Francisco Goya a écrit : ❝ Le fantasme, abandonné par la raison, produit d'impossibles monstres. ❞

Mes pas tapaient le bitume depuis longtemps. Combien de temps, je ne savais pas. J'errai sans raison, comme un damné dans les Enfers. J'avais envie de me jeter tête la première dans le Styx et d'ouvrir grand la bouche. M'abreuver de ce liquide funeste, emplir mes poumons de ce poison, sentir mon corps adhérer aux profits d'Hadès et lui offrir mon âme.
La peur ne m'avait pas quittée, depuis cette fois-là. J'avais été stupide de croire que l'amour pouvait me sauver. J'avais été imbécile de mêler Lucy à ma débâcle. Pourquoi diable avais-je retrouvé le goût à l'espoir ? Ne pouvais-je pas me contenter d'observer et de me taire, en attendant que les Parques s'amusent avec ma vie ?
Sans savoir exactement comment, j'avais empêché le Monstre de me nuire. Mais je le sentais toujours, à l'Intérieur. Il grognait doucement, affamé, griffes acérées. Il avait faim, Il reviendrait. Saurais-je le tenir à l'écart, cette fois encore ?
Dans mes poches, mes phalanges craquaient nerveusement. Je tournais en rond comme un poisson dans son bocal, le recul m'était interdit, la réflexion aussi. Mon cerveau s'était emmuré et je demeurais face à une porte close, dont je n'avais pas la clé. D'une certaine manière, cela me rassurait, mais je craignais de récupérer mes capacités avant le retour de la Bête. Et sans ma malice, j'étais un enfant qu'on livrait à l'ennemi tout juste bon à verser des larmes en silence et à obéir.
Je ne savais pas pourquoi mes pas m'avaient emmené jusqu'ici. Il n'y avait personne, il était trop tard. L'ombre de la nuit avait succédé aux douces couleurs du soir. Les roulettes des skate-boards résonnaient encore, même si les pentes étaient désertes. Je soupirais, désolé de ne pouvoir être aussi insouciant que les autres. L'image de ma mère, inerte au bas des escaliers traversa mon esprit, et je réprimai un sanglot. Je m'en voulais, j'en voulais à la vie...
J'allais repartir pour erreur comme le dément que j'étais lorsqu'une silhouette glissa quelques mètres devant moi. Nos regards se croisèrent, et je le reconnus aussitôt. Pénombre ou pas, c'était lui, c'était son aura. L'Autre le reconnaissait aussi. Jay Black.
Un frisson joua avec ma colonne, et je déglutis bruyamment.

La nuit commençait à tomber lorsque Jay quitta le Gordon Coffee. Il avait la fin d'après midi avec des amis, bien rigoler autour d'un bon café bien chaud. Bien que le mois d'Avril soit arrivé le temps n'était pas à la canicule. Fermant son manteau, Jay décida de passer par le skatepark pour rentrer, changer de chemin pouvait être intéressant. Et puis il y avait peut être encore des jeunes là bas et il pourrait les regarder cinq minutes.

Le chanteur s'aventura donc sur le terrain de la jeunesse roulante mais aucune âme ne semblait être dans les lieux à part la sienne. Enfin c'est ce que Jay pensait avant d'apercevoir une ombre et croiser le regard d'une personne qu'il n'aurait jamais penser voir ici. Julian King, dont la terreur se lisait sur son visage. Jay n'avait jamais trouvé le courage depuis l'anniversaire d'Holden d'aller s'excuser de l'avoir violemment frappé. Le pauvre avait du être très perturbé par Jay vu l'état dans lequel il se mettait rien qu'en le voyant. Enfin, le chanteur n'avait aucune animosité envers Julian alors franchement ce dernier n'avait rien à craindre de lui.

- Bah qu'est ce que tu fous là Julian ?

C'était rare d'ailleurs de le voir en dehors de chez lui, même si d'après Dirty Secret il avait renoué avec la population. Notamment Lucy Roberts que Jay connaissait vaguement. C'est pour cette raison que Jay était étonné de voir Julian ici, à cette heure.

Ma joue. Je la sentais qui brûlait d'un souvenir trop intense, trop douloureux. Le feu se répandait dans mes veines, ce brasier désagréable, comme une plaie qui démange.
Jay évoquait bien trop de choses pour moi. Quelques meilleures mais surtout une ribambelle de pires. Les raisons de la morsure sur sa joue, souvenir amer, étaient parfois un peu vagues. Elles dataient d'un temps où je n'appréhendais pas le décès de... ma mère de la même manière. Le combat n'avait pas lieu, je jouais alors dans les vestiaires comme un enfant s'amuse avec une balle, à profiter sans se soucier de la réalité, à enfiler sa visière et à penser sans scrupule à l'oubli. L'alcool, la dope, ces stupides drogues qui me berçaient dans l'illusion la plus totale avaient été mon quotidien. Jusqu'à ce que Jay arrive. Pourquoi m'avait-il frappé ? C'était une question franchement inconvenante. Je n'osais pas tout à fait avouer que j'avais pu, même dans un moment de faiblesse ou d'incohérence, embrasser Holden. Et pourtant, ç'avait été le méfait dont il m'accusait. Alors soit, de toute façon, il existait bien des raisons de me démolir, alors pour un baiser ou pour autre chose...
J'avais eu mal, l'âme noyée par l'alcool réveillée par ses poings. Jay avait eu raison : me conforter dans l'oubli et la débauche ne me sauverait pas. Je devais assumer mes actes, si horribles soient-ils. J'étais un King, et si mes mains m'avaient trahies, si elles s'étaient adonnées à un tel péché, moi, je pouvais toujours m'efforcer de garder le contrôle.
Mais si au fond de moi, je pouvais remercier Black, en superficie, mon corps n'était géré que par les réminiscences de mes pommettes écrasées par ses phalanges. Et j'avais peur, ni plus ni moins. Jay était dit un peu fou, sorti d'un asile psychiatrique. Lucy était la victime potentielle et bien alléchante qu'Il avait choisi. Pourquoi ne pouvais-je pas être la proie démunie de Jay Black ?

-Je... marche, et toi ? avais-je répondu en forçant sur ma voix pour traduire une assurance imaginaire.

On disait qu'il ne fallait pas montrer aux animaux qu'on les craignait, sans quoi ils s'amusaient à nous faire languir plus encore avant de venir déchiqueter notre nuque à coup de crocs bien aiguisés. Peut-être que Jay était de cette espèce-là, comme Lui. Après tout, Il semblait l'apprécier, le Black. Bien plus que moi.

Julian marchait. Ca paraissait logique en effet, vu l'endroit et l'heure il n'y avait pas tellement d'autre activité à faire. Jay rentrait bien chez lui et par conséquent marchait aussi. Sauf que Julian n'avait pas l'air de rentrer chez lui. Le chanteur avait plutôt l'impression qu'il attendait vaillamment qu'il se casse, la lueur dans les yeux de son interlocuteur faiblement éclairé était loin de montrer l'assurance dont Julian voulait faire preuve.
Cela dit leur rencontre n'était surement pas anodine, il n'y avait pas de hasard dans la vie et si Jay continuait son chemin comme si ne rien était il s'en voudrait d'avoir manquer l'occasion de s'excuser pour les coups.

- Je rentrai chez moi

Jay soupira et se passa une main dans ses cheveux hérissons, en essayant de trouver le courage de hisser le drapeau blanc. Car honnêtement, Julian n'avait rien fait de mal au fond, il avait juste embrasser Holden sous ses yeux, ce qui ne révélait pas d'un crime étant donné que à l'époque ce dernier et Jay ne sortait pas ensemble...

- Ecoute Julian...c'est sans doute trop tard depuis le temps mais...Je te présente mes excuses pour t'avoir tabassé...

Pas pour l'avoir giflé lors de la fête de Noël, ça non il l'avait quand même mérité en insultant Jersey. Il espérait que Julian lui pardonne au moins ce méfait, même si Jay n'était plus à ça près.

Un instinct primaire me poussait à fuir. Devant moi, se tenait un prédateur et j'étais déjà passé entre ses griffes, et avais déjà senti ses crocs dans ma chair. J'avais été sa chose, l'histoire de quelques secondes, et mon corps ne pouvait l'oublier. Alors oui, mes jambes cherchaient à faire demi-tour, à courir, à s'éloigner. Mais moi, être raisonné et raisonnable, quand bien même un peu perdu, jeté d'un train à pleine vitesse, souhaitait rester là. Faire face. Prendre des coups ? J'avais peur, mais peut-être aurait-ce pu m'aider à revenir au monde des vivants, comme la dernière fois.
Donc, l'âme écartelée entre ces deux idées antagonistes, celle de l'animal et celle de l'homme, je restai là. Planté comme un i dont la barre tremblait un peu. Mon regard se voulait assuré, mais je me doutais bien que l'onde d'incertitude qui me traversait devait faire briller mes pupilles. Lui, Black, me semblait déjà bien plus enclin à parler sans bégayer. Il répondit sans hésiter qu'il rentrait chez lui.
J'étais déçu, et Lui aussi le serait certainement. Non, Jay Black ne cherchait pas à trouver une brebis égarée pour l'égorger d'une main de maître. Non, Jay Black ne revenait pas d'une orgie sanglante lors de laquelle il aurait été pris d'une hilarité témoignant tout le monstre qu'il était. Non, Jay Black ne sentait pas le crime à plein nez. Mais oui, Jay Black avait l'air d'un garçon tout à fait banal, qui rentrait chez lui après avoir dégusté une bonne bière au PMU le plus proche.
Il y eut un silence qui ne m'étonna pas. Je ne savais pas quoi dire, et Jay non plus. Mais pour autant, ni lui ni moi ne bougions. Je gardais un œil sur lui, les mains toujours enfoncées loin dans mes poches, jusqu'à ce qu'il tienne à s'excuser. Je déglutis bruyamment en entendant le mot qui m'avait tant fait souffrir. « Tabassé », que ne tienne la douleur, mon nom avait été sali et humilié. J'étais le King de rien du tout, écrasé comme une mouche par le Black.
J'avais enfin de répondre sèchement qu'il n'en était pas question ; qu'il m'avait laissé inconscient, défiguré, l'âme et la mâchoire en miette. Mais ma bouche ne m'obéit pas.

-Ouais, ok.

J'eus plutôt tendance à croire que je ne gobais pas un mot de ce qu'il me disait. La teinte de mépris et de peur mêlée donnait à ce que j'avais dit une certaine contenance. Certes, mon ton avait été un peu sec, mais à comparer avec ce que j'aurai pu dire d'autre, j'étais comme un chaton qui acquiesce bien sagement dans la gueule de sa mère. L'autorité que possédait Black m'effrayait. Cette peur languissante juste sous mon épiderme, j'espérai un jour qu'elle disparaisse. Mais je doutais réussir à l'ôter avec quelques sincères excuses.

Cette peur qui enveloppait Julian commençait légèrement à agacer Jay. Il allait pas le bouffer, ou le frapper comme ça. D'accord ça devait être en quelque sorte traumatisant de se faire tabasser mais bon le chanteur n''était pas méchant d'habitude. Et si Jay hausserait le ton tout de suite c'était sur que Julian ferait pipi dans son pantalon.
C'était même sans doute la peur qui avait obligé Julian a accepter ses excuses, sans doute en croyant que Jay allait le frapper. Ce dernier soupira et attrapa le poignet de son interlocuteur pour lever son bras et guida sa main jusqu'à sa joue, la frappant comme si Julian était une sorte de marionnette. Ca manquait de force c'était certain comparé à la branlé que Jay lui avait mise.

- Hey les pédés dégagez d'ici !

D'un point de vue extérieur c'était certain qu'il y aurait des gens suffisamment débile pour s'imaginer des choses. Jay avait pourtant parier sur sa chance que personne ne passerait dans le coin. Sauf qu'il avait oublié que la chance l'avait quitté depuis longtemps. Le chanteur lâcha le poignet de Julian, pivotant vers celui qui venait de les traiter de gays.
Bon en fait il était pas tout seul, mais avec sa petite troupe tout de même qui était prête à se faire des joints tranquille au skatepark. C'était cependant pas l'effet de groupe qui allait effrayer Jay. Il en fallait beaucoup plus pour ça. Lui qui était seul face au reste du monde depuis son adolescence ce n'était pas cinq petites cons qui allait le faire fuir.

- Non on est très bien ici

Il ne chercha même pas à démentir sur leur véritable relation, les cons étaient têtus et surtout pensaient avoir toujours raisons. Ca aurait été du blabla en vain. Et son petit doigt lui disait que sa réponse ne plaisait pas à l’assemblée.

Que cherchait-il à faire ? Pourquoi s'approchait-il de moi ainsi, vil reptile à la mue maléfique ? J'aurai aimé bouger, me débattre, retirer mon poignet de sa gueule humide, mais j'étais tétanisé. Un pantin, un Pinocchio contrôlé par cet animal. Je crus retenir ma respiration, effrayé, abasourdi, abandonné par tous mes moyens. Jay mima avec ma main un coup sur sa propre joue, mais j'eus du mal à comprendre ses intentions. Je me leurrais peut-être de croire qu'il cherchait une fois de plus à me convaincre. Mais si moi je me trompais alors eux, ils se fourraient le doigt dans l’œil, et profondément. Eux, ou quelques gamins désœuvrés qui vinrent à passer et à prendre les deux ennemis jurés pour des pédés. J'eus à peine le temps de jeter un regard aux inconnus que le Black avait déjà lâché mon poignet et s'était avancé vers eux. L'air s'insinua à nouveau dans mes poumons, et mon cœur se calma un peu. Jay s'était approché des gosses, qui, ce qui ressemblait fort à un joint entre les doigts, se marraient de la pseudo-découverte qu'ils avaient faite. « Non on est très bien ici » rétorqua-t-il sans ciller.
Je soufflais en silence dans la nuit, à regarder à travers la buée blanche ces deux mondes qui s'affrontaient. La peur battait encore dans mes veines, mais j'étais contaminé par les gestes de Jay et toute l'étrange volonté qu'ils exprimaient. Peut-être devais-je le croire ?
Les autres, sans se démonter, firent un pas en avant. Ils lâchèrent une injure accompagnée d'un crachat au pied du Black. Je sentais la pression grandir, ces deux prédateurs se cerner doucement. Evidemment, l'autre ne pouvait sentir l'aura noire et instable de Jay Black, mais je savais, moi, les ravages que cet homme pouvait faire.
Le gamin arma son bras menu, et le dirigea vers le brun. Cependant, il ne l'atteint pas. Car je tenais son avant bras dans le creux de ma main, n'ayant en réalité eu que peu de mal  à contenir sa force. Et dire qu'il pensait blesser Black avec cette misérable menotte. Je me tournai vers le brun et lui intimai :

-Viens, on y va.

Ma peur ne s'était pas envolée, bien au contraire. Elle continuait de glisser sous mon épiderme, carnassière et vorace. Mais j'étais certain qu'une bagarre n'arrangerait rien. Le môme, qui avait premièrement eu l'air stupéfait de mon intervention, se reprit et lâcha quelque chose qui ressemblait à : « Oh, tu viens au secours de ta princesse, sale tarlouze. »
Un battement, un second, un de trop. Dans mes tempes, le sang tambourina. Dans mon cœur, la colère planta ses crocs. Je jetai à l'abruti un regard noir et n'attendis pas une seconde de plus pour lui asséner une droite. Sous la surprise, il tituba et trébucha. Les autres grognèrent comme des gorets et en guise de réponse, je lâchai un peu le prédateur en moi.

-Allez voir ailleurs si j'y suis, sifflai-je entre mes dents.

En tentant de garder contenance, les gamins sacrèrent à voix basse et filèrent après avoir relevé l'autre imbécile. Je me tournai vers Jay une seconde, mon regard toujours noir. Quelques secondes passèrent avant que l'adrénaline ne retombe et que la peur reprenne le dessus. Je fis un pas en arrière et extirpai une clope. J'en proposai une au Black et allumai la mienne.

Comme il pouvait s'y attendre de cerveaux aussi peu évolué, où la lâcheté était leur deuxième prénom à tous, la réponse de Jay eut comme réponse de les faire salir le sol avec leur microbe. Dire que dans certains pays un flic serait passé ils auraient eut tous une bonne amende dans le derrière. Mais bon c'était pas cracher par terre qui allait faire fuir le chanteur. En fait il avait surtout une folle envie de rire tellement c'était pitoyable.
De son côté, son allié temporaire lui intimai de partir, plutôt que de faire éclater une bataille. Ca serait tellement drôle de leur faire savoir qui était le patron ici, que le skatepark était loin d’appartenir à ce groupe de cas sociaux. Mais bon, Jay n'avait pas envie de terroriser Julian plus qu'il ne l'était déjà envers sa personne. Il s'apprêtait donc à partir comme si bien suggérer mais l'autre con l'ouvrit, sa bouche ainsi qu'un couteau. Jay eut un rictus, tiquant sous ce surnom fabuleux de "princesse". Sous ses yeux Julian avait arrêté le bras du gars, si fragile qu'il serait aisé de le casser.
Julian n'avait pas non plus apprécié les paroles et son poing avait joliment cogné la joue du petit connard qui s'étala comme une merde sur le sol. Un sourire en coin s'afficha sur les lèvres de Jay, alors que du regard il les suivaient, courant comme des lâches. Il soupira devant cet interlude inutile mais qui avait au moins eu le mérite de l'amuser. Voir le couteau ne l'avait même pas fait frémir, ce n'était rien d'autre qu'une simple lame et puis il se doutait bien que Julian ne serait pas resté sans rien faire. Il avait beau avoir le chanteur en amertume ce n'était pas un con.

Son partenaire lui proposa une cigarette que Jay refusa, il ne fumait pas, vu sa santé et les cochonneries qui circulaient dans son sang ça ne serait pas vraiment top.

- Alors maintenant que tu as fait fuir les méchants, on y va quand à ton château mon cher prince ?

Bien évidemment il avait dit ça en blaguant. Il n'était nullement intéressé par quoique ce soit avec Julian, la seule personne qui avait ses intentions sexuelles était Holden.

La fumée blanche vint se découper dans le néant glacial de cette nuit interminable. A croire que le destin avait décidé de se jouer de moi, et de me récupérer de ma baignade dans le Styx ; c'était bien plus amusant de me voir coexister avec un autre damné, et de nous voir apprécier la langueur d'une vie un peu fade. Désormais, j'étais en compagnie de Jay Black, et ce terme me déplaisait plus que quiconque n'aurait bien voulu le croire. Le tabac ne me procurait aucun calme ; mon sang continuait de s'agiter sous ma peau, mu par la peur. Les souvenirs ne semblaient donc jamais enclins à disparaître ? Ou alors, avais-je banni le pardon de mes aptitudes ? Jay ne me semblait pourtant pas bien menaçant, et même, il s'était platement excusé. Pourquoi ne réussissais-je pas à gommer ce passé qui continuait de me détruire doucement, pour jeter un nouveau coup de crayon ?
Je tirai avidement sur ma cigarette qui se consumait plus vite encore que mon cœur abîmé. L'incandescence dans la nuit rappelait la lueur dans mes yeux. Aucune pitié, j'avais jeté mon poing à travers la mâchoire d'un inconu. Et même si j'avais plus de raisons que prévu d'avoir agi ainsi, je ne pouvais que m'en vouloir. La violence ne menait à rien. J'étais pourtant censé l'avoir compris à mes dépens...
Je levai un regard accusateur à Jay ; je n'appréciais pas du tout son ton. L'ironie du Black débordait d'insolence et d'impudence. Mais surtout, je compris enfin pourquoi je détestais ce type. Il était l'imprévision incarnée. Je ne pouvais rien contrôler de lui, rien anticiper. Et c'était sans nul doute ce facteur qui réveillait en moi quelques sombres sentiments. Il pouvait me frapper, il pouvait s'énerver. Et qui sait, à l'appel de son ombre enragée, la mienne ne viendrait pas s'éveiller à son tour. Histoire de jouer avec un complice amusé et qui se fiche bien des réalités.

-Arrête ça, si t'avais frappé, ça aurait fini en bain de sang, Black, crachai-je en le regardant droit dans les yeux.

La douleur dans mes phalanges vint me rappeler que j'avais failli m'énerver aussi. Heureusement, j'étais encore bien plus à même de garder mon sang-froid que Jay. Ces amateurs du vandalisme avaient finalement eu bien de la chance que le temps ait joué en défaveur des poings du chanteur. Un nez cassé valait cent fois mieux qu'un séjour prolongé dans le service des comateux à l'hôpital.

Pour la tentative d'humour c'était loupé. Julian n'avait apparemment pas trouvé drôle ses paroles et d'ailleurs accusait indirectement Jay d'être un fou furieux. Il ne fallait quand même pas exagéré, le chanteur n'était pas non plus suicidaire de se battre à mains nus contre un mec qui avait un couteau. Encore si il avait eu le sien sur lui...Enfin en y réfléchissant il aurait eu peur d'effrayer son comparse. Mais quand même ça le vexait que Julian ait une image aussi dégradante de lui.

- A t'entendre on dirait vraiment que je suis un assassin

Ce qui s'était passé à l'anniversaire d'Holden, Julian ne comptait ne pas passer l'éponge dessus. Ce qui était dommage car en voyant le magnifique duo qu'ils faisaient, ça aurait pu faire une belle amitié. Adrian aussi pensait que Jay était une pourriture et pourtant les choses avaient faits qu'ils avaient du se côtoyer, enterrer la hache de guerre pour finalement devenir en quelque sortes des amis.
Le chanteur ne comptait pas obliger Julian à l'apprécier, non ça c'était les sans amis qui faisait ce genre de choses. Jay soupira et se passa une main dans les cheveux, se demandant pourquoi il restait ici, avec ce type qui le regardait comme si il comptait le tabasser dans la seconde qui suivait. Ce qui était loin de plaire à Jay. Ce genre de regard il l'avait supporté durant un bon moment lorsque DS avait révélé qu'il sortait d'un hôpital psychiatrique le rendant finalement exécrable à la fin.

- Ecoute Julian, je te veux aucun mal ok ? Je me suis excusé pour ce que je t'ai fait tout à l'heure et je le pense vraiment alors arrête de me regarder avec cette tête là parce que vraiment...ça me vexe

Lanca t-il en fixant son interlocuteur.

Un assassin ? Oui, c'était certainement ce que je croyais. Du moins, même s'il n'avait pas encore mis ses poings à disposition d'une mort violente, je le sentais prêt à ôter le souffle d'un inconnu avec la même aisance que s'il avait à terminer une tasse de café noir. Peut-être me trompais-je. Certainement, même. J'espérais, à vrai dire, être totalement dans le faux. Jay Black était violent, désemparé, démuni -parfois- d'une conscience, ce qui le rendait totalement anormal et pathologique, mais il n'avait encore tué personne. Enfin, à ma connaissance. De nombreuses fois, ses phalanges avaient offert un aperçu de cette faucheuse glacée, je m'en souvenais alors parfaitement, mais il s'était gardé de tuer. Quelle adorable attention !
J'expirai la fumée blanche de mon tabac. Je me sentais alors revivre. Cette nicotine si néfaste m'éclairait l'esprit comme si l'on pointait un spot sur ma cervelle à nu. Les gens pouvaient être fous autour de moi, il n'y avait que quand mon sang portait les marques du goudron que je pouvais les reconnaître dans la foule. Alors une fois encore, à fumer et m'enivrer d'extase, je réalisai que la scène aurait pu être bien pire. Jay aurait pu m'ôter les yeux sans que j'eusse le temps de geindre ou de fuir. Il aurait pu démolir la petite bande téméraire, les arracher de la surface de la Terre comme quelques ronces et orties dont les piquants n'effrayaient plus. Il y aurait pu avoir un coup de couteau, un cocktail Molotov, une batte de base-ball, un poing américain. Mais non, il n'y avait rien eu de tout cela. Juste un enfant tiré de force d'un rêve un peu trop mielleux. Alors je devais bien convenir que même si la peur continuait de sévir dans mes tripes, les obligeant à se contorsionner douloureusement, Jay n'en avait pas après moi, ce soir.
Le vexer ? Je m'en fichais royalement. Il n'avait pas une seconde pensé à l'humiliation qui avait rongé mes veines et ma fierté après m'être fait rafraîchir la gueule chez Turner. Alors je n'allais en aucun cas m'amuser à culpabiliser d'avoir peur de lui. Cependant... ses excuses me semblaient honnêtes et sincères. Et le tabac en torche pour éclairer la grotte sombre dans laquelle nous nous trouvions, je pris conscience que j'étais plutôt injuste.

-Mmh, lâchai-je pour ne pas céder trop vite, avant de fixer ses pupilles. Tu sais, j'en ai rien à faire que ça te vexe. T'as jamais pensé à ce que je pouvais ressentir, je ne vois pas pourquoi je me la jouerai psychologue avec toi. Mais... je marquai alors une courte pause pendant laquelle je levai les yeux au ciel et ne le quittai plus. Le passé, c'est le passé. Ce serait injuste de ma part de vouloir me repentir sans le permettre aux autres.

Oui. Vraiment injuste. Moi qui voulait assumer les horreurs qui avaient jonchée ma vie, et avancer, désormais, je me retrouvai là à ne pas l'autoriser à d'autres. Le Black et moi n'avions certainement pas les mêmes ennuis mais... la volonté était sans nulle doute la même. Et les excuses qu'il me tenait ouvertement et sincèrement, j'aurai aimé pouvoir les offrir à d'autres. Seulement, je n'avais pas sa chance : la vie jouait contre moi.

La réponse de Julian cloua Jay sur place qui ne s'attendait pas du tout à ça. Il ne voyait pas quand est ce qu'il avait parlé d'un psychologue dans la conversation.
Cette façon de parler, de se sentir supérieur ne lui plaisait pas des masses, comme si le chanteur était une merde qui avait besoin de Julian tout puissant pour s'excuser de ses crimes. Et puis quel crime avait fait son interlocuteur ? Bien sur Jay avait entendu les rumeurs comme quoi ça serait lui qui aurait tué sa propre mère mais il n'y croyait pas du tout. Si Julian était un criminel il se serait vengé des coups de Jay, or il n'était qu'un pauvre lapin face à un loup. Mais pas un loup sauvage. Jay était loin d'être violent par désir, c'était une chose qui lui échappait totalement et dont il avait du mal à maitriser l'issue.
En tout les cas les propos de Jay eurent vite fait de refroidir son espoir de tourner la page sur le chapitre Julian.

- Psychologue ? Mec je t'ai pas demandé d'être mon psy t'a rêvé ! Et redescend ton nuage en te prenant pour Dieu, si je veux me repentir j'ai pas besoin de ton autorisation !

Jay fixait Julian de ses yeux glacés, plus une once de chaleur traversait son visage, juste celui d'un homme qui avait envie d'en foutre une à l'autre pour lui enlever le melon. Dire que le chanteur voulait juste être sympathique, en récompense on l'envoyait chier. Jay se demandait ce qu'il faisait encore ici face à Julian qui avait pas du tout envie de faire la paix. Ce qui était assez dommage.

Décidément, Jay et moi n'étions pas sur la même longueur d'onde. J'eus l'impression qu'il ne me comprendrait jamais, et que peu importaient mes mots, ils ne l'atteindraient jamais.
Mes yeux quittèrent la voûte étoilée pour rejoindre les pupilles glacées de mon interlocuteur. Oui, entre nous, je pouvais ressentir clairement ce fossé, ce mur, qui se creusait et s'épaississait chaque seconde que Dieu faisait. Je ne savait exactement pourquoi nous ne réussissions à nous comprendre. Etait-ce juste parce qu'il réinterprétait chacune de mes phrases ? Ou plutôt car ma soudaine assurance le décontenançait ? Difficile à dire.

-Mais de quoi tu parles ? Demandai-je légèrement surpris.

Je plissais les yeux en secouant la tête de gauche à droite. Jamais je n'avais parlé d'être son psychologue, et encore moins d'être un Dieu ! Mais peut-être devais-je me résoudre à abandonner cette conversation qui malgré les efforts, semblait stérile. Je ne comptais pas me satisfaire d'une miche de pain : il me paraissait évident que si je pardonnais à Jay, c'était pour obtenir un grand résultat, et pas une conversation pleine de quiproquos.

-Pourquoi tu prends tout de travers ? Je haussai légèrement le ton sans lui avoir laissé le temps de répondre à ma première question. J'ai jamais dit que je voulais être ton psy ! J'ai juste dit que je me fichais de tes sentiments. Que ça te vexe, j'en ai rien à faire, tu ne t'es jamais préoccupé de moi alors. Je laissai ma phrase planer dans les airs. Sérieusement, t'es pas foutu d'écouter ce que je dis.

Avec Jay, nous étions comme deux imbéciles qui communiquaient depuis deux isoloirs. Nos paroles étaient brouillées par des interférences que ni lui ni moi ne maîtrisions. Mais les mots qui quittaient ma bouche n'avaient jamais le même sens quand ils arrivaient aux oreilles de Jay.

-Tu me fais des excuses, j'ai du mal à les accepter, mais quand enfin j'y arrive, tu te braques. Nous ne sommes certainement pas faits pour être en paix, toi et moi, conclus-je.

Je tirai sur ma clope à nouveau et me délectai de cette sensation qui ne me trahissait jamais. Le tabac avait un léger goût de désespoir, car je savais que si Jay et moi pouvions être amis, je n'avais pas la clé pour résoudre nos problèmes. J'étais captif de mes soucis personnels, et il l'était tout autant de ses ennuis. Alors comment nous réunir ?

Face aux paroles de Julian, Jay se braqua, un mur se soulevant entre les deux hommes. Incompris l'un et l'autre alors qu'au fond ils n'étaient pas si différents. Poursuivis par leur démon intérieur qui les empêchaient de correctement communiquer. Le chanteur s'était peut être trompé dans l'interprétation des propos de Julian mais ce dernier ne faisait rien pour arranger les choses. Il exprimait clairement son indifférence face à ce que le chanteur ressentait, mettant sur le dos de Jay l'incompréhension de leur dialogue. Ce dernier ouvrit la bouche pour répliquer mais la referma aussi sec. Il ne savait pas quoi répondre face à ces accusations injustifiés. Il avait tardé c'est vrai à faire des excuses, montrant par ce fait qu'il s'en fichait de Julian. Ce qui était ridicule, Jay avait juste eu trop de fierté au début et ensuite le temps avait coulé et il n'avait pas eu le courage d'aller voir sa victime. La peur de se faire rejeter.

- Très bien, j'ai compris. Je ne t'approcherai plus

Il tentait tant bien que mal de masquer que l'indifférence de Julian le blessait. Il n'aimait pas qu'on l'ignore, que on le rejette. Jay aimait avoir des gens sur qui compter, même si avec certains ça avait mal commencé ils avaient réussis à tisser une amitié correcte. Manifestement Julian n'avait pas envie d'en faire partie.

- Je te laisse.

Articula t-il sèchement avant de détourner les talons pour reprendre la route vers sa maison.

Ma discussion avec Jay tournait au vinaigre. Nous ne parvenions pas à nous comprendre, malgré les efforts de nos deux partis. Jay restait trop fier, moi trop méfiant. Il nous faudrait fioler quelques dizaines de bouteilles pour parler sans réfléchir, mais ce ne serait encore pas une solution. Nous étions trop imprévisibles, sobres, pour se risquer à l'être ivres.
Il y eut quelques secondes de répit, de silence qui, pour une fois, me dérangea. Ce n'était pas ce doux murmure du vent qui souvent venait m'accompagner. Mais plutôt cette pression sourde qui m'obligeait alors à me remettre en question. J'avais très certainement été trop loin pour laisser coi ainsi Jay Black. Cependant, la culpabilité ne m'atteignit guère, et je restai campé sur mes positions. Si le brun voulait de moi un peu plus de sympathie, il devait se montrer plus à même de faire des efforts. Qu'il rengaine sa fierté me faisait déjà plaisir, mais il me fallait plus encore.
Quand Jay prit du recul vis-à-vis de cette relation naissante, précisant qu'il ne s'approcherait plus de moi, je relevai les yeux. Ma clope arrivait à son filtre et je tirai une dernière fois pour recevoir la nicotine tant appréciée. Je ne trouvai rien à redire au chanteur, n'ayant aucun sentiment précis à son égard. Tantôt je me sentais tiraillé par la pitié de voir que ses excuses ne menaient à rien, tantôt j'étais certain de ne pas faire d'erreur en me montrant si exigeant envers lui. Tantôt aussi je m'en voulais un peu d'être si dur avec lui, si froid et si distant.
Je jetai mon mégot par terre, n'ayant en cet instant aucun scrupule compte tenu de l'environnement. Ce fut l'instant choisi par Jay pour mettre fin à notre conversation. Je soupirai, alors qu'il tournait les talons et je lâchai :

-Hey, Black. On pourrait être de bons amis, mais j'ai encore du mal à te faire confiance, c'est compréhensible non ?

J'avais parlé un peu sèchement à mon tour, en écho à sa phrase d'adieu. Je ne pensai pas à mal, et essayai d'être le plus clair possible pour éviter une méprise, puisque nous étions destinés à cela.

-Je vais partir quelques temps, hum... si tu veux reprendre cette conversation à mon retour, je serai moins méfiant, j'en suis sûr.

Je n'attendais pas de lui qu'il me réponde aussitôt. Il était sans nul doute blessé de mon indifférence sentimentale, alors je pus comprendre son silence. Cependant, je restai immobile quelques instants jusqu'à voir une réaction de sa part. Un départ, un mot, un geste. Même un silence suffirait.

Lorsque Julian parla, Jay s'arrêta écoutant ce que l'autre homme avait à lui dire. Le chanteur ne pensait pas que tous les deux pourraient être de bons amis si leur discussion était toujours aussi sous tension. Jay n'avait rien contre son interlocuteur, c'était ce dernier qui avait une dent contre lui suite aux coups qu'il avait reçu. Le chanteur comprenait parfaitement que c'était difficile de lui faire confiance après cela. Jay ne voulait pas passer sa vie à attendre un espoir que le jeune King tourne la page de cette histoire. Il avait déjà essuyé assez de déception comme ça.

- Oui c'est compréhensible...

Répliqua t-il, ne trouvant de toute façon pas d'autres choses à répondre. C'était un fait Jay s'était fait un ennemi tout seul. Et cet ennemi lui annonça qu'il partait quelques temps et que peut être à son retour sa méfiance serait moindre.

- On verra ça, mais ne compte pas sur moi pour venir toquer à ta porte pour savoir si tu t'es calmé

Sur ce il lui fit un signe d'au revoir et reprit tranquillement sa route. Laissant derrière lui le skatepark et Julian avec. Jay avait fait sa mission, il s'était excusé. Trois ans plus tard mais c'était mieux que rien du tout.

Francisco Goya a écrit : ❝ Le fantasme, abandonné par la raison, produit d'impossibles monstres. ❞

J'attendais une réponse, et je l'obtins, à mon plus grand ravissement. Certes, ce n'était pas l'amour fou, et j'aurai été fortement effrayé que ce le soit, mais Jay n'avait pas fui bouche close, et je m'avouai chanceux. Chanceux ? D'entendre la voix de Jay ? Woh, tout doux mon chaton, tu dérailles ! Et pourtant, je sentis en cet instant un certain soulagement, et sans me l'expliquer, je crus que nous venions de trouver le bout de la ficelle et que désormais, tout cette pelote serait plus facile à dénouer. Il me laissa seul, moi et mes questions sans réponses. Le vent ondulait tendrement, comme une mélodie éteinte en écho à l'espoir qui se mourrait en moi. La lumière déversait son halo sur mes pieds que je lançai à travers le chemin, en quête d'une maison où je ne me sentais ni chez moi, ni nulle part. Les nuages de mon haleine brûlante dans le froid glacé s'élevaient doucement, pour revenir à leur lune mère. Et celle-ci, loin de moi, continuait de m'appeler. Et sa voix nette, précise et lascive faisait se tortiller Quelque Chose au fond de mes entrailles. La foi ne servait à rien, la science non plus. Il n'y avait que moi pour trouver mes réponses. Et Jay, car il me ressemblait bien plus que je n'osais alors le penser. Il m'apparaissait très clairement que je pouvais apprendre beaucoup de lui. Je soupirai de déni, ne m'octroyant là aucune chance de m'en sortir grâce au Black. Mais sans lui près de moi, la peur ne disparaissait pas. Et l'Autre s'agitait toujours un peu, à l'Intérieur. Il n'était plus si loin, plus si près. Il dormait paisiblement, mais je ne pouvais m'empêcher de sentir chacune de Ses respirations. Damoclès avait jeté son épée au-dessus de mon crâne, et d'une seconde à l'autre, en tombant sur le gravier, elle Le réveillerait. Tout n'était qu'une question de temps, et le temps, malheureusement, était hors de mon contrôle. Alors, déçu, éreinté, las et avide d'une autre vie, sans Lui ni Black pour m'agacer, je plongeai mes mains dans mes poches. Elles y semblaient au chaud, et au calme. Loin des tracas passés et des envies interdites qu'Il leur offrait. Et moi, j'étais un peu plus rassuré de les savoir là, de penser encore que je les dirigeai de ma totale volonté. Car bientôt, elles s'en iraient avec Lui, et je pleurerai alors de savoir où elles s'en allaient traîner sans pouvoir les en empêcher. Tout n'était qu'une question de temps. Une simple question de temps...