Esperanza faisait les 100 pas dans le salon. Elle replaçait sans cesse la mèche qui lui tombait sur le visage d'un geste nerveux. Elle était levée depuis 7h du matin avait fini le ménage, le repassage, le repas du midi et était naturellement douchée et habillée. En gros elle n'avait plus rien à faire pour évacuer son trop plein d'énergie. Depuis la tempête qui s'était abattue sur Magnolia tout était devenu plus compliqué. La mère et la fille avaient été victimes d'une explosion au gaz et tout leur système respiratoire avait été endommagé. Autant dire que pour exercer les métiers d'actrice et de cuisinière c'était assez singulier d'avoir des problèmes de cordes vocales ou de palais, et un sacré handicap. Les médecins qui suivaient les deux filles leur avait demandé de ne plus parler. Sauf que voila, Esperanza était bavarde comme une pie. Elle avait sans arrêt un truc à raconter et se retrouver sans aucune possibilité de s'exprimer était réellement frustrant. C'était une véritable épreuve pour elle. En ce qui concerne Evane ce n'était pas mieux. La jeune fille semblait avoir perdue toute motivation. Elle qui devait partir à New York pour trouver du travail avait dû repousser son départ pour être sûre d'avoir retrouvé sa voix et sa nouvelle situation semblait l'avoir plongée dans un état un peu léthargique. Evane restait des heures dans son lit, refusait de se lever, traînassait toute la journée, chose qui avait le don d’énerver sa mère. Elle avait fait une fille belle et intelligente ce n'était pas pour qu'elle perde sa vie à ne rien faire. La cerise sur le gâteau était que mademoiselle Evane s'était permise d'aller se bourrer la gueule dans un bar. Sauf que l'anecdote avait été rapportée à Esperanza et que celle-ci ne risquait pas de laisser passer ça ! Sa petite fille modèle finir pompette dans un bar non mais où va-t-on ! Ce n'est pas parce que ce que vit sa fille par rapport à l'accident n'est pas facile qu'elle peut se permettre de dériver ainsi. Esperanza n'ayant pas sa langue dans sa poche elle s'assurera que le message soit bien passé. Et plutôt deux fois qu'une. Dix même s'il le faut.
Esperanza était donc en train de faire les 100 pas en pensant à l'attitude de sa fille ces derniers jours. Elle tentait de se retenir encore un peu pour ne pas monter la réveiller mais la pression était trop forte , elle devait secouer Evane ! Et lui faire comprendre qu'elle devait se bouger les fesses pour changer de comportement. Elle ne savait pas comment s'y prendre, mais elle n'était pas du genre à réfléchir des heures pour organiser un guet-apens pour sa fille, elle préférait y aller cash. N'y tenant plus Esperanza grimpa les marches de l'escalier deux par deux et frappa à la chambre d'Evane tout en poussant la porte. Elle se dirigea immédiatement vers les volets qu'elle ouvrit en grand pour faire rentrer la lumière du soleil qui brillait déjà haut dans le ciel. Elle se tourna ensuite vers sa fille, les deux points sur les hanches et la mine renfrognée, attendant de voir si mademoiselle Damenez allait se lever ou s'il allait falloir la tirer de son lit aussi. Elle était prête à tirer les draps, et pourquoi pas même à aller chercher un verre d'eau si c'était le seul moyen. Elle ne savait pas du tout comment elle allait s'y prendre pour avoir cette discussion tellement importante alors qu'elle ne pouvait plus prononcer un seul mot, mais tant pis, elle ne voulait pas renoncer. Sans possibilité de faire l'énonciation de toute ce qui la dérangeait chez sa fille ces temps-ci, ni même de tenter de discuter pour trouver le fond du problème ou la remotiver elle allait devoir trouver un autre moyen pour faire cesser tout ça. En attendant elle devait déjà réussir à la lever.