Et voilà, le moment tant redouté était arrivé, mon oncle, mon deuxième père, venait de mourir. Cela faisait quelques mois déjà qu’il était malade, on l’a découvert courant avril. C’était rapide pour un cancer, mais ça été découvert bien trop tard, les médecins ne pouvaient que reculer l’inévitable. Pendant une semaine on s’était affairé avec Papa et Gregory à ranger ses affaires, à régler les derniers papiers, surtout ceux de l’héritage. Oui, mon oncle n’avait ni femme ni enfant, il n’avait plus que mon père et nous. Du coup il a tout partagé en trois. Je ne sus pas vraiment ce que mon père et mon frère avaient eu, je n’étais pas très curieux, je savais juste que c’était équitable. On avait chacun eu une lettre de la part de mon oncle, où il expliquait ce qu’il nous léguait. Quand j’ai lu cette lettre, le lendemain de sa mort, j’ai pleuré à chaude larme. Elle était poignante. Dedans il m’annonça que c’était à moi qu’il léguait son bateau. Oui, le fameux bateau où j’aimais tant le rejoindre pour m’évader. Il me demanda d’en prendre soin et de faire un voyage avec. Je fus vraiment touché de cette attention, et je décidai que l’année scolaire qui arrivait était devenue pour moi, une année sabbatique. Il fallait que j’honore mon cher oncle. Cependant, j’en avais encore parlé qu’à mon père et mon frère. Je n’avais pas vraiment envie de m’étaler à tout le monde, et je ne voulais pas partir dans une effusion de larmes. On avait déjà assez pleuré comme cela. Il fallait juste que je prévienne Camilla. Mais je n’avais toujours pas eu le temps de la prévenir, tellement j’avais été pris dans les papiers et affaires de famille.

De plus, la maison avait été bien abîmée par la tornade du 4 juillet dernier. Le premier étage avait tout pris. On avait réussi à récupérer quelques vêtements, papiers qui s’y trouvaient et on avait tout descendu au rez-de-chaussée et à la cave. On avait transformé le salon en chambre parentale, et la cave où Greg et moi avons aménagé notre squat, était devenue notre nouvelle chambre. Le rez-de-chaussée avait été légèrement abimé, les ouvriers avaient déjà réparé les fenêtres, mais, maintenant ils s’affairaient au premier étage, où il y avait beaucoup de choses à refaire. Par chance, et parce que le squat était aménagé dans un sorte de bunker/cave, toutes nos affaires n’avaient pas bougé.

Tout, ou presque, était régler au niveau de mon oncle. Le restant c’était à papa de s’en occuper. Du coup, je pouvais commencer tranquillement à préparer mes bagages. J’avais sorti la voiture dehors, j’allais m’en servir pour faire des allers retours jusqu’au bateau, qui était amarré non loin d’Atlantic City, pour l’aménager et y mettre toutes mes affaires. Dans le hall se trouvait quelques bagages grands ouvert qui attendait d’être remplis, et moi je faisais des allers retours entre le squat/chambre, et le dressing familial qui se trouvait au rez-de-chaussée, en lançant de temps à autre mes affaires sur mes valises. « Tu en fou du bordel Lukas » Râla mon père quand il tenta d’aller dans la cuisine. Une fois là-bas, et moi en train de ranger tant bien que mal quelques vêtements dans un sac de voyage, on entendit quelqu’un frapper à la porte. Oui, la sonnette n’avait pas résisté à la tempête de l’Inpendance Day. Etant le plus près, j’enjambai les sacs et valises qui se tenaient devant moi en tentant de ne pas tomber dessus, et j’allais ouvrir la porte. Le soleil entra dans la maison par un rayon aveuglant. Je n’y vis rien pendant quelques secondes. Puis mes yeux s’habituèrent doucement à la lumière extérieure, et je reconnu Heather. Oui Heather, la deuxième fille avec qui je l’avais fait. C’était arrivé comme ça, sans préméditation. Je ne voyais pas encore Camilla en cachette non. C’est arrivé peu de temps après que cette dernière m’avait annoncé qu’elle préférait sa sœur plutôt que moi. J’avais le cœur en miette quand Heather est venue un jour voir mon père. Il n’était pas là, alors nous avons parlé, et j’ai lâché ce que j’avais sur le cœur, et elle aussi. Et de fil en aiguille, nous avons ressenti un désir charnel monté de plus en plus. Personne dans la maison, on ne pouvait pas nous interrompre. Heather et moi avons fait l’amour. Puis elle est partie. Depuis nous n’en avons pas reparlé de cette aventure. Et aujourd’hui, alors que je préparais mes affaires pour mon voyage en bateau, elle arrivait. « Bonjour Heather, tu voulais voir mon père ? » Bah oui, elle n’allait probablement pas vouloir me voir, elle travaillait avec mon père. Donc c’était la seule raison valable à sa venue. Je ne pensais pas un seul instant qu’elle puisse venir pour moi.

Heather jeta un coup d'oeil à sa montre. Aujourd'hui, elle n'avait rien de prévu, enfin elle avait reporté ses rendez-vous au lendemain. L'un des avantages à être son propre patron. De plus, Trevor, son associé était très conciliant avec elle et malgré le fait qu'il soit peu loquace, il n'était pas aveugle. Il avait noté le récent changement d'attitude de la jeune Hamilton ainsi que ses fréquentes sauts d'humeurs. Elle avait conscience d'être devenue légèrement insupportable et invivable pour ses proches. Cela expliquait son envie de s'en éloigner.
De plus la tempête du 4 juillet l'avait bien secoué, ou tout du moins, ce qu'elle avait appris ce jour-là. Elle était en pleine période de déni et n'avait toujours pas assimilé les informations. Elle en avait parlé à Scarlett, mais c'était comme si elle était spectatrice de sa propre vie. Attention au retour de bâton Heather ! Après avoir pesé le pour et le contre, elle avait prit la décision de se rendre chez les Whiteley pour s'excuser auprès de Trevor. Elle se sentait coupable. Elle s'habilla rapidement, enfila une paire de ballerines, noua ses cheveux en chignon et fila. Elle descendit et se rendit au numéro 36.

Lorsqu'elle arriva devant, un souvenir lui revint en mémoire. Elle se souvenait du jour où elle avait rendu visite à Trevor, justement pour lui parler de l'annonce qu'il avait posté. Elle était tombée sur Lukas ce jour-là, et dans un piteux état d'ailleurs. Ils avaient beaucoup discuté, s'étaient livrés sans gêne et finalement, avaient succombé au plaisir charnel. Depuis ce jour, ils n'en avaient pas reparlé. La brunette frappa à la porte et tomba justement sur Lukas. Elle lui sourit, mais son attention se porta sur autre chose. Un tas de valises se trouvaient derrière lui. Elle fixa le jeune Whiteley lorsque celui s'adressa à elle. Il lui demanda si elle souhaitait voir père. Au début, c'est ce qu'elle aurait dit mais elle était plus curieuse de ce qu'elle avait vu quelques secondes auparavant. Il l'invita à entrer et elle le remercia pour finalement répondre à sa question.

« Oui je voulais discuter avec lui. Mais tu vas quelque part ? »

Heather savait qu'il avait perdu son oncle, le quartier parlait beaucoup et même si vous ne vouliez pas être au courant, vous finiriez par le savoir. L'idée qu'il voulait fuir la réalité et prendre l'air lui effleura l'esprit mais ce qui l'inquiétait plus, c'est justement, dans un quartier de commère, que personne n'ait eu vent de son départ.

Spoiler:

J’avais hâte de partir, bien que Camilla me manquerais, mais au moins cela me permettra de prendre du recul vis-à-vis de notre relation. Cela faisait plusieurs mois que l’on se cachait de tout le monde. Ce n’était pas évident, et bien qu’on s’aimait et qu’on s’adonnait à cœur joie de le pratiquer, ce n’était quand même pas évident de faire tout cela en douce. Il fallait réfléchir à que dire à papa, à Greg, sans qu’ils ne soupçonnent grand-chose. Pour mon père c’était plus facile de lui cacher cette relation, par contre, pour Greg, c’était plus dur. On était jumeau, on était fusionnel. J’avais décidé de ne rien lui dire puisqu’il était ami avec mon ex petite amie, qui est accessoirement la grande sœur de Camilla. Et c’était de Zoë qu’on avait le plus peur de la réaction. Je n’avais pas l’habitude de cacher des choses à mon jumeau, juste pour une seule chose, mais c’était bien plus gérable que cette relation. J’avais l’impression d’avoir une maitresse. Alors que moi et Camilla étaient « officiellement » célibataire, ce n’était pas logique. Enfin bref, c’est avec ses pensées en tête que je faisais mes bagages pour mon voyage. J’avais prévu de longer les côtes américaines, puis de remonter en prenant le fleuve st Laurent au Québec. Cela me permettait de me mettre doucement dans le bain pour ma traversée de l’atlantique prévue début septembre. Je n’avais jamais fait naviguer ce bateau jusqu’en Europe, mais mon oncle l’a fait très souvent, il adorait l’Angleterre. Alors j’avais envie d’y aller, pour mon premier grand voyage. Après je n’avais pas réellement prévu. Je verrais bien d’ici là.

C’est alors qu’Heather toqua à la porte, me sortant de mes pensées. Que dirait Camilla si elle savait qu’on l’avait fait. En vérité, elle n’avait trop rien à dire dessus. Nous n’étions pas en couple à ce moment-là, et elle m’a, on peut ainsi dire, jeter au profit de sa sœur. Je me doutais bien qu’elle n’allait pas être aux anges, mais quand même. J’avais le droit de mettre mon attribut dans l’entrejambe de qui je voulais. Je n’étais pas non plus un chaud lapin, à mon âge, Popol n’a connu que deux félines différentes.

Probablement qu’Heather avait aperçu mes valises derrière moi tant elles prenaient de la place. Elle me demandait où j’allais. A part bien sur mon père et mon frangin, je ne l’avais encore dit à personne. Je leur avais fait promettre. Je voulais le dire moi-même à Camilla, et pas qu’elle l’apprenne de quelqu’un d’autre. Tant pis, elle l’a vu. Alors que je voulais lui répondre, je l’observais plus attentivement. Elle avait l’air patraque, je voyais bien que ça n’allait pas. Elle avait l’air de quelqu’un qui avait appris une mauvaise nouvelle. « Tu n’as pas l’air d’aller bien. Ça va ? » Je voulu la faire entrer pour lui proposer un petit remontant. « Un thé ? Un café ? Un chocolat ? » C’était l’été quand même, je pourrais bien proposer une boisson fraiche, non, quel idiot. « Un soda ? De l’eau pétillante ? Un sirop à l’eau ? » Du pied, je repoussais toutes mes affaires pour la laisser entrer, et je lui indiquai un petit pouf bien confortable, en face du fauteuil/lit de mon père.

Spoiler:

Heather avait eu un passé avec Lukas et elle se le repassait en mémoire chaque fois qu'elle le voyait. Ils n'avaient pas réellement gardé contact mais ils ne s'étaient pas ignoré pour autant. Disons qu'ils étaient restés en bons termes et la brunette en était heureuse. Ils étaient capables de passer du temps ensembles sans forcément être mal à l'aise ou qu'il n'y ait de blanc durant leur conversation. En revanche, Heather savait que quelque chose clochait. Des tas de valises se trouvaient derrière Lukas. Il semblait sur le départ. L'avait-elle interrompu ? Elle lui posa donc la question directement et, chose surprenante, il préféra l'esquiver. Ce n'était pas son genre pourtant. Il l'invita à entrer et la brunette le remercia. Il lui demanda si elle allait bien. Je n'ai pas envie d'en parler songea t-elle. Il lui proposa finalement à boire. Oui un terrain plus neutre serait parfait. Elle le suivit et s'installa sur le pouf.

« Un café oui s'il te plait et je vais merci »

Heather préféra ne pas s'étendre sur sa santé - physique ou mentale d'ailleurs - c'était bien trop compliqué. Après tout, elle ne se voyait pas lui mentir, à lui aussi. Elle l'avait fait avec les membres de sa famille, elle n'y parvenait plus. Elle n'arrivait plus à se regarder dans le miroir. Elle détestait le mensonge pourtant, après tout c'était à cause de cela qu'elle s'était disputée avec Scarlett. A cause d'un mensonge. Et elle ne voulait plus raconter n'importe quoi. Alors elle choisit l'évitement. C'était plus simple même si elle savait qu'elle ne pourrait pas faire ça éternellement. Cela expliquait son éloignement perpétuel. Lukas s'affaira en cuisine tandis que la brunette fixait l'amoncellement de valises dans l'entrée.

« Alors pourquoi ces valises ? Tu pars en vacances ? C'est un peu tard non ? La rentrée approche à grand pas. »

Ce départ était assez soudain. Trevor ne lui en avait pas touché un mot, ce qui était étrange et dans un quartier comme Magnolia, les nouvelles allaient très vite. Alors elle trouvait cela étrange.

Spoiler:

Quand j’ouvris la porte à Heather, elle me demanda directement si je partais quelque part. Je ne voulais pas trop lui en parlais comme ça. Personne d’autre que mon père et mon frère étaient au courant. Alors j’esquivais sa question en lui posant une autre. J’avais vu qu’elle n’avait pas l’air d’aller très bien. Je lui ai demandé si ça allais et elle m’a répondu promptement qu’elle allait bien. Bizarrement, je ne la croyais pas. Alors que j’allai dans la cuisine préparé le café je réfléchissais. Que pouvait-elle avoir ? Cela était surement du être à cause de la tempête. Je lui demanderais plus tard. C’est alors qu’elle me coupa dans mes réflexions en me parlant de mes valises. J’étais toujours dans la cuisine. Je fis semblant de n’avoir rien entendu, je prendrais le bruit de la cafetière comme excuse si elle me poserait la question.  Alors que le café était en train de passer, j’avais préparé un plateau, j’y avais mis le sucrier, déposé deux tasses ainsi que deux cuillères et quelques biscuits que je déposai rapidement avant de verser le café et de porter ces boissons chaudes au salon.

« Voilà, voilà, tiens, j’ai mis quelques biscuits, au cas où tu voulais faire trempette dans ton café. » Je me posai sur un pouf aux côté d’Heather et lui fit un sourire bienveillant. D’un air faussement innocent, je lui fis part de mes interrogations la concernant. « Alors, pas trop de dégâts lors de la tornade ? » J’espérais aussi qu’on allait plutôt parler de la catastrophe, plutôt que mon prochain voyage. La seule personne a qui j’avais envie d’en parler c’était Camilla.