Le premier nom qui était sur l'agenda de Clara ce matin, était celui de « Lily Evans » qu'elle avait prit le soin de souligner au stylo rouge et de resurligner avec un fluo de façon à ne pas qu'elle oublie ce rendez-vous qui n'en était pas vraiment un. En effet, ces derniers temps la jeune psychologue avait pu discuter avec la reine mère Evans qui lui avouait qu'elle était plutôt inquiète pour Lily, ce qui était complètement compréhensible. La jeune blonde essayait de trouver les mots pour calmer son amie car au-delà du côté formel, il y avait cette amitié entre les deux femmes qu'essayait d'entretenir la Melrose. Certes, elles ne se sont pas connues, ni même rapprochées dans les meilleures conditions, mais aujourd'hui Katlina était l'une de ses amies et quand elle avait besoin de Clara, sans hésiter, elle accourait. Le problème du moment pour la mère Evans était ses enfants, une en particulier : Lily.

En bonne amie et surtout psychologue de profession qu'elle était, elle proposa son aide à Katlina lui demandant si elle pouvait passer voir Lily pour qu'elles puissent discuter toutes les deux. Clara savait que Katlina serait d'accord, bien que sa visite ne servirait pas à grand chose. Cela faisait déjà trois ans qu'elle suivait la rouquine et n'avait remarqué aucune bonne volonté de la part de cette dernière, en temps normal elle aurait abandonné et dit aux parents que cela ne servait à rien d'emmener la jeune demoiselle jusque son cabinet puisqu'il n'y a aucune amélioration, et qu'elle ressentait même une envie de rester dans ce mal être, mais elle n'en fit rien. Au contraire, toutes les semaines elle fixait des séances avec la rouquine et s'efforçait de la faire parler, quitte à parler dans le vent, toute seule. Alors, au bout de quinze bonnes minutes, elle se tait et se met à l'observer, elle regarde minutieusement ses moindres gestes et essaie de déterminer une quelconque réaction en fonction de ce qu'elle faisait, par exemple, si elle se passait les mains dans les cheveux, Clara le notait et en déduisait que c'était soit un signe d'agacement, d'impatience ou de nervosité, avec le temps cette observation a su se développer et faire même en sorte que la Melrose arrive à peu près à mettre une émotion ou un sentiment sur un geste. Elle n'avait peut-être pas été assez observatrice la dernière fois qu'elles s'étaient vues parce qu'après leur dernière séance, Lily avait prit la décision de s'en aller pour New-York et à partir de là, tout bascula.

Une fois arrivée devant la maison des Evans, elle sortit une petite clé que lui avait soigneusement confiée Katlina, persuadée que si elle frapperait, elle serait sûre de ne jamais mettre les pieds dans la maison des Evans. Elle lui avait même expliqué le chemin à emprunter pour arriver à la chambre de Lily. Prenant une profonde respiration, elle se sentait un peu mal de ce qu'elle s'apprêtait à faire, certes étant donné qu'elle avait l'autorisation de la maîtresse de maison, ce n'était en rien illégal et son geste avait même pour but, un but professionnel, voire médical. Mais elle ne pouvait s'empêcher de se dire qu'elle était en train de violer la propriété de quelqu'un et s'apprêtait même à violer l'intimité de quelqu'un. Mais bon, plus vite elle le ferait et plus vite elle aura fini et pourra s'en aller.

La psychologue monta les marches doucement pour ne pas faire trop de bruit qui pourrait effrayer quelqu'un, même si le calme de la maison lui indiquait qu'elle était seule ( avec Lily bien sûr ). Elle arriva devant la porte de la jeune rouquine et après dix secondes d'hésitation, décida de toquer avant de tourner la poignée de la porte pour l'ouvrir. Oui, ces méthodes étaient peu orthodoxes, mais ayant prit connaissance de la situation, elle ne voulait pas se risquer à un échec et avoir prit tous ces risques pour rien. Une seule porte les séparait, autant ne pas s'arrêter à ça.

Elle prit la liberté d'ouvrir la porte juste après avoir toqué, sans attendre de réponse appréhendant la réaction de la jeune rousse. Après des années d'observations, mis à part gribouiller quelques notes et tenter de distinguer ce qui se passait dans la tête de Lily par elle-même sans devoir passer par Katlina, elle n'avait réussit à rien avec cette petite. Certes, elle la connaissait et devait être la personne qui l'a le plus observée, même sa mère de ne devait pas l'avoir fait. Comme elle l'attendait, ce fut de la surprise qu'elle vit sur le visage de la jeune Evans quand elle vit la psychologue franchir le pas de la porte de sa chambre.

Jetant un rapide coup d'oeil à l'état de la chambre lorsque l'un des talons de sa chaussure se coinça dans ce qui était un vêtement, elle ne pu s'empêcher d'analyser l'environnement dans lequel se trouvait Lily. Sombre, très peu de lumières, seulement quelques touches de couleurs par-ci par-là avec un bordel immense, faisant passer un champ de bataille bagdadien comme parfaitement clean . Des papiers et des vêtements à même le sol, des choses qu'elle n'arrivait pas à identifier, et au milieu de tout ça, une Lily fragile qui semble tellement dépassée par le désordre de sa chambre qu'elle a préféré ne plus y prêter attention, comme quoi ce devait être dans cet état d'esprit qu'elle était. Complètement seule et perdue à l'intérieur d'elle-même, n'arrivant pas à bien ordonner ses idées et ses pensées.

« Je suis venue te voir toi, pas ta mère... » dit-elle en avançant, essayant de se frayer un chemin parmi tout ce bazar. « Et non, ta mère n'est pas là, je suis ici toute seule. »

Bien qu'elle soit là sous la demande de Katlina, elle n'était pas venue ici pour voir cette dernière, mais bien Lily qui avait besoin d'aide. De plus, elle n'était pas obligée de savoir qui l'a vraiment envoyé ou pas, le but premier de la Melrose étant de l'aider, tout comme sa mère, savoir cette information ne les avancera pas à grand chose.

Parmi tout le désordre de la chambre, Clara pu cependant tirer une chaise du bureau de la demoiselle avant de s'asseoir en croisant ses jambes. Elle déposa son sac à ses pieds et se mit à scruter Lily, comme elle le faisait toujours lorsqu'elles se voyaient, à la différence que là, elle connaissait la cause de toute cette tristesse, cette peine et cette colère qu'elle voyait toujours sur son visage. Autant avant elle cherchait à comprendre ce qui n'allait pas en la regardant, autant aujourd'hui elle devait chercher comment l'aider. Bien qu'elle essaie de se mettre à la place de Lily, elle n'imagine pas à quel point sa situation pouvait être difficile, et parler à quelqu'un qui ne fera seulement en sorte de ressasser ce douloureux souvenir n'aidait en rien, mais surtout ne donnait pas envie.

« Lily, je suis là pour t'aider... je ne veux pas qu'on en reparle, ou du moins qu'on aborde le sujet.. je suis ici pour t'aider à aller mieux... »

Elle parla lentement et de façon claire et distincte, pas parce qu'elle prenait la rouquine pour une demeurée, mais juste pour qu'elle comprenne qu'elle pouvait avoir confiance en Clara. Son intention n'est en rien de l'enfoncer encore plus, mais de la tirer de cette mauvaise et si elle l'acceptait, peut-être que la personne qui serait apte à le faire serait la jeune psychologue. En espérant juste qu'elle montre de la bonne foi cette fois-ci.

Depuis des années qu'elle connaissait la jeune Evans, ce devait être la première fois qu'elles dialoguaient réellement, sans que Clara n'ait l'impression de se heurter à un mur et surtout, que Lily accepte de lui parler. La psychologue était là dans le but de l'aider – comme elle l'a toujours été d'ailleurs – mais pour ce faire, elle savait qu'elle allait devoir ramer pour faire en sorte que la jeune rouquine coopère. Elle prit alors la parole tout doucement pour que la jeune fille comprenne bien tout ce qu'elle lui disait, elle choisissait d'ailleurs ses mots avec une extrême minutie juste pour lui faire comprendre qu'elle ne voulait qu'une chose : l'aider. Lorsqu'elle avait entendue ce qui s'était passée, elle avait mieux comprit l'attitude renfermée de Lily et surtout, pourquoi est-ce qu'elle refusait d'en parler, mais elle s'était surtout mise à la place de Katlina qu'elle ne connaissait que trop bien depuis quelques années et qui était avant tout une amie, avant d'être la mère d'une de ses patientes. Si une telle chose était arrivée à Austin ou même à Allie, ou les deux, elle serait elle aussi dépassée par les événements et irait chercher du secours là où elle pouvait en trouver. Elle ne garantissait pas qu'elle, elle pouvait aider, mais cela ne coûtait rien d'essayer après tout, si elle pouvait rendre service à une amie en exerçant son métier, alors tant mieux. La jeune rousse leva enfin les yeux en direction de Clara pour prendre la parole et ce qu'elle vit à ce moment là la frappa. Elle souffrait, son visage était fatiguée, cerné, meurtri... tous les mots de l'univers ne pourraient même pas décrire ce que voyait la psychologue à ce moment précis. La dernière fois qu'elle avait vu une telle expression, était sur le visage de son époux lorsque les choses avaient mal tournés suite à une dernière dispute. Elle ouvrit la bouche pour lui répondre, mais la ferma aussitôt, réfléchissant à ce qu'elle allait lui dire. Elle lui dirait bien qu'elle lui faisait penser à son mari, mais ce n'était sûrement pas ce qu'elle voudrait entendre et encore moins ce que la jeune blonde devrait dire. Déjà parce que le lieu n'était pas approprié pour parler de cela, mais en plus, Lily et Isaac étaient deux personnes totalement différentes qui se rejoignaient pourtant sur un seul point, ils souffraient et avaient besoin d'aide. Du moins, c'était l'impression qu'elle avait pour Isaac et le constat qu'elle faisait chez Lily. «  Alors pour toi c'est comme ça que ça marche ? Tu fais souffrir des personnes, donc tu mérites de souffrir toi aussi ? » Demanda-t-elle sur un ton très calme et serein sans pour autant attendre une réponse parce qu'elle savait qu'elle répondrait par la positive. Si il y avait bien une chose qu'elle avait apprit depuis qu'elle exerce ce métier, était que le monde ne fonctionne pas de cette façon. « Est-ce que je peux te demander où est-ce que ça va te mener ? Mis à part te renfermer sur toi-même, te faire du mal et faire du mal aux personnes autour de toi par la même occasion. » Haussant légèrement les sourcils à la fin de cette phrase comme si il s'agissait d'une évidence, elle marqua une courte pause avant de reprendre la parole. «  Tu sais, je ne suis pas là pour te juger, je ne suis pas la personne la plus apte à le faire de toute façon et crois moi, j'ai vu des cas pires que toi... » Ajouta-t-elle de façon pensive. «  Si je devais choisir les personnes que je voulais aider en fonction des délits ou crimes qu'ils ont commis, ce ne serait certainement pas ce métier que j'exercerai. » Poursuivit-elle d'une voix qui se voulait à la fois ferme, sans pour autant être violente. «  Je reprends donc ma question et te la pose différemment. Est-ce que selon toi, cela en vaut la peine de faire souffrir des personnes qui essaient de t'aider, comme tes parents qui sont innocents dans toute cette histoire, dans le but de te sentir mieux quelque part,en portant cette culpabilité à bout de bras ? » Elle se redressa sur sa chaise et croisa les bras comme pour soutenir ce qu'elle disait, sachant très bien que ce sont le genre de paroles qui feraient sûrement réagir la jeune femme. Mais ce que devait comprendre Lily, c'était que d'agir de la sorte n'était certainement pas la bonne solution, elle ne devait pas se renfermer sur elle même et vivre telle une recluse parce qu'elle a fait une fois une erreur, certes, avec de graves conséquences, mais qui est en train de la faire souffrir elle mais d'autres personnes autour d'elle. Et là, bien que Clara avait évoqué ses parents, elle ne pensait pas seulement à eux mais aussi à Nathanaël qui devait être dans la même situation qu'elle – en moins meurtrie peut-être – mais également de ses amis qui voient en Lily bien plus qu'une meurtrière.  

Le métier de psychologue n’était pas le métier le plus reposant du monde et ça, Clara pouvait le constater tous les jours. Chaque jours la jeune femme se trouvait face à des cas les plus incroyables les uns que les autres, chaque jours elle devait affronter la dure réalité de la vie et comme si elle n’avait pas déjà assez à faire avec ses problèmes, elle se rendait tous les jours à son cabinet pour écouter les autres lui raconter leurs problèmes en espérant qu’elle trouve une solution, qu’elle leur donne un remède miracle pour qu’ils puissent reprendre le cour de leur vie normalement. Parfois, il arrivait que la jeune blonde se demande pourquoi est-ce que de tous les métiers du monde, il avait fallut qu’elle choisisse celui là ? Pourquoi est-ce que son métier devait consister en partie à régler les problèmes des autres, alors que très franchement, elle n’avait déjà aucune idée de comment régler les siens de problèmes ? Ces questions longtemps restés en suspens avaient finis par trouver des réponses, peu convaincantes, mais des réponses tout de même. Quand dans ses jeunes années d’exercices on lui demandait pourquoi est-ce qu’elle avait choisit ce métier précisément, elle répondait innocemment et avec humour qu’elle aimait bien savoir que des gens qu’elle ne connaissait pas forcément, avaient des problèmes plus graves que les siens. Au fil des années, elle s’est vite rendue compte que ce n’était pas cela qui la motivait réellement, mais le simple fait de pouvoir aider les gens qui en ont besoin lui donnait la force de se lever tous les matins pour se rendre à son cabinet. Si elle pouvait l’espace d’un instant, aider les autres plutôt que de se focaliser sur ses propres problèmes, alors tant mieux. De plus, elle s’était rendue compte assez rapidement que sa vie n’était pas complètement à plaindre vu tous les cas qu’elle voyait, entre le couple qui avait du mal à se reconnecter, la femme qui était hantée par un lointain souvenir traumatisant, et même l’enfant qui avait la phobie de faire caca aux toilettes. En l’occurrence, ce n’était pas la première fois qu’elle voyait des cas comme Lily, elle avait même vu des pires et ils s’en étaient sortis, pourquoi est-ce que ce ne serait pas le cas pour elle ? La psychologue tenta de faire réagir la jeune Evans par de multiples techniques avant de trouver la bonne, celle qui la ferait réagir véritablement. « Et pourtant crois-le ou non, mais ça ne les fait pas non plus plaisir de te voir comme ça. Aucun parent ne prend plaisir à voir son enfant aller aussi mal… » Répondit-elle du tac au tac mais toujours en essayant de rester douce dans sa voix, son but n’étant pas de la brusquer ou quoi que ce soit, mais de l’aider elle. Les parents de la jeune rousse n’étaient peut-être pas innocent selon la jeune fille, mais en attendant ce n’était pas eux qui avaient le plus besoin d’aide, ce n’était pas eux qui étaient terrés dans leur chambre en sweat-shirt ridicule avec un lama dessus. Toujours assise sur sa chaise, elle fixait Lily qui semblait hésitante comme si son cerveau lui ordonnait de poser une question ou d’émettre un son, mais que sa bouche faisait barrage en ne laissant rien sortir. Difficilement, mais elle finit tout de même par prendre la parole pour poser, la question qui devait la titiller depuis un moment. « C’est une bonne question à laquelle je n’ai pas la réponse. Malheureusement je ne suis pas encore dotée du pouvoir du Saint-Esprit pour pouvoir te donner une réponse claire. Ce dont je suis certaine, c’est qu’il doit souffrir tout autant que toi, si ce n’est plus et que, les chances pour que cela redevienne comme avant son minces. Mais de toute façon, je suis ici pour toi, je te propose de t’aider toi et de voir pour lui plus tard, tu es d’accord ? » La jeune blonde lui fit un petit sourire qui essayait d’inspirer la confiance, mais savait très bien que sa réponse n’était en rien satisfaisante, mais en même temps elle n’avait pas non plus toutes les réponses de l’univers non plus et ne pouvait pas inventer juste pour que la rouquine se sente mieux.

Au fil des années et des séances qu’avaient pu effectuer Clara en compagnie de la jeune Evans, elle avait en effet pu remarquer que la situation entre elle et ses parents n’étaient pas au beau fixe. Pourquoi ? C’était ce qu’elle avait essayé de comprendre depuis qu’elle avait fait le constat, mais au vu du peu de collaboration que montrait la rouquine à l’égard de la psychologue à chaque fois qu’elle avait tenté d’aborder le sujet avec la rouquine, elle a préféré laisser tomber et d’avancer, même si les avancées ne furent pas vraiment spectaculaires depuis. Lui proposant son aide, la jeune blonde agréablement surprise lorsque Lily lui demanda ce qu’elle devait faire. Elle ne put d’ailleurs cacher sa joie et afficha un petit sourire sur ses lèvres, elle avait bien conscience qu’elle n’avait jamais parlé d’accepter son aide, mais devait seulement vouloir un aperçue de ce qu’elle devrait faire si jamais elle disait oui. Se levant, elle partie en direction de la fenêtre de la jeune femme en passant au travers de tout le bazar qui traînait sur le sol, marchant comme si elle était sur un champ de mine en évitant de toucher au maximum les choses qui traînaient par terre. Elle écarta les rideaux tout doucement pour ne pas les abimer ou les déchirer, et ouvrit ensuite la fenêtre pour que l’air et la lumière de l’extérieur puisse y passer un minimum. « Pour commencer, on aère et on éclaire. » Affichant toujours le même petit sourire, commença à faire les cent pas dans la chambre, jouant aux exploratrices avec ses pieds, il lui arrivait parfois de pousser quelques objets qui traînaient ici et là, histoire de vérifier qu’aucune bête vivante ne se cachait parmi tout ce désordre sans nom. La Melrose n’avait pas vraiment d’idées sur comment procéder, et ne savait d’ailleurs même pas ce qu’elle allait bien pouvoir proposer à la jeune fille pour qu’elle se sente un peu mieux à la fin de leur petit entretien, sachant très bien que les belles promesses de la remettre en forme et de l’aider à aller mieux, ne passerait sûrement pas. Non, ce dont elle était sûre en revanche, était que cette pièce avait besoin d’un bon déblayage et peut-être même d’un bon rasage vu l’état du sol sur lequel elle posait ses pieds, et tout d’un coup, une idée lui passa par la tête. « On va faire un peu de rangement si tu veux bien. » Elle leva la tête en direction de la rouquine et voyant son air sceptique, elle sourit encore un peu plus. Non Clara n’avait pas perdue la tête et en dépit de son sens de la propreté et son côté maniaque du rangement qu’elle avait, elle venait d’avoir l’idée d’aider Lily en rangeant sa chambre ; tout d’abord, cela l’aiderait vraiment car vu tout ce qui traînait, elle aurait sûrement besoin d’un coup de main pour ranger tout ce qui traînait, mais en plus, si en langage psychanalyste, cette chambre représentait tout le bordel qu’avait la Evans dans la tête, alors un peu de rangement pour qu’elle puisse y voir plus claire ne serait pas de refus. « Avant que tu ne dises quoi que ce soit, non, je ne me suis pas crue dans l’émission ‘c’est du propre’. » Partant d’un petit rire, elle marcha jusqu’en direction de boîtes de rangements qu’elle avait aperçue quelques instants plus tôt, et les disposa sur le lit de la jeune rouquine. Elle prit ensuite des post-it qu’elle avait également aperçue sur le bureau, et munit d’un stylo, elle prit soin d’écrire sur les morceaux de papiers ‘à jeter’, ‘à ranger’ et ‘à réparer’, avant de les coller sur les boîtes respectives. « Voilà ce qu’on va faire : tu mettras dans cette boîte ce que tu penses judicieux de jeter… » Fit-elle en pointant du doigt l’une des boîtes. « … dans celle-là, ce que tu estimes réparable, et dans celle-là, ce que tu devras ranger. Mais attention, je ne te demande pas de remettre l’objet à sa place, mais juste de la mettre dans la boîte pour la ranger plus tard. Est-ce que tu me suis ? » Attendant quelques secondes avant de reprendre, elle reprit la parole pour préciser un peu plus son idée. « Cette chambre représente ce que tu as dans la tête, ce bordel monstre sont tes pensées, et ces boîtes vont représenter ce qu’on va essayer de faire avec tout le désordre que tu as dans la tête. Cela prendra le temps qu’il faudra pour ranger cette chambre, et également pour t’aider à aller mieux, mais ça vaut la peine d’essayer. Est-ce que tu es avec moi ? » Poussant une des boîtes vers elle tout doucement pour la lancer, elle n’espérait qu’une chose : que la jeune Evans ne décide pas de reculer alors qu’elles venaient de faire un petit pas dans ce long travail de tentative de guérison.

La coopération allait être le maître mot de ce long processus, elle savait que ça n’allait pas être facile et pour avoir traité – ou du moins essayé de traiter – avec la jeune rousse depuis déjà des années, elle savait qu’elle allait se heurter à un mur certaines fois. Toutes les fois où elle avait cette impression, elle n’avait jamais abandonné Lily et au-delà de son amitié avec Katlina, la jeune psychologue avait mit un point d’honneur à venir en aide autant qu’elle le pouvait, même si elle devait se coltiner des cas difficiles. Qu’on le croit ou pas, Lily était loin d’être la pire des patientes de la Melrose, au contraire, elle devait être l’une des plus ‘simples’ à venir en aide dans le sens où ce n’était pas la première que la jeune blonde rencontrait et avec qui elle allait devoir travailler. Elles avaient toute ce sentiment de culpabilité qui les rongeait intérieurement et qui ne les quittait pas, elles avaient toute cette impression que pour les personnes qu’elles ont fait souffrir aillent mieux, elles devaient elles aussi souffrir, refusant d’envisager un avenir avec une once de bonheur à l’intérieur. Ce qu’essayait de leur faire comprendre Clara était que l’erreur est humaine, fauter était quelque chose qui faisait partie de l’Homme avec un grand h, mais on ne devait pas rester sur ces erreurs, il fallait qu’on puisse se définir au travers de choses positives accomplit dans notre vie et non pas par une erreur que l’on a commise, surtout que pour la plupart du temps, c’est bien la seule que l’on ait commise. Elle eut un petit sourire qui s’afficha sur les lèvres lorsqu’elle vit que Lily acceptait son aide et sa méthode et sourit de plus belle lorsqu’elle se fit presque mettre sur la touche pour être sûre qu’elle ne toucherait à rien. Elle aimait ce côté chez la jeune Evans, elle qui d’apparence était quelqu’un de fragile et qui – toujours d’apparence – préférait se montrer de mauvaise foi dans le bordel qu’est son esprit, avait décidé de reprendre le contrôle de la situation en décidant que c’était elle et personne d’autre qui allait remettre de l’ordre dans sa chambre. « Comme tu veux. » Elle repartit là où était sa place initiale et poussa légèrement sa chaise dans un coin de façon à avoir une vue sur toute la pièce et sur la rouquine, tout en restant en retrait pour ne pas la bousculer ou la gêner dans ce qu’elle faisait. Mentalement, la jeune blonde se mettait à noter et à mémoriser les moindres gestes que faisait l’Evans qui devait se sentir observée ; chaque objet qu’elle décidait de ranger dans telle boîte était aussitôt noté dans le cerveau de la psychologue qui essayait de se faire la plus petite du monde. Cependant, la Melrose savait bien que tout cela n’allait pas durer, que la coopération de Lily n’allait pas durer et que tôt ou tard elle allait finir par laisser tomber, il ne lui fallut pas plus de cinq minutes pour confirmer sa pensée. En moins de temps qu’il ne lui fallut  pour ouvrir la bouche, la rouquine avait déjà cessé toute action, invitant la jeune blonde à sortir de sa chambre. Bon ou mauvais signe, elle ne saurait le dire. Sans en dire plus, Clara emboîta le pas à Lily en prenant soin de récupérer son sac au passage, sachant pertinemment qu’elle ne risquait pas de remettre les pieds dans cette chambre de sitôt, à moins qu’elle n’y fasse de nouveau irruption comme elle l’avait fait plus tôt. « Je vais devoir y aller de toute façon. » Passant son sac autour de son épaule, elle fit quelques pas de plus pour dépasser Lily. Elle sentait bien que cette dernière avait besoin de retrouver son espace vital, ce qui était tout à son honneur, mais elle sentait surtout qu’elles devaient s’arrêter là et que sa coopération pour aujourd’hui était plus que suffisante, en espérant qu’elle ne s’arrêtera pas là et pas de sitôt. « Je suis contente qu’on ait pu ‘discuter’. » Lança la jeune blonde avant de se diriger vers l’escalier avec un petit sourire sur les lèvres. Un dernier signe de la main et la jeune blonde descendit les escaliers à la même vitesse à laquelle elle était montée, avant de se diriger vers la sortie pour aller retrouver ses autres patients qui devaient sûrement l’attendre.