Juliet était perdue. Elle errait dans un quartier qu’elle ne connaissait pas et qu’elle n’avait finalement pas la moindre envie de connaitre. L’agent immobilier lui avait pourtant assuré que l’endroit était paisible et qu’elle pourrait y couler des jours heureux. Tu parles ! Vivre ici se résumerait à passer un séjour en enfer ; la ruelle était sombre, humide et exhalait une odeur absolument épouvantable. Des ombres glissaient sur les murs humides et lézardés, s’infiltraient dans les coins, se tapissaient dans les fissures et enveloppaient chaque centimètres carrés de cette rue. Tous les sens en alerte, elle écoutait et guettait le moindre bruit. Comment pourrait-elle envisager un seul instant de vivre ici ? C’était un véritable coupe-gorge ! A l’angle de la rue, un homme la dévisagea avec une expression proprement déstabilisante. Juliet détestait qu’on la regarde de cette façon, comme si elle n’était qu’un vulgaire morceau de viande exposée en vitrine chez le boucher. Perdue dans ses pensées, elle continua à marcher jusqu’à ce qu’elle s’aperçoive qu’elle n’était pas seule. D’autres pas retentissaient derrière elle. Juliet fit immédiatement volte-face. Une silhouette enveloppée de ténèbres se tenait un peu plus loin. Trop loin pour qu’il semble naturel de lui adresser la parole. Juliet accéléra et sur une impulsion, plongea dans une ruelle et évalua du regard le décor qui l’entourait. La jeune femme entendit la silhouette se rapprocher sans hâte. Troublée et inquiète, elle continua à avancer, demeurant naturellement sur le qui-vive tout en essayant de comprendre où elle était et de retrouver sa voiture au plus vite. Inutile de préciser que dès qu’elle l’eut retrouvée, Juliet s’empressa de s’y enfermer avant de démarrer en trombe. Elle n’avait plus qu’à trouver un autre appartement à visiter…
Assise dans sa chambre d’adolescente, au sein de la demeure familiale des Davies, Juliet poursuivait ses recherches. Plusieurs journaux étaient ouverts sur son lit et munie d’un marqueur rose, la jeune femme entourait chacune des annonces susceptibles de l’intéresser. Elle les examina successivement, prenant soin de noter les adresses afin de s’assurer qu’elle ne tomberait pas une nouvelle fois dans un ignoble traquenard. Cela faisait déjà un bon moment qu’elle cherchait. Son expression était lasse mais sa détermination sans faille. Diable ! Que c’était compliqué de trouver un appartement décent et dans un quartier relativement calme et sécurisé. Après d’interminables recherches, une petite annonce attira l’attention de la jeune femme et elle décida de contacter le propriétaire des lieux. Ce dernier, fort aimable, lui proposa un rendez-vous l’après-midi même. Juliet accepta volontiers. A l’heure convenue, la demoiselle fut sur place. Elle n’eut aucun mal à trouver l’adresse indiquée et contrairement à sa précédente visite, le quartier était tout bonnement magnifique. Ca, c’était l’endroit idéal. De plus, Juliet avait revu ses exigences à la hausse : elle avait opté pour la visite d’une charmante petite maison et non d’un appartement. Après tout, quitte à passer les quinze prochaines années entre quatre murs, autant s’y plaire un minimum. Toujours aussi soignée et féminine, Juliet vérifia que sa robe était correctement ajustée avant de sonner à la porte. Sur un petit bout de papier, elle avait noté le nom du propriétaire … par conséquent, elle ne s’attendait nullement à voir Christopher lui ouvrir la porte.
Juliet demeura interdite durant quelques secondes avant qu’un sourire radieux ne vienne se dessiner sur son visage de poupée. « Christopher ? Si je m’attendais à ça ! » Ah le fantasmatique ténébreux qui lui avait fait perdre ses moyens à plusieurs reprises quand elle était adolescente ! A l’âge de quinze ans, elle aurait donné n’importe quoi pour attirer son attention mais était beaucoup trop timide pour oser quoi que ce soit. Quand bien même, il l’aurait envoyé sur les roses avec perte et fracas. A l’époque, chaque fois qu’elle se rendait chez lui pour garder son fils, Juliet sentait les battements de son cœur adopter un rythme incroyable. Autrefois, tout lui plaisait chez cet homme : elle le trouvait drôle, charismatique, élégant … parfait. Elle aurait tellement aimé lui plaire ! Elle s’était toujours demandé pourquoi elle n’était pas née à la bonne époque !! … ou pourquoi LUI n’était tout simplement pas né quelques années plus tard. En le regardant, Juliet se rappela que son journal intime de l’époque débordait de déclarations enflammées qui lui étaient destinées et elle se sentit rougir. Quelle honte, vraiment … heureusement qu’il n’en avait jamais rien su. Du moins, elle en était persuadée. Après tout, il était un homme expérimenté alors qu’elle n’était qu’une gamine. Il avait forcément remarqué qu’elle en pinçait pour lui. « Quelle surprise, je suis sincèrement ravie de vous revoir… J’ignorais que cette maison était la vôtre. » Machinalement, Juliet lança un regard en direction du papier qu’elle tenait entre ses mains. Non, le nom indiqué au téléphone n’était pas celui de Christopher.
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Sujet: Re: ✿ Memories ... Sam 13 Juil - 20:38
sans la cravate sur la tête, évidemment
Christopher a connu Pete Martinez à l'université. Ces belles années où tout le monde rêve d'un monde meilleur, ont leurs aspirations, visent une belle carrière avec de beaux enfants et une belle maison. Où le rêve américain est de plus en plus accessible. À l'université, Cooper était de ces étudiants inscrits à l'équipe de football et où les cours étaient secondaires à la réussite. Il n'y resta qu'une année, réalisant que l'université n'était pas fait pour lui et s'inscrivant à l'école de police par la suite, mais c'était une année remplie de bons souvenirs. Pete faisait partie de ces souvenirs. Membre de l'équipe de football également, il faisait partie de plusieurs associations étudiantes sur la politique et l'environnement en plus d'avoir de très bonnes notes en cours. Un parfait petit étudiant, en somme. Lorsqu'ils n'étaient pas en train de se pratiquer pour leurs matchs, les deux jeunes hommes se voyaient au bar et discutaient de sujets importants entre deux bouteilles de bière. Leurs idées politiques divergeaient quelque peu, mais ça rendait leurs discussions plus enflammées. Pete était un idéaliste, se battant contre ces politiciens qui vous vendaient du rêve avant de contre-révolutionner leurs projets de loi une fois élus. Christopher, quant à lui, était un vrai patriote - pas le choix lorsqu'on avait été élevé par un soldat américain - et approuvait chaque idée républicaine. Les contraires s'attiraient. Même après avoir quitté l'université, Cooper & Martinez sont restés en contact, et quelle ne fut pas le joie du marshall en découvrant que Pete vivait dans la ville voisine de Magnolia et possédait quelques maisons en ville. Cette découverte rapprocha davantage les deux hommes, qui se voyaient fréquemment.
C'est pourquoi lorsque Pete le contacta vers 13h ce jour-là pour lui demander de faire visiter sa maison de ville à une dame intéressée à la louer, Christopher n'hésita pas une seconde. La fille aînée de Martinez venait de crever les eaux et il devait l'emmener d'urgence à l'hôpital pour son accouchement. Cooper avait déjà un double des clés de cette maison - lorsqu'il y avait des travaux majeurs à faire, Pete lui demandait de l'aide, c'était donc plus pratique ainsi - et s'y trouvait depuis quelques minutes lorsqu'on sonna à la porte.
La surprise pouvait se lire sur le visage des deux personnes. Il fallait dire que Pete n'avait pas informé Christopher de l'identité de la fille, mais ce n'était pas étonnant dans les circonstances. Juliet Davies finit par briser le silence, sortant Cooper de ses pensées. La petite Davies avait bien grandi depuis ses quinze ans, certes, mais ce qui l'étonnait davantage était sa présence ici. Depuis leur dernière discussion, le couple de la jeune femme battait un peu de l'aile, mais au point de se chercher un nouvel endroit où vivre? Des explications s'imposaient. "Juliet! Il se trouve que je suis aussi étonné que toi!" Cooper n'avait jamais vouvoyé Juliet, probablement parce qu'il la connait depuis qu'elle est adolescente. C'était une bonne gardienne pour Cameron et le marshall était bien content de l'avoir dans son voisinage, même si la jeune fille agissait différemment lorsqu'il était présent. Ce n'était pas difficile d'en connaître la raison, mais cela n'a jamais dérangé le père Cooper, trouvant même cela flatteur. "Non, cette maison n'est pas à moi, c'est une longue histoire... mais entre! Je vais t'expliquer tout ça devant un bon café." Christopher sourit à Davies et l'invita à le suivre dans la cuisine. Heureusement que Pete nettoyait la maison régulièrement pour éviter la poussière, car Christopher n'avait pas eu le temps de le faire. À la cuisine, Cooper mit en marche la cafetière et pendant qu'il préparait les tasses, il tourna la tête vers Juliet. "Sens-toi à l'aise de visiter pendant que je prépare le café, je te rejoins dès que c'est prêt. Si tu as des questions, n'hésite pas, je connais cette maison par coeur!" Christopher connaissait assez bien Davies pour savoir qu'elle n'allait pas détruire les murs ni voler des objets. Elle était un petit ange à 15 ans, alors il y avait peu de chances qu'elle ait changé plusieurs années plus tard.
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Sujet: Re: ✿ Memories ... Ven 19 Juil - 19:45
Memories ...
L’étonnement ne tarda pas à laisser place à un ravissement certain. Christopher avait occupé une place importance dans la vie de Juliet et ce, sans même le savoir. Fut un temps où elle comparait tous les garçons qu’elle rencontrait à cet homme beaucoup plus âgé qu’elle et qui incarnait à ses yeux, la perfection. Avec amusement, elle l’observa donc quitter le hall d’entrée pour rejoindre la cuisine et ne put s’empêcher de penser qu’elle n’avait pas si mauvais goût que ça lorsqu’elle était adolescente. Même en vieillissant, Christopher était doté d’un charme fou. "Sens-toi à l'aise de visiter pendant que je prépare le café, je te rejoins dès que c'est prêt. Si tu as des questions, n'hésite pas, je connais cette maison par coeur!" Sortant de ses pensées, Juliet daigna enfin s’intéresser à la maison. Après tout, c’est pour ça qu’elle était venue, n’est-ce pas ? Délicatement, la jolie brune ôta sa veste qu’elle garda dans ses bras tout en prenant ces marques dans cette demeure qui prochainement, serait peut-être la sienne. Manifestement, le propriétaire des lieux prenait grand soin de son bien et la décoration épurée mais d’un goût exquis ne faisait que renforcer le charme de cette maison. « Cette maison est vraiment magnifique. Je vous avoue que comparativement à tous ce que j’ai pu visiter jusqu’à maintenant, c’est même une pure merveille.» En attendant Christopher, la jeune femme s’autorisa à grimper les escaliers pour découvrir les chambres à l’étage. Elles étaient au nombre de trois, ce qui était absolument parfait. Juliet aurait sa chambre, Logan aurait la sienne et la troisième pourrait potentiellement lui servir de bureau. Juliet n’avait aucun mal à se projeter ici, sans compter que la quartier semblait calme et plaisant. Quand elle redescendit les escaliers, la demoiselle s’empressa de retourner près de Christopher, un large sourire aux lèvres. « C’est même trop beau pour être vrai. Par simple curiosité, pourquoi votre ami ne vit-il pas ici ? Dois-je m’attendre à une mauvaise surprise une fois que le bail sera signé ?» Juliet était méfiante vis-à-vis des offres trop alléchantes pour être honnêtes et c’était totalement légitime. Elle avait peur que l’annonce soit légèrement trompeuse et elle n’avait pas envie de découvrir après coup que la maison était un nid à thermites ou encore qu’une ligne de métro passait juste sous son salon. « En tout cas, cela semble correspondre à ce que je recherche. J’ai besoin de m’isoler un peu au calme et je pense que ça ne peut être que bénéfique pour mon fils également. J’imagine que d’ici peu, il sera ravi de pouvoir courir dans le jardin.» Elle se mit à sourire en imaginant déjà cette scène des plus exquises. Logan représentait tout pour elle, il était donc totalement normal qu’elle se préoccupe de son bien-être.
Tout en continuant sa petite visite improvisée, Juliet lançait de temps à autre un regard en direction de Christopher. Naturellement, elle était bien loin de songer à lui de la même manière qu’il y a dix ans mais étrangement, sa présence la perturbait toujours d’une certaine manière. Chaque fois qu’elle croisait son regard, ses joues s’empourpraient, un peu comme s’il était capable de lire dans ses pensées et savoir précisément ce qu’elle pensait. C’était embarrassant mais Juliet demeurait lucide : comment pouvait-il savoir ? Il n’était pas devin quand même ! Tout en jetant un coup d’œil par la fenêtre afin de se familiariser avec la vue, Juliet s’aventura donc à lui poser quelques questions plus… personnelles. Simple curiosité, que voulez-vous ! « Et sinon Christopher, que devenez-vous en dehors de faire visiter des maisons qui ne vous appartiennent pas ?» Elle lui lança un regard à la fois mutin et amusé avant de revenir vers lui histoire de prendre sa tasse de café. Ah !! Adolescente elle aurait payé cher pour obtenir quelques minutes en tête à tête avec lui. « En tout cas, vous n’avez pas changé le moins du monde.» En fait si … en mieux… mais bon, elle ne pouvait pas se permettre de dire ça à un homme qui aurait pu être son père quand même, si ?