‘‘ Qui a t-il de plus beau qu'un oiseau qui vole vers le soleil ? ’’

CRÉDIT - CSS

J'ai toujours été fasciné par les oiseaux. Ces petites bêtes ailées qui peuvent s'envoler librement où elles veulent. Et même si un jour ils se retrouvent enfermés, ils chanteront toujours avec le même engouement, toujours au poste pour égailler les débuts de matinée. Ils continueront leur petite vie insignifiante, accrochés aux barreaux de leur cage, attendant vainement le jour où ils retrouveraient leur liberté, et pourraient voler à nouveau. En attendant, ils chantaient inlassablement à longueur de journée, trompant ainsi leur ennui. A cet instant précis, je me sentais tel un oiseau, emprisonné dans une cage. Allongé sur mon lit, au centre de ma chambre, je ne pouvais pas faire grand chose à part regarder le ciel par la fenêtre, sans aucun nuage, fixe comme si le temps n'avait pas d'emprise sur lui. Et assit là, à tromper mon ennui, j'avais l'impression que les minutes étaient des heures.

Ma chaine stéréo changeait à présent de musique, me faisant revenir à la réalité, et les premières notes de piano d'une chanson de Beethoven se firent entendre. Rigolez ou non, j'adorais la musique classique. Elle m'aidait à me détendre quand rien n'allait. Et actuellement, c'était exactement le cas. Je me sentais comme une coquille vide, vidé de toute essence de vie, de toute joie, de tout bonheur. J'apportais instinctivement ma main à mon visage, là où une cicatrice me barrait de haut en bas la joue, me rappelant pour la énième fois le soir de l'anniversaire d'Holden. Cet anniversaire, où je mettais fait battre à mort par Jay, enfin apparemment pas tant que ça puisque j'étais encore miraculeusement vivant. Je lâchais un soupir. La douleur et la colère était mes seules compagnes durant ses longues journées de solitude. J'en voulais à Black de m'avoir mit dans cet état, mais je m'en voulais à moi aussi, de l'avoir poussé à bout.

En parlant d'Holden, il m'avait d'ailleurs promit de passer me voir un peu plus tard, par sms. Je lui avais parlé en premier, m'excusant d'avoir gâché sa fête, et demandait qu'il m'explique pourquoi il m'avait laissé seul, enfin en compagnie d'Orlane, alors que j'étais à demi-inconscient. Je prenais mon portable et tapais rapidement un autre sms, ayant oublié de lui dire qu'il pouvait rentrer, la porte étant ouverte, lorsqu'il arriverait, et pourrait monter à l'étage, mon état ne me permettant pas d'aller lui ouvrir moi-même la porte. Je lâchais ensuite mon téléphone, qui atterri à côté de moi sur le lit, et ferma les yeux. J'avais demandé quelques instants plus tôt à Orlane de me laisser, la remerciant d'être passé pour s'occuper de moi, voulant rester seul avec Holden. Elle était donc partie, me laissant seul à la maison, en proie avec ma tristesse.

Je remuais un peu le visage, et sentis immédiatement la douleur me tarauder, lâchant un gémissement. J'avais juste envie de reposer mon regard sur la fenêtre moi. J'étais terriblement frustré depuis que j'étais alité, ne pouvant pas faire grand chose par moi-même. Et en plus, la nouvelle avait fait le tour du quartier, étant devenu le nouveau phénomène de foire, les gens ayant pitié de moi. Angélique disait que ce n'était pas de la pitié, mais de la compassion, mais pour moi c'était la même chose. Les gens s'intéressaient soudain à moi parce que j'avais la gueule d'un boxeur en fin de carrière. Et je ne trouvais pas ça vraiment glorieux. Je n'avais même pas pu répliqué. J'avais honte de moi, honte de m'être fait avoir par un pauvre malade mental, honte d'avoir un œil au beurre noir et la lèvre tuméfié. Mais pour l'instant, tel l'oiseau en cage, je ne pouvais que me morfondre sur mon lit.

La musique emplissait doucement la pièce, me faisant fermer les yeux, calme et détendu. J'appréciais chaque note, comme si c'était la dernière que j'entendais, la musique me gonflant le cœur au fur et à mesure des accords. Elle allait bien avec mon état d'esprit du moment, douce et mélancolique. J'entendis soudain des bruits de pas dans l'entrée, et baissait la musique, me demandant qui ça pouvait bien être. Surement ma sœur ou mon père. Je ne les voyait pas beaucoup de toute façon en ce moment, même si on habitait sous le même toit. A moins que ce ne soit Holden, bien que je m'attendais à ce qu'il vienne plus tard. J'ouvrais les yeux, me tournant vers la porte, le voyant débarqué dans ma chambre, avant de venir s'asseoir sur mon lit. Je vis dans son regard toute la tristesse du monde, et ne put m'empêcher de me mordre la lèvre, comprenant que c'était par rapport à moi qu'il était dans cet état.

Je vis sa main se poser sur moi, avant qu'il ne lâche un "Julian" rempli de tristesse, ce qui me gonfla un peu plus le coeur. Je ne voulais pas que mes amis s'inquiètent ou soit mal pour moi. J'avais mérité mon état, mais eux n'avaient pas mérité de subir ça. Je pinçais ma lèvre un peu plus fort, avant d'essayer de lui sourire, ce qui donna plutôt une grimace. Je devais faire atrocement peur avec la tête que j'avais. Je détournais le visage de lui, ne voulant pas lui offrir cette vision plus longtemps, et posais ma main sur la sienne, essayant de le rassurer. Je lâchais ensuite d'une voix que je voulais assuré quelques mots.

Julian . Holden ! Comment tu vas ?

Je tournais ensuite un peu ma tête vers ma table de nuit, envoyant doucement mon autre main pour essayer d'attraper le paquet de cigarettes posé dessus. J'avais besoin de fumer. C'était le seul truc qui me permettait d'oublier un peu ma douleur. Je fis tomber au passage le verre d'eau vide posé sur la table, qui rejoignit le sol en se fracassant, éclatant en petit morceaux, et me protégeais instinctivement, quasiment traumatisé par le verre qui se brisait à présent depuis que Jay avait explosé une bouteille près de mon visage. Je lâchais un juron, passablement énervé, avant de tendre à nouveau le bras pour essayer d'attraper mon paquet, en vain. Il était trop loin et mon bras me faisait souffrir.

Frustré, j'abandonnais, me retournant vers Holden. Le fait de ne pouvoir rien faire tout seul m'énervait au plus au point, n'aimant pas être un assisté. Je lâchais un soupir, ne voulant me résigner à demander de l'aide à mon meilleur ami, et lui lançais un regard suppliant pour ne pas qu'il fasse de commentaire. J'en avais assez. La moindre chose me mettait en rogne. Je venais de péter un verre et ne pouvais même pas nettoyer. Je n'arrivais pas à attraper mon paquet de cigarette. La seule chose qui m’apaisait un peu était le fait que mon ami soit là, pour moi. Je lâchais dans un soupir.

Julian . Merci d'être venu... Comme tu vois je sers pas à grand chose ce soir. Si tu veux repartir, maintenant que tu as vu mon état, tu peux.