Une voiture, de vieux potes d'Irlande de passage au states, des chips, de la limonade et des joints. Une bonne journée en somme. On a vagué sur les routes toutes la journée, la musique à fond, à rigoler, parler du bon vieux temps, les potins de ma ville natale, des nouvelles par ci et par là. Bidule est enceinte, machin s'est marié, truc a divorcé et tout ça tout ça. Sortir de Magnolia Cresent m'avait fait du bien, comme si pendant un court instant tout ce fardeau sur mes épaules s'était envolé, comme si pendant un moment éphémère, j'étais ce petit irlandais qui ne s'était pas encore heurter à la vie, tranquille chez papa & maman, pas encore écorché de la vie ou presque, moins qu'aujourd'hui sûrement. Et puis, tout cela s'est envolé quand mes chers amis m'ont déposé devant ma maison et qu'ils sont repartis dans des éclats de rires et des promesses de se revoir. Je souhaite que ces promesse puissent être tenues, je souhaite au fond, un jour, pouvoir retourner chez moi, en vacance ou un truc du genre. Revoir mon île, mes paysages d'enfance, manger la cuisine de ma mère, voir mes soeurs que je ne vois plus grandir à mon plus grand désarroi. Être avec ma famille, celle qui m'a soutenu dans mes périodes les plus sombres. Aujourd'hui, ça me semble tellement dur d'y retourner, je ne suis plus le même et pourtant, pourtant...une part de moi reste le même irlandais la tête plein de rêves qui a quitté son foyer. Un jour, j'y retournerai...

RDV pris avec mon cher compagnon pirate pour ce soir, soirée entre mecs. Pizza & co. Je m'occupe du dessert. D'abord une sieste s'impose car je suis crevé. Bosser crève mais il semblerait que avoir du fun épuise aussi. J'ai mal à l'estomac tellement j'ai rit et j'ai les poumons qui vont exploser avec la fumée des clopes que mes potes m'ont imposé. Je n'arrive décidément pas à fermer l'oeil sûrement pris d'un immense mal du pays, alors je me motive à descendre à la cuisine cogiter sur le dessert que je dois apporter. Je farfouille les placards et selon les ingrédients déjà présents, je décide de nous faire un crumble aux framboises. C'est vite fait et fastoche. Tellement fastoche que je ne le rate jamais. Recette de ma grand-mère. Je me mets à la tâche et enfourne le truc. En attendant je vais m'écrouler devant le poste de télé, devant un documentaire marin. C'est banale mais moi, j'aime bien être tranquille chez moi, à rien foutre. Ce soir, je bosse pas et cette journée détente m'a fait du bien et ce n'est pas fini. Je compte bien passer une bonne soirée ce qui sera le cas vu l'entente que j'ai avec Adrian le Pirate. Je cours toujours à droite et à gauche alors me poser et kiffer du temps, de ma vie, c'est agréable. Finalement, les baleines ont raison de moi et je m'endors face à la voix soporifique du présentateur. Je ne me réveille qu'à la sonnerie du four. Crumble cuit ! Je me lève et éteint le four. « Pas touche à ce qui y'a dans le four les gars ! C'est pas pour vous ! » Je m'égosille en montant à la salle de bain. Une bonne douche fraîche et j'enfile un jean et un polo à rayure avant de filer reprendre mon bien avant que les autres n'aillent y picorer leurs doigts. Je les connais. J'enveloppe le dessert encore chaud et m'extirpe de la maisonnée sans un mot, direction le voisin. Je toque à sa porte, quelque instant plus tard, mon camarade d'abordage m'ouvre « Salut moussaillon ! Comment va ? » Je rigole avant de me faufiler à l'intérieur « Hey pirate ! Ca va depuis qu'on s'est parlé sur FB. Où es donc ton crochet hein ? » Dis-je en désignant sa main sur la poignée. « Crumble aux framboises, encore vierge, je te rassure. Personne n'y a touché ! Je le jure ! Je lui ai mis une ceinture de chasteté ! » Plaisantais-je avant de lui faire un clin d'oeil. Je me dirige vers la table et pose le plat qui me brûle les mains. C'est la première fois que je mets les pieds chez lui. C'était plutôt pas mal et confortable.

« Il est rangé, bien au chaud t'inquiète ! Il sort pas comme ça. » Sort mon compagnon avant de me donner une petite tape amicale dans le dos. Je me contente de me marrer. C'est agréable. Je veux dire je n'ai pas une tonne d'amis dans le quartier à cause de ma tendance à être silencieux et par moment froid. J'ai pas beaucoup de pote masculin, j'ai une tonne d'amis fille mais des potes ça se remplace pas. Faut dire qu'avec ma façon de penser j'ai du mal à trouver chaussure à mon pied. C'est pas pour me jeter des fleurs ou quoique ce soit mais je veux dire, avoir vécu dans la rue m'a énormément changé et je ne supporte plus aujourd'hui les petits mecs débiles qui ne pensent à rien qu'avec leurs porte-feuille ou le bout de chair qui leur sert de pénis. J'arrive tout bonnement pas à m'entendre avec ce genre de mec et j'ai trouvé en Adrian un bon pote. Je ressens chez lui un sérieux, une maturité mais aussi une capacité à pouvoir dire des conneries, à s'amuser. Tout ce que je recherche. Exactement, ce que je suis. « Ah ! Tu me prends par les sentiments ! Tu sais bien qu'un pirate ne résiste pas à une jolie vierge ! Même couverte de framboise et de gélatine. J'ai bien hâte d'y goûter. On va aller poser tout ça, les pizzas devraient plus tarder. » Je lui décoche un clin d'oeil « Mais je te connais très bien, cher ami. Hehe. Vivement qu'elle arrive, je meurt de faim. Je me suis fait force pour ne pas grignoter la vierge aux framboise » Parfois, j'ai du mal à croire qu'Heathcliff est son frère car avec ce mec, je m'entends pas du tout. Pour des raisons que j'ignore, il me déteste alors qu'avec les autres membres du groupe, il s'entend à merveille. « Un petit quelque chose à boire ? ...Pour célébrer la venue de ta vierge, j'ai du rhum dans le placard camarade ! » Je me retourne vers lui, abandonnant le crumble à sa solitude « Une bière si tu as. Mais quelle délicate attention ! Je sens que je vais devoir rentrer à quatre pattes chez moi. Ne le prend pas comme une quelconque incitation » Lançais-je, le regard pétillant de malice. On s'entendait bien Adrian et moi, à se balancer des conneries sur conneries, par comme son frère où on se balance des merdes à la figure. Il me tend ma bière décapsulée quand on sonne à la porte. Le repas est là. Je bois une gorgée pendant qu'il règle les pizzas et me fait signe de le suivre au salon ce que je fais aussitôt. Je me laisse tomber à côté de lui sur le canapé. Je suis impressionné par la taille de leur télévision, ça change de la minuscule télé que nous avons à la maison. Le salon était décoré avec goût et classe, bien loin de mon propre salon bien les efforts que je fournis pour que la maison reste nickel. Il ouvre les cartons et déjà un fumet délicieux envahit la pièce, j'en saliverai presque. « Il y a du piment sur celle-là ! J'espère que t'es pas une chochotte hein, j'te passe sur la planche sinon ! » Je rigole et prend une part au hasard « Désolé de te décevoir mais je suis un homme, un vrai ! Bien que je suis sûr ça te fera encore plus fantasmer » Je rigole avant de croquer dans ma part. Je me rappelle plus depuis combien de temps je n'ai pas mangé de pizza, ça m'avait manqué. Il allume la télévision et zappe, cherchant sûrement un bon truc à mater. Un match de basket s'affiche à l'écran au bout de quelques chaînes, je lève la main et lui fait signe d'arrêter de zapper. J'ai la bouche pleine je peux pas causer. J'avale en vitesse « Vas-y laisse ça sinon ! Enfin si tu aimes le basket. Ou alors, on fait un tour des chaînes pour voir ce qu'il y a et on choisit. » Proposais-je avant d'engloutir ma part de pizza de façon la plus propre possible, maniaque jusqu'au bout.

« Non, jamais, je te jure ! Mais tu n'es pas bien loin, si l'on ne te prend pas pour une bestiole tu ne te fera même pas écraser ! Ou tu resteras là que je profite de toi hein ! » J'arque un sourcil, l'air de dire "dans quel sens profiter" puis je rigole un peu jaune, la pensée qu'un homme puisse me...Arf bref, je secoue la tête pour ne pas y penser. Je suis là ce soir pour décompresser et lever un peu la pression. Je mène une vie à un train fou ! Parfois tout va un peu trop vite pour moi, j'ai une sensation que tout défile trop vite que je ne profite de rien et surtout que je n'ai de contrôle sur rien, c'est assez déstabilisant. Surtout pour moi qui aime avoir le contrôle sur ma vie. C'est pour dire, les nuits et les journées défilent, trop vite. J'ai pas l'impression de kiffer ma vie ces derniers temps. Debout, petit dèj, je m'occupe de la maisonnée, peut-être le temps de me détendre et c'est l'heure d'aller au bar bosser. Et mes jours de repos, je les passe à dormir ou répéter pour nos show le week-end. Je sais pas si c'est possible de mourir d'épuisement mais je pense bientôt que je vais mourir de fatigue ou de stress. Alors ces deux jours en Irlande, ça me fera du bien. Je serais pas celui qui m'occupe de tout. Non. Je serais cajolé par ma maman, je pourrais reposer ma tête et être un peu, même un court instant, juste inconscient et vivre.

« Ah mon pauvre Shawn ! Retiens moi de te sauter dessus une fois les boissons terminées ! » Je rigole après avoir avaler ma bouchée de pizza. Faudrait pas que je m'étouffe. On délire souvent comme ça avec Adrian. C'est enfantin et loin d'être sérieux, je le sais bien. Ca me fait bien rire, même si parfois, ce genre de plaisanteries me fait bizarre. Surtout quand j'y repense mais de façon générale, je mets ça dans un coin de ma tête et je tente d'oublier. Adrian c'est le gars avec qui je me sens à l'aise. On est sur la même longueur d'onde. Je prend pas soin de lui, je veux dire, oui je serais là pour lui si y'a besoin. Mais c'est comme avec mes coloc, je me sens pas obligé de tenir un rôle, d'être celui qui pense à tout, je suis juste moi, simplement, pas le type qui se doit d'être droit, mature, penser pour les autres, prendre tout sur les épaules. Adrian, il me prend comme tel et n'attend rien de moi. Je dois dire que ça fait du bien. Je me pris une deuxième part après avoir pris une gorgée de bière. Le match de basket se déroulait sous nos yeux alors mon regard était déjà capté par le porteur du ballon. Ce genre de soirée, ça m'avait manqué. Simple mais super sympathique. Je mords dans ma part de pizza et repose ma bière. Je grogne dans ma barbe, la bouche pleine, pendant que le joueur se fait voler la balle dans une seconde d'inattention. Crétin ! Le sport, j'aimais bien ouais. Le basket j'aime bien. Même si je ne suis pas super sportif à la base, j'ai fait du base ball mais rien de bien longtemps. Le sport que j'ai pratiqué le plus longtemps, c'était la natation. J'adorais ça. Mais j'ai dû arrêter, si bien que je nageais que dans notre piscine, les compétitions me manquaient beaucoup. Il faut dire que je pratiquais la natation depuis quoi, mes 5 ans. Si bien que même quand j'ai arrêté, j'ai gardé une silhouette de nageur. Faut dire que dès que je pouvais, que j'en trouvais le courage et dans les heures creuses, j'allais faire des mètres à la piscine municipale mais je rentrais rapidement chez moi. Ce lieu ne m'inspirait rien de bien positif même si le monstre de la piscine municipale avait disparu. Ma part de pizza engloutie, je m'essuie les mains sur la serviette en papier avant de râler en voyant le mec rater le panier.

« T'as des cocotiers dans la main ou quoi ! » Râlais-je m'adressant au joueur qui bien-sûr ne m'entend pas. Je me cale dans le canapé et me tourne à moitié vers Adrian, de fonction à pouvoir suivre le match encore

« Non mais t'as vu sa passe pathétique ? Ca craint ! Ma petite soeur fait mieux que lui » Je m'esclaffe car, bien que ce soit con, c'est ce que je préfère devant un bon match, descendre les joueurs. C'est pas intelligent, c'est juste débile mais faire parfois des choses débiles, ça me va. Ca me permet d'oublier le rôle d'adulte que je dois menais lors de mon quotidien. Et Adrian, c'est le seul avec qui je peux le faire. Entre adultes débiles, on se comprend.

Ma famille avait été ancrée profondément dans la religion si bien que mon père et ma mère nous avaient inculqués de bonne règles de base et une éducation stricte. Le mot chiant était interdit, punaise et mince était toléré mais nous devions jurer le moins possible. J'ai grandit dans cet environnement jusqu'à que je perd toute foi et croyance en cet homme qu'on appelait Dieu et de son fils, Jésus-Christ. Oui. Il y a eu énormément d'évènements, s'accumulant encore et encore qui m'ont conduit aujourd'hui à rejeter cette croyance qui, maintenant, me parait bien stupide bien que je respecte ceux qui y croient encore. Leur foi force mon respect et mon admiration. Quelque part, moi je n'ai pas pu. Malgré cette perte de croyance, j'ai gardé certaines habitudes, ne pas dire de gros mots, ne pas jurer, être poli, être digne, être droit, être juste, être quelqu'un de bien, même si quelque part c'était raté. Parfois ma langue fourchait mais maman et papa n'étaient plus là pour me remettre dans le droit chemin alors j'ai quitté un peu le sentier droit et limpide qu'ils avaient tracé pour moi. Regardez-moi ! Musicien et serveur, qui se prend des joints de temps à autres, qui se prend des cuites dès qu'il peut, pas vraiment un homme de religion. Qu'importe. Seulement les habitudes sont coriaces et parfois il m'arrivait encore de sortir des expressions pour le moins stupéfiante comme a dû remarquer mon compagnon. « Des cocotiers ? Drôle !! .. Et ouais, il est tellement naze, j'en reviens pas ! Tu veux pas qu'on appelle ta sœur pour le remplacer alors ?
» Je rigole avant de prendre une gorgée de bière et secoue la tête

« Elle ferait peur à l'équipe adversaire, ils agiteront drapeau blanc. Surtout si les jumelles débarquent à deux » Je rigole rien qu'à l'idée d'imaginer mes pestes de petite soeurs sur un terrain de basket. En plus, je me souviens super bien de mes parties avec elles, ces sales petites tricheuses. L'une me faisait un croche-pied pendant que l'autre me volait le ballon. Ces petites pestes là ! La mi-temps sonna laissant aux joueurs exécrables de se reposer. Pendant la pub, mon ami en profite pour papoter nana. Sauf qu'il cause de ma soeur. Je grince un peu des dents. Je sais bien qu'il plaisante, enfin j'espère, c'est juste mon côté protecteur qui ressort. Je crois que je supporterai pas qu'un mec touche à l'une de mes soeurs, surtout un mec comme Adrian, fiancé et du genre super fidèle. Bien que je n'ai rien contre lui.
« Mec, tu fais dans le détournement de mineur maintenant ? Laisse tomber. Mes soeurs sont encore mineurs et je ne te laisserais pas les approcher » Je lui dis en lui faisant un clin d'oeil avant de rigoler doucement même si quelque part, je suis très sérieux. Celui qui voudra se faire mes soeurs devra me passer sur le corps ou être un gars très réglo et bien, sinon, pourtant je suis pas violent, je lui casse la gueule. Ami ou pas.