La soirée speed dating se tenait dans douze jours, mais le couple avait encore toute une longue liste de tâches à effectuer. Heureusement, Katarina menait l'organisation d'une main de maître, comme à son habitude. Alliée à l'ingéniosité de son mari, cette soirée serait une réussite, pour leurs voisins comme pour eux. Ils étaient dans le quartier depuis quelques mois, mais ne connaissaient pas encore tous ceux qui le peuplait. Cette soirée permettrait à bien des célibataires de trouver l'amour, mais aussi à Katarina et Harrison de se faire un nom, ici. Leur activité n'en serait que renforcée. La jeune femme frétillait d'impatience de voir le résultat, ce soir là. Elle avait toujours un peu de mal à se contenir, comme une petite fille à l'annonce d'un nouveau disney princesse.

Cet après-midi là, ils avaient prévu d'étudier les nombreuses participations qu'ils avaient déjà reçues. Katarina se plaisait à les lire, mine de rien elle enrichissait ses connaissances sur ses voisins. Même si les participants seraient masqués, eux deux connaissaient qui se cachait derrière chaque loup, connaissaient désormais la véritable opinion que ces gens avaient d'eux même. « Certains ne se gênent pas pour nous dire la vérité sur eux, heureusement que tout le monde sera masqué ! » fit-elle remarquer à son mari en riant. Il était assis, derrière son grand bureau merisier, dans son imposant fauteuil en cuir. Elle, comme à son habitude, était assise en tailleur sur son bureau, à côté de lui. Si on ne les connaissait pas, à les voir ainsi, on aurait pu croire que cette jeune femme le draguait ouvertement, penchée ainsi pour laisser voir son décolleté sous son chemisier, les jambes ainsi croisée et sa mini jupe mal mise. « Tu imagines, si ces formulaires tombaient entre de mauvaises mains ! » ajouta-t-elle en riant. Rejetant sa tête en l'air, elle arrangea ses cheveux pour que ses quelques mèches volages retournent derrière ses épaules. Depuis leur arrivée ici, elle se croyait dans une mauvaise série pour adolescentes, avec ce Dirty Secret qui dévoilait des secrets par morceaux, attirant la meute de commères avides de scoop, comme une meute de chiens autour d'un os. Pour l'instant, ils étaient tranquilles. En même temps, cette personne n'avait rien à dire sur eux : ils étaient fraichement débarqués ici. Limpides de tout soupçon. Parfois, Katarina se demandait si tous ses voisins cachaient vraiment un secret. Si c'était le cas, le quartier prenait vraiment une facette effrayante. Mais elle n'y croyait pas, et préférait en rire. Ces articles l'amusaient. Il faut dire que Katarina s'amusait toujours de tout.

Les affaires marchaient bien, et ce n’était pas Harrison qui allait se plaindre de la situation. Il aimait son travail, il aimait pouvoir l’exercer tous les jours, avec sa femme, et essayer de se rendre un minimum utile pour les gens. Trouver l’amour était un but difficile à atteindre, certains n’y arrivait d’ailleurs jamais. Pour Harrison et sa femme c’était un objectif atteint. Il était clair que pour lui, Katarina était LA femme de sa vie. Alors ils essuyaient de mettre à profit leur expérience, et d’apporter un peu de bonheur dans la vie des gens. Depuis quelques années, ils avaient fondé leur entreprise, et tout se passait bien. Ils avaient emménagé à Magnolia depuis six mois, et voulait faire connaître leur agence au sein du quartier. Pour ce faire, ils avaient en tête d’organiser un événement, un speed dating. C’était Katarina qui avait proposé l’idée, histoire de se faire un nom dans le quartier. De se faire accepter, ici, dans ce quartier déjà si soudé. Du moins, c’est ainsi qu’il apparaissait aux yeux d’Harrison, qui n’avait jusqu’à présent jamais vécu dans une banlieue chic.

Alors assis à son bureau, Katarina épluchait les formulaires qu’on leur avait adressés. Visiblement les gens de Magnolia n’avaient pas tout, et l’amour semblait manquer. Il rit. Ils n’étaient finalement pas différents des autres clients qu’ils avaient pu avoir auparavant. Katarina ajouta que ces formulaires étaient importants, et qu’ils ne devaient pas atterrir dans de mauvaises mains. Faisait-elle référence à Dirty Secret ? Ce site web auquel Harrison avait jeté un œil une fois. C’était d’un humour douteux, du moins Harrison ne pouvait pas croire que la vie de ses voisins pouvait ainsi être étalée aux yeux de tous. « Du genre de Dirty Secret ? » demanda-t-il sur le ton de l’humour. C’était tout nouveau tout beau pour lui, il ne se rendait pas encore compte de la gravité des choses. « Elle sera peut-être parmi nous durant le speed dating. » ajouta-t-il sur le même ton et levant les yeux au ciel. Il regarda sa femme, qui se comportait toujours comme si elle avait vingt ans. Elle avait toujours cette fraicheur d’antan. Malgré le temps qui passe, Katarina apparaissait toujours comme cette jeune fille qu’il avait ramenée d’Estonie. Il avait toujours ce même sourire niais lorsqu’il posait les yeux sur elle. « D’ailleurs, on a beaucoup de participants ? » il devait revenir sur terre. Il avait tout le temps pour apprécier la beauté de sa femme. Pour le moment, il devait s’occuper de leurs affaires. Le speed dating était important pour eux, en particulier pour la cause qu’ils défendaient. Harrison mettait un point d’honneur à réussir sa vie professionnelle pour apporter à sa femme tout ce qu’elle désirait. Il voulait la rendre heureuse, pour toujours et à jamais.

Katarina se savait chanceuse : avoir trouvé l'amour, un amour vrai et intense, que certains cherchaient parfois toute une vie durant. Elle, l'avait trouvé sans le chercher. Il lui était tombé dessus, comme un gros orage lors d'une promenade sans parapluie. Un sentiment violent, qui lui était rentré dedans, et qu'elle respirait et transpirait désormais. Elle ne pouvait plus s'en passer. Elle n'était plus Katarina aujourd'hui, elle était Katarina Greene, femme de Harrison. Elle savait pertinemment que si, un jour, ils venaient à être séparés, jamais elle ne s'en remettrait. Elle ne deviendrait pas une de ces femmes moroses, regardant à longueur de journée la neige tomber au dehors (oui la météo m'inspire), et recouvrir les rues d'un blanc aussi terne que sa vie. Non, Katarina ne serait même pas capable de vivre encore, sans Harrison. Car sans lui, elle n'était plus rien. Car aujourd'hui, elle était sa femme, et c'était ainsi qu'elle se définissait. Et sans définition, elle ne pourrait que s'effacer, tel un mot désuet qu'on supprimer finalement dictionnaire. Ils vantaient leur amour, leur joie, leur bonheur, et Katarina espérait que tous ses amis puissent connaître sa vie idyllique. Mais un sentiment si passionnel était également dangereux. Ce n'était pas un feu qui risquait de lui laisser une sombre brûlure sur le coeur. C'était un véritable incendie qui menaçait de la brûler vive, si jamais il venait à s'éteindre. Elle avait signé pour ça. Et même en connaissant tous ces risques, elle signerait encore et encore. Car l'amour se vit dans la joie comme dans la peine, et Harrison en valait le coup, dix fois, ving fois, cent fois même. Passer leur vie ensemble, à la maison comme au travail, aggravait peut-être leur dépendance mutuelle. Ils étaient juste deux fous irresponsables, consumant ce sentiment d'amour inépuisable, intact depuis le premier jour.

« Oui je pense à elle. Tu imagines, on a peut-être le formulaire de ce ou cette folle dans les mains ! » Elle eut un rire nerveux, en secouant tous ces bouts de papiers. Le destin sentimental de leurs voisins tenaient là dessus, sur des formulaires manuscrits, de simples feuilles légères et volantes. Et eux deux étaient chargé d'assembler toutes ces pièces de puzzle, nouer deux personnes ensemble, par un coup de baguette magique, un filtre amoureux. « Attends je compte » précisa-t-elle avant de passer en revue chaque inscription, méticuleuse. Elle reconnaissait bien sûr quelques noms, ce qui ne faciliterait peut-être pas la tâche pour mettre un visage sur chaque prétendant. « Une petite vingtaine, c'est sympathique pour un début. Par contre ... Il y a un nombre impressionnant de femmes ! » Ce constat la choquait. « Mais où sont les hommes, où se cachent-ils ? Je ne pensais pas que les mâles de ce quartier seraient si coincés, ou casaniers » Elle posa alors un doux regard amoureux sur son mari, l'envie de se lover sur ses genoux la démangeait. L'inconvénient de cette proximité continue, était qu'il était toujours difficile, pour elle, de se tenir en public. « Nos pauvres voisines, elles qui pensaient quitter leur solitude quotidienne. Quelle chance j'ai d'avoir trouvé l'homme parfait, moi » La jolie blonde se leva aussitôt, et se pencha vers son mari, posant ses lèvres sur les siennes. Un sourire presque psychédélique se dessina sur son visage, on pouvait parfois avoir l'impression que Katarina était droguée. Elle se shootait simplement à l'amour, et c'était jouissif. « Nous allons devoir trouver quelques animations dans la soirée, afin d'en consoler certaines ! » En quelques enjambées de gazelle, elle se positionna alors au centre de la pièce, face à Harrison et son bureau. Son mari affirmait parfois qu'elle marchait en dansant, en volant. Et Katarina se plaisait à être une petite fée. Son regard examinait chaque photo accrochée aux murs, elles retraçaient tous les évènements qu'ils avaient pu organiser. Pour créer l'amour, le love. Et chaque photo était synonyme de bons souvenirs. Eux deux, empereurs de l'amour, qui décidaient de qui et qui seraient heureux, et de qui quitterait l'aventure. « Tu crois que des strip teasers en satisferaient certaines ? Ou une énorme fontaine de chocolat ? »

Parler de Dirty Secret d’un ton léger, en préparant la Saint-Valentin, avoir le loisir de regarder sa belle femme toute la journée, c’était le lot quotidien d’Harrison dans sa vie professionnelle. Si beaucoup d’homme aurait pu trouver cela étouffant de partager sa vie personnelle et professionnelle avec la même personne, lui, pensait tout le contraire. C’était l’équilibre parfait. Il était aussi heureux d’avoir céder à l’impulsion de Katarina d’avoir décidé de vivre dans cette banlieue chic. Ils étaient bien ici. Ils avaient même trouvé des personnes assez sympas qui rendaient la vie plus agréable qu’elle ne l’était déjà. Sa femme rit nerveusement à l’évocation du seul point négatif de ce quartier, la présence de cette célèbre bloggeuse qui balance des rumeurs sur tout le monde. L’avoir au speed dating serait comique, ou peut-être plutôt tragique. Si elle était aussi diabolique que les gens du quartier le laissaient entendre, évidemment. Toutefois, pour le moment Harrison était bien candide par rapport à tout ça.

Il préféra demander à Katarina combien de participants il y avait. Sa femme compta les formulaires qu’elle tenait encore en main. Une petite vingtaine de personnes avaient décidées de sortir des sentiers battus pour participer à leur événement. S’ils appréciaient, à leur prochain speed dating, ils pourraient largement avoir le double de participants… Les affaires se tenaient bien. Seul bémol, une présence importante de femmes comparé à une minorité d’homme. « C’est peut-être la peur du nouveau. » répondit-il aux interrogations de Katarina. A leur place, il n’aurait sans doute pas eu l’audace de s’inscrire non plus. Mais comme Katarina venait habilement de le souligner, il n’avait pas besoin d’un speed dating pour faire des rencontres ; il avait d’ores et déjà trouvé l’amour de sa vie en Katarina. Il esquissa un sourire, et se laissa embrasser par sa femme. Il souffla un bon coup, comme requinqué. Katarina aussi semblait avoir retrouver un nouveau souffle. Elle venait d’avoir une idée, des animations pour que les personnes présentes ne soient pas déçues d’être venues. En quelques enjambées elle se trouvait face au bureau d’Harrison, prête à lui faire une présentation à la Peggy Olson. « Des strip teasers ? Je ne crois pas que ça corresponde à notre image. » se risqua-t-il à répondre. « Et puis, je ne voudrais pas que tu en profites. » fit-elle en souriant. « Quant à une fontaine en chocolat, oui ça me semble tout à fait approprié. » le chocolat matchait totalement avec l’idée de la Saint-Valentin. « Et pourquoi pas offrir une rose à chacune des filles ? Les filles adorent qu’on leur offre des fleurs non ? » lui aussi essayait de faire marcher cette entreprise, mais il devait bien l’avouer, sans les idées de Katarina leurs affaires ne marcheraient pas aussi bien. Cette femme avait un don c’était tout bonnement indéniable.

Telle une Peggy Olson plus sexy et sans meche-rideau, Katarina se tenait face au bureau de son mari, démunie au centre de la pièce. C'était elle, qui avait insisté pour venir habiter dans ce quartier. Pourtant, la jeune femme s'était bien vite ennuyé. Avec leur évènement, elle voyait là un moyen de bouger un peu les petites vies tranquilles et ennuyeuses, dans lesquelles leurs voisins s'étaient terrés. Mais comme le soulignait habilement son mari, certains devaient avoir peur. Katarina soupira, levant les yeux au ciel. Ses cheveux se balançaient le long de son dos, libres. « Comment peuvent-ils préférer rester seuls, la vie est tellement mieux à deux » pensa-t-elle à haute voix. « A l'issue de l'évènement, je veux une pub monstre, partout, des articles dans tous les journaux. Ils verront ce qu'ils ont raté et s'en mordront les doigts » Plutôt que d'admettre qu'ils avaient peut-être mal ciblé la clientèle visée par leur campagne publicitaire, Katarina préférait rejeter la faute sur ces voisins empotés. Et leur faire regretter d'avoir gâché son évènement. Même si elle ne connaissait pas encore le bilan de ce dernier, puisqu'il n'avait pas eu lieu. Qu'importe, Katarina voyait grand, elle voulait un carton plein, elle voulait que tous le quartier se retrouve dans la salle des fêtes.

C'était aussi pour ça, qu'elle avait suggéré les strip teasers. En mettre plein la vue à ces femmes célibataires en rute trop fières pour se plier au jeu. Mais Harrison choisit de calmer son entrain. « Comme d'habitude, tu es plus sage que moi, et tu as bien raison » dit-elle en venant alors s'asseoir sur un des fauteuils, devant le bureau, face à lui. Elle recroquevilla ses jambes sur sa poitrine et les entoura de ses bras. Le menton posé sur ses genoux, elle restait pensive. Même s'il approuvait la fontaine de chocolat, ce n'était pas suffisant. Elle voulait du grandiose. C'est alors que son mari eut l'idée qu'elle cherchait. « Exactement, des roses ! D'ailleurs, n'oublie pas mon bouquet le 14 ! » s'exclama-t-elle en bondissant de sa chaise. A nouveau debout, elle agitait grand les bras, dessinant ses projets dans l'air, qui se soulevait autour d'elle, virevoltant sous ses pas légers. « A l'entrée de la salle, un homme en costume, noir, noeud papillon, qui tend une rose à chacune des femmes. Je veux vendre le rêve Harrison, je veux qu'on parle de nous pendant des mois. » le regard plongé dans celui de son mari, elle savait que ce dernier la comprenait.

Le fait qu’une majorité de femmes se soient inscrites à leur speed dating ne serait pas ce qui arrêterait le jeune couple dans leurs projets. A deux ils savaient qu’ils pouvaient trouver toutes les solutions à n’importe quel problème. C’était ça leur force. Ils avançaient à deux, et regardaient toujours dans la même direction. Avant de rencontrer Katarina, il n’avait jamais cru pouvoir rencontrer une personne qui le comprenne si bien. Qui arrivait à le compléter de cette manière-là. Elle était surtout si adorable. Elle pensait à haute voix, et ne comprenait pas comment les gens faisaient pour vivre seul. Katarina vivait tellement sur son petit nuage qu’elle avait tendance à oublier que les autres histoires d’amour ne sont pas aussi idylliques que la leur. Elle ajouta qu’elle voulait qu’ils fassent plus de pub, elle avait vraiment l’intention de se faire une place à Magnolia. D’ailleurs, peut-être même que sa femme s’enflammait un peu car honnêtement ils n’avaient jamais parlé d’ajouter des frais publicitaires à leur budget. Harrison était prévoyant, il désirait d’abord voir comment les évènements se dérouleraient avant de prendre une décision. Il n’avait cependant pas le cœur à la couper dans son élan. Il l’avait frêne pour son idée de strip teaseur. Ils pouvaient toujours garder cette idée pour un autre événement, comme par exemple une soirée entre fille spéciale séduction ou un truc dans le genre dont Katarina avait le secret. En revanche il proposait que chacune des participantes ait une rose, pour donner au 14 février ce romantisme. « Comment oublier ? » répondit-il affectueusement à sa jolie blonde. Chaque année, il lui offrait un bouquet énorme de rose. Il n’allait quand même pas déroger à la règle.

A son tour il se leva de son fauteuil, il avait besoin de dégourdir les jambes. Katarina proposait sa nouvelle idée ; un homme en noir, offrant aux femmes une rose. Harrison visualisait totalement la scène. C’était carrément parfait. « Voilà c’est ça qu’il nous faut. » il était persuadé du talent de son épouse, elle aurait tout à fait pu être une ses redoutables femmes d’affaire qui travaille pour les plus grandes compagnies. Et dire qu’elle n’avait jamais fait d’études. Comme quoi, elle avait tout simplement un sens inné des affaires et du marketing telle une Peggy Olson, en 1000 fois plus sexy (voilà, heureuse). « Grâce à toi ça sera sûrement le cas. » il lui lança un sourire, attendri. « La pub ne nous sera d’aucune utilité tellement cet événement sera parfait. On va faire bouger les choses à Magnolia, tu verras. » Harrison avait plein d’espoirs quant à sa vie future ici. Bâtir un empire, être respecté, fonder une famille, et finalement finir ses jours tranquillement en ayant toujours la joie de profiter de Katarina. Et puis pourquoi pas, quand ils seraient vraiment, vraiment vieux, finir leur jour dans un petit village d’Estonie où leurs petits enfants viendraient leur rendre visite durant les vacances scolaires.

Katarina attendait le verdict de son mari avec impatience. Elle restait impassible devant lui. Souvent, il devait calmer ses ardeurs et ses envies de grandeur. Et à chaque fois, elle l'écoutait, il avait toujours au final des idées bien meilleures. Certes, il arguait ensuite tirer son inspiration de ses idées à elle, mais Katarina n'était pas dupe. Il était toujours bien plus réaliste qu'elle. S'il ne la freinait pas, Katarina reconstruirait un pays de Cocagne, le jardin d'Eden ou toute autre contrée utopique sujette au bonheur et donc à l'amour.

Elle se laissa tomber dans le fauteuil. « J'aimerais être aussi convaincue que toi ! Dans ce quartier, les gens sont soit déjà en couple, soit trop désespérés pour y croire encore. Je me demande parfois si ce déménagement était un bon choix. » Elle se garda bien de noter à voix haute que tout ça était son idée, elle détestait relever ses erreurs. Cependant, ses craintes étaient réelles. Ils avaient abandonné leur commerce fleurissant de Baltimore pour relever un nouveau défi ici. Mais Katarina s'était déjà demandé une ou deux fois s'il n'aurait pas dû plutôt se reposer sur leurs lauriers, et profiter. Mais leur soif de challenge, de renommée et d'argent, leur donnait parfois la folie des grandeurs. Les suites de l'évènement de la Saint Valentin les fixeraient sur leurs chances de réussite. Mais Katarina détestait attendre. Elle imagina un instant leur vie, si cette nouvelle agence ne fonctionnait pas. Ils ne seraient pas à la rue, et toujours capable de fonder cette famille de Katarina rêvait. Cependant, elle ne saurait s'en contenter. La jeune femme voulait plus, toujours plus. Et c'était aussi pour ça, qu'ils étaient là. « Même si tu es contre cette idée de pub pour l'évènement, tu voudras bien jeter un coup d'oeil à un projet qu'on doit recevoir par mail ? J'ai rencontré une jeune photographe dans le quartier il y a quelques jours, elle a proposé de me shooter pour l'agence, j'ai trouvé ça intéressant alors j'ai dit oui » Aussitôt avait-elle quitté Heather, la laissant elle et sa pellicule débordant de clichés, qu'elle aurait dû aborder le sujet avec Harrison auparavant, et lui demander son accord. Certes, ce partenariat d'un jour ne les engageait en rien, mais il appréciait que sa femme prenne des initiatives sans lui en faire part, même si aucune décision décisive n'en découler. Pire, il risquait de ne pas aimer une ou deux photos peut-être un peu trop choquante. En fait, Katarina s'était vite prise au jeu, et avait oublié ce qu'elle faisait. Nature comme à son habitude, elle s'était laissé aller.