J’étais en marge de ma famille. Je ne m’entendais pas avec grand monde. Enfin, j’étais un peu la rebelle de service, qui ne veut rien faire comme tout le monde. Alors forcément ça pouvait créer des tensions. Néanmoins, l’une des rares personnes que j’avais réussis à supporter était Tessa. Lorsqu’elle est morte, je n’ai rien montré, surtout par fierté plus qu’autre chose. Depuis DS avait dévoilé le secret de Lily. Depuis, il était impossible que je considère cette fille comme une maie. Franchement ? Elle croyait quoi ? Certes, on se connaissait depuis qu’on était des gamines mais il y a avait tout de même des limites. Tant que je pouvais l’éviter, je le faisais. Dieu seul sait comment je pourrais réagir si je la revoyais un jour. Tout ce que je pourrai dire ou faire ne me soulagera pas. Elle a fait une connerie, elle avait qu’à assumer. Certes, elle n’était pas seule mais comment aurait-elle réagit si la situation avait été inversé ? J’évitais de parler de la mort de Tessa parce que ça continuait de me faire mal mais je savais que face à Lily, je serai impitoyable. Dans l’hypothèse où je la revois un jour, bien évidemment.

Ce jour-là, je ne savais pas vraiment quoi faire. Si j’avais été une fille sérieuse, j’aurais certainement travaillé mes cours mais je n’en avais pas l’envie. J’en avais marre des cours. Je voulais être diplômée, vivre ma vie et me barrer loin de cette ville. Loin de ma famille. Loin de toutes ces histoires. J’en avais réellement ma claque. Le pire c’est que j’avais l’impression d’être la seule à ressentir ça. J’avais l’impression d’être la seule à me sentir aussi ici. J’avais réellement besoin de changer d’air, prendre mon envol et peut-être ne jamais revenir. Je soupirais. Je passais d’une chaîne télévision à une autre, en imaginant ce que serait ma vie dans quelques années. Aucun programme ne m’intéressait et ma jumelle était occupée. J’aurais pu envoyer un texto à Zain mais je ne voulais pas m’abaisser à ce niveau. Je valais beaucoup mieux que ça. J’étais donc condamnée à regarder des émissions complètement inintéressantes.

Une bonne demi-heure plus tard, je décidais d’éteindre la télé pour voir si quelqu’un dans cette baraque voulait bien qu’on sorte. Ma sœur était occupé à réviser ses cours et les autres membres de la fratrie, n’était soit pas là, soit il ne voulait pas sortir. Je retournais donc m’asseoir sur le canapé et regarda quelques minutes la table basse, cherchant désespérément une activité à faire. C’est à ce moment-là que j’entendis quelqu’un frapper à la porte. Poussant un juron, je me levais. J’étais en jogging, tant pis. Avec un peu de chance, s’était un de mes voisins qui venait chercher un paquet de farine, de sucre ou de je ne sais trop quoi. J’espérais que ce n’était pas le beau gosse du coin, quoi. Enfin, pour ça, encore faudrait-il qu’il y en ait… Je me dirigeais donc vers la porte, et tourna la clé et ouvrit la porte. Je vis alors Lily. Je la regardai de haut en bas, telle une pimbêche mais elle l’avait bien mérité. Je lui lançai alors sur un ton glacial :

« Qu’est-ce que tu veux ? »

Je la regardais avec un œil mauvais. Elle n’était pas la bienvenue et ça devait certainement se sentir. J’avais tout fait pour l’éviter et elle, elle venait se jeter dans la gueule du loup. Elle était un peu sado maso sur les bords. Non mais franchement… J’attendais sa réponse. Je n’avais pas l’intention de la faire entrer dans la maison. Je n’avais pas l’intention de lui parler pendant 107 ans non plus. Je voulais qu’elle parte, qu’elle vive sa vie. S’était franchement, la dernière personne que j’avais envie de voir, ce qui pouvait se comprendre.

Est-ce que je voulais parler à Lily ? Absolument pas. Je crois que si j’avais des snipers à la place des yeux, elle serait morte sur place, mais vraiment. Ce n’était même plus de la haine que je ressentais à son égard. S’était un sentiment tellement négatif que s’était indéfinissable. Je la regardais froidement. Elle voulait me parler. Elle voulait qu’on parle de ça. De ce qu’elle avait fait. Du fait qu’elle n’avait pas assumer ses actes plus tôt. Je ne voulais pas parler de ça avec elle. Je voulais juste qu’elle sorte de ma vie, qu’elle quitte la ville et qu’on entende plus parler d’elle. Jamais. Seulement, je savais qu’il y avait de grandes chances pour que cette solution ne soit pas possible. Néanmoins, je ne savais pas trop comment j’allais réagir si on abordait. J’avais mal vécu la mort de Tessa. Même si je n’avais rien montré, je l’avais très mal vécu. Lily m’avait enlevé la seule personne que je supportais dans cette maison, à part NJ. Sur un ton toujours autant glacial, je répondis :

« Je crois sincèrement qu’on a rien à se dire… » Je marquais une brève pause avant d’enchaîné toujours le même ton : « Tu crois quoi ? Que tu peux débarquer comme une fleur ici et me dire qu’il faut qu’on parle de ce que t’as fait ? Non, ça ne marche pas comme ça, Lily. Si Aaron et Heather ont réussi à te pardonner moi je crois sincèrement que je n’y arriverais pas et j’ai pas envie d’entendre tes excuses. »

Il fallait aussi qu’elle se mette à ma place. Comment elle aurait réagi si la situation avait été inversée ? S’était facile de venir et d’essayer de se rattraper. Il y a des choses qu’on peut pardonner parce que c’est pas si grave que ça mais la mort de quelqu’un, c’est rarement pardonnable. Je ne voulais même pas qu’elle essaie de s’expliquer sur le pourquoi du comment. Encore, elle serait venu en parler directement après l’accident, elle ne l’aurait pas caché, j’aurais peut-être pu passer au-dessus de lui pardonner. Mais je ne supportais pas les mensonges, les cachoteries et la trahison. Et il était clair que je considérais le fait qu’elle ait tout gardé pour elle comme une trahison. Comme pour abréger la conversation, je lui lançais toujours sur ce même ton :

« Autre chose ? »

Je préférais faire l’autruche, clairement. Je n’avais rien à lui dire. Je ne voulais pas non plus prendre le risque de pleurer devant elle. Elle n’aurait jamais dû venir ici. Elle n’était pas la bienvenue et je voulais qu’elle s’en aille, qu’elle me laisse finir la journée tranquillement. J’attendis une réponse ou une réaction de part. Pour le coup, elle n’était pas tombée sur la bonne jumelle.