Silencieuse, Katarina gardait les yeux rivés sur Sara. On aurait pu la croire pensive, mais en réalité l'Estonienne avait tout d'une examinatrice de jeu télé. Le moindre mouvement de son amie était passé au crible, aucun sourcillement ne lui échappait. Ainsi, elle vit le visage de l'adolescente s'éclairer. Son regard se faisait plus sûr, sa pose plus affirmée. Comme si la tortue sortait enfin de sa carapace pour faire face au monde. Elle avait finalement trouvé les mots qu'il faut, en fin de compte. Sara lui avait donné du fil à retordre, leurs deux opinions s'étaient souvent croisées durant cette conversation, sans jamais s'épouser. Elles trouvaient enfin un terrain d'entente où se retrouver. Et Sara savait que Katarina était là pour la soutenir, dans sa quête. Une véritable amie dans le monde d'hypocrites auquel elle se frottait. Ce n'était pas un luxe.

« Oui, serveuse, c'est une bonne idée par exemple. Il y a d'autres cafés ou bars dans la ville, ça ne te coûte rien de demander ! » Katarina se garda bien de proposer un petit boulot à l'accueil de son agence. Réaliste, un tel emploi n'avait rien d'attrayant. Et puis, l'été, l'agence serait probablement encore plus calme qu'à l'accoutumée. La jeune femme en profiterait pour revoir - avec l'aide d'Harrison - leur stratégie ici, à Magnolia, où les célibataires se terraient chez eux, seuls, bornés. Mais si Sara était barman dieu sait où, elle prendrait bien sûr le temps pour venir la soutenir, et lui commander un café, voire un petit quelque chose à manger.

En parlant de repas, Katarina regarda soudainement l'horloge de la cuisine. Au même moment, la grande aiguille vient rejoindre le douze, et le son du coucou se résonna. « 18 heures, mon dieu déjà ! Je parle et je parle, et j'oublie de préparer le repas pour mon mari ! » Affolée, elle se leva à la va vite, attrapant son sac d'une main, laissé sur la table de la cuisine, et ses clés de voiture de l'autre. « J'ai totalement oublié le rôti que j'avais commandé pour le diner. C'est détestable Sara, mais je vais devoir te mettre à la porte. Je te dépose au passage ? » Katarina se sentait rude, de mettre ainsi une invitée dehors. Mais il était déjà tard, et on objectif d'épouse banlieusarde parfaite passait par la préparation d'un repas prêt pile au moment où son mari rentrerait.