J'ouvrais brusquement les yeux, après avoir fais ce même cauchemar depuis plusieurs nuits déjà. La brutalité de cet étrange rêve m’empêchait alors de refermer les paupières, et de me replonger dans un sommeil profond. Non, je n'arrivais désormais plus à me rendormir. Je tournais la tête, observait Johan qui elle dormait comme un bébé. Mon côté du lit était trempé de sueur... je tentais de me remettre progressivement de ce rêve effrayant, et me glissait hors du lit. Torse nu, la mine pâle, je descendais discrètement les marches de l'escalier pour rejoindre le salon. Une infusion m'apaiserait probablement. Je faisais attention de ne pas faire de bruit, pour ne pas réveiller les enfants, et surtout Anaïs qui depuis quelques semaines maintenant avait beaucoup de mal à s'endormir. Tous les soirs nous avions droit à un cinéma, ce qui devenait de plus en plus pesant.

En descendant les escaliers, je constatais que la lumière était allumée dans le salon. Pourtant, je n'avais pas le souvenir d'avoir laissé la lumière allumée avant d'aller me coucher. Puis je me souvins que Mike n'était pas encore rentré de son travail. Il devait donc être dans le salon, pas encore couché. Il était tout de même 3h du matin, ce n'était pas raisonnable de sa part d'être encore éveillé à cette heure-ci. Je poussais alors la porte du salon, avançais jusqu'au centre de la pièce, et découvrais le fils aîné de ma compagne allongé sur le canapé, endormi. Je soupirais. Cela fait quelques temps déjà que le jeune Mike enchaîne les petits boulots, et rentre tard le soir. J'étais fier de Mike car il connaissait la valeur de l'argent, et était conscient des efforts qu'il fallait faire pour s'en sortir dans la vie. Mais je m'inquiétais. Enchaîner autant de boulots le fatiguais de plus en plus, il n'était plus du tout concentré et bref, cette situation n'était certainement pas très bonne pour son état physique et moral.

Je m'approchais de Mike, me penchait, et le secouais légèrement pour le réveiller. "Mike... Mike? Allez bonhomme, va te coucher dans ton lit, c'est quand même plus confortable."

Il s'était assis sur le canapé, se disant qu'il soufflerait deux minutes puis irait se coucher mais sans s'en rendre compte, il s'était endormi. Au bout de quelques minutes, il avait fini par tomber sur le flanc, allongé sur le divan dans une position tordue. Ces derniers temps, il redoublait d'efforts pour se faire de l'argent, multipliant les petits boulots à droite et à gauche, au risque de se lever tôt et de se coucher tard, pour ne plus dormir que quelques heures. Lui qui trouvait déjà son travail à la boutique de jeux fatiguant, notamment parce qu'il lui arrivait de n'avoir rien à faire de son service et que son patron l'énervait plus qu'autre chose. Il était passé au niveau supérieur. C'était un peu comme ce voisin qu'Emily avait embrassé – le fils Dekker. Mike n'avait pas pour habitude de trainer avec lui, mais il savait par quelques rumeurs que, un peu comme lui, il s'exténuait à bosser, bosser, toujours plus. Enfin, de ce qu'il en avait compris, c'était surtout parce que son père s'était cassé, laissant sa mère seule avec deux enfants. Comble, la mère n'était pas capable de tenir en place, c'était donc à Zachary que revenait la lourde tache de subvenir aux besoins de la famille. Quoiqu'il en soit, ça n'avait pas empêché Mike de lui en faire voir de toutes les couleurs quand il avait appris que c'était avec lui que sa copine l'avait trompé.
Il sentit qu'on le secouait et une voix lui parvint, de plus en plus nette au fur et à mesure qu'il s'extirpait des bras de Morphée. Il y serait bien resté. Le visage de Paul lui apparut, penché sur lui. Il ne pouvait pas le laisser dormir ? Plus Mike aurait d'heures de sommeil entre ses jobs, mieux c'était. Il devait s'assurer de tenir le coup jusqu'au bout.

« Hein ? Ah, Paul. Ouais, j'y vais. »

L'homme le laissa se relever et Mike se redressa, se passant les mains sur le visage tout en baillant. L'horloge sur la télévision indiquait trois heures du matin ; il n'avait dormi qu'une petite heure. Il n'avait rien vu passé et avait plutôt l'impression de sortir d'un long sommeil duquel on l'avait tiré sans ménagement.
L'ainé des Huntington se mit sur pied mais au lieu de se diriger vers les escaliers, il alla dans la cuisine, ouvrit quelques placards, trouva ce qu'il cherchait et se servit un verre d'eau. Il aurait bien pris autre chose, du genre une petite bière mais avec Paul dans les parages à trois heures du matin, il valait mieux éviter. Et qui sait, si ça l'empêchait de dormir ensuite, c'était carrément pire.

Mike ouvrit les yeux, je restais là un instant à le regarder émerger de son profond sommeil. Même s'ils semblait si bien dormir sur le canapé, il serait bien mieux dans son lit, prévu à cet effet. Mike se redressa, et acquiesça. Je le regardais alors se lever avec difficulté du canapé, se dresser sur ses deux jambes, et partir en direction de la cuisine. Comptait-il dormir sur le plan de travail? Je levais les yeux au ciel et soupirais.

Après avoir fait le tour du salon pour éteindre les quelques lampes encore allumées, après avoir également ramasser les affaires du jeune homme, rangé les quelques jouets qu'Anaïs n'avait pas remonté dans sa chambre, et enfin, après avoir remis un peu d'ordre sur la table basse, je refermais la porte derrière moi et me dirigeais à mon tours vers la cuisine où je rejoignais mon beau-fils. J'entrais sans un mot, attrapais une chaise et m'asseyais autour de la table. Je me frottais les yeux, baillais et posais mes yeux sur le jeune garçon.

Je m'interrogeais sur la finalité d'un tel engagement professionnel. Mike avait-il réellement besoin de ça, travailler autant? Nous n'étions pourtant pas en manque d'argent. Et je sais très bien que lorsque Mike demande un peu d'argent, c'est parce qu'il en a réellement besoin. Je sais aussi qu'il en fait toujours bon usage. Je le regardais, la mine fatigué, la tête penchée sur son verre d'eau. A voix basse, je l'interrogeais donc: "Tu ne crois pas que c'est un peu beaucoup? Je veux dire... tes petits boulots. Tu n'as même plus le temps de dormir Mike!"

Mike avait entendu Paul entrer dans la cuisine et s'asseoir sur une chaise, comme s'il comptait engager une longue discussion, mais ne fit rien. Si Paul voulait s'endormir à une heure plus tardive encore que celle-ci, c'était cool pour lui. Mike, lui, devait être en forme pour le lendemain. Déjà qu'il avait moins d'heure de sommeil que d'habitude, il ne s'agissait pas d'en perdre d'autant plus. Il finit donc son verre d'eau et, par précaution, s'en servit un second. Paul avait décidé qu'il était temps pour eux d'avoir une conversation sur la vie professionnelle de Mike, à trois heures du matin. Si c'était uniquement pour ça qu'il l'avait réveillé, il pouvait aller se recoucher, Mike ne parlerait pas.

« J'en ai besoin. »

Fidèle à lui-même, Paul faisait mine de s'inquiéter. Comme s'il n'était pas d'avis qu'il fallait savoir se débrouiller seul et qu'on n'avait ce qu'on voulait qu'à la sueur de son front. Mike avait beau le considérer comme un intru dans cette maison, il ne pouvait passer outre ses leçons de morale et d'éducation, qu'elles soient destinées à lui, à son frère, sa soeur ou même à la petite Anaïs. Et finalement, c'était ce qu'il était en train de faire : se tuer à la tache pour gagner de l'argent, retenant par la même occasion les paroles de Paul, comme si c'était à lui de lui apprendre tout ça, alors que c'était bien là le rôle d'un père.
Mike avala son verre d'eau, qu'il reposa ensuite dans l'évier sans prendre le temps de le laver. Lui ou quelqu'un d'autre de la famille ferait ça plus tard. Il se tourna vers Paul, prêt à lui montrer que la discussion s'arrêtait là, parce qu'il allait se coucher. Après tout, c'était ce pourquoi il l'avait réveillé de son sommeil sur le canapé ; il ne s'agirait pas de le retarder en changeant de sujet. Et puis de quoi Paul se souciait-il ? N'avait-il pas déjà dit que tout ce qu'il avait réussi à obtenir jusqu'à aujourd'hui, était là uniquement parce qu'il avait donné les efforts nécessaires pour les avoir ? Autrement dit, enchaîner les petits boulots. Exactement comme Mike. C'était d'ailleurs comme ça que l'ainé des Huntington voyait la chose, comme ça qu'il pensait réussir à se faire de l'argent – pour avoir, plus tard, les choses dont il avait envie, peut-être. En somme, il retenait bien les leçons de Paul. De quoi celui-ci se plaignait-il alors ?

Faire comprendre à Mike que l'on obtient rien sans rien faisait parti de l'éducation que je souhaitais lui donner. Mais j'avais très bien vu qu'il suivait à la lettre mes recommandations. Mike m'étonnait par son autonomie, son organisation, et son sens des responsabilités. En revanche, je n'étais pas celui qui l'avait forcé à travailler autant. Non il l'avait choisi, et n'avait pas l'air de s'en plaindre. Très bien, mais je suis aussi un parent responsable, et pour moi, je ne trouve pas ça très raisonnable d'enchainer les petits boulots, de manquer autant de sommeil et de temps. Oui, il y a un temps pour tout, et malheureusement, Mike ne semble pas encore l'avoir compris. Personne ne le blâmera pour sa motivation et ses engagements professionnels, mais il me semble que nous devons bien discuter de tout ça avant qu'il ne craque complètement. De toute façon, il s'en rendre compte lui même un jour et finira par tomber de fatigue. Et ce jour là, il se souviendra de mes discours et sera bien obligé de reconnaitre que j'avais raisons.

"J'en ai besoin", oh bah oui bien sûr ! Ce n'était pas la réponse que j'attendais. Il pensait berner qui? C'était limite insultant, car il remettait là en question le fait que nous puissions également subvenir à ses besoins, au même titre que Lou, Jerem et Anaïs. Je secouais la tête et levait les yeux au ciels. Il tenta de me faire comprendre qu'il n'avait pas envie de parler, mais je n'étais absolument pas de cet avis. "Non tu n'en as pas besoin. Un petit boulot oui, mais pas trois Mike... c'est de la folie, et ça ne te rend pas plus efficace... Bien sûr, tu évites la conversation... laisse moi deviner, tu as envie d'aller te coucher c'est ça?" disais-je en soupirant. Je marquais un silence, puis repris "Dans ce cas là, fais en sorte d'avoir moins de boulot, et couche toi plus tôt.". Je parlais comme un père, et au final c'est ce que je suis. Lui ne me voit peut être pas comme tel, et je ne prétend pas être le sien. Mais son père est décédé il y a quelques années maintenant, et je suis certain qu'il aurait aimé que quelqu'un prenne la relève. C'est ce que je tentais de faire, même si j'avais encore beaucoup de mal.

Qu'est-ce que Paul savait de sa situation ? si Mike avait vraiment besoin de cet argent ou non ? Rien. Absolument rien. Il ne s'agissait pas seulement de s'acheter deux ou trois fringues et quelques menus McDo de temps en temps. Il s'agissait de démarrer dans la vie. Oui, voilà, exactement. Comment Mike pourrait mettre son plan de déménagement à exécution s'il n'avait pas d'argent ? Changer de ville, de maison ; avoir un appartement à soit, avec les factures à payer, la nourriture et tout le reste. Il avait besoin d'argent s'il voulait enfin faire ce qu'il désirait depuis dix bonnes années. Il ne pouvait pas se contenter de demander à Maman et Beau-Papa quelques billets parce que la note d'eau à la fin du mois était plus grosse que prévue. Ça faisait des années qu'il attendait d'être indépendant, or, selon la loi, ça faisait maintenant deux ans qu'il l'était. Il était temps de l'être officiellement. Soit, de se construire un avenir. D'être efficace professionnellement. Comment ça il n'était pas efficace avec trois boulots ? Ça faisait trois salaires. C'était fatiguant, la journée était longue et il se couchait tard, mais c'était trois sources d'argent simultanées.

« Bien sûr que si j'en ai besoin ! J'ai envie d'autre chose que bosser dans une boutique de jeux. Ça va bien pour les vacances ; toute ma vie non merci. Mais avant de changer de travail, faut bien que je mette de l'argent de côté. Et plus j'en aurais rapidement, mieux ce sera. »

Avec son travail à la boutique de jeux vidéos où l'ennui était parfois de mise, il avait eu le temps de bien réfléchir. Ce job-ci le lassait profondément. Il avait envie de changement, de quelque chose qui lui plairait vraiment. Certes, il avait d'abord été dans son élément en acceptant ce travail. Mais au fil du temps, il grandissait, jouait de moins en moins à la manette. Et voulait un travail d'adulte. Ranger des boites de jeux, conseiller les clients... Ça allait bien pendant un temps, mais ça n'avait plus beaucoup d'intérêt au bout d'un autre. Or, il avait beau creuser un peu partout, le seul moyen d'obtenir un travail « d'adulte » était d'avoir fait des études. Et Mike n'était pas allé plus loin que le lycée. S'il avait arrêté, c'était précisément parce que les études n'étaient pas son fort ; il avait beau réviser comme il pouvait, il n'arrivait jamais à se concentrer bien longtemps. Ce qui, évidemment, amenait de mauvaises notes et un bulletin médiocre. Mais aujourd'hui il se rendait compte que c'était la seule façon d'avoir un travail autre qu'employé à la boutique de jeux vidéos. Et la seule façon de faire des études était de les payer. Donc d'avoir de l'argent.

Voilà, ce qui m'embêtait le plus c'est que ces boulots empêchaient désormais Mike d'entreprendre des études. Et je ne pouvais pas le nier, cela m'embêtais réellement. Je préférais le voir réussir à l'école, plutôt que de le trouver là, à moitié endormi, à cause de boulots médiocres qui ne lui apportait finalement aucune véritable expérience professionnelle. Je n'étais absolument pas contre le fait qu'il se fasse son propre argent, mais de là à délaisser complètement les études .. non, ça ne marche pas comme ça, et ce n'est pas ce que je souhaite pour lui.

"Tu dis n'importe quoi Mike. Ce n'est pas avec de l'argent que tu vas décrocher un poste plus qualifié. Alors peut-être que tu trouveras le boulot de tes rêves, mais ça durera combien de temps? 6, 7 mois, peut être même 1 an. Et après? ..." Je secouais la tête. Il m'agaçait. Il savait pourtant que j'avais raison, mais il n'en faisait qu'à sa tête. De tous les Huntington, Mike est certainement le plus têtu, celui qui prétend n'avoir de leçons à recevoir de personne. "Après tu te lasseras, et le jour où tu voudras en changé, tu n'auras peut être pas le diplôme requis, et admets tout de même que ton expérience de vendeur de jouets ne te mènera pas très haut!"

Je me levais de ma chaise, j'allais finalement moi aussi rejoindre mon lit. Inutile de continuer cette conversation, mon lit m'attendait. Je n'étais pas à l'abris d'entendre à présent les reproches de Mike sur ma façon d'éduquer les enfants Huntington, du moins ça se passait souvent comme ça. Selon eux, je devais me contenter d'Anaïs, et m'occuper de mes affaires.

Mike avait longuement réfléchi. Il avait exploré tous les terrains possibles pour trouver le plus d'alternatives, mais il n'y en avait décidément qu'une seule : reprendre les études. Or, quelles études étaient gratuites au-delà du lycée ? C'était Paul qui n'avait pas compris ce que Mike voulait dire. Le seul moyen pour lui d'échapper aux boulots minables, tels que vendeur de frite ou de jeux vidéos, c'était de reprendre les études. Etudes qui n'étaient pas données. Et certes, Johan et Paul pourraient l'aider de ce côté-ci et lui en payer une partie. Mais tout ? Non, il y avait aussi celles de Lou à gérer et bientôt, celles de Jérémy. D'autant plus que pour le moment, Mike n'était pas sûr de ce qu'il voulait faire. Donc, d'une certaine manière, plus il mettait d'argent de côté, mieux c'était.

« Et tu proposes quoi ? Que je refasse des études ? »

Mike avait parlé d'une voix plus forte que précédemment. Alors que Paul l'avait réveillé et engagé une conversation sur sa situation professionnelle, voilà qu'il le laissait en plan. On parlait ou on ne parlait pas, mais on n'abandonnait pas une discussion comme ça. De plus, trouver un travail qui nous motivait plusieurs mois durant, c'était toujours ça de gagné. Ca restait mieux qu'employé à la boutique de jeux où il passait le plus clair de son temps à maudire son patron et s'ennuyer entre le rangement et la vente des jeux.

« Je suis pas du tout littéraire. Le scientifique, très peu pour moi. »

Mike et les bouquins, ça faisait quatre. Il avait bien lu quelques trucs, pour le collège ou même le lycée, mais ce n'était décidément pas quelque chose qui l'attirait. En plus, il n'avait pas le temps. Quant à la science et les mathématiques, il avait tout juste la moyenne du temps du lycée, histoire de ne pas redoubler, mais ce n'était pas assez pour poursuivre dans ce domaine. Alors maintenant qu'il se rendait compte qu'il était obligé de faire des études, après avoir tout laissé tomber après le lycée, il se demandait franchement ce qu'il pouvait faire. Et d'une certaine manière, oui, Mike demandait conseil à Paul – peut-être inconsciemment, car le ton de sa voix était empli d'une pointe d'énervement devant les propos de son beau-père.

« À part ça, j'vois pas trop ce que je pourrais faire. » reprit-il d'une voix qu'il s'efforçait d'être calme.

Refaire des études? En voilà une bonne idée. Finalement, il ne manquait pas de lucidité. Sérieusement, Mike peut prétendre à un bon travail car il en a les capacités. Maintenant, s'il ne s'en donne pas les moyens, s'il ne veut pas s'en donner les moyens, je ne vais pas passer mon temps à être sur son dos. Rentrer du travail en pleine nuit, ne dormir que quelques heures, ce n'était pas une vie pour moi. Je préférais certe le voir s'épanouir dans les études et dans sa vie de jeune, mais il ne voudrait rien entendre.

"Reprendre tes études serait une bonne initiative oui." disais-je en me retournant face à lui. Puis je soupirais. A présent, je tombais presque de fatigue. Mais si j'arrivais à avoir une discussion sérieuse et constructive avec Mike, je pouvais bien faire une concession sur les heures de sommeil qu'il me restait.

Pour une fois, Mike restait calme. D'habitude, la conversation aurait tourné au vinaigre. J'aurais pris dans les dents que je n'étais pas son père et que je devais me mêler de mes affaires et pas des siennes. Sa réaction m'étonnait donc. Je penchais la tête, et décidais de retourner m'assoir sur ma chaise, face à mon beau fils. Il me dit qu'il n'était pas bon en littérature, ni dans les matières scientifiques. Soit, mais il pouvait tout de même se concentrer sur un métier en particulier et mettre les chances de son côté, et toute son énergie à apprendre, plutôt que de passer ses soirées à trimer pour gagner trois sous.

"Tu feras le métier que tu veux Mike, je n'attend pas de toi que tu deviennes PDG d'une grande enseigne, ni même que tu deviennes un homme riche et puissant. Je veux que tu puisses t'épanouir dans le métier que tu désires, et que tu arrêtes de perdre ton énergie à travailler autant alors que cette énergie, tu pourrais l'y mettre dans des études. Tu veux ton indépendance, je trouve ça très honorable... Mais n'oublie pas que nous sommes aussi là pour t'aider, l'argent n'est pas ce qu'il manque."

HJ: Désolé pour le retard ♥

Alors Paul pensait vraiment que Mike devait reprendre ses études. Mais lesquelles ? La question n'était pas de savoir s'il devait continuer ses petits jobs ou les arrêter pour privilégier ses études, mais bien dans quel domaine il devrait se spécialiser. De son côté, l'aîné Huntington n'en avait aucune idée, et pour une rare fois où il demandait conseil à Paul, celui-ci ne semblait pas bien comprendre sa question.

« Oh c'est bête. Je prévoyais justement de devenir le PDG de Macdo ! » railla-t-il.

Bien sûr que oui il savait que Paul n'attendait pas grand chose de lui. De toute manière, le but premier de Mike n'était pas de satisfaire son beau-père, bien au contraire. Il venait tout juste de prouver en une phrase qu'il se moquait bien de lui.

« Très bien. Alors si vous êtes prêts à me payer les études à 2 000 balles le trimestre, quelle école j'devrais choisir exactement ? »

Il était fatigué et par extension de mauvaise humeur. À quoi bon avoir cette discussion. Il s'était bloqué lui-même et n'aurait jamais dû arrêter les études, mais malgré les désapprobations de ses proches c'est ce qu'il avait fait. Maintenant il cherchait juste un moyen de se faire de l'argent sans avoir à demander à quelqu'un la somme dont il avait besoin. Oui il avait voulu devenir indépendant et pensait que la meilleure façon d'être autonome n'était pas d'étudier des bouquins mais de gagner seul sa vie. Aujourd'hui il se rendait compte que ça pouvait marcher, en effet, mais que le job n'était pas toujours des plus plaisants. Malgré cela il ne voulait pas devenir dépendant de Paul et Johan. Il se détourna de Paul et ouvrit le frigidaire ; il n'avait pas mangé depuis midi et avait la sensation d'avoir plus besoin de manger que dormir. Il prit un sachet de frites congelées, les versa dans une assiette et les passa au microndes. Que Paul dise ce qu'il veule, pour l'instant il mangerait son plat de frites.