Le t-shirt était poisseux, à chaque pas Ellie sentait le tissu se coller sur ses côtes humides, impression désagréable dont elle ne pouvait se défaire, les mains étant prises par deux gros sacs de course qu'elle ramenait de la petite supérette dans laquelle elle travaillait. Et puis, elle avait beau souffler à plusieurs reprise sur cette insupportable méché de cheveux blond qui recouvrait sa vue, la maligne effrontée revenait se rabattre constamment sur son front, aussi avançait elle avec cet air bougon et fermé qu'on lui connaissait si bien, arpentant férocement ce chemin qu'elle connaissait par coeur. Ellie faisait tache au milieu de ses allées bien rangé, de ces gens si propre et de ces boites aux lettres toutes identique, elle tachait de ne pas y porter grande attention, cela faisait bien longtemps qu'elle avait compris qu'elle n'était pas en adéquation avec le beau tableau qui se dressait devant elle. Et puis, après tout, ce n'était pas comme si elle comptait pas finir sa vie à Magnolia Crescent. Elle désespérait d'ailleurs de voir arriver le jour où elle quitterait ce quartier trop propre pour faire sa vie, trouver son autonomie et un job un peu plus glorifiant. Enfin, ça, c'est se dont elle se persuadait. La vérité, c'est qu'elle avait arrêté ses études trop tôt et mis un terme à des rêves trop vite, et que, même si il était or de questions de l'avouer, pour l'heure elle ne s'imaginait pas une seule seconde vivre seule dans un petit loft pourri, le seul qu'elle pourrait se permettre de payer avec ses économies minables. Elle aimait son foyer, elle aimait son père et ses frères, elle aimait la chaleur de leur habitat et la bienveillance de cette maison aussi couteux soit-il de le reconnaitre. Aussi, l'idée de se retrouver en solitaire une bonne fois pour toute, à manger un bol de nouille instantanée devant la télé d'un 10m² ne la réjouissait en rien. Trop fière pour avouer cependant que cette forme d'autonomie l'effrayait, elle continuait de vivre, ou plutôt de vivoter, en attendant... En attendant quoi, d'ailleurs ? Elle ne pouvait même pas terminer cette phrase, ce qui l'énervait au plus haut point, alors elle évitait d'y penser trop longtemps.
Posant enfin les sacs de courses sur le palier et faisant craquer sans vergogne ses articulations, la blonde chercha ses clés, ouvrit la porte et donna un grand coup de pied dedans pour pouvoir s'engouffrer dans la maison, récupérant les provisions au passage. La chaumière semblait vide, pourtant le bruit feutré de la télévision lui apprenait qu'elle n'était pas seule et ne lui fallut pas beaucoup de temps avant de mettre un nom sur la présence. Déjà agacé parce qu'elle s'apprêtait à voir, ses muscles se contractèrent, les souvenirs d'une journée harassante l'assaillirent et ses doutes se confirmèrent quand, allongé dans un fauteuil, filet de bave le coin de la bouche, elle découvrit son grand frère Calvin somnolant comme un bien heureux.
- Bordel Calvin... Mais bouge-toi !!
S'insurgea-t-elle sans se priver de faire entendre sa voix alors que Cheyenne jappait déjà en tournant autour d'elle, manifestement heureuse de voir quelqu'un on ne peut plus apte à jouer avec elle que son amorphe propriétaire. Entrant rageusement dans la cuisine, la blonde posa les courses ouvrit une fenêtre et s'assit sur le comptoir en se saisissant d'une bouteille d'eau qu'elle termina presque aussi vite. Elle n'allait quand même pas finir comme lui ? Elle ne se le pardonnerait pas. Comment lui faire entendre qu'après les journées qu'elle avait derrière le dos, elle n'avait rien moins envie de voir que son frère qui ne bougeait pas le petit doigt ? Soufflant un grand coup en basculant la tête en arrière, son regard se promena vers le jardin. Au fond, elle ne pouvait entièrement lui en vouloir, ils avaient tous les deux peur de quitter le confort et la sécurité que leur garantissait cet habitat, peur de se confronter enfin à la vrai vie, aussi, et à ses assommantes responsabilités. Bon sang ne saurait mentir.
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Sujet: Re: Damn you lazy brother Mar 12 Mai - 13:50
Damn I'm a lazy brother
Brother and sister Δ keep calm and love your family they said ♥
La chaleur rendait lourd, la chaleur rendait idiot aussi, qui avait envie de travailler ou ne serait-ce que de sortir de chez soi lorsque le temps vous frappait sur les tempes, lorsque vos yeux se plissaient à cause de la luminosité agaçante ou que vos semelles de chaussures collaient au béton ? Personne, personne n’aimait subir cela. Le footing de la matinée avait largement suffit à Calvin qui avait reporté son échange de balle avec un de ses amis du club de tennis à une journée plus nuageuse à venir. Pour l’heure il était seul au 17 Magnolia Cresent, jouant avec Cheyenne dans le salon, éparpillant des balles qu’elle s’empressait de ramasser et de ranger dans la corbeille à papier. Calvin riait seul face à la capacité de sa chienne à ne jamais s’arrêter dans cet exercice. Si le père de la fratrie aurait été là, il aurait certainement soupiré en voyant que cette pauvre bête continuait de faire les milles et un caprice de son paresseux de maitre, mais ni Trevor, ni Ellie, ni même Matthew n’étais là pour lui faire des reproches, et ainsi Calvin pouvait profiter pleinement de ce moment de solitude pour faire ce qui lui plaisait. Son bermuda beige usé par les années, froissé et taché semblait soudé au cuire du canapé sur lequel il se trouvait, il n’avait pas bougé d’ici depuis au moins deux heures, et il ne prévoyait certainement pas de le faire dans l’heure à venir, sauf si une envie pressante venait à le tirer de là. Se lassant de son jeu avec Cheyenne, Calvin tendis le bras pour attraper la télécommande qui se trouvait sur la table recouverte de journaux et de coupures de publicités qu’on l’avait chargé de trié et qui avaient atterrit ici depuis plus d’une semaine. Sur les chaines, toujours la même soupe, aussi intéressent qu’un micro trottoir fait à Magnolia Cresent, et sans même s’en rendre compte Calvin s’endormit. A ses pieds Cheyenne ronflait aussi déjà, un duo ensommeillé qui plongeait dans les limbes réconfortants du sommeil, oubliant, une fois n’était pas coutume, ce qui pouvait bien se passer en dehors des murs protecteur entre lesquels ils se trouvaient. Ainsi le garçon n’entendit pas la porte s’ouvrir, il n’entendit pas non plus les sacs en plastiques frotter les murs de l’entrée, ni même le soupire d’exaspération que sa petite sœur poussait tandis qu’elle essayait de se frayer tant bien que mal un chemin vers leur petite cuisine, Cheyenne l’abordant déjà dans un jappement heureux. Ce ne fut que lorsque l’injonction incisive d’Ellie s’adressant directement à lui tandis qu’elle passait à son niveau avant d’aller poser violemment ses affaires sur la table de la cuisine. Ouvrant les yeux à demi, son visage se tournant mollement à droite puis à gauche essayant d’aviser la personne qui venait de le sortir de sa léthargie, Calvin aperçut les vêtements pleins de sueurs et la chevelure rebelle de sa petite sœur. Ils se ressemblaient beaucoup physiquement, le même physique musclé, les mêmes mâchoires carrées, de grands yeux clairs et cette chevelue blonde cendrée à nul autre comparable. Ils se ressemblaient beaucoup plus tous les deux que Matthew ne pouvait lui ressembler étrangement, mais la loi des gènes est une dure loterie et personne n’a son mot à dire dessus.
« T’es rentrée … »
Ni une question, ni une affirmation ne venait soutenir ces quelques mots qui sortaient mollement de la bouche de l’aîné, s’étirant dans un bâillement sonore, étendant ses bras et ses jambes prenant ainsi une bonne partie de la place qui se trouvait dans le salon, le garçon attendit encore quelques secondes avant de se lever, passant un pied puis un autre dans les tongs qui l’attendaient patiemment à quelques pas de lui, puis se dirigeât vers la cuisine. Attrapant un verre qui devait très certainement lui appartenir car il trainait prêt de l’évier, le jeune homme se servit un verre d’eau avant de s’approcher de sa petite sœur et de lui ébouriffer les cheveux. Lui-même ne supportait pas que l’on fasse ça, mais l’un de ses péchés mignons était de voir les deux sourcils de sa sœur se rejoindre au-dessus de son nez. Sa petite tête ronchonne, vingt-cinq ans déjà et un toujours cette même moue boudeuse ou effrontée qu’elle affichait à tout vent.
« Qu’est ce qu’il y a p’tite tête ? T’es de mauvais poil encore ? »
Un nouveau sourire venait s’afficher sur le visage de Calvin, laissant découvrir une rangée de dents parfaitement blanches et alignées, sorties tout droit d’une publicité pour chewing-gum. La génétique, elle avait été généreuse avec Calvin, mais son flegme et son manque de motivation constant arrivait à endommagé son image, il le savait, mais il ne faisait rien pour aller contre. Cela faisait déjà quelques années que l’horizon c’était assombri pour lui et il n’arrivait pas à trouver le bon chemin pour remonter la pente, ou peut-être que tout simplement il ne voulait pas le retrouver.