Vicky est une garce. Non bien sûr, elle n’est pas seulement ça. Sa condition de « fille de » depuis son plus jeune âge lui a forgé un caractère assez égocentrique. De ce caractère découle un goût assez prononcé pour la putasserie, la vulgarité en moins. Difficile de ne pas prendre la grosse tête lorsque l’on est élevé par un père auteur de best-seller et une mère mannequin sur le retour convertie en papesse de la mode.  Même si elle ne se sent jamais à la hauteur aux yeux de ses prestigieux géniteurs, ça ne l’empêche pas d’avoir un égo démesuré et d’avoir hérité de l’assurance de sa mère. Si elle dit quelque chose ou qu’une opinion quelconque traverse son esprit vif, c’est forcément qu’elle a raison et ceux qui le conçoivent autrement ont obligatoirement le QI d’une huitre.  Ses résultats scolaires, toujours au top malgré les soirées étudiantes qui rythment sa vie universitaire, la confortent un peu dans l’image qu’elle a d’elle-même. Au fond, son manque d’humilité est peut-être le résultat du manque de reconnaissance qu’elle éprouve dans sa famille, mais l’avouer voudrait dire qu’elle a des problèmes psychologiques, or son destin est déjà tout tracé dans sa tête et elle n’a vraiment pas l’envie ni l’honnêteté de se remettre en question.

Certaines personnes diraient d’elle, qu’elle est froide. Vicky fait souvent mine de ne pas le faire exprès, même si au final elle est satisfaite que les gens ne la trouve pas facilement accessible. Elle aime se convaincre que son aura, son charisme et sa confiance en elle sont la raison des aprioris à son sujet, alors qu’inconsciemment elle prend un malin plaisir à cultiver ce trait de caractère pour déstabiliser les gens qu’elle rencontre.

Même si Vicky ne se trouve pas appréciée à sa juste valeur dans sa famille, elle reste néanmoins fière d’en faire partie. La réciprocité lui plairait d’autant plus, elle est souvent un peu agacée de la manière que ses parents ont à la faire passer au second plan, après Harry. Elle a l’impression de toujours devoir faire ses preuves, alors que pourtant elles sont bien là et solides comme le roc. La compétition avec son aîné est souvent présente, mais Vicky commence peu à peu à se faire une raison. Un brin fataliste, elle se rend bien compte qu’elle perd son temps à essayer de redorer son blason aux yeux des Lawford et qu’elle risquerait de négliger le concret : ses études qui lui permettront de rayonner une bonne fois pour toute une fois son diplôme en poche...

Vicky a toujours eu en horreur les tatouages et les piercings. Enfin, elle peut trouver certaines œuvres jolies sur les autres -très rarement-, mais il a toujours été hors de question qu’elle modifie son corps pour ensuite finir par le regretter plus tard. Elle s’était toujours dit que l’originalité du 21e siècle résidait dans la virginité d’un corps pur, épargné de toute modification corporelle. Mais un jour alors qu’elle n’était âgée que de 16 ans et qu’elle se trouvait chez sa meilleure amie lors d’une fête en plein cœur de l’Upper East Side, les deux jeunes filles s’étaient un peu emportées.  Vicky et son acolyte s’étaient réfugiées dans la chambre de la seconde, alors que la fête battait son plein, beaucoup trop alcoolisées et droguées, elles avaient commencé à se lancer des défis stupides. Puis leur petite contre soirée s’était transformée en véritable salon de tatouage, la douleur en moins grâce aux diverses substances ingurgitée.

Vicky s’était réveillée le lendemain avec un immonde « FREE », certes minuscule mais très baveux, sur son poignet. Qu’elles avaient fait dans leur état second, avec un cutter et de l’encre de Chine. Autant vous dire qu’il avait fallu peu de temps pour qu’elle se débarrasse de cette horreur, quelques mois plus tard, au laser. Depuis, elle a une légère cicatrice à cet endroit, un peu plus claire que le reste de sa peau. Parfois, elle la regarde avec un sourire nostalgique avant de fustiger le dermato qui lui avait enlevé pour son travail qu’elle juge bâclé..

Vicky était posée sur la terrasse de sa nouvelle maison. Cigarette dans une main et limonade dans l’autre, elle était épuisée. C’était d’un fatiguant d’avoir orchestré l’aménagement de sa chambre, les déménageurs n’avaient rien compris à sa manière d’organiser les lieux. Elle s’était même surprise à espérer avoir un bâton pour frapper leurs mains quand ils les posaient sur sa collection de sac à main Hermès. Un peu comme un directeur qualité dans une usine d’un pays lointain et sous développé, où la moyenne d’âge des employés -lisez esclaves- ne dépassaient pas les 12 ans. Mais elle avait réussi à se contenir, elle s’était convaincue seule qu’il y avait des choses bien plus grave que de voir un Birkin Bag frôlé par les mains d’un travailleur clandestin.

Elle sirotait tranquillement sa limonade, observant la faune de son nouveau jardin qui ajoutait un peu de verdure dans sa vie comparé au triplex froid dans lequel, elle et sa famille résidaient la veille. Les toits de ses nouveaux voisins encerclaient la maison, elle se demandait quel serait leur degrés d’émerveillement et la quantité de bave qu’on leur prélèverait quand il la découvrirait. Cette pensée n’était pas vraiment sérieuse, elle avait toujours imaginé que les gens qui vivaient hors de New-York étaient des beaufs incivilisés, mais elle s’était bien rendue compte que la réalité était autre lorsqu’elle avait pu voir quelques-uns de ses voisins en arrivant dans le quartier. Plutôt qu’une ville rescapée d’un accident nucléaire, MC avait plutôt l’air d’une banlieue bourgeoise à la Desperate Housewives. Puis dès qu’elle avait appris le choix de ses parents de s’établir ici, Vicky s’était auto-persuadée du bien-fondé de ce changement en déclarant que la vie citadine était démodée et que c’était plus hype de vivre loin de la pollution et des chauffeurs de taxis mal éduqués. C’était une tricheuse, elle ne faisait pas non plus un remake de Simple Life puisqu’elle continuerait à aller dans son école de commerce à New York la semaine, mais Vicky avait souvent tendance à arranger les situations qu’elle traversait pour les rendre plus valorisante pour sa propre personne.