Quitter Magnolia Cresent m'avait fait du bien. Je n'en pouvais plus de ce quartier bizarre où vivait des familles toutes plus dégénérées les unes que les autres. J'avais besoin de voir autre chose, et aller faire mes études ailleurs était la meilleure idée que je puisse avoir. Désormais, cela faisait quelques temps que je vivais dans un appartement à Phildelphie, non loin de mon université, en colocation de Katya et de Nina. Je m'étais toujours posé la question de comment pouvaient-elles me supporter. C'est vrai, je suis quelqu'un de très... dispersé.

Comme tous les matins, je m'étais réveillé en retard, étais passé sous la douche en un temps record en arrosant le sol, j'avais pris un temps considérable à me mettre du gel dans les cheveux, je m'étais habillé à deux à l'heure, puis j'avais sorti les céréales, avais grignoté dedans, et avais tout laissé en plan. Cela laissait de bonnes surprises à mes amies lorsqu'elles rentreraient le soir, parce qu'en effet, je suis tellement gentil que je leur fais des cadeaux sans arrêt... Pour me rendre au campus, j'étais monté dans ma voiture et avais conduis jusqu'au parking où se trouvaient déjà garées de nombreuses voitures, puis que j'étais en retard, une fois de plus. Je passais devant le garage à vélo et remarquais les vélos de mes amies. Qu'importe des Koalas et des plantes carnivores qui crèvent partout dans le monde, je n'allais pas me tuer à faire du vélo matin et soir... Vérifiant qu'il n'y avait personne aux alentours, je cherchais dans ma sacoche ma plaquette d'étiquettes Bob l'éponge et en collais une chacune sur le siège des vélos. Je marchais jusqu'à mon bâtiment en riant et allais en cours. Les heures passèrent... Lentement... Lourdement... Si bien qu'à ma dernière heure de cours de la matinée, je dormais à moitié sur le bord de ma table. La sonnerie me réveilla enfin, et d'un pas las, allais manger en compagnie de mes amis. Je ne prononçais pas un mot jusqu'à ce que nous arrivions à la table. Puis un ami me regarda, et en fronçant les sourcils me demande : « Bah la terreur, t'es muet? Quelque chose ne va pas? ». D'un air endormi, je levais les yeux vers l'intéressais et secouais la tête, et posais mon menton dans la paume de ma main, en jouant avec la nourriture de ma fourchette. Puis je relevais les yeux et une idée me vint : « Tout va bien. Dites, après les cours vous venez chez moi? » Tous approuvèrent et l'on me tapa dans le dos, comme quoi j'étais un génie. Soudain remotivé, je passais le reste de ma journée à faire des blagues, foutre le bordel, me faire virer de cours, et à rire de mes âneries comme un idiot.

Puis vint le moment de rentrer chez moi. La dernière sonnerie de la journée. Le dernier cours, le dernier mot à écrire. Le chemin du retour. Et enfin, le canap' et la musique. Nous étions tous regroupés dans le salon, à parler, fumer et boire sans complexes. Il devait déjà y avoir un garçon accroupit dans les toilettes, mais je ne m'en souciais pas, déjà trop hébété par l'alcool et une substance illicite dont je ne citerai pas le nom. Je sentis alors quelqu'un arriver derrière moi et une voix s'élever: « C'est une blague ? » Ouille. J'étais dans un sacré pétrin, une fois de plus. Je me tournais vers Nina et lui souriais, puis apportant ma cigarette à ma bouche je lançais d'un air nonchalent : « Bah non. Tu veux une clope? » Je lui tendais un paquet de Philip Morris et attendais qu'elle l'attrape, mais elle me tapa dans la main et s'avança vers moi. J'apportais mon poing à ma bouche et l'embrassais, comme pour faire passer la douleur quand on a six ans et qu'on croit aux absurdités que nous raconte nos parents pour arrêter de nous faire pleurer après une chute.

Nina était plantée au milieu de la pièce et fixait Austin. Avoir contemplé à peine quelques secondes le bordel ambulant qu'était devenu l'appartement lui suffisait amplement pour prendre la mesure du désastre. Austin avait cet espèce de sourire insolent collé aux lèvres qui lui donnait encore plus l'envie de le baffer. Et ses potes n'avaient pas l'air plus fin que lui. Ce garçon était aussi adorable que détestable. Autant parfois Nina et lui pouvaient s'entendre à merveille, autant d'autres fois comme présentement il était la personne qu'elle détestait le plus sur terre. Après Naya Freeman. Et Zoë Kahn, et Cameron Cooper aussi. Bref. Tout le monde qui avait cotoyé Nina un tant soit peu savait à quel point elle pouvait se montrer colérique. Et elle vivait en colocation avec Austin depuis deux mois déjà, il avait bien eu le temps de la cerner donc. C'était dire à quel point le garçon était suicidaire. Nina ne détourna pas le regard. La musique était si assourdissante qu'elle lui avait déjà donné un mal de crâne en moins de deux. La jeune fille se demanda comment le garçon avait fait pour ne pas se faire virer de son appartement depuis le temps. En fait c'était logique, il lui appartenait, grâce à Papa et Maman. Austin avait cet appartement depuis un an, si elle se souvenait bien. Les voisins devaient souvent se plaindre, heureusement cela n'était pas encore arrivé depuis que les deux meilleures amies s'étaient installées ici. Enfin si, quelques fois, indirectement, puisque des voisins avaient donné des coups dans le mur pour dire de baisser le son. En même temps, il fallait voir les chansons qu'ils mettaient. Pas le genre de musique pour s'endormir le soir, une musique de soirée quoi. Nina avait envie de donner un coup de pied dans la chaine hifi et de débrancher tous les câbles avant de les balancer par la fenêtre. D'ailleurs c'est ce qu'elle finirait par faire si Austin ne s'assagissait pas. Il était hors de question de finir l'année comme ça, pas avec toute la fatigue accumulée et le travail qui l'attendait.

La jeune fille s'indigna, et Austin eut le culot de s'en foutre. Rien ne pouvait énerver Nina plus que ça. A part peut-être son téléphone. Il lui demanda même si elle voulait fumer avec lui. Pour toute réponse elle fit voltiger le paquet dans la pièce avant de lui taper dans la main. « Non je crois pas, non. » Ce dernier eut l'air d'avoir mal. Bien fait pour lui. Même si elle le soupçonnait de jouer la comédie ; Nina n'avait pas tant de force que ça. « Je peux te parler cinq minutes. » lui dit-elle d'un ton entendu. Ses yeux lançaient des éclairs et elle indiqua le couloir d'un geste de tête avant de tourner les talons. Elle expira pour rester calme. Sa tête lui faisait un mal de chien. La jeune femme en profita pour pianoter sur son téléphone un texto afin de demander à Katya où elle était et si possible qu'elle rapplique au plus vite. Deux pas plus loin, entendant qu'il ne la suivait pas, Nina se retourna. « C'était pas une question en fait. »

Austin aurait mieux fait de vérifier sa liste d'invités, l'un d'eux avait fait irruption sans prévenir, et surtout sans qu'on le voit ! Vous devinez de qui il s'agissait bien sûr ? Oui je parle bien de moi, le chat noir. Me faufilant à travers le salon, je jetai un regard vers Nina et Austin, c'est à ce moment là que l'un des potes du jeune homme se leva du canapé et lança :

« C'est elle la coloc bandante dont tu m'as parlée ? C'est vrai qu'elle est plutôt bonne, je comprends que t'ai rêvé d'elle, mec... »

Comme si de rien, il s'éloigna du duo pour aller se chercher une bière, qu'il but non nonchalamment, il en fit d'ailleurs tomber sur des vêtements qui trainaient sur le plan de travail de la cuisine... Ai-je besoin de préciser qu'ils appartenaient en effet à Nina ?

Nina n'avait jamais vraiment supporté mes soirées. Enfin, au début ça allait, mais le problème était que je ne rangeais jamais rien. Je laissais tout dans un état pas possible, et le lendemain, j'allais dormir quelques heures pour récupérer de la vieille, et je recommençais le soir même. En fait, j'avais toujours agis ainsi, surtout quand je vivais seul dans cet appartement, et l'arrivée des filles n'avait rien changé à mon quotidien. Tous les soires c'était la même rengaine, et je me faisais disputer, mais lorsque j'invitais mes amis, souvent j'oubliais que Nina et Katya allaient péter un plomb le soir même. Et puis même, je m'en foutais, et j'aimais me faire engueuler, c'était plutôt drôle à voir. « Non je crois pas, non. ». Elle m'avait tapé sur ma main, et moi, en bon acteur, j'avais fais semblant d'avoir mal. Mes potes s'étaient mis à rire, et fier de moi, j'avais tapé dans les mains de certains en gigotant tel un gamin sur le canapé. Mais la voix Nina me coupa dans mon élan alors que je m'apprêtais à taper dans la main d'un troisième gars : « Je peux te parler cinq minutes. » Elle désigna le couloir de la tête, et je lançais un regard à mes potes, puis souriant, je me rassiais, sans bouger, bras croisés. Je ne comptais pas bouger de là, si elle avait besoin de parler, qu'elle le fasse là, dans le salon. Un pote gloussa et Nina, se rendant compte que je ne la suivais pas se retourna et me toisa. « C'était pas une question en fait. » Je riais et commençais à raconter des conneries à mes potes en ignorant Nina. J'aimais tellement la faire enrager!

Puis un chat noir entra aisément par la fenêtre, fit le tour de la pièce et me toisa, puis il repartit et j'entendis une voix s'élever derrière moi : « C'est elle la coloc bandante dont tu m'as parlée ? C'est vrai qu'elle est plutôt bonne, je comprends que t'ai rêvé d'elle, mec... ». Je me tournais vers l'abruti qui avait balancé cela et le regardais de haut en bas, ahuri. Il se leva et se dirigea vers la cuisine où il alla chercher une bière... qu'il renversa sur les vêtements de Nina que j'avais posé là pour faire de la place sur le canapé. J'allais me faire tuer, voir étriper, peut-être même égorgé... Je regardais mon pote, un grand blond baraqué et lui glissais discrètement : « Putain Matt tu peux pas fermer ta gueule parfois? Et fais attention bordel! C'est moi qui vais me faire tuer là! » Je lui arrachais l'éponge des mains et la passais sur le plan de travail, mais autant vous dire qu'avec mon savoir faire, je trempais la table d'un mélange de bière et d'eau au savon, qui dégoulina lentement le long de la table pour finir son chemin sur le carrelage de la cuisine. Nina s'était mit à crier et se trouvait désormais à l'encadrement de la porte! « T'inquiètes je vais nettoyer! » Tu parles, au moment où j'avais terminé ma phrase, je fis gicler mon nouveau mélange sur Nina, qui se retrouva trempé de la tête au pieds. Ca allait barder pour moi...

Nina attendait qu'Austin se décide à bouger ses fesses, elle voulait mettre les choses au clair. Des soirées tous les soirs c'était bien sympa mais cela ne pouvait pas continuer comme ça. La jeune fille se demandait vraiment comment il avait pu obtenir sa première année, et même comment il avait été pris à l'université de Philly. Nina et sa meilleure amie avaient trimé comme des folles sur leur troisième trimestre, tandis que lui semblait tout réussir avec un effort minime, et c'était très agaçant. Peut-être avait-il un QI hors norme ; Nina était sceptique, elle songea à le tester un jour.

Mais l'heure n'était pas aux réjouissances, la jeune femme comptait bien mettre fin à la petite fête improvisée. Sur les nerfs, la petite brune observa son coloc se marrer avec ses amis qui n'avaient pas l'air bien plus intelligents que lui. L'un d'eux d'ailleurs balança une vanne que Nina n'entendit qu'à moitié à cause de la musique qui battait son plein, mais elle avait compris l'essentiel. Elle éclata d'abord de rire tellement elle trouvait ça ridicule. « Au moins il y en a un de nous deux qui l'est. » Comme s'il était suicidaire, ce fameux pote d'Austin se leva vers la cuisine et renversa comme par hasard malencontreusement son contenu sur ... des affaires de Nina qui trainaient sur le bar. DarkVV allait péter une durite, c'était officiel. La jeune femme s'avança d'un pas nerveux jusqu'au bar pour voir l'étendue des dégâts, et surtout quelle fringue il avait trempée. « PUTAIN mais c'est quoi votre problème ? J'peux savoir ce que ça fait là ? Et j'peux savoir de quoi il parle ? » cria-t-elle, excédée, en désignant tour à tour ses fringues trempées puis le blond. Comme si Austin cherchait encore plus à s'enfoncer dans sa connerie, il aspergea (soit-disant sans faire exprès) Nina avec son éponge. Ça y est elle était à son maximum. La jeune femme balaya du revers de la main le bar ce qui fit tout tomber par terre, fringues, éponges, liquide, bouteille de bière. Elle avait envie de s'arracher les cheveux, c'était insupportable. La musique résonnait dans sa tête et, elle qui habituellement adorait cette chanson, avait actuellement envie de tout stopper, qu'Austin et ses potes aillent faire la fête ailleurs, mais surtout elle avait besoin d'un bon lit et de médicaments. C'est d'ailleurs ce qu'elle projeta de faire, mais se rendant compte que le blond et les autres étaient toujours pliés de rire, elle se dirigea vers la chaine hifi d'Austin. « Tu veux savoir ce que ça fait quand on touche à tes affaires Austin ? » demanda-t-elle le plus calmement du monde au garçon, avant d'attraper la chaine hifi et de la balancer par la fenêtre déjà ouverte. Il lui facilitait la tâche en plus.

Il ne fallait pas que je m'attende à une réponse gentille et tolérante de Nina. Déjà parce qu'on disait d'elle qu'elle était "bonne", ce qui n'était franchement pas flatteur. Mais en plus, Nina était bien trop agacée pour prendre les choses à la légère. J'allais morfler à tous les coups. Les choses ne s'arrêtèrent pas là, puisqu'après mon ami Matt renversa de la bière sur les affaires de Nina. Là, j'étais carrément condamné à un enfer. Je tentais de nettoyer, mais connaissant mon adresse, les choses empirèrent. Il fallait que je trouve une solution.

« Bon, ok. La fête est finie! Dégagez maintenant! » Je lançais à mes amis, qui toujours avachis sur le canapé, observaient la scène en gloussant. Mais ce que je n'entendis pas à ce moment là, c'est ce que Nina dit. Je la vis alors attraper ma chaine hi-fi et la balancer par la fenêtre. J'hurlais, lâchais l'éponge sur le plan de travail, et me précipitais vers la fenêtre. Je regardais en bas et la vis complètement explosée sur le sol. Je me retournais vers Nina, énervé et virais tout le monde de la maison. Une fois l'appartement vide, je me dirigeais vers Nina et la regardais.

« Nan mais t'es sérieuse de faire ça! Elle m'a coûté super cher! » J'ouvrais brusquement la porte de l'appartement, et descendis devant l'immeuble. Je regardais les "ossements" de mon ancienne chaîne hi-fi et attrapais un bout qui traînait, c'était l'enceinte. Je la pris avec moi, et remontais. Déposant les restes de ma chaîne hi-fi sur le sol de l'entrée, je regardais Nina d'un oeil noir. En réalité, elle était jalouse. J'avais trouvé quel était son problème. Alors je m'avançai vers elle et la collais contre le mur.

« Expliques moi ce que tu veux de moi. J'aimerai qu'on oublie ça... » Je me penchai vers elle et l'embrassais, mais aussitôt fait, je senti une douleur sur ma joue. Elle n'allait pas me repousser éternellement. Avec elle, rien n'allait, tout ce que je faisais ne lui convenait pas. Alors, vexé, je m'asseyais dans le canapé, bras croisé, et je me mis à bouder comme l'aurait fait un gamin de cinq ans.

Se défouler en exprimant toute sa colère (et en balançant des chaines hifi par la fenêtre), ça faisait étrangement beaucoup de bien. Nina estimait qu'Austin avait amplement mérité ce qu'elle venait de faire. Depuis le début de leur colocation, il y avait eu de grosses engueulades, des mauvais moments à passer. Aujourd'hui n'était que la goutte d'eau qui faisait déborder le vase. L'accumulation de toutes ces soirées imposées aux jeunes femmes l'avait fait sortir de ses gonds, et même si cette réaction semblait excessive, elle ne regrettait pas. Austin s'empressa de sortir à l'extérieur pour admirer les dégâts. Sur le coup, Nina ressentit une certaine satisfaction à voir le propriétaire des lieux s'écraser, pour une fois. Mais elle ne put s'empêcher de se sentir un peu coupable, peut-être était-elle allée un peu trop loin. Peut-être pas. En tout cas ce qui était fait était fait, et au moins la chaine hifi ne tomberait pas plus bas. Alors que son colocataire était en train de dévaler les escaliers jusqu'au rez-de-chaussée, elle regarda par-dessus le balcon voir si personne ne s'était pris l'engin sur la tête. Mais heureusement pour elle aucun homicide involontaire n'avait été commis ce soir.

Lorsqu'il remonta dans l'appartement, ce fut au tour d'Austin de péter son câble. Il hurla, cria à ses potes que la fête était finie et qu'ils devaient s'en aller. Les bras croisés, Nina était contente, elle avait eu ce qu'elle voulait. Le jeune homme fit remarquer à sa colocataire quel prix lui avait coûté cette chaine hifi. « Au moins tu sais quoi demander pour Noël maintenant. » Maintenant elle n'était plus que spectatrice de la scène, observant Austin s'exciter tout seul après elle. Ses potes étaient maintenant partis. Enfin. Mais le garçon n'avait pas fini de se donner en spectacle, apparemment. Il marmonna des paroles que Nina ne comprit pas, puis s'avança vers elle et ... l'embrassa. Spontanément, la jeune femme le repoussa et lui colla une gifle. Vraiment suicidaire ce soir celui-là. « Austin tu joues à quoi là ? » Visiblement vexé, ce dernier alla s'asseoir dans le canapé, et peu de temps après Nina le rejoignit. Encore une fois elle ne comprenait tout ce qui venait se passer. Honnêtement, elle l'aimait bien Austin. Ils s'engueulaient aussi souvent qu'ils passaient de bons moments, mais c'était ça aussi qui la faisait douter. La petite brune était persuadée qu'Austin n'était pas qu'un couillon se donnant des airs. Lorsqu'ils parlaient parfois, il pouvait se montrer intéressant et un peu plus mature. Nina avait le sentiment qu'il se donnait des airs devant ses potes pour se faire remarquer, mais qu'au fond il était bien plus que ça. Et nul doute qu'elle préférerait voir cet Austin-là. « T'es sûr que tout va bien ? » Sa question était sérieuse et dénuée de toute ironie. Non elle n'allait pas l'engueuler pour ce qu'il venait de faire, ni cette fois balancer la télévision par la fenêtre. Elle voulait essayer de voir s'il était capable de tenir une conversation mature avec elle, sans se donner un genre de bad boy qui ne lui allait définitivement pas.

J'avais toujours cherché Nina, je savais que mon comportement l'agaçait, et je trouvais drôle de la chercher, car je voulais voir jusqu'où elle pourrait aller. Mais ce soir, j'avais voulu trop jouer, et je m'étais retrouvée battu. Dehors, je regardais ma chaîne hi-fi, et je remontais avec tristesse. Je n'aimais pas que l'on s'attaque à mes affaires, encore moins quand cela venait de personnes que j'appréciais, comme Nina. Lorsque je lui criais qu'elle m'avait coûté cher, elle me répliqua que je savais quoi demander à Noël. J'avais prévu autre chose pour Noël, je voulais emmener ma petite soeur en France, faire un séjour à Paris. Comme ça, j'aurais pu revoir cette fameuse fille avec qui j'étais sorti quelques années auparavant, et j'aurai passé quelques jours seul avec ma soeur, sans nos parents pour nous dire quoi faire. Mais désormais, mon projet tombait à l'eau, car soyons honnête, je ne pouvais vivre sans musique.
Je ne sais pourquoi, mais j'avais embrassé Nina, un coup de folie, un élan de courage avait parcouru mon corps. Et cet acte s'était soldé par une bonne gifle. Je m'étais reculé, et étais allé bouder dans le canapé. Nina me demanda à quoi je jouais, et je ne répondis pas, tout simplement parce que je ne savais pas quoi répondre. Je regardais devant moi, à l'endroit où se trouvait auparavant ma chaîne hi-fi. Elle vint s'asseoir près de moi, et me demanda si tout allait bien. Je me levais, et allais chercher de quoi nettoyer mes dégâts dans la cuisine. Je fis couler l'eau dans l'évier et mis du savon dedans. Puis je m'apprêtais à mettre le haut de Nina à tremper dedans, lorsque je m'arrêtai, le bras tendu au dessus de l'évier.

« Si je mets ça dedans, ça craint rien? » Nina vint m'aider. Et j'allais alors chercher toute la vaisselle qui traînait dans l'appartement. J'avais envie de me racheter, pour les dégâts que je causais dans cet appartement, pour mon comportement de garçon insupportable et pourri gâté. Je ne prononçais pas un mot, me contentant de réfléchir. Nina semblait vouloir parler, mais j'avais peur de faire une autre erreur, de l'embrasser une nouvelle fois. D'ailleurs, pourquoi l'avais-je embrassé? Je m'étais réellement senti différent pendant ces quelques secondes, comme si tout était permis, alors que j'avais très bien vu que Nina était capable de gagner contre moi. J'avais juste besoin de montrer que je n'étais pas qu'un naze, que ma vie ne se résumait pas qu'à faire des blagues et des soirées. Que je pouvais aussi me montrer sûr de moi et faire ce dont j'avais envie, sans avoir quelques personnes derrière moi pour me juger. J'avais les mains dans l'eau, et je frottais une assiette, certes, maladroitement, mais je m'y mettais quand même. En quelques mois de colocation, je n'avais jamais participé aux tâches ménagères, le plus souvent, je faisais autre chose, et je m'occupais de tout remettre en désordre après que Nina et Katya aient terminés.

« Je suis vraiment un imbécile, n'est-ce pas? » J'avais tourné la tête vers elle, et je la regardais dans les yeux. Ma franchise et mon sérieux allaient sûrement la désorienter quelques instants. Il était rare que je parle sans me montrer idiot et joueur, et surtout que je dise des chose qui concernent la vie de tous les jours. Il n'y avait qu'une personne avec qui je pouvais être sérieux vingt-quatre heure sur vingt-quatre et c'était ma petite soeur Ally. Je m'essuyais les mains dans un torchon et attrapais le paquet de Philip Morris derrière moi. Je me mis une clope dans la bouche, l'allumais, et replongeais mes mains dans l'eau, en tenant ma clope avec les lèvres, la tête en arrière pour qu'elle ne tombe pas. J'avais l'habitude de faire ça lorsque j'étais sur l'ordinateur à rien glander, mais je remarquai que Nina me lança un drôle de regard. Je tournais les yeux vers elle, et souris timidement, puis lâchais une bouffée de fumée.

Nina n'aurait jamais cru que cela puisse arriver un jour, mais ce soir Austin lui faisait de la peine. Oublié le garçon immature et arrogant, oublié celui qui fait des conneries et en est fier, oublié le Austin qui n'avait peur de rien. Assis sur le canapé, il semblait un peu perdu, et Nina se demandait vraiment ce qu'il avait. Maintenant que la partie engueulade était terminée, elle avait envie de comprendre. Après tout, ils avaient déjà eu des conversations intéressantes tous les deux même s'ils n'étaient jamais vraiment entrés dans les détails de leurs vies respectives. Assise sur le canapé à côté de lui, la jeune femme lui demanda s'il était certain que tout allait bien pour lui. Elle attendit une réponse de sa part qui ne vint pas. Comme perdu dans ses pensées, il refusait de parler. « Ho ! » fit Nina en le secouant un peu pour le réveiller. Tentative inefficace. En effet au lieu d'engager une conversation sérieuse avec elle, Austin se leva sans un mot en direction de la cuisine pour ... faire la vaisselle. La jeune femme arqua un sourcil. Austin, vaisselle ? Première fois que ces deux mots allaient dans la même phrase sans que celle-ci ne soit une réprimandation. La petite brune laissa passer quelques secondes pour être sûre qu'elle ne rêvait pas. « Attends, je reviens. » souffla-t-elle pour se rendre dans sa chambre. Elle chercha dans ses affaires un objet en particulier, ce qui ne lui prit beaucoup de temps puisque sa chambre était rangée niquel, maniaque comme elle l'était.

Une fois de retour, elle se positionna de sorte à prendre le jeune homme en photo. « Tu permets, faut que j'immortalise ça quand même. » Nina espéra lui décrocher un sourire. En effet, voir son colocataire les mains dans l'évier n'était pas donné à tout le monde. Peut-être que cela ne se reproduirait jamais. Sans doute Katya ne la croirait pas non plus lorsqu'elle lui raconterait, alors autant avoir des preuves à l'appui. Le jeune homme lui demanda tout d'abord si passer ses vêtements sous l'eau ne craignait rien. Nina haussa les épaules d'un air blasé l'air de dire "vas-y, au point où on en est." Elle le regarda faire. Pour une fois que les rôles étaient inversés. « Nettoie bien, homme. C'est pas bien lavé là. » fit-elle avec un sourire moqueur. Nina montra du doigt l'assiette. La jeune femme s'assit au tabouret du bar, observant Austin à l'oeuvre. Franchement c'était jouissif. Ce dernier se décida enfin à parler et son intervention fut plutôt surprenante. S'il était un imbécile ? « Non Austin, je ne crois pas. » assura-t-elle en secouant la tête tout doucement de droite à gauche. Austin n'était-il donc pas si sûr de lui qu'il le prétendait ? Cela ne faisait aucun doute. Et Nina le trouvait bien mieux comme ça.

Nina pouvait se montrer lunatique, et vraiment difficile à comprendre parfois. Soupe au lait qu'elle était, sa colère montait très vite, et retombait aussi vite qu'elle était arrivée. Dix minutes plus tôt elle était en train de balancer la chaine hifi par la fenêtre et de crier contre Austin et ses potes, et maintenant elle se retrouvait un appareil photo dans les mains à photographier l'énergumène en train de faire une tâche ménagère, wahou. Il fallait avouer que ce n'était pas un moment à louper, peut-être Nina était-elle dans un rêve ou en train d'halluciner, peut-être que tout ça n'était jamais arrivé dans la réalité, et qu'Austin était toujours ce garçon branleur qui ne fout rien à la maison. Ce dernier la tira de ses songes, lui répliquant que cet instant allait rester dans leurs mémoires pour un bon moment. Ça, il n'était rien de le dire. « Pince-moi je suis en train de rêver je crois. » blagua-t-elle en présentant son bras à Austin, avant de le retirer aussitôt en se rappelant que ce dernier avait les mains pleines de mousse. Pas qu'elle était contre de faire une bataille de mousse dans l'appartement, mais ses vêtements venaient déjà d'en voir de toutes les couleurs et puis, ce serait encore Katya et elle qui seraient de corvée pour tout nettoyer. Alors non. A moins qu'il les aide à tout ranger bien sûr. Apparemment, ce dernier décida de commencer la bagarre puisqu'il déposa de la mousse sur sa joue. Nina d'un geste vif enleva ce truc de son visage et fit comme si de rien n'était. « Tu cherches vraiment la bagarre en fait. »

Austin continua ce qu'il avait commencé, précisant à Nina qu'il avait l'impression de tout faire de travers. Ce qui n'était pas faux au premier abord ; la jeune femme avait l'impression qu'il faisait en réalité tout pour compliquer la vie aux deux meilleures amies quand celles-ci espéraient que cette colocation soit une réussite. Mais tout n'était jamais tout blanc ou tout noir, alors si leurs engueulades étaient souvent spectaculaires, celles-ci étaient contrebalancées avec des moments où Nina et Austin arrivaient à parler vraiment, sans faire les gamins ni se chamailler. C'était rare, mais cela arrivait. C'était peut-être même en train d'arriver là maintenant. Austin lui expliqua qu'il aimait bien la coloc avec elles, mais sentait que ce n'était pas forcément l'impression que lui transmettaient Nina et Katya. En même temps, cela paraissait logique. Nina avait en effet du mal avec cette colocation, qui s'avérait plus difficile que prévue. Il était loin le temps où elle vivait chez ses parents et se faisait chouchouter dès qu'elle le souhaitait. Cela lui manquait, mais ce déménagement avait marqué une sorte de changement dans sa vie, une nouvelle étape effaçant les épisodes précédents qui n'avaient pas toujours été exempts de difficultés. Nina descendit de son tabouret, et puisqu'Austin avait désormais terminé de faire la vaisselle, elle s'approcha de lui, s'empara du liquide vaisselle, se mit sur la pointe des pieds et commença à déverser le produit sur la tignasse d'Austin. « Mais si c'est réciproque. Tu vois, je te fais même un shampooing gratuit tu devrais être reconnaissant. » expliqua-t-elle tout en "lavant" les cheveux d'Austin le plus sérieusement possible alors qu'au fond d'elle elle avait juste envie d'éclater de rire. Il cherchait la bagarre, eh bien il l'avait trouvée.

Elle voulait que je la pince, je m'apprêtais à le faire, un sourire aux lèvres, quand elle retira son bras. Je voulais bien croire que ce qui se passait était vraiment inhabituel, presque incroyable. Qui aurait pu croire qu'un jour, moi, Austin Russell, plonge mes mains dans un évier et fasse la vaisselle. Comme quoi, tout pouvait arriver un jour où l'autre, mais je ne garantissais évidemment pas de faire la vaisselle quotidiennement. Déjà commencer par essayer, et je verrais par la suite à quelle fréquence m'y coller... A défaut de ne pas avoir pu mettre de la mousse sur le bras de Nina, je me vengeais sur la joue et lui en mis doucement sur le visage, pour qu'elle n'ai pas l'impression de recevoir une gifle... Elle enleva rapidement ce qui se trouvait sur ses joues et me dit que je désirais la bagarre. Je souriais et haussais les épaules, avec un air innocent sur le visage. Puis je riais.

« Non, du tout. En réalité t'avais un truc sur le visage, fallait que je te l'enlève... » Je riais de nouveau et tirais la langue à Nina. Je plongeais mes mains dans l'eau et fis glisser une assiettes sans faire exprès, je la rattrapai à la volé en évitant qu'elle n'explose sur les rebords de l'évier et la rinçais pour ensuite la déposer délicatement sur la plan de travail. Je remarquai alors que toute l'eau dégoulinait sur le plan de travail puis sur le sol. Je poussais un râlement et roulais des yeux. C'était vraiment compliqué la vaisselle en réalité...

« Hein? Quoi? Mais non arrêtes! Ils vont être super ternes après! » Hurlais-je en tournant sur moi-même et en essayant d'enlever le liquide que Nina laissait couler sur ma tête. Je me tournais face à elle, attrapais sa main, pris le liquide vaisselle et me collais à elle. Puis je la regardais, la tête baissée pour avoir ses yeux à autour des miens. Je souriais, et je ne bougeais plus. Je restais quelques instants à respirer en la regardant, puis d'une main, j'attrapais le chocolat qui se trouvait sur le plan de travail. Je l'ouvris et laissais la poudre se déverser sur la tête de Nina. Elle avait eut une très mauvaise idée en déclarant la guerre avec moi. Je posais enfin le pot et la regardais. Elle avait changé de couleur de peau en peu de temps, même pas besoin d'aller bronzer au Mexique ou de faire une opération à la Michael Jackson, mais cette fois pour devenir noire... Je riais et me courbais sur moi-même. Elle avait une telle tête de petite fille désorienté que c'en était trop mignon.

HS : Désolé pour tout le temps que j'ai mis à te répondre, je n'avais pas trop la tête et le temps pour...