Depuis plusieurs semaines, la vue de la bibliothécaire ne s'était pas vraiment améliorée. Junie prenait pourtant son traitement avec rigueur et faisait tous les efforts possibles et inimaginables pour réussir à retrouver la vue. Puis, il faut dire que Benjamin l'aidait beaucoup aussi durant cette période difficile. Certes, il y avait ses colocataires mais le fait d'avoir le jeune Seavers à ses côtés la rendait plus ... heureuse en quelques sortes. Puis depuis qu'il venait la voir pour l'aider à sortir mais aussi pour parler, ils étaient devenus assez proches et Junie aimait bien être en sa compagnie. Il faut dire qu'il la faisait rire mais aussi la faisait sentir comme avant. L'aveugle avait mis quelques jours à vouloir de nouveau sortir dans la rue. Quoi que, même si elle ne voyait pas les gens la défigurer, elle sentait leur regard sur elle et ça la rendait dingue et surtout se sentant impuissante. Du coup, elle était contente de pouvoir compter sur quelqu'un qui la "protégeait" et qui savait lui changer les idées quand il le fallait.

D'ailleurs, le beau brun venait de frapper à sa porte pour l'emmener quelque part. Il lui avait demandé de se dépêcher et du coup, Junie avait pris ses affaires en quatre vitesses pour ne pas le frustrer et surtout parce qu'elle était curieuse de savoir ce qui pouvait bien se passer. Souriante et rigolant de temps à autre, elle tourna la tête vers lui pour lui répondre. "Hum... Bah vu que c'est par tes soins que j'y vais, je pense qu'il n'y a pas de doutes pour ça !" Elle pouvait faire confiance à Benjamin les yeux fermés (ahah) et elle n'avait pas peur de lui faire confiance. Une fois qu'il annonça qu'ils étaient arrivés, Junie avait perdu tous repères. Elle se laissa guider jusqu'à l'endroit. L'odeur de peintures fraîches étaient assez fortes. Puis quand Benjamin lui demanda de deviner où ils étaient, la jeune femme ne mit pas longtemps à savoir. S'approchant en tendant sa main vers la première étagère qui se trouvait à sa droite, elle prit un livre et passa sa main dessus doucement. Un petit sourire s'afficha mais il disparut bien vite. Un sentiment de colère s'empara d'elle. Enfin... Colère est un bien grand mot pour l'aveugle mais c'était presque ça. "Pourquoi tu as fait ça ?" Junie essaya de trouver où il pouvait être mais le fait de ne pas le voir et ne pas pouvoir le regarder dans les yeux (car elle fait Gilbert Montagné) était aussi une source d'énervement. "Je ne t'avais rien demandé, Benjamin." Elle n'était pas en colère mais son ton pouvait paraître froid et dans quelques minutes elle s'en voudrait de lui avoir parlé de la sorte mais à ce moment là, Junie se sentait faible et complètement dépendante de lui alors qu'elle ne voulait pas. Reposant le livre à sa place, elle continua de marcher en longeant les étagères avec sa main en attente d'une quelconque réponse de sa part.

Savoir que son ami l'emmenait quelque part et à entendre la voix enjouée que celui-ci avait, la bibliothécaire était contente. En fait, la joie de Benjamin était communicative, sauf... que tout ça s'évanouit très vite. Junie se sentit comme un peu la personne qui ne sait pas se débrouiller seule, une fille dépendante des autres. Un poids venait de s'installer dans la poitrine de la jolie brune, un poids qu'elle n'arrivait pas à évacuer. Elle savait au fond d'elle que Benjamin voulait bien faire mais non la pauvre aveugle était en "colère". Car oui, voir Junie en colère s'était bien rare. La seule fois qu'elle s'était énervée, ça avait été contre Alana et c'était encore une marque dans son esprit. Sauf que là, c'était de l'énervement et aussi une envie de lui être redevable. Serrant les poings, Junie avala difficilement et garda le ton quelque-peu froid qu'elle avait. "Mais... Tu sais ce que ça représente ? Tu sais ce que ça veut dire pour moi, Benjamin ? Tu ne sais pas ce que ça peut me faire."

Junie ne lui en voulait pas de lui avoir refait la bibliothèque, elle lui en voulait car à présent elle se sentait vulnérable à ses yeux. Impuissante. Déambulant à travers les étagères, la jolie brune écouta les paroles de Benji et se sentit mal, pendant quelques instants. "Non... ce n'est pas ça qui me fait peur." Pourquoi est-ce qu'elle réagissait ainsi ? Junie aimait bien se débrouiller seule et ne pas dépendre des autres. En faisant la fausse aveugle, Junie avait su se débrouiller seule et ses colocataires ne s'étaient pas données autant de mal que l'avait fait Benjamin ces dernières semaines. Cependant, savoir qu'il avait fait ça pour elle et qu'elle n'avait pas pu l'aider... ça la rendait quelque peu mal à l'aise envers lui. Benjamin l'emmena au bureau et lui expliqua que rien n'avait changé. Mais Junie était plus occupée à sentir les caresses sur sa main plutôt que de toucher son bureau. Soupirant quand celui-ci se recula, la bibliothécaire resta à la même place et secoua la tête. "Oui... mais... ok, certes." La pauvre aveugle ne savait même pas quoi dire ! Elle était dérangée entre le fait de lui en vouloir, de s'en vouloir et de le remercier. Etre avec le beau brun ces derniers jours l'avait bien aidé, mais savoir qu'elle avait, en quelque sorte, profité de sa gentillesse, la rendait malade. "Merci." Elle baissa la tête et se tourna vers lui, enfin essaya, puis reprit. "Il n'empêche que tu n'aurais pas dû faire ça tout seul ! Et que je t'en dois une maintenant et que je me sens dépendante." Sa voix était toujours un peu plus douce et un petit sourire avait franchi ses lèvres, sauf qu'elle ne savait pas quoi faire pour le remercier et ça la rendait nerveuse.

Pour notre bibliothécaire c'était impensable que quelqu'un puisse faire ça pour elle et surtout... Benjamin. Junie l'appréciait énormément et le fait qu'il puisse faire ça pour elle... la dérangeait. Se sentant vraiment redevable face à cet acte. La jolie brune n'arrivait même plus à trouver des mots pour s'énerver contre Benji car elle n'y arrivait presque pas. En effet, la brunette se mettait rarement en colère et là ce n'était qu'une pseudo-colère. Elle lui en voulait comme elle vouait en lui une certaine reconnaissance. Même s'il n'avait pas fait ça seul... Benjamin l'avait fait, pour elle. Pour le coup la jolie brune ne savait même plus quoi faire. Elle était confuse et s'en voulait de lui parler de la sorte mais Junie ne pouvait pas prendre ceci à la légère. Ca représentait beaucoup pour elle. Et pourtant, il s'excusa. Elle se pinça les lèvres pour lui avoir fait dire ça. L'aveugle n'était pas comme ça d'habitude mais là c'était différent, dans une situation différente. Elle voulut parler mais se ravisa ne sachant pourquoi. Cependant la bibliothécaire finit par le remercier et lui expliqua pourquoi elle avait agi ainsi. Ca lui coûtait beaucoup ce que le beau brun avait fait pour elle et Junie cherchait déjà comment le remercier. "C'est énorme pour moi, Benjamin."

La jeune femme s'attendait à faire n'importe quoi pour Benjamin sauf... payer en nature. Une rire nerveux s'échappa de sa gorge quand il lui dit ça et vira au rouge. Que dire ? Que faire ? Junie toussota et se sentit vraiment... mal à l'aise. Et le pire c'est que Benjamin continuait dans sa lancée, mais ce qui fit rire Junie c'est que lui aussi s'enfonçait dans sa connerie. La bibliothécaire reprit son sérieux et compta sur le bout de ses doigts pour arriver à six. "En effet, je m'en suis fait six en un mois seulement." Elle tourna son regard vers Benjamin en souriant puis s'approcha de lui de deux pas. "Des livres, en braille. Bien entendu." Junie lui sourit et rigola ensuite. L'aveugle avait tourné en quelque sorte la situation à son avantage et ça lui avait redonné le sourire. Le fait de sentir (oui car elle peut pas voir hein !) Benjamin embarrassé la faisait toujours sourire et rire. Le beau brun faisait quelque chose à notre bibliothécaire et ce quelque chose lui échappait encore. Enfin... elle aurait adoré voir la tête qu'il faisait à cet instant. "T'es tout rouge n'est-ce pas ?" Annonça-t-elle en touchant sa joue avec son index, tout en souriant. Bah oui, autant poser des questions puis d'abord, c'était lui qui avait commencé, alors peut être qu'elle ne voyait pas et que lui la voyait rougir, mais Junie pouvait bien demander ce qu'il ressentait. Ce n'était pas interdit. Puis inutile de lui mentir, elle savait décerner le vrai du faux.

Arriver à un moment inopportun... Décidément, Benjamin y allait vraiment fort mais cela faisait rire et amusait beaucoup l'aveugle. "Oui, il ne faudrait pas que tu arrives pendant que je suis en pleine exploration..." Un petit sourire en coin s'afficha sur son visage et la jeune femme rigola par la suite. Ce que pouvait explorer Junie n'était autre que sa chambre, la salle de bain, la cuisine, le salon et le grenier ah ! Puis ses livres aussi. D'ailleurs elle avait dû en racheter en braille pour continuer à se vouer à sa passion. Cependant, réapprendre à lire en braille n'avait pas été facile et avait pris rendez-vous avec un spécialiste histoire de se remettre dans le bain. La jolie brune était contente de se retrouver en sa compagnie et pouvoir passer encore du temps avec Benjamin et son sourire, car même si elle ne le voyait pas, elle l'imaginait très bien et ça la faisait sourire également.
Le fait qu'un défi lui était lancé animait la volonté de l'accomplir. Pour Junie ça n'allait pas être difficile vu que la plupart des livres, elle les avait déjà lu mais ceux-là non, c'était juste pour prendre le nom et les commander en braille. L'aveugle lirait les livres aussi, pour rentrer en compétition avec le beau brun. La bibliothécaire espérait vraiment que son histoire d'amitié avec Benjamin continuerait à évoluer dans un sens positif car la jeune femme n'était pas indifférente aux charmes du jeune Seavers, même si celle-ci arrivait à en cacher une bonne partie.

Un gage au cas ou celui-ci n'arrivait pas à les finir. Se tournant vers lui et se mordant la lèvre inférieur, elle tapota du bout des doigts le comptoir et réfléchit pendant deux bonnes minutes. Puis avec un grand sourire, elle annonça sa condition. "Si tu n'y arrives pas... tu seras obligé de me faire un dîner et me montrer tes talents culinaires, mon cher !" Fière d'elle mais trouvant cela pas assez, elle décida de continuer. "Et je t'oblige à venir avec moi voir le médecin la semaine prochaine à Los Angeles. Il me faut un conducteur et vu que c'est en week end, les filles ne sont pas dispos." Peut être que c'était trop mais bon, ça aiderait beaucoup Junie à savoir que Benji serait là si jamais elle apprenait une mauvaise nouvelle. Et d'un autre, elle allait pouvoir le connaître encore plus durant ce week end. Puis retrouvant son sourire, elle lui demanda avec une voix toujours aussi calme et joyeuse. "Et moi ? Si jamais je ne finis pas mes livres ? Qu'est-ce que tu me réserves, monsieur-au-sourire-unique ?" Peut être qu'elle ne verrait pas sa réaction, mais la brunette pouvait très bien imaginé sa tête et rien que ça, ça la faisait fondre. Puis, Benjamin avait un truc et la jolie brune n'arrivait pas à lui résister.

Jamais auparavant, la jolie brune aurait dit de telles choses comme elle l'avait fait avec Benjamin. Mais c'était différent, Junie se sentait bien avec lui, se sentait elle même puis se savoir avec lui ne la rendait pas indifférente depuis un moment et cela venait de s'accroître avec ces sous-entendus. La présence du beau brun devenait de plus en plus importante pour elle et il fallait se rendre à l'évidence que la bibliothécaire était attiré par Benjamin-au-sourire-unique. Du coup, l'aveugle ne pouvait plus en vouloir au jeune Seavers pour ce qu'il avait fait ici, car grâce à lui elle allait pouvoir reprendre le travail.
Quand Junie lui proposa de venir avec elle à Los Angeles, enfin proposa était un bien grand mot car elle lui ordonna presque sans lui laisser le choix, le jeune homme était apparemment ravie et cela fit rire la bibliothécaire. "Oui, sérieusement. Ah ! Bravo, je vois que tu vas t'y atteler." Rajouta-t-elle en souriant. A présent, c'était à Benjamin de chercher un gage si jamais Junie n'arrivait pas à lire ces livres au bout d'un mois. Enfin pour elle, ça n'allait pas être difficile, normalement, mais il suffit d'un imprévu pour que la jolie brune perde. Elle rigola quand il lui annonça qu'il allait chercher un gage qui la dissuaderait de gagner. Et en effet, quand Benjamin annonça la couleur, un rire nerveux s'échappa de la bouche de l'aveugle. "C'est tentant de vouloir perdre, mais je pense que tu devrais avoir peur de mes mains. Mais c'est d'accord" Aveugle, on ne savait pas où est-ce qu'elle pourrait les poser, ses petites mains toutes douces ! Enfin, ce n'était pas la jolie brune qui ferait de telles choses.
C'est avec un grand sourire que la jeune femme hocha la tête pour que Benji la ramène chez elle. Elle venait de passer une après midi incroyable et avait pu connaître un peu plus le beau brun qui se trouvait à ses côtés. Junie allait d'ailleurs approfondir ses liens lors de ce week end à Los Angeles et ça l'enchantait beaucoup. Même si cette après midi prenait fin, la jolie brune allait profiter jusqu'à la dernière minute de la présence du jeune Seavers.