Carl ferma les yeux et soupira longuement.

- Carl. Je m'appelle Carl. murmura-t-il.

C'est alors que Naya parla de Sterling High. Non pas que ce soit étonnant, vu qu'elle y a bel et bien étudié. Il y a trois ans. Et la voilà qui parlait comme si elle y était encore.. Le Spencer fronça les sourcils.

- Euh, attends, t'en en quelle année là ?

Carl avait presque envie d'en rire. Presque. Mais il voyait bien que la jeune femme ne faisait pas semblant, et ça le faisait un peu flipper. Quoi ? Il avait attendu qu'elle revienne pendant 7 mois et la voilà qui ne se souvenait plus de rien ? Le comble.

Naya lui confirma ses doutes lorsqu'elle lui parla d'un David, de New York, de sa bande de potes, et de vouloir faire connaissance avec lui. Elle avait bel et bien perdu la boule. Malgré sa peine, Carl vit alors une opportunité de recommencer à zéro. Si Naya ne se rappelait plus de lui, ils avaient peut-être une chance de revenir à l'époque où elle avait eu des sentiments pour lui. Oui, il n'en avait rien à faire de prévenir les autres, rien à faire de ce que pouvait penser Cameron. Il avait retrouvé Naya, et avait une chance de refaire partie de sa vie.

Il lui tendit le bras pour l'aider à se relever, et son cri le fit sursauter. Elle ne découvrait qu'à l'instant le chaos autour d'eux.

- Ouais, un ouragan est passé dans le coin. Je crois. Je sais pas vraiment, j'étais évanoui. dit-il en haussant les épaules. Tu te souviens vraiment de rien ? rajouta-t-il, curieux. Son esprit d'étudiant en médecine faisait surface, et la situation l'intéressait. Et il eut envie d'en savoir un peu plus.

Mais il hésitait encore : lui dire la vérité, ou rentrer dans son jeu ? Telle est la question.

Naya avait l’impression qu’elle allait suffoquer. C’était la WW3 devant elle, c’était un véritable champ de bataille. Maison ravagés, des gens allongés par terre –elle entre autre -  du bois partout sous toutes les formes, planches, branches etc .. Ce n’était pas possible. Qu’est-ce qui s’était passé ? Elle n’avait pas de souvenir de sa soirée et plus elle essayait de se remémorer les instants passés, plus ça devenait flous. Complètement flous.

Le dénommé Carl leva le voile sur son identité mais ça ne lui disait pas grand-chose. Carl. Un nom de famille l’aurait peut-être aidé mais là pour l’instant aucun Carl n’émergeait de ses souvenirs.

« Enchanté Carl. Moi je vais pas me présenter, t’as l’air de plutôt bien me connaitre. Je fais ma dernière année au lycée, et toi ? »

Naya rigola doucement, ouais elle prenait plutôt ça à la rigolade. Mais bon trêve de plaisanterie, le chao autour d’elle lui faisait un peu peur et quand Carl lui annonça qu’un ouragan venait de passer, elle écarquilla grand les yeux. Un ouragan ? Sérieux ? Naya comprenait mieux l’égratignure qui lui mangeait la moitié du visage

« Ca va je suis pas trop défigurée ? »

Bien entendue, elle était sale comme toutes personnes touchées par l’ouragan. Elle avait certes beaucoup maigri mais ne semblait pas affaiblie. Peut-être juste un peu fatiguée. Rien à voir avec les filles qu’on retrouve des années après leur disparition qui sont méconnaissable, les cheveux sales et des haillons sur le dos.  Naya portait des vêtements normaux, une veste en jean qui allait avec la température de la saison, un jean et un débardeur turquoise, des ballerines aux pieds. Comme si elle n’avait jamais quitté chez elle. Elle n’avait pas de sac, pas de clé et espérait bien que son portable était entrain de charger chez elle. Enfin surtout que son chez elle ne ressemblait pas à la maison face à elle. Naya chercha néanmoins son sac des yeux autour d’elle, bien qu’elle n’ait pas la moindre idée à quoi il ressemblait

« Dis t’aurais pas vu un sac dans les parages ? J’ai pas le mien. Ca me foutrais la haine d’avoir perdu mon Iphone 3GS je venais juste de l’acheter à sa sortie !

Sans vraiment de raison, l'humeur de Carl changea. Au fil de la conversation, il avait découvert une toute autre personne et il ne supportait pas cet air niais, cet air qui lui donnait à vrai dire vraiment l'impression d'être lycéenne. Certes il était ivre de bonheur de la savoir en vie, mais ce n'était pas comme ça qu'il avait voulu la retrouver. Et même s'il souhaitait recommencer à zéro, ça n'allait pas le faire si elle restait comme ça.

- Je vais commencer ma troisième année de médecine. Et tu n'es pas au lycée Naya, tu fais une école d'architecture, bon sang. On est en 2013 là, youhou, sors de ton rêve là.

Carl aurait pu lui dire qu'elle bossait dans un marché à terme d’instruments financiers, cela n'aurait pas eu plus d'effet.. Ils parlèrent ensuite de l'ouragan, et tout ce que la jeune femme trouva à dire, c'était de savoir si son visage n'était pas défiguré. Pas un mot sur le paysage, sur les arbres abîmés, sur le problème que ça allait poser pour faire repousser des plantes. La Naya écolo ne semblait plus faire partie de ce corps. A vrai dire, la Naya que Carl avait connu n'existait plus. Celle-ci était superficielle, hystérique, et à en croire ses dernières paroles, très matérialiste. Mademoiselle avait perdu son sac et avait peur de ne pas retrouver son IPhone. Ben voyons.

- Alors déjà, est-ce que j'ai une tête à chercher des sacs ? Tu n'aurais pas remarqué par hasard que jusque il y a peu de temps j'étais allongé par-terre comme une merde et que j'étais inconscient ? T'entends pas les gens crier au loin, les pleurs de ceux qui ont perdu leur maison ? Non, toi c'est ton portable qui compte, et tu t'en fous du reste, c'est ça ? Et pour ton info, je sais toujours pas en quelle année t'es, mais on est déjà à l'IPhone 5 nous hein. Arrête tes conneries là, ça suffit.

Carl soupira et se leva pour marcher un peu. Il rageait de la voir comme ça, et surtout être impuissant face à la situation. Il alla s'adosser contre le muret dégradé d'une maison à moitié détruite -d'où une pompe semblait sortir de nulle part-, et dénicha au fond de sa poche son briquet et une cigarette à moitié écrasée. Tant pis, ça fera l'affaire. Le Spencer ne pensait plus à une blague, mais il ne pouvait s'empêcher de crier, malgré le fait qu'elle n'y soit pour rien. Mais il fallait se l'avouer, la jeune femme qui se trouvait devant lui, Carl ne la supportait pas.

« Tu te fous de ma gueule ? Pourquoi j’aurais fait une école d’archi alors que mon rêve a toujours été de faire une école de danse à New York »

Mais ce Carl sortit de nulle part partait dans un délire ! Qui il était pour lui dire quelle était sa vie, en la changeant par gros lambeaux. 2013, il s’est cru dans une science fiction ou quoi ? Elle le regarda d’un air chelou, comme si c’était lui qui était anormal. Bref, elle songeait déjà à lui sortir un pipeau pour le quitter quand il l’enchaina. Et Naya n’était pas prête à se laisser marcher dessus.

« Déjà tu me parles sur un autre ton, on ne se connait pas. Ensuite, oui j’ai besoin de mon sac et par conséquent de mes clés pour savoir si ma maison est encore debout et  et de mon portable pour appeler Jordan et mon père pour savoir s’ils sont en vie. Donc c’est bien gentil de jouer les super héros, mais je t'ai jamais demandé de me secouer comme un sac à patates pour que je me réveille. Maintenant j’ai des j’ai des proches à aller retrouver au lieu de parler à un pauvre inconnu. Sur ce, ciao et à jamais parce que t’es franchement chelou à me faire croire qu’on a fait un bon de 3 ans. Attention, on assiste à un changement spacio-temporel ! »

Naya leva les yeux au ciel, et tourna déjà les talons pour faire quelques pas. Jamais elle ne s’attendait à ça. Elle avait déjà vu aux infos des catastrophes naturelles et espérait que jamais elle n’aurait à subir une telle épreuve. Le quartier était en ruine, elle ne reconnaissait même plus les maisons et aurait été incapable de retrouver la sienne. Des dizaines d’inconnus –conscients ou non – l’entouraient et franchement, elle avait l’impression d’être dans une autre ville que Magnolia Cresent.

« Euh, Carl. On est bien à Magnolia hein ? »

Elle avait l'impression qu'il se foutait royalement de sa gueule, mais d'un côté, elle commençait franchement à avoir les jetons.

Naya sortit de ses gonds en haussant le ton. Ah, bah c'était déjà un bon point, Carl la reconnaissait un peu plus ! Mais chaque mot qui sortait de sa bouche rendait Carl fou. Il voulait la secouer comme un prunier pour qu'elle réalise les débilités qu'elle racontait.

- Euh, parce que t'as raté l'examen ?

Comment pouvait-elle oublier une chose pareille ? Qu'à cause de ça elle était partie en Amérique du Sud et en était revenue écolo ? Carl soupira de frustration. Et encore plus lorsqu'elle demanda où était son cher iPhone de deux générations en arrière. Il sortit de ses gonds et l'apostropha de paroles assez sèches, croyant peut-être que ça allait la réveiller. Raté. La jeune femme répondit de plus belle en criant sur Carl qu'elle ne lui avait rien demandé et qu'elle voulait trouver son sac et son portable pour appeler sa famille et aller voir si sa maison était encore debout. Certes, de bons arguments. Mais le visage du Spencer restait fermé, tellement il n'arrivait pas à la croire. Mais la dernière phrase de la jeune femme réussit à lui tirer un sourire. Elle tourna les talons, et Carl resta là, adossa contre le muret, une main dans la poche, l'autre avec la cigarette, et avec ce petit sourire narquois. Si elle était encore la Naya qu'il avait connu au lycée, elle finirait par revenir. Il attendit donc qu'elle se décide, et ce fut d'ailleurs très court. Il la vit s'arrêter, puis tourner les talons vers lui de nouveau. Il pouffa de rire en écrasant son mégot par-terre, la fumée grisâtre s'échappant d'entre ses lèvres.

- Oui Naya, on est bien à Magnolia. N°35, c'est bien ça ?

Ouais, finalement Carl avait décidé de se laisser prendre au jeu. Après tout, il n'avait rien à perdre.

Architecture. Sérieusement ? A part de taper des Ted Mosby architect, Naya ne voyait vraiment pas ce qu’elle irait foutre en architecture. Le garçon lui répliqua alors qu’elle avait raté ton exam. Naya écarquilla les yeux comme s’il lui avait profané une menace de mort. Pardon ? PARDON ? Rater un examen de danse, je ne crois pas nan. Il devait y avoir erreur sur la personne sorry. No way. Impossible. Naya eut un petit rire et répliqua sur ce petit ton hautain qui caractérisait si bien Naya alors qu’elle méprisait quelqu’un.

« C’est clair qu’on se connait pas alors. Si c’était le cas, tu saurais que je suis une danseuse hors pair »

Le malheureux, se disait-elle. Il n’avait jamais du avoir l’occasion que Naya lui accorde une danse, sinon il s’en souviendrait. Mais ça intriguait quand même la jeune métisse qu’il se souvienne si bien d’elle, et elle non. Elle était pourtant un radar à beau goss, et c’est qu’il était pas mal le Carl en fait. Mais vu comment elle avait déjà finit à certaines soirées, ça ne l’étonnait pas si quelques souvenirs lui échappaient.

« Bon, vu que t’as l’air de si bien connaitre, tu m’accompagnes ? »

Et sans lui laisser le choix, Naya l’attrapa par la main et le tira déjà vers la direction de la maisonnée 35. C’était une jolie petite maison sur deux étages, avec 4 chambres à l’étage, une cuisine qui connait sur la salle à manger et un canapé en angle qui séparait les deux pièces communes. Naya avait adoré cette maison dès qu’elle y avait posé les pieds, et espérait qu’elle le retrouverait intact. Aussi bien l’intérieur que l’extérieur car la propriété Freeman-Johnson jouissait d’un grand jardin, dont personne n’avait eu le temps d’y prêter attention malheureusement.

« Et plus sérieusement, on se connait d’où ? »

Naya leva les yeux vers lui et lui sourit, toujours avec son petit air l'air de rien qui faisait enrager Carl.

Rose essayait toute seule de dégager sa mère mais c'était au dessus de sa portée : elle aurait besoin d'aide. Tout en enlevant quelques débris "légers" pour tout de même soulager Natalia qui se trouvait dessous, elle lui apprit qu'elle n'avait pas de nouvelles du reste de la famille. Natalia craignait que le pire ne soit arrivé...

D'un coup, Rose s'arrêta de parler et de bouger. Au bout d'un instant, elle dit "Non, maman, non" alors que Natalia ne lui avait rien dit qui justifiait cette réaction. Elle l'appela comme si elle avait perdu la mémoire et ne savait plus où se trouvait sa mère.
Cette réaction n'était pas normale et Natalia comprit que Rose était en train de faire une crise de panique où elle perdait les pédales. Le choc, sans doute.

"Rose? Rose! Je suis là, n'aies pas peur. Tout va bien se passer chérie. J'ai besoin que tu sois forte, j'ai besoin de ton aide. Calme toi, respire...".

Natalia ne savait pas si Rose l'écoutait. Elle avait l'impression de parler à un mur. Elle sentit que sa fille n'allait pas avoir les épaules pour la sortir de là toute seule, ni physiquement, ni psychologiquement.

"Rose, regarde autour de toi, y a-t-il quelqu'un d'autre? Vois-tu quelqu'un qui pourrait venir nous aider? Rose, réponds-moi!"

Carl répondit aux paroles de Naya par le même petit rire qu'elle venait de faire, et fronça les sourcils en faisant un sourire en coin. Puis il décida d'abandonner l'affaire, si elle voulait croire qu'elle y était arrivé, tant mieux pour elle, ça l'aidait peut-être à faire face à la réalité. Enfin bref.

L'expression de Naya changea alors et s'adoucit, demandant à Carl de l'accompagner.

- Allez, pourquoi pas. De toute façon, j'ai rien de mieux à faire.

Alors que si. Il aurait peut-être pu aller aider les gens autour de lui. Mais à quoi bon ? Il n'aurait réussi qu'à faire quoi, les soutenir moralement ? Nah, ça va, et puis juste comme ça, ça faisait du boulot pour la morgue hein. (a) Et puis de toute manière, il fut vite entraînée par la jeune Freeman, qui lui avait attrapé la main. Carl sentit son coeur faire un bond, ravivé par la mémoire de Naya et lui, sur le bord d'une plage, il n'y a pas si longtemps que ça .. Bref, oui, non, ce n'est pas le moment de penser à ça, Carl, arrête, semblait lui dire son cerveau. Il secoua la tête en fermant les yeux, puis reprit ses esprits pour suivre la brune chez elle. Elle lui sourit alors en demandant d'où ils se connaissaient, sérieusement. Le Spencer prit une grand inspiration, expira, puis sourit.

- Ok c'est bon, tu m'as eu. On se connaît d'une fête, la semaine dernière. Dommage que tu ne t'en rappelles pas, il s'en est passé, des choses.. impliqua Carl avec un sourire en coin et un regard malicieux. Ouaip, il avait décidé de tenter sa seconde chance.

Ils quittèrent le trottoir dévasté pour longer les maisons une par une. Naya ne put s’empêcher d’avoir un pincement au cœur. Elle n’était pas arrivée depuis très longtemps, et le quartier ne lui était pas encore familier mais tout ça lui fit mal au cœur. C’était la vie de familles entières qui n’étaient que briques cassés et vitres brisées. Naya respira plus difficilement comme si elle commençait une crise de panique. Elle n’avait jamais vécue ça et franchement elle n’espérait ça à personne. Même pas aux Van Valkenburg. D’ailleurs, ils passèrent devant la mère et la fille aînée. Naya fit un coucou à Rose qu’elle trouvait jolie mais elle n’eut en retour qu’un regard effaré et plein de dégout. Sur le moment, Naya ne comprit pas trop et se reconcentra vers Carl qui lui répondit qu’ils s’étaient connus la semaine passé à une soirée.

« Vraiment ? Hum … comment j’ai pu oublier que … »

Naya ne continua pas sa phrase. Ca faisait vraiment tepu de pecho n’importe qui et se retrouver devant le fait accompli devant le dit garçon, sans aucun souvenir. Et pourtant, Naya Freeman était bien un radar à beaux gosses. Elle rit doucement en haussant les épaules en lui adressant ce sourire adorable dont elle avait le secret lorsqu’elle voulait se faire pardonner.

« Oups. Tu m’en veux pas j’espère hein ? »

Ils passèrent devant des maisons, plus ou moins épargné par la catastrophe. Toutes les maisons ou presque avaient les carreaux brisés, des branches d’arbres qui passèrent à travers la fenêtre mais certain, comme la maison dont Naya s’était arrêté faisait vraiment dépotoir maintenant. La maison semblait assez intact mis à part les fenêtres qui ne faisaient plus qu’office de trou et quelques dégâts au rdc mais ce qui arrêta la petite Freeman, c’était l’état du jadis beau jardin. Elle tira le bras de Carl pour lui montrer

« Quel dommage ! Ce beau potager et toutes ces fleurs ! La propriétaire va être en rogne en voyant ça. Oh mais attend … C’EST MON JARDIN !! »

Elle vit le n° 35 qui s’était dévissé et tombait en demi tour, mais Naya reconnut le patio plein de branches, et l’absence de la jolie porte blanche qui ouvrait son salon à tous les passants. Les fruits et légumes formaient une bouillie sur le sol et des morceaux de citrouilles oranges ponctuaient de sa couleur la pelouse marron-vert qui entouraient la maison Freeman-Johnson. Des tiges vertes signalaient qu’il y avait autrefois des bancs de fleurs.
A cette vue, toute la superficialité de Naya s’envola et se jeta dans les bras de Carl en pleurs. Elle était apeurée maintenant, ne savait pas quoi faire, ni qui aller retrouver. Même dans les bras du BG, Naya se sentait inutile, faible et inexistante.

Natalia fut soulagée en entendant à nouveau la voix de sa fille, même si c'était pour dire une mauvaise nouvelle : d'après Rose, il n'y avait personne autour d'eux. La jeune fille sembla reprendre ses esprits et se remit à essayer de dégager sa mère, mais ce fut très bref. Rapidement, Rose se découragea à nouveau et lui attrapa la main en lui demandant de la rassurer.
Natalia aurait fait n'importe quoi pour la consoler, lui donner confiance, mais elle était bien impuissante, complètement bloquée avec personne pour l'aider. D'un coup, il lui sembla entendre quelqu'un d'autre parler. Une femme était dans les parages et parlait avec au moins une autre personne. Il y avait des gens à proximité!
Natalia serra la main de sa fille avec toute la force qu'il lui restait, comme pour l'encourager, et lui dit :
"Rose! J'entends quelqu'un! Va les voir, dis leur de t'aider s'il te plaît!" puis elle essaya elle-même d'appeler à l'aide en criant "Hey!!! Ne partez pas! Venez m'aider!! Je suis coincée!!"

Elle tendit l'oreille pour guetter une réponse. De ces gens, de Rose, peu importe, mais une réponse. Il fallait qu'ils perçoivent sa présence.

Carl rit. Il s'amusait bien de voir que Naya pensait n'avoir oublié que la soirée, alors qu'elle en avait oublié bien plus. Quelle ironie. Il savait que c'était mal ce qu'il faisait, que ce n'était pas bon, ni pour lui ni pour elle. Mais c'était plus fort que lui, il devait suivre cet instinct qui lui donnait l'envie de reprendre à zéro, de vivre avec la Freeman ce qu'il n'avait pas pu faire avant. 

- Ah bah merci ! ça fait plaisir .. lui dit-il, faussement énervé. Mine de rien, Carl était en train de tester Naya, la tester pour voir s'il n'arriverait pas à dénicher une étincelle en elle qui parviendrait à la faire revenir. En vain ..

Naya semblait atterrée par ce qui se passait autour d'elle. Carl l'aurait été aussi, s'il n'avait pas eu d'yeux que pour la brune, dont il arrivait encore à peine à croire à son retour. Pile au moment où il avait commencé à se dire qu'elle ne reviendrait pas, la voilà qui apparaissait comme une fleur, comme si les dernières années n'avaient pas existé. Mais d'un côté, il enviait cette amnésie. Pouvoir tout oublier, repartir vraiment à zéro, faire table rase. Parce qu'on dit tous qu'on recommence à zéro, mais on est pris au piège par notre conscience qui au fond, nous rappelle sans cesse qu'on ne peut pas revenir dans le passé ni l'effacer. Pour Naya, cette conscience s'était tue. Et Carl trouvait cela fascinant.

La brune le tira alors par la manche en lui montrant un potager, qu'elle réalisa être le sien que quelques secondes plus tard. Puis elle se jeta dans les bras du Spencer, en pleurs. Carl resta un moment les bras en l'air, comme figé. La présence de Naya contre son torse ne lui donnait qu'une seule envie .. -oui, bon, vous avez compris. Mais ce n'était plus la même Naya, et l'étudiant décida alors de seulement resserrer l'étreinte, comme pour la consoler. A ce stade, c'était tout ce qu'il pouvait faire ..

C'est alors que des échos parvinrent à son oreille, des cris qui résonnaient au loin. Enfin, pas loin tant que ça puisque Carl put facilement repérer d'où cela venait. Il se dégagea de la Freeman.

- T'entends ça ? Quelqu'un appelle à l'aide non ? Faut qu'on y aille, vite !

Et Carl se dépêcha d'accourir vers les cris et les pleurs qui résonnaient à travers le soudain silence de l'après orage. Naya sur les talons, il découvrit une femme coincée sous des débris, et une autre plus jeune lui tenant la main. Carl s'accroupit près d'elle.

- Mon dieu, vous allez bien ? Quelle drôle de question. Carl fit l'analyse rapide de la situation, et très vite il sut quoi faire. Faut croire que les études de médecine, ça sert bien un jour. Bon, déjà vous êtes consciente, c'est bien. Est-ce que vous sentez vos jambes, vos bras ? Puis il se tourna vers la jeune femme. Est-ce que c'est toi qui l'a trouvée ? Tu l'as bougée ? Vous vous appelez comment ?

Carl continuait ses questions, afin de voir notamment quels seraient les risques encourus si on la sortait de sous les débris. Car le moindre faux-mouvement, et elle pourrait se vider de son sang. Qui sait ce qui se passait sous cette toile du chapiteau..

Natalia en était maintenant convaincue : elle avait une bonne étoile. Elle avait survécu à un ouragan, sa fille aînée aussi, elle n'était pas gravement blessée, et quelqu'un venait d'entendre son appel à l'aide. Quelqu'un accourut et lui posa des questions de premiers secours. Natalia connaissait bien cette procédure puisqu'elle avait elle-même fait des études poussées en médecine. Elle répondit en récitant méthodiquement "sa leçon" :

"Je me sens bien. Je suis Natalia Van Valkenburg, j'habite au numéro 27. Pas d'hémorragie apparente. Une grosse douleur au poignet, des plaies superficielles, quelques contusions. Je suis coincée là-dessous et j'avais peur de ne pas être trouvée étant donnée l'ampleur des dégâts. Inutile d'appeler les secours, ça doit être saturé et ils vont de toutes façons se rendre rapidement sur place. Est-ce que vous pouvez essayer de retirer tout ce qui est sur moi? Je verrai ensuite si je parviens à bouger toute seule...".

Natalia n'avait pas attendu la réponse de sa fille. Elle sentait bien que Rose était dans un état de choc...