ça.

"Juliet..." lançais-je, mais elle ne s'arrêtait pas de parler. Non, son agacement était profond, et son envie de déballer son sac encore plus. Elle me disait que je lui faisais du mal, ce qui entre nous n'est pas une grande nouvelle, je le savais déjà... Elle me balançais en pleine face tous les reproches qu'elle pouvait me faire, toute cette colère accumulée, toutes ces mauvaises pensées emmagasinées. Je la prenais pour une idiote? Et bien je pense que c'est pourtant clair, si je la respecte aussi peu, je ne peux pas prétendre que je ne me moque pas d'elle.

Je m'approchais enfin d'elle, pour la calmer, mais elle reculait, et continait de me sermonner. Je ne supportais pas de la voir dans cet état, de l'entendre me parler de la sorte. D'habitude, je suis celui qui hausse le ton... Alors quand elle souligna le fait que je buvais pour ne pas avoir à affronter les problèmes que rencontrait notre couple, je pris la mouche... piqué au vif je lançais, sans vraiment réfléchir:

"Mais qu'est ce que tu veux que je te dise Juliet? Tu veux la vérité c'est ça? Très bien..." criais-je, "Je t'aime encore, je le sais, mais... j'ai des sentiments pour une autre fille et je suis complètement perdu. Je me dis qu'avec du temps j'arriverai à ouvrir les yeux et prendre une décision, mais ça fait cinq ans Juliet... cinq ans que je me pose les mêmes questions...".

Je baissais la tête, je venais de dévoiler à Juliet ce que je n'osais jusque là pas lui dire. Je ne voulais pas croiser son regard, je savais pertinemment que je venais de la blesser, une fois de plus. Je redoutais l'instant où elle me répondrait. Affaibli par la consommation d'alcool et tout ce que je venais d'entendre, tous ces mots qui prenaient tellement leur sens quand ils sortaient de la bouche de Juliet, je ne tardais pas à ressentir un violent choc au niveau de la poitrine. Je savais peut être enfin ce que ça faisait d'être blessé. Je n'ai pas de honte à dire qu'à cet instant là, je fus emparé d'une tristesse indéfinissable, les larmes m'étaient montées aux yeux sans que je puisse avoir le temps de les retenir. Ne voulant pas entendre ce qu'elle avait à me répondre, et décidé à aller jusqu'au bout de mes confessions, je reprenais: "Je sais que je te fais mal, et... je sais que je ne te respecte plus Juliet... mais je n'ai pas trouvé la solution à tous ces problèmes... je crois qu'il faut que ça s'arrête... Tu ne peux pas vivre comme ça... et je ne veux pas vivre comme ça...". . Mon regard était figé, les larmes coulaient sur mes joues et je me trouvais si faible. Où était Adrian O'Conell la brute putain!? Je passais ma main sur ma nuque. Je ne voulais vraiment pas avoir à croiser le regard de Juliet, et à ce moment j'ignorais sa réaction, réaction que je redoutais depuis un moment déjà.

Je venais d'avouer mes sentiments pour une autre à Juliet, j'avais eu enfin le courage de le faire. C'était dur, dur à accepter, dur à assumer. Mais les choses étaient dites, et je ne pouvais pas faire marche arrière. C'était trop tard, et puis est ce que ça en valait la peine? C'est vrai au final, les choses étaient telles que je me sentais impuissant, et que j'ignorais vraiment comment remonter la pente. Tu vois ce n'était pas si compliqué... si ça l'était. Sinon je lui aurais tout dit il y a fort longtemps. C'était si compliqué que je n'avais jamais su prendre une décision. C'était si compliqué que j'avais fait de notre relation un enfer, oui...

Je pleurais comme un pauvre con, mais je crois que je ne pouvais m'en empêcher. J'étais comme cet enfant qui avouait sa bêtise, qui se retrouvait face à ses actes... Juliet me dit qu'elle ne me croyait pas quand je lui disais que je l'aimais. Pourquoi? Parce que sinon je n'aurais pas été cherché ailleurs? J'ai cherché ailleurs? Je ne crois pas. Je n'ai jamais demandé à tomber amoureux de Sasha... c'est arrivé, c'est comme ça.

"Je n'ai jamais cherché ailleurs Juliet..." murmurais-je. Elle ne savait plus quoi penser... moi non plus. J'étais là, complètement saoul, face à elle. L'alcool redescendait, je ne me sentais pas très bien. Elle me tourna le dos puis passa ses mains sur son visage. J'avais la gorge nouée. J'en profitais pour essuyer mes joues avec la manche de mon pull et souffler comme un buffle. Je me redressais, et l'écoutais me parler alors qu'elle ne me faisait plus face. Je crois qu'on a plus rien à ce dire, lançait-elle. Non justement nous avions trop de chose à nous dire, mais nous n'en avions plus la force. "Alors qu'est ce que j'aurais du faire Juliet, te mentir? J'aurais dû faire comme de rien n'était?... Putain Juliet, tu sais ce qu'on traverse, tu sais comme c'est difficile... tu sais que... je suis désolé Juliet, sincèrement." Je secouais la tête, et soupirais... Elle se retourna brusquement, s'avança vers moi. Je cru un instant qu'elle allait m'en mettre une, mais elle trébucha et je la retenais. Une fois remise sur ses deux pieds, elle me lança que je venais de la détruire... je ne m'attendais pas à mieux de toute façon. Je savais bien que d'entendre ces choses là ne lui ferait pas du bien. Je me reculais d'un pas. Elle me tourna une nouvelle fois le dos, et commença à partir.

"Juliet... attend." Je pressais le pas pour la rejoindre, l'attrapais par le bras. "Où est-ce que tu vas?". Elle plongea son regard dans le mien et resta un instant silencieuse, avant de prendre la parole.

En la voyant s'éloigner, j'étais soudainement pris de remords, je m'en voulais... putain, mais j'aurais dû me taire. Je suis complètement saoul, et même si ce que je venais de révéler à Juliet était vrai, j'aurais dû le dire à un autre moment, avec beaucoup de tact, et beaucoup plus de réflexion. Le mal était fait de toute façon. Je soupirais avant de passer ma main sur mon visage. Mon coeur battait la chamade, la voir dans cet état me rendait fou. Même si j'ai des sentiments pour Sasha, je n'arriverai pas à oublier Juliet. Non, Juliet c'est toute mon adolescence et mes premiers pas dans la vie active, dans la vie d'adulte. Juliet, c'est tous ces souvenirs, aussi bons que mauvais, aussi forts. Je n'étais pas en train de dire à Juliet que je la quittais, même si je pensais être fixé depuis la dernière fois que j'avais vu Sasha. Non, je n'avais pas le courage de la quitter, alors ce soir j'avais juste exposé les faits, ce que je ressentais pour cette autre fille, et cette incapacité pour moi de remonter la pente avec Juliet. Mais je n'avais pas explicitement formulé mon intention de rompre. Il était trop tôt. Et dans un sens, j'espérais un peu qu'avec cette annonce, Juliet me facilite la tâche. Raaaah, j'étais complètement perdu.

Elle commençait à partir, je la rattrapais donc par le bras, lui demandant où est-ce qu'elle comptait aller à présent. Elle se débattait, avec force. J'étais étonné... cette force de caractère ne m'était jamais apparue si évidente. "Ne me touche pas Adrian ! et puis pourquoi tu veux le savoir !! retourne te saouler la gueule avec tes potes, jusqu'à là tu ne pensais pas à moi alors casse toi .. je veux plus voir ta tronche .. tires toi !! je veux t'effacer de ma vie seulement je sais que je ne vais pas y arriver .. je préfère crever que de penser à toi .. oublie moi ! " hurlait-elle. Je réalisais que ce soir, c'était à celui qui se ferait le plus de mal. Ces mots eurent sur moi l'effet de centaine de couteaux plantés un peu partout dans mon corps. Ma respiration se coupa net, oublie moi, tire toi, je veux t'effacer de ma vie... Wahou, c'était tellement violent. Et je comprenais Ô combien c'était blessant d'entendre ces choses là, et combien j'avais pu la blesser pendant toutes ses années. Je reprenais une bouffée d'air, tout en tenant son bras fermement. Quelques instants plus tard, elle me demanda une fois de plus de lâcher son bras. Elle baissait désormais la tête, mettant fin à ce regard remplie de colère et de haine qu'elle me jetait jusqu'alors. Je déglutissais, tout en continuant de tenir son bras, avec moins de fermeté cependant. Le silence s'installa.

"Laisse moi au moins te raccompagner... Vu l'état dans lequel tu es, je ne te laisse pas prendre ta voiture."

Je lâche alors son bras, et j'attend qu'elle me dise quelque chose. Etonnement, elle reste silencieuse et nous commençons à marcher. Dans le plus grand des silences, nous marchons, et quittons rapidement le quartier de Cliffton Center. Je passerai récupérer sa voiture demain, et la mienne par la même occasion. Ce soir, je ne savais pas où j'allais mettre les pieds, de toute façon j'étais trop saoul pour prendre une décision.

Nous marchions donc, et je penchais ma tête, scrutant du regard la douce Juliet que je venais de détruire. Ma gorge se nouait, une fois de plus. Mais cette fois-ci je ne devais pas pleurer, je ravalais donc un sanglot. Je remarquais que Juliet commençait à avoir froid. Je retirais alors ma veste et la déposais sur la épaules de Juliet. Ce silence était atroce, j'avais l'impression que la fin du monde venait d'arriver... Ca y ressemblait d'ailleurs. Je n'avais jamais vu Juliet dans cet état, et aussi étonnant qu'il puisse être, elle m'avait cloué le bec en trente seconde. Je m'arrêtais soudainement de marcher, la retint par le bras, et lui dis: "Juliet... Je ne t'ai jamais trahis, même si c'est ce que tu penses. Je n'ai ni embrassé, ni couché avec une autre fille que toi. Je ne t'ai pas menti pendant tout ce temps, contrairement à ce que tu peux penser... J'ai douté oui, je me suis posé un tas de questions, et ... je me pose toujours les mêmes questions. Alors oui, je suis un bel enfoiré, je ne te traite pas bien, je ne te respecte pas... je te cache ses sentiments pour une autre pour la simple et bonne raison que je ne suis certain de rien. Et parce que si c'était si facile de me décider, je n'aurais pas hésite une seconde à faire un choix... parce que oui... je t'aime Juliet et tu peux me dire que tu n'y crois pas, que je suis un menteur, tu peux me considérer comme le pire des connards, mais je sais que je t'aime Juliet... je suis attaché à toi, et c'est sans doute ce qui m'empêche de partir, de te laisser... parce que je ne veux pas te laisser. Je ne suis pas venu ce soir, pas par manque de respect non, juste parce qu'au fond j'avais besoin de prendre suffisamment de recul, réfléchir... Juliet écoute moi... J'ai essayé de faire mieux, je te le jure..." .

"Alors fais un choix" me dit Juliet. Oui mais justement, je ne savais pas quoi faire, ni même qui choisir. Un choix... c'était trop difficile. Si j'avais pu choisir, les choses seraient moins compliquées aujourd'hui, du moins je l'imagine. Je ne voulais pas choisir, tout simplement parce que je ne savais pas choisir. Et si je faisais un choix, serait-il le bon? Ne regretterais-je pas? Prendre des risques, c'est peut être mon plus gros soucis. Je préfère laisser les choses faire, même si dans le cas présent, ça n'arrange pas ma vie, ni celle de Juliet d'ailleurs.

Je ne répondais donc pas à Juliet, je ne voulais pas me risquer à lui demander encore du temps pour réfléchir, même si c'était évident. J'hochais la tête en guide de réponse. Je posais mon regard sur Juliet un long moment. Nous restions là, un instant à nous regarder sans rien nous dire. Alors Juliet fini par me dire qu'elle ne m'oubliera jamais, et je pouvais lui dire la même chose. Je sors avec Juliet depuis mes 14 ans, et il y a beaucoup de choses que je ne pourrais pas oublier. J'ai vécu avec elle les plus belles années de ma vie, toutes les premières fois, et l'oublier serait oublier aussi ma vie.

"D'accord Juliet." disais-je en soupirant. Je continuais à marcher. Dans ma tête, je revoyais le déroulement de la soirée. J'étais saoul, avec mes copains, dans un bar que je fréquente depuis toujours. Je sors fumer une cigarette, je me retrouve nez à nez avec Juliet, et tout dérape. Je ne m'attendais pas à ça, pas ce soir.

Puis Juliet me demanda subitement qui était la fille pour qui j'avais désormais des sentiments. Comment lui dire qu'il s'agit de Sasha? Elles se connaissent à peine. Et entre nous, je préfèrerais taire son nom. Je ne veux pas lui causer de problèmes. Mais face à une Juliet qui s'avérait être bien plus forte que moi, que j'aimais encore, pour qui je ressentais encore beaucoup de chose, je ne pouvais plus lui mentir. Elle me demandait d'être honnête. La voix faible, je répondais: "Sasha..." Je baissais la tête, et continuais à marcher. Nous étions encore bien loin de notre quartier, et d'ici à ce qu'on arrive à la maison, il pouvait se passer bien des choses.

Faire marche arrière était désormais impossible, et puis ce qui était dit était dit. Je ne sais pas ce que j'aurais préféré, me taire et continuer à vivre un calvaire, ou bien parler mais me retrouver encore plus indécis que ce que je ne l'étais avant cela. Je pense que plus je lui mentais, plus je me voilais la face. Et en même temps, est ce que je suis conscient de ce que je fais? Est ce que je mesure le poids de mes actes, de mes paroles, est ce que je ne suis pas en train de faire une bêtise? Ce sont toujours les mêmes questions qui subsistent dans ma tête, de nombreuses interrogations qui m'empêchent d'y voir plus claire, qui me donnent l'impression de n'être plus moi même, ou plus suffisamment fort pour me contrôler.

Juliet se retourna vers moi et afficha un visage dur, un regard de haine, et lorsqu'elle me dit que je la dégoûtais, je soupirais. J'était comme un bateau dans un jeu de bataille navale, touché, coulé... surement autant qu'elle pour le coup. Je baissais les yeux, joignais mes deux mains avant de les détacher pour rattraper ma veste qu'elle me lança au visage. Je laissais tomber mon bras le long de mon corps. Je relevais la tête, et la vit s'éloigner, d'abord à petits pas, puis plus rapidement. Je ne bougeais plus de ma place, comme tétaniser. Je ne savais quoi lui dire et en même temps, je n'avais pas envie de la laisser partir sans avoir prononcer les derniers mots. "Juliet... JULIET", criais je pour l'arrêter dans sa course. "Je regrette... sincèrement, je regrette. Laisse moi encore du temps, s'il te plait... je t'aime... vraiment.". Elle se retourna, ne pris pas la peine de me répondre, mais elle haussa simplement les épaule, et je fus contraint de la laisser partir pour de bon.

La regarder s'éloigner me donnait l'impression de tout perdre, et contrairement à ce que j'espérais, je ne fus pas soulagé. Au contraire, j'étais bien plus perdu qu'auparavant, mais au moins Juliet savait, et nous n'allions plus vivre dans le mensonge. Avec ou sans Juliet? Tout se déciderait bien un jour, peut être demain, ou peut être plus tard... personne ne sait ce que l'avenir nous réserve pour demain, et j'espère que le destin fera mieux les choses que moi je ne les fais.

THE END