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| Allez viens, on rembobine. [Julian & Andy] | |
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| Sujet: Allez viens, on rembobine. [Julian & Andy] Dim 5 Mai - 10:18 | |
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Allez viens, on rembobine. On ne connait qu'un premier baiser. Un seul. Certaines personnes disent qu'il nous fait frissonner de la tête au pieds. D'autres, qu'il fait briller des étoiles dans nos yeux. D'autres encore qu'il nous fout des papillons dans le ventre. C'est stupide. Que viendrait faire des papillons dans votre estomac ? En plus de ça, il y a fort à parier que si ces pauvres bestioles atterrissaient un jour dans votre ventre, vos sucs digestifs aurait bientôt fait de les digérer. Alors non. C'est pas une histoire de papillons. C'est autre chose. Un premier baiser, c'est une brûlure, un brûlure ardente, qui vous embrase les chairs. C'est puissant, violent même, ça vous dévore de l'intérieur. Un énorme brasier interne. Est ce un feu de joie ? Est ce un bûcher incendiaire ? Peut importe. Ça vous habite, l'espace d'un instant, puis ça vous quitte, aussi brutalement. Ça vous laisse seul, démuni, à terre, KO. C'est une initiation au manque, un baptême à la dépendance. Un cadeau empoisonné. C'est trop tard, votre cortex orbitofrontal a déjà imprimé d'une marque indélébile l'intensité de ce que vous venez de lui offrir. Il grogne, il gémit, il en redemande. Il réclame sa dose de dopamine, comme le ferait un enfant capricieux. Avec bruit et fracas. Puis, vous cédez. Vous êtes faible. Vous partez en chasse. Vous vous démenez, vous vous donnez corps et âme, pour au final le recevoir le St Graal tant attendu : un nouveau baiser. Et là... C'est la claque. Une amère déception. La friandise a perdue de sa saveur. Les sensations promises sont si tenues que vous en pleuriez presque de frustration. Elles sont bien présentes, certes, mais muselées à double tour, sournoisement ballonnées. Vous êtes comme face à une photographie donc les couleurs délavées atténues le souvenir flamboyant. Quoi ? C'était donc ça, le grand frisson ? Vous aurait on menti ? Et les papillons dans le ventre alors ? Je vous l'ai dit. C'est pas une histoire de papillon. On ne connait qu'un premier baiser. Un seul. Tout le reste, ce sont des embrassades de rattrapage. Amours en chassés croisés. Pourtant, on essaye, on essaye encore. On se relève, on retente, on se ramasse la gueule aussi le plus souvent. Mais on garde là, tout prés de notre coeur meurtrit, l’espérance qu'un jour, peut être, quelqu'un viendra. Et ce jour là, il balayera nos dernières déceptions le temps d'un baiser. Un baiser ardent.
Mes doigts enserrent sa taille. Je crois que j'aime ça, de la sentir faible, de la voir ainsi s'abandonner à moi. Je peux jouer avec ses lèvres. Jouer, c'est le mot. Elle est ma poupée grandeur nature. Je peux passer mes doigts dans ses cheveux, je peux l'attirer contre moi, je peux baiser ses lèvres, elle ne se dérobera pas. Nos bouches se mêlent, sans distinctions. Elle ? C'est la fille paumée que j'ai ramassé dans je ne sais quel bar à la con. La nuit a filée entre mes doigts. J'ai laissé ma mauvaise humeur stagner au fond de mon verre d'alcool, et j'me suis mise à lui faire la cour. Ca a dut lui plaire, je crois. Puis, petit matin, il a bien fallu se remettre en route. Le bar fermait ses portes, et nous délogeait de son entre enfumée. On avait traîné nos deux carcasses jusqu'à la ville dans le petit matin. Main dans la main. Un couple de zombie revenus de l'au delà. Je l'avais raccompagnée jusqu'à chez elle. Elle avait hésité devant sa porte, puis finalement, au moment de se dire au revoir, elle me l'avait offert : son dernier baiser. Je la sens vaguement trembler sous mes doigts. Je crois que je suis la première fille qu'elle embrasse. Je sens son appréhension, son excitation aussi. Son abandon, finalement. On savoure plus les choses, lorsqu'elles ont le gout de l'interdit. Pour un peu, on pourrait se croire seules au monde, juste elle, moi, et le battement de son coeur. Mais nous ne sommes pas seules, loin de là. Des pas se font entendre à l'autre bout de la rue. L'écho se rapproche lentement. Je ferme les yeux. Je nie l'évidence. Ce matin, nous sommes seules au monde, et sens son coeur battre sous ma main.
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| Sujet: Re: Allez viens, on rembobine. [Julian & Andy] Mer 15 Mai - 18:45 | |
| Albert Einstein disait : ❝ Quiconque prétend s'ériger en juge de la vérité et du savoir s'expose à périr sous les éclats de rire des dieux. ❞ Une promenade en dehors du temps, comme si je tenais en main la pellicule d'un film en noir et blanc. Je marche, mais je me sens totalement étranger à toutes ces couleurs, à toutes ces sensations. Je regarde autour de moi, et découvre la vie qui s'éveille dans l'aube. Les images se succèdent sur l'écran, et le temps passe ainsi, maître de bien plus de choses que moi. Je vis en spectateur désabusé, prisonnier d'une salle obscure où l'on imprime toujours les mêmes cinématiques à l'écran. J'aimerai parfois quitter mon siège, mais une force mystérieuse m'oblige à garder la même position, chaque seconde, toujours. Suis-je condamné à rester voyeur sans jamais profiter de la fête ? Bien certainement, je m'en suis convaincu avec bien des facilités. De toute façon, un être comme moi ne pouvait prospérer en liberté, alors il fallait bien qu'une quelconque menace m'enchaîne et m'entraîne à rester bien sagement à place. D'une certaine manière, si d'autres auraient pu trouver ma condition bien déplaisante, je ne puis l'avouer. Evidemment qu'au départ, je me suis débattu et ait tenté de briser ces entraves à ma liberté, bien que je restais conscient de toutes les horreurs commises par ces mêmes-mains qui se débattaient. Les détacher aurait été bien injuste ; c'est donc en fervent protecteur d'une humanité dont j'étais d'une certaine manière dépourvu, que je m'applique depuis lors à ne pas vouloir m'évader. Et la douleur, cette pression gênante provenant de ce cœur prisonnier, s'est finalement amenuisée, jusqu'à disparaître. Les menottes ont cessé de scier mes poignets, elles se sont incrustées dans la peau et font bien plus profondément partie de moi que quiconque pourrait le croire. Je marche donc, balade nocturne qui me satisfait chaque soir un peu plus, répondant à l'appel du silence et de la désertion que je passe secrètement. Cette nuit est plus belle que les précédentes. La voûte céleste offre une vue dégagée sur des étoiles, pour certaines éteintes depuis bien longtemps. Mais j'apprécie le spectacle, les yeux rivés sur ce néant tacheté de lumières. En réalité, je trouve ce tableau fort ironique, même la nature nous ment. Comment pourrais-je espérer l'honnêteté d'animaux avec une conscience ? Je ris sous cape, je n'espère plus depuis longtemps. L'homme m'a déçu, certainement parce que je me suis déçu. Je suis à l'origine d'une décadence amère de mes instants de vie. Je n'ai plus le goût à toutes ces futilités malhonnêtes. Et à broyer du noir, je me suis surpris à avoir un véritable radar pour toutes les formes d'amertumes. Rares sont ceux qui partagent pleinement mon point de vue, rares sont également ceux qui le connaissent, mais lorsque ces deux facteurs sont réunis, le feu d'artifice dans ma poitrine fait peur et mal. Il est bien difficile de savoir qu'il existe des gens aussi peu heureux qu'on ne l'est, quand on a fait ce que j'ai fait. Certainement ont-ils leurs raisons, mais je doute qu'elles égalent les miennes. J'extirpe mon paquet de cigarette de la poche de mon blouson et glisse une clope entre mes lèvres. Le briquet suit, docile instrument pour l'exercice de ma dépendance. J'inspire goulûment ce poison et noircis un peu plus mes poumons. J'aimerai penser que c'est un plaisir que je m'octroie de temps en temps, mais c'est plus un besoin, et j'en suis fatalement conscient. Je souffle la fumée de dioxyde de carbone et de goudron mêlés pour la voir s'étirer jusqu'au firmament. Les voilà, les nuages. Je continue de marcher et de fumer, dans un silence brouillé uniquement par mes inspirations violentes, jusqu'à ce que je les voie. Ou que je les entente. Ou juste les ressente. Elles, sur le perron d'une maison. Mon regard se pose sur leurs hanches soudées par une passion certaine. Des homos, c'est marrant. Je ne m'attendais pas à rencontrer quelqu'un, si tôt, mais encore moins un couple, et histoire de faire plonger mes probabilités dans un gouffre d'impossibilité sans fond, encore moins un couple de lesbiennes. J'avance toujours, bien que plus lentement, une drôle de force qui m'empêche de fuir. Alors je les regarde, légèrement insistant, sans réellement le vouloir cependant. Soudain, une révélation s'impose à moi, comme si je venais de comprendre l'intrigue de ce film qui se joue devant moi contre mon avis. Je sais alors pourquoi mes yeux sont aimantés sur ces cheveux entremêlés tendrement, ou plutôt, je le sens. Je ne sais laquelle des deux, je ne peux même pas expliquer mon impression. Mais elle est là, dans leur salive, sur leurs lèvres. L'amertume. Je la vois très clairement balayer cette seconde immortelle d'un baiser volé.
Dernière édition par Julian King le Sam 1 Juin - 21:22, édité 1 fois |
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| Sujet: Re: Allez viens, on rembobine. [Julian & Andy] Jeu 23 Mai - 8:20 | |
| Allez viens, on rembobine. L'homme est un animal sociable. Enfin, il parait. Personnellement, j'en viens de plus en plus à en douter. Ou alors, peut être c'est moi, qui ne suis plus tout à fait humaine, qui sait ? Oui. C'est peut être ça, après tout. Je me suis défait de mon humanité, comme l'on se défait d'un habit trop encombrant. J'ai mué, j'ai laissé derrière moi ma vieille enveloppe charnelle, toute rapiécée. Je l'ai envoyé valsée, d'un coup de pied négligent. Je ne suis plus Andy. Je ne suis plus humaine. Je suis un zombie hébété, une carcasse animée peinant à comprendre ce qui la maintient encore en vie. Le sang qui palpite dans mes veines ne colore plus mon visage depuis trop longtemps. Trop longtemps ? Un an. Un an exactement. Un an que ma mère nous a laissé, moi et ma fratrie. Elle a plié bagages, et elle a embarqué, direction le ciel. Un aller simple. Non négociable. Mais elle n'y est pas allée les mains vides, loin de là. Avant de partir, elle a prit soin d'emporter avec elle mon sourire. Et depuis ce jour, j'improvise. Hasardeusement. Mes lèvres s'étirent mécaniquement, ma gorge exulte, sans joie. Je crois qu'au fond, quelque chose est cassé à l'intérieur de moi. Et moi je suis là, les bras ballants, à chercher comment fixer cette putain de fuite du coeur. J'ai perdu le mode d'emploi, j'ai même pas les bons outils. Bah alors, qu'est ce qu'on va faire alors ? Rien. Absolument rien. Je regarde mon coeur agoniser, lentement. Il est en train de crever entre mes doigts, et je reste plantée là. Je sais pas quoi faire pour lui porter secours. Et puis il parait que même le 115 ne pourrait rien pour moi. Alors tant pis ? Ouais, tant pis. Mon coeur se meurt, et je meurt avec lui.
L'homme est un animal sociable. Peut-être, mais je ne suis plus homme. Je ne suis plus grand chose tout court d'ailleurs. La foule m'horripile, et la masse me fait horreur. Ca grouille de partout, dans tout les sens. Une fourmilière à taille humaine. Ca me file la gerbe. Je me perds dans la masse, je me noie dans la multitude. Et je bois la tasse. Comme toujours. Parfois, je rêve de me lever un matin, et d'être la dernière personne sur terre. Plus de contraintes, plus d'obligations, plus d'attentes, plus de compromis. Plus d'espoir non plus, mais plus de déceptions, dans un sens. Je ne crois plus en l'humain. Mais très vite, quand j'ouvre les yeux, la réalité me rattrape et me prend à la gorge ; je ne suis pas seule. Je ne le serais jamais. Je ne suis qu'un infime élément, parmi sept milliards d'autres. Je ne suis pas seule, et ce matin encore, le destin décide de me le rappeler. J'entrouvre les yeux. Face à moi, le visage de cette fille, qui se forme et se déforme, au gré de ses baisers. Je peux voir au ralenti sa bouche chercher la mienne, dans une course poursuite incessante. Le spectacle est à la fois fascinant et effrayant, mais je ne prends pas le temps de m'y arrêter. Pas cette fois ci. Derrière mes paupières mi-closes, mes prunelles sont en chasse. Elle recherche l’intrus, cet homme qui vient impunément me troubler dans mon plaisir. Il est là. A quelques mètres de nous. La rue seule nous sépare, et pourtant, c'est comme s'il était tout prêt. J'étouffe. Je sens son regard, qui irradie sur moi, qui me brûle les chaires pour y laisser sa marque, incandescente. J'aimerais m'en défaire, mais je ne peux pas. Je suis coincé. Prise au piège comme un rat.
« - EH, LE TORDU LA ! »
Ma voix résonne contre les murs de la ville, encore ensommeillée. Sous mes doigts, je sens ma jolie inconnue sursauter. Passer d'un beau ciel d'été à un coup de tonnerre en moins d'une demi seconde, ça a de quoi surprendre. Elle lève ses grands yeux vers moi, et me regarde, interloquée. Elle doit se demander ce que je fous. A vrai dire, elle n'est pas la seule à se poser la question. Ma bouche a parlé, presque malgré moi. Je ne sais pas dans quoi je me lance. Je n'ai pas de but, pas de plan. Tout ce que je sais, c'est que je ne pouvait plus supporter de sentir sur moi son regard. Je fixe mon inconnu, prête à sortir les crocs.
« - Ca va, tranquille, t'as fini de te rincer l'oeil ? Dis moi si on te gène surtout ! PERVERS. » Son regard ne se baisse pas, et continue de me fixer avec cette même expression inqualifiable. Mon malaise inexplicable grandit de secondes en secondes. Son regard est dérangeant. Il est... différent. Je le sens d'ici. C'est comme s'il arrivait à voir ce que les autres ne voit pas. Cette pensée me glace la colonne. Peut importe qui est ce mec, peut importe ce qu'il fait là. Tout ce que je veux, c'est qu'il s'en aille, qu'il mette les voiles, et qu'il nous laisse enfin seules. La double solitude des amants enlacés. |
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| Sujet: Re: Allez viens, on rembobine. [Julian & Andy] Dim 2 Juin - 0:52 | |
| Albert Einstein disait : ❝ Quiconque prétend s'ériger en juge de la vérité et du savoir s'expose à périr sous les éclats de rire des dieux. ❞ May it be the shadows call will fly away. Doucement, je sens le ciel illuminé d'étoiles fondre. Sa noirceur infinie s'éclaircit et la douce lueur de l'astre de la nuit s'éteint. L'aube tend à paraître et à réchauffer la terre comme chaque jour. Bientôt, elle viendra m'embrasser tendrement, et j'accepterai ses caresses matinales. Mais pour l'heure, mes yeux restent figés sur ces amantes passionnées, couple insolite, marionnettes de désir. Je viens de saisir l'intrigue d'un récit qui commence juste, et duquel je suis le personnage principal. L'autre, le protagoniste qui me comprend et vient grandir mon histoire, se tient là, devant moi. A une dizaine de pas seulement. La brune ou la rousse ? De là où je suis, la réponse n'est en rien évidente. Je ne fais que ressentir cet appel, et je l'entends geindre et me héler. A qui est cette voix étouffée ? D'où viennent ces cris éreintés et las qui, pour une fois, ne m'appartiennent pas ? Je ne peux m'empêcher de les regarder encore, leurs langues humides qui s'emmêlent et se rencontrent. Et mon cœur se serre. Un œil dérive vers moi, et la réponse m'apparaît si clairement qu'elle me fait mal. C'est elle : la brune. Dans la grisaille de cette ville morne, à peine éclaboussée par les raisons du soleil qui peine à se lever, je ne distingue rien d'autre que ses pupilles noires. Mais cela me suffit à comprendre que c'est elle, qui m'inspire tant de compassion. Ses mots viennent d'ailleurs affirmer mes soupçons ; elle m'accuse, elle me sacre. Elle me vampirise avec sa voix suave et m'invite à compromettre mes projets. Alors je la regarde, elle, tout particulièrement. J'attends qu'elle poursuive, qu'elle me lacère doucement. Je veux qu'elle exprime toute l'Amertume que je reconnais en elle, je veux qu'elle fasse siffler l'air avec dédain. Et elle m'obéit, douce poupée de fil de fer et barbelés. Pervers, moi ? J'en souris tellement je trouve ça drôle. Je soutiens son regard, elle soutient le mien avec affront. Je tire sur ma clope sans la quitter des yeux une seconde. Je ne comprends même pas ce qui me force à agir ainsi, plutôt qu'à fuir la queue entre les jambes. Mon impression de déjà-vu est plus que dérangeante. La blondeur des cheveux de Jaylann m'aveugle une seconde, et je sens ma mâchoire se contracter. Quel complot s'amuse avec ma rage de la sorte ? Pourquoi ne puis-je pas tout simplement me satisfaire de voir ce monde sans les couleurs qui lui sont associées ? Que diable ai-je fait pour subir les Amertumes effrontées de ces filles inconnues, jusqu'à me sentir connecté à elles ? Ah, oui. J'ai péché, mon père. Je dois me repentir. Elles aussi, certainement. C'est ça, notre lien. Le monde est gris, et nous attendons de retrouver un jour le bleu du ciel d'été, le vert de l'herbe qui scintille sous la rosée, le rouge du sang qui s'écoule dans nos artères. J'expire la fumée et décide qu'il est temps d'arrêter de jouer. La comédie a suffisamment duré, je ne me reconnais pas. Je baisse la tête, incapable de faire reculer mon sourire qui s'étire et s'étire. Et j'emporte à nouveau les pavés sous mes pieds. Quelques pas lents avant de sentir ma main quitter ma poche duveteuse et s'élancer dans les airs. Une salutation amicale des plus banales ? Non, elle le sait, et moi aussi. C'est mon corps qui bouge, comme sa bouche a bougé. Ce sont nos mondes qui se croisent, qui s'appellent et se toisent. Et qui, inexorablement, se rencontreront encore, et encore.
L'air est à peine frais, et le soleil brûle ma peau. J'aime cette sensation de liberté, où tout m'échappe et où rien ne m'appartient. Cet instant où le vent est maître et où je ne suis qu'une feuille qui se laisse emporter, doucement. Le calme se fait rare, en ces temps printaniers. Les mots se refusent à disparaître ; ils préfèrent de surcroît tambouriner contre mon crâne, marteler encore et encore. Ils me blessent, j'ai mal. Ils s'insinuent dans mes tempes et glissent le long de ma gorge, et suivent le chemin tout tracé de l'oxygène qui rejoint mes poumons. Puis, ils quittent le train et pénètrent dans mon cœur, où ils répètent leur danse nocive, et me blessent encore. J'ai de plus en plus mal. Qu'on les fasse taire, qu'on les censure ! Je ne veux plus les entendre, je ne veux plus les sentir. L'ignorance, rendez-moi l'ignorance ! Je vivrai bien mieux ainsi. Dopez-moi, faites-moi avaler du paracétamol à m'en tuer. Ne me laissez pas souffrir davantage. Je veux... L'air frais et le soleil brûlant apaisent mes maux. Je me sens libéré de ce fardeau qui brise mes clavicules. Je ne suis rien, rien qu'un homme bercé par le chant des oiseaux. Allongé sous le ciel qui nous protège tous, je me sens enfin humain. Vide et simple. Une toile qu'on peindra bientôt, mais qui se satisfait du blanc qui l'illumine. Mes yeux restent clos, je m'enivre de l'absence de questions. Juste moi, les oiseaux dans les branches des arbres, le soleil qui lutte pour garder éveillée la vie, la rivière qui tinte gaiement un peu plus loin, le vent qui fait frissonner l'herbe. Je peux presque m'endormir en paix, pour une fois. Presque. |
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| Sujet: Re: Allez viens, on rembobine. [Julian & Andy] Dim 30 Mar - 18:37 | |
| Allez viens, on rembobine. • • • Le problème, lorsque l'on est vide de tout, c'est qu'on se rempli d'un rien. Des premières lueurs du jour qui nous aveuglent d'une manière délicieuse. Du léger vent qui fait valser ses cheveux. De la brulure de l'astre solaire le long de son épiderme. Autant de rien qui formaient un tout, autant de tout qui me faisait du bien. C'était comme si le petit matin s'était immiscé dans mon esprit, avec la menace d'un bonheur forcé. Sans bruit, sans crier garde, il s'était glissé dans la salle de pilotage que je prétendait être mon cerveau, et il avait prit possession de l'engin. La tristesse avait été bâillonnée, ligotée dans un coin. On avait ouvert les rideaux, on avait mit la musique à fond, on avait saturé les couleurs, on avait fait le grand ménage, le ménage de printemps. Changement de propriétaire les mecs. Liquidation sur les stocks, -20% sur les stocks d'amertumes, - 30% sur le rayon agressivité, -40% sur les peines à l'âme. Oh et puis non, prenez tout après tout. Débarrassez nous de tout ça. Changement de proprio on a dit. Changement de décors aussi.
Les mains crispées sur un petit bout de papier chiffonné au fond de ma poche, là où ma belle de nuit avait griffonnée ce que je devinais être un faux numéro, je me met en route. Devant mes pupilles, le paysage défilait devant mes yeux avec la régularité effrayante d'un film dont le projectionniste passerait en boucle la même bobine. Maison. Boite aux lettres. Buissons. Maison. Boite aux lettres. Buissons. Maison... Ah, parc. Parc ? Mais oui, parc. Okay, pourquoi pas après tout. Pourquoi pas. J'entre dans le parc en même temps qu'un petit groupe de coureurs matinaux. Ils me contournent, pour mieux continuer leur course vaine et sans finalité. Les traits plissés. La respiration saccadée. Ce matin, il se sont probablement levés tôt, pour aller courir tous ensemble. Courir. Et tourner en rond à l'infini, jusqu'à ce que leur poumons les menace d'explosion. Tourner en rond, puis rentrer chez eux. Prendre une douche, et reprendre leur journée. Leur journée qui les fera tourner en rond, encore et encore. Mes lèvres s'étirent, imperceptiblement. Diluée dans la candeur de ma fragile allégresse, les perceptions se brouillent, s'étirent et se déforment. A mes yeux, le circuit cylindrique prend soudain des airs de valse interminable, aux danseurs à bout de souffle qui virevoltent sans jamais se croiser. Un, deux, trois, un, deux, trois. Je fini par me détourner de ce spectacle improvisé et pour lequel je n'ai pas réservé ma place. Je quitte peu à peu le banc des spectateurs, pour la douceur extrême que me réserve l'herbe. Chacun de mes pas s'écrasent sur matelas mou que forme ce tapis de végétation. Mes jambes me portent, sur cette étendue verte que rien ne semble pouvoir arrêter. Rien, si ce n'est peut être...
Lui. La tache sombre au milieu de la pelouse. Le témoin indiscret de mes baisers volés. La cible de ma colère. L'instrument de ma peur. Lui. Lui. Réminiscence visuelle. Comme inscrit dans l'historique de mes sens, la simple vue de ses traits suffit à hérisser ma colonne vertébrale. Comme un sac d'os névralgique, tout mon corps est en tension. Pourtant... Pourtant, l'émotion retombée, tu dois bien reconnaître qu'il a l'air assez paisible, les yeux fermés. Quoi, c'est donc lui, la terrible bête féroce qui te faisait trembler quelques minutes plus tôt ? C'est lui, ton bourreau ? C'est ridicule, Andy. Regarde le, enfin. Il a les traits lisses. L'air apaisé. Comme un homme à bout de souffle, dont on a lavé les peines à la lueur des premiers rayons de soleil. Quelque chose de presque... enfantin. Quelque chose... quelque chose qui ne peut t'empêcher de te rappeler...
« - Andy. Je m'appelle Andy. »
Dernière édition par Andy Swarovski le Mer 31 Déc - 9:23, édité 1 fois |
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| Sujet: Re: Allez viens, on rembobine. [Julian & Andy] Lun 14 Avr - 20:45 | |
| Albert Einstein disait : ❝ Quiconque prétend s'ériger en juge de la vérité et du savoir s'expose à périr sous les éclats de rire des dieux. ❞ La paix me guette. Elle m'observe en silence, m'épie amoureusement. Je suis celui qu'elle n'aura jamais plus. Jamais je ne lui appartiendrai, jamais je n'irai dormir dans le creux de ses bras, ni embrasser ses lèvres tendres. Elle peut m'observer, me supplier, m'inviter encore et encore. Jamais je ne la rejoindrai entièrement. Les feuilles des arbres frémissent dans un rire cristallin. Les clapotis de l'eau ponctuent la mélodie d'un la en rythme. Vient s'ajouter le vent qui étire sa longue plainte brûlante sur mes joues. L'herbe danse autour de moi, chahute en silence, bercée par cette musique de nature. Nul besoin d'être un exobiologiste pour profiter de ce petit bonheur qui m'apaise un peu. Les yeux fermé, je me languis de la lumière qui chauffe mon visage et mord mes paupières. Le noir ne l'est pas tellement ; j'ai l'impression qu'on a remplacé mes paupières opaques par un voile épais. Ce n'est pas dérangeant, simplement étrange. Moi qui vit à la lumière de ma lampe de bureau, profiter du soleil me semble être d'une telle déconvenue... Où sont les classeurs, les cours qui s'entassent, les stylos et les crayons, les calculatrices, les dictionnaires ? Que sont-ce ces bruits légers, ces délicates tintes de nature, qui me chatouillent les oreilles ? Je me surprends à sentir mes lèvres s'étirer doucement. Ai-je le droit de consommer un telle extase, moi, Julian King ? Les réponses sont évidentes. Non, je ne dois pas y prendre goût ou j'en manquerai toute ma vie. Et malheureusement pour moi, la dépendance à l'allégresse ne se compense pas à coup de patchs. Une voix me tire de mes pensées. J'ouvre les yeux et me redresse aussitôt : une jeune fille se tient à côté de moi. Elle est debout, paraît immense. Je la détaille de bas en haut, mais nul doute n'est permis. C'est elle : la brune de toute à l'heure. Ses prunelles de ténèbres me glacent et me brûlent à la fois. Elle ne m'accuse plus, se présente simplement. Andy. Son prénom lui va bien : totalement mixte, asexué même. Mais je ne comprends pas pourquoi elle me parle.
-Ouais, ok.
Mon visage exprime toutes les questions qui ne trouvent aucune réponse. Andy, ma brune amère dont les sentiments dégoulinent et s'épandent comme une nuée de phéromone est là mais sa présence me perturbe. Elle provoque en moi une étrange sensation, comme si la connexion entre nous n'avait pas été qu'une invention de ma part. Est-ce réellement le cas ? Peut-on dire que cette inconnue et moi, nous avons échangé quelque étrange et inexplicable liaison ?
-Tu as enfin lâché ta poupée ? Demandé-je avec un drôle de ton dans la voix.
Ce n'est pas moqueur, ni même teinté de répréhension. C'est juste mon amertume qui palpite. Je la sens s'agiter dans mon cœur, sautiller comme un oisillon excité, comme si elle prévoyait de rencontrer une amie. C'est elle, cette Andy. Son amertume fait écho à la mienne, elles se sont trouvées, enfin. Après avoir survécu des années à se chercher. |
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| Sujet: Re: Allez viens, on rembobine. [Julian & Andy] Dim 27 Avr - 13:08 | |
| Allez viens, on rembobine. Naïvement, j'avais toujours pensé que le feu trahissait une brulure dévorante, qui ne pouvait qu'esquinter un peu plus les plaies que celui ci venait lécher. Je n'avais retenu des brasiers ardents que les clameurs montantes, les chaires calcinées, les démons de fournaise, la foudre crépitante. Je voyais de la violence là où il n'y en avait pas. Je voyais du danger là où je ne risquait rien. Le feu m'effrayait, il me tenait à distance. Pourtant hypnotisée par ses flammes dansantes, le fuyais ses éclats comme la peste, gardant ma peau bien à l'abri de ses éclats corrosif, gardant mon âme bien à l'abri dans sa prison glacée. La vérité, c'est que j'avais peur de prendre feu, moi. De me transformer en torche humaine, qui brule encore et encore, qui se consume de colère, comme d'autre ne brûlent que d'amour. Je sais que j'en suis déjà couverte ; l'aigreur m'imbibe déjà, comme si j'étais un simple buvard. Il suffirait d'une étincelle pour foutre le feu à mon esprit, d'un craquement d'allumette pour raviver mon amertume, charbon ardent se cachant sous une fine couche de cendres. Il suffirait d'un rien, je le sais, pour me condamner au bucher. Pourtant, le feu, ce n'était pas que ça. Au coeur de ce brasier, se trouvait la chaleur et l'éclat. Une palette de couleurs chaudes, douces, envoutantes, dans lequel j'acceptais de me perdre volontiers. La douceur de ces orangés. L'écho intrinsèque de ce rouge à toute entité. Chaque choses prenait un sens, bien lointain du sens que j'en avait d'abord tiré. Je comprenais que la brûlure était parfois un mal nécessaire pour qui veut gouter à la chaleur, et que sans mal, le bien ne sera pas mesurable. Je comprenais que les éclats luminescents pouvaient aussi m'éclairer de leur lumière vacillante. Je comprenais que je devais cesser de craindre. De me retourner, et d'affronter enfin ce qui m'effrayait tant. J'ai compris que parfois, un salut inattendu pouvait se trouver là où on ne s'y attendait pas. J'ancre mon regard à ses pupilles ardentes. Sa bouche me parle. Peu importe, ce n'est pas elle qui m'a convoquée ici, en assemblé exceptionnelle. Elle n'est qu'un détail, auquel je réponds malgré tout avec un demi-sourire machinal.
« - Faut croire que ouais. Je lui ai rendu sa liberté, tu vois. Dieu soit loué, la Liberty Bell des âmes esseulées va pouvoir résonner encore une fois ce soir. » Lui laissant le temps de décrypter mon habituel charabia, je m'assois sur ce tapis d'herbe molletonneux, sans y avoir été invitée. Comme il avait brisé mon intimité quelques minutes plus tôt, je venais à présent briser son recueillement. Pas pas vengeance, ni par malveillance. Simplement par un besoin impétueux que je ne pouvait justifier.
« - Et toi, qu'est ce que tu fous là ? Tu n'as trouvé personne d'autre à épier ? » Mon ton était doux. Calme. Malgré la rudesse de mes paroles, je ne souhaitais pas rentrer en guerre. Pas tout de suite, pas maintenant. Qu'on agite le drapeau blanc, que je puisse poser les armes, rien qu'un instant.
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| | | Je n'ai plus aucun secret pour personne, enfin presque...
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| Sujet: Re: Allez viens, on rembobine. [Julian & Andy] Dim 31 Aoû - 11:57 | |
| Albert Einstein disait : ❝ Quiconque prétend s'ériger en juge de la vérité et du savoir s'expose à périr sous les éclats de rire des dieux. ❞ Elle me préside de toute la hauteur de ses jambes. Son regard me couve de trop loin pour que je puisse le voir. Et pourtant, je sens sa curiosité et sa désespérance me bercer d'un œil incertain. Je ne suis rien pour elle, rien encore, sinon l'origine de son dérangement, quand les voiles noirs de la nuit cachaient encore la ville. Le déclic de sa ire aussi, celle-là même au profit de la défense de ses droits et de son identité. Gay. Voilà ce que ma brune, Andy de son prénom, pense de moi. L'étrange opportun dont l'attention s'achève sur ces deux silhouettes aux formes élégantes, qui s'embrassent et s'aiment en silence et sans secret. Un petit pervers de pacotille. Mais je sens dans son sourire et dans ses galimatias que je prétends à être plus que ça. Sent-elle aussi comme nos cœurs sont attirés l'un par l'autre, aimantés par cette similarité noire qui nous lie ? Éprouve-t-elle comme moi le lampion qui s'embrase dans les ténèbres de solitude qui nous hantent ? Je ne sais pas tout à fait ce que je raconte. Je me laisse guider par ce picotement en moi qui me murmure qu'elle est comme moi. Déçue. Amère. Elle croule sous la réalité de la vie, loin d'être aussi belle et si enchanteresse qu'on nous l'avait promis dans les contes de fées. Elle pleure ces ouragans de désastre quand elle rêvait de fleurs et de liberté. Elle tenait bon dans le tunnel en espérant que la lumière du jour viendrait la mordre un de ces quatre. Mais depuis vingt ans qu'elle attend, c'est le noir total qui la borde chaque soir et la réveille tous les matins. Jusqu'à ce que mon tunnel croise le sien, et que cette intersection inopinée se voit baignée d'une tendre et délicate lueur. Si douce et pourtant si malvenue qu'elle nous aveugle et nous laisse apprécier de cette formidable rencontre.
Soeur d'amertume, je me présente, je suis ton frère.
Je la laisse s'asseoir à mes côtés sans rien dire. L'herbe ne m'appartient pas. Et puis, j'ai encore à confirmer cette impression qui me tient éveillé à ses côtés. Je me rallonge, nonchalant, serein aussi. Elle ne m'inquiète pas, m'inspire même confiance. Malgré ses sarcasmes et le venin qui parsème sa langue et contamine ses mots. C'est le même poison qui me ronge la gorge. Je sais comment l'appréhender et le jauger.
-J'avais besoin de repos, c'est dur d'être un pervers.
Je lui souris en tournant la tête vers elle, histoire de ne rien louper de sa réaction. Mes phrases rentrent en harmonie avec les siennes. L'entendre brailler plus tôt ne m'avait guère amusé mais j'entends désormais me révéler au grand jour. J'extirpe mon paquet de cigarette de mon manteau et lui propose de fumer en ma compagnie.
-Tu fumes ?
J'attends sa réponse et allume ma clope en silence. Je ne connais pas bien Andy et je ne suis pas curieux de nature. Poser des questions me semble souvent déplacé. Je préfère qu'on se confie à moi, chose qui n'arrive plus si souvent depuis quelques temps.
Le soleil grignote toujours la peau que je lui offre, lèche de sa paresseuse langue mon menton et mon front. Mais cette caresse me semble froide comparée à l'intense brasier qui s'anime dans mon sein. Il gonfle et soupire de plaisir comme un chat ronronne amoureusement. C'est l'effet Andy. |
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| Sujet: Re: Allez viens, on rembobine. [Julian & Andy] | |
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| | | | Allez viens, on rembobine. [Julian & Andy] | |
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