Tandis que Scarlett répondait gentiment à ses questions sur Jules, aussi innocentes soient-elles, Andrew s'appliquait à manger proprement. Sa soeur lui répétait sans cesse de manger moins vite, car il semblait toujours manger à vitesse grand V. Juliet le comparait souvent à un hamster, avec ses grosses joues. Lui, il lui répondait simplement en tirant la langue, vexé. Il savait cuisiner, certes, mais perdait toutes ses bonnes manières une fois à table. Quand il sortait avec Lou au restaurant, il devait toujours faire preuve d'une concentration extrême, pour ne pas speeder. La première fois, Juliet lui avait conseillé en rigolant de faire un noeud à son mouchoir, pour ne pas oublier. Il ne l'avait pas écouté, et Lou fut choquée de voir que Andrew dévorer si vite ses assiettes. Depuis un an, il s'était amélioré, aussi devant Scarlett réussissait-il à l'écouter tout en mangeant convenablement. Pourtant, la jeune femme se faisait un peu vexante. Pas une seconde Andrew n'avait espéré que Jules soit arrivée pour lui. Il était heureux avec Lou, et n'avait pas besoin d'une ex qui vienne roder autour de lui pour se sentir adulé. Sa vie sentimentale lui convenait ainsi. Mais présenté comme son amie venait de le faire, il avait l'impression d'être un ex putatif, croyant que leur relation avait compté alors que, pour Jules, ce n'était qu'une histoire comme ça, qui ne méritait même pas une petite annotation, une petite marque dans le livre de sa vie. Il cacha sa déception, mais l'ambiance gênante devint bien vite palpable. Seulement Andrew s'en voulait, de réagir ainsi. Ce n'était pas la faute de Scarlett. « Ah d'accord, ça va alors. J'espère qu'avec le temps elle et moi pourrons devenir amis » Il n'imaginait pas cela possible une seconde, ni Jules ni Lou n'accepterait. Mais il fallait bien clore ce sujet.

Bien vite, ils dérivèrent sur leur voyage, les lieux qu'ils voulaient visiter, ils planifiaient furtivement tout en finissant leurs assiettes. « Tu souhaites un dessert ? » lui proposa-t-il, en constatant qu'elle avait terminé à son tour. Lui, ne disait jamais non à un dessert, mais si elle n'en prenait pas, et que lui si, la situation aurait été bizarre. Malheureusement, il ne pourrait pas se passer de sa touche finale sucré, sans ça les repas sonnaient toujours incomplets. Mais il avait prévu des bonbons dans sa valise, à l'hôtel, ça devrait faire l'affaire.

Que Scarlett se base sur lui pour les choix culinaires, pour échanger en italien avec les personnes locales ... n'était pas anodin pour Andrew. Il se retrouvait avec son lot de responsabilités, d'un coup, et prenait cette charge très au sérieux. Il était rare qu'on se repose sur lui, et que Scarlett le fasse sans crainte le touchait. « Due tiramisu per favore » demanda-t-il donc à une serveuse passant par là.

Un peu plus tard, ils retournèrent à l'hôtel, bien fatigués. Ils avaient décidé de dormir assez, mais pas trop, pour profiter pleinement de la semaine. « Merci Scar, c'est gentil de me dire ça. Bonne nuit ! » dit-il en souriant, avant de disparaitre dans sa chambre. Il envoya un dernier texto à sa petite amie, avant de s'affaler dans son lit. Au moins, la literie était bonne.

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Sept jours s'étaient écoulés. Ils étaient passés si vite que Andrew restait persuadé qu'ils en avaient raté certains. Que mercredi était venu juste après le lundi, que vendredi s'était fait la malle, mettant le samedi à la suite du jeudi. Ils étaient de retour, à l'aéroport, déjà. Hier, ils avaient compris que leurs achats de souvenirs et cadeaux étaient trop importants, et avaient décidé d'acheter une troisième valise, pour y caser toutes leurs emplettes. C'était un trait de caractère qu'ils avaient en commun, ne jamais compter quand il s'agissait des amis, dépenser plus que de raison, et réaliser trop tard qu'il n'y avait pas de place dans leurs valises pour ces paquets de pâtes ou ce petit tableau. « Alors Scar, après ces sept jours italiens, je veux savoir ce que tu as préféré ! » Il ne l'interrogeait pas tout de suite sur son choix amoureux. Ce sujet resta tabou toute la semaine, mais désormais Scar devait y faire face, elle l'avait décidé ainsi. Cependant, ils foulaient encore le sol de Dante et de Vinci, la magie italienne pouvait continuer encore quelques instants. Ils attendaient devant la porte d'embarquement, leurs bagages étaient déjà enregistré. Et pour le trajet de retour, ils avaient un tas de souvenirs en tête à évoquer. « Ce soleil va me manquer énormément. Il doit faire un temps de chien à Magnolia. Pourtant je suis bien content de rentrer ... mais ne prends pas ça pour toi, j'ai bien aimé ce voyage avec toi ! » ajouta-t-il sur un ton précipité, avant que son amie ne se vexe. Mais elle devait bien se douter que Lou lui manquait énormément. Pour preuve, il avait acheté pour elle dans l'ordre : une parure de rubis chez un petit bijoutier du Ponte Vecchio, un petit tableau dans la boutique du Palazzo Vecchio, représentant le palais et ses jardins, une représentation miniature de David, un tablier de cuisine avec la représentation de la Toscane, des cartes postales représentant les monuments importants de la ville, un livre de recettes avec les spécialités Toscane, et un tas de photos de lui.

Andrew et Scarlett n'avaient pas fait les quatre cents coups à Florence. Ils avaient seulement enchaîné les visites, et profité un maximum de ces courtes vacances. A l'instar de Rome qui ne s'était pas construite en un jour, Florence ne se visitait pas en une semaine. Pourtant, Andrew était plutôt satisfait de son séjour, surtout en sachant que d'habitude, il n'aimait pas le tourisme. Mais Florence avait quelque chose de magique. Au final, on pouvait dire qu'ils avaient fait bon usage de ce cadeau de tombola.

Tout en rejoignant les portes d'embarquement, Andrew écoutait son amie lui confier ses meilleurs souvenirs. Elle évoqua Lou, par deux fois, prénom qu'ils n'avaient pas prononcé durant toute la semaine. Mais loin des yeux ne voulait pas dire loin du coeur, et Lou n'avait pas quitté le sien une seule seconde. Il s'était appliqué à ne pas saouler Scar avec sa belle, évoquer sa petite amie aurait pu rappeler à la jeune fille les deux hommes qu'elle avait mis de côté pour la semaine. « Ne fais pas l'innocente, je sais que ces touristes n'étaient pas les seuls à prendre des photos ! Et si jamais tu la postes sur Facebook à notre retour, je posterai celle où tu t'extasies devant le David ! » Certes, ils s'étaient bien à la Galerie de l'Académie. A l'origine, Scarlett avait commencé à vanter, à voix haute, la beauté du David, car une vieille à côté d'eux trouvait honteux que cette statue d'un homme nue trône dans un musée. Mais Andrew n'avait pas su résister à l'envie de la prendre en photo. « Je crois que le meilleur moment, ça reste cet italien lourd et bof qui t'a dragué, sur la piazza del Duomo, et que je t'ai laissée seule lui te débarrasser de lui » Il sourit, fier de sa bêtise. Il s'était éclipsé discrètement et Scarlett avait dû lui expliquer seule qu'elle n'était pas intéressée. Par la suite, elle avait fait vivre un mauvais quart d'heure à Andrew, mi énervée mi amusée. « Oh oui j'ai hâte de la revoir, je lui ai dit de ne pas venir me chercher à l'aéroport ... Mais j'espère qu'elle y sera quand même ! » Il eut un rire nerveux, il se sentait digne d'une mauvaise série à l'eau de rose. Il se demanda si Scarlett - quant à elle - avait fait le point sur sa situation amoureuse et mouvementée. Mais les portes d'embarquement ouvrant alors, il préféra garder cette question une fois qu'ils seraient installés. La réponse de Scarlett ne se résumerait probablement pas à quelques mots.

Une fois dans l'avion, il s'apprêtait à ré aborder le sujet Natlias, quand Scar le devança en sortant un cadeau surprise de son sac. Andrew resta d'abord sans voix devant ce présent inattendu, puis s'empressa de l'ouvrir. Quelle ne fut pas sa surprise, de découvrir un livre de recettes et une photo d'eux. Il ne savait même pas comment elle avait pu la faire développer, il en était d'autant plus touché. Son regard resta posé quelques instants sur la photo, sur ce soleil d'un jaune si brillant, et sur la beauté des jardins, derrière. « J'adore cette idée, nous pourrons organiser un grand repas, et revêtir ces tabliers que nous avons acheté sur le marché ! » Il en jubilait déjà. Il décida alors de sortir de sa poche son propre cadeau, bien moins glorieux il fallait le dire. « J'ai moi aussi prévu un petit quelque chose pour toi, en souvenir du voyage, mais c'est beaucoup moins bien que le tien » il s'excusait d'avance. Il lui avait acheté un bracelet en perles de Murano, chez un des bijoutiers du Ponte Vecchio. Mais il n'avait joint aucune photo souvenir pour personnaliser le tout.

Déjà, l'avion s'apprêtait à décoller. Andrew regarda par le hublot, prononçant mentalement quelques paroles d'adieu à la Toscane. « Alors, prête à retrouver Magnolia ? et ce fameux chois que tu avais à faire ? » Non, il ne perdait pas le Nord, et surtout il avait hâte de savoir si Scarlett en avait fini avec ces tourments.

Au fond, Andrew espérait bien que Lou ne l'avait pas écouté. Il avait tellement envie de la voir, qu'il se sentait incapable d'attendre les quelques minutes qui séparaient l'aéroport et le quartier. Il voulait la voir à son arrivée, qu'elle lui saute dans les bras, quitte à le faire tomber. Il voulait la serrer fort et se gaver de son parfum, oui il était en manque sévère de Lou. Il avait réellement pris conscience de sa dépendance, avec ce voyage. « Bon d'accord, j'espère qu'elle sera là à m'attendre » finit-il par admettre.

Une fois dans l'avion, bien installés et cadeaux échangés, Andrew remit inévitablement le sujet de la vie sentimentale de Scarlett sur le tapis. Il avait promis de ne pas en parler durant une semaine et s'était correctement exécuté. Mais un deal était un deal, Scarlett ne pouvait pas se défiler plus longtemps, et la polyandrie n'était toujours pas autorisée dans le quartier. Et effectivement, Scarlett avait rempli sa part du marché. « Je suis content pour toi, tu ne pouvais plus supporter cette situation bien longtemps ... Tu me tiendras au courant » conclut-il. Il ne voulait pas être trop curieux, Scarlett lui dirait en temps voulu qui était son élu. Même si, bien sûr, il mourrait d'envie de connaître son identité.

Leur voyage fut alors assez silencieux. Lorsque le chariot repas passa entre les sièges, Andrew se laissa tenter par des biscuits à la confiture, il avait toujours été friand de ce genre de sucreries. Mais déjà, il apercevait l'autre côté de l'Atlantique. Andrew n'avait pas vu le temps passer, probablement trop absorbé par ce film qu'ils avaient projeté. Il avait dû aussi s'assoupir, une fois ou deux, car la vieille dame devant lui avait fini par le secouer, gênée par ses ronflements. « Nous y revoilà ! » Sans plus tarder, ils sortirent de l'avion. Comme prévu, Lou se trouvait là, et Andrew courut pour la prendre dans ses bras. Idéalement, il aurait voulu la survoler et la faire tourner dans les airs. Malheureusement, l'air chaud italien n'avait pas fait pousser ses biceps. Alors, il se contenta de l'embrasser longuement mais pas trop, afin de ne pas mettre leur amie dans l'embarras. Lou fit bien sûr une remarque amusée sur la présence d'une 3ème valise de cadeaux, et Andrew se contenta de lui tirer la langue. Heureusement, tout rentra dans le coffre de la petite voiture de sa petite amie, et les deux touristes entreprirent alors de lui raconter, le long du trajet, les grandes lignes de leur voyage inoubliable